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FINANCES ET COMPTES PUBLICS
ANALYSE DE L’EXÉCUTI
ON
BUDGÉTAIRE 2023
Compte de commerce « Soutien financier au
commerce extérieur »
Avril 2024
Sommaire
SYNTHÈSE
..................................................................................................................................
1
RÉCAPITULATIF DES RECOMMANDATIONS
.................................................................
3
INTRODUCTION
.......................................................................................................................
5
CHAPITRE I LES RÉSU
LTATS DE L’EXERCICE
............................................................
7
I - DES RECETTES QUI SE MAINTIENNENT À UN NIVEAU ÉLEVÉ
..........................................
8
II - UN NIVEAU DE DÉPENSES INÉDIT DEPUIS LA CRÉATION DU COMPTE
......................
10
III - UN SOLDE DE TRÉSORERIE QUI EXCÈDE LES BESOINS DU COMPTE
........................
11
CHAPITRE II LES RECETTES ET LES DÉPENSES PAR SECTION
...........................
15
I - LA SECTION « ASSURANCE-CRÉDIT ET ASSURANCE-INVESTISSEMENT »
..................
15
A -
L’objet de la section
.............................................................................................................................
15
B - Les recettes et les dépenses
..................................................................................................................
15
II - LA SECTION « STABILISATION DE TAUX »
............................................................................
17
A -
L’objet de la section
.............................................................................................................................
17
B - Les recettes et les dépenses
..................................................................................................................
18
III - LES AUTRES SECTIONS
..............................................................................................................
19
A - La section « Assurance-prospection »
.................................................................................................
20
B - La section « Change »
..........................................................................................................................
20
C - La section « Risque économique »
.......................................................................................................
21
D - La section « Risque exportateur »
........................................................................................................
21
E - La section « Financement de la construction navale »
.........................................................................
21
F - La section « Cap Francexport et Cap Francexport + »
.........................................................................
22
CHAPITRE III LA GESTION DU COMPTE DE COMMERCE
......................................
23
I - LA SOUTENABILITÉ DU COMPTE DE COMMERCE
..............................................................
23
A -
L’encours des garanties publiques pour le commerce extérieur
..........................................................
23
B -
Le risque d’appel en garantie
...............................................................................................................
24
II -
L’ENREGISTREMEN
T DÉCALÉ DES FLUX DE TRÉSORERIE SUR LE COMPTE
..........
25
III - LE « VERDISSEMENT » DES GARANTIES PUBLIQUES POUR LE COMMERCE
EXTÉRIEUR
...................................................................................................................................
27
ANNEXES
..................................................................................................................................
31
Synthèse
Le compte de commerce
Soutien financier au commerce extérieur
(programme 915)
retrace principalement les recettes et les dépenses auxquelles donne lieu la gestion des garanties
publiques pour le commerce extérieur.
Le compte comporte huit sections :
-
six se
ctions se rapportent aux garanties à l’export proprement dites
: « assurance-crédit et
assurance investissement », « assurance prospection », « change », « risque économique »,
« risque exportateur », « Cap Francexport et Cap Francexport + » ;
-
une section concerne le régime de garanties à la construction navale ;
-
une section, créée à compter du 1
er
janvier 2023, est consacrée à des opérations de
stabilisation et de couverture
de taux d’intérêt de crédits
-export qui étaient auparavant
assurées par Natixis depuis 1997.
Les résultats de l’exercice
L’analyse de l’exécution budgétaire en 202
3 fait apparaître :
-
un niveau de recettes élevé et bien
meilleur qu’attendu, l’activité de la principale section
du compte, celle relative à l’assurance
-crédit, ayant été plus
soutenue qu’envisagé, de
manière prudente, lors de la programmation ;
-
des dépenses qui progressent, beaucoup plus rapidement, et qui concernent essentiellement
la section précitée,
celle relative à l’assurance
-prospection ainsi que la nouvelle section
rel
ative à la stabilisation des taux d’intérêt
;
-
des versements au profit du budget général nettement supérieurs à ceux reçus par le compte,
qui correspondent aux résultats positifs dégagés au cours de l’exercice précédent
;
-
un résultat global
d’activité
légèrement négatif, et fortement inférieur à celui de 2022, mais
un résultat global positif du fait du reversement des fonds antérieurement gérés par Natixis
et un solde de trésorerie cumulé1 qui représente quatre
années de dépenses d’activité du
compte au rythme actuel.
L’exercice 2023 se conclut ainsi par un excédent de 310,8
M€, qui vient porter le solde
cumulé à 4,6
Md€.
L’importance de ce solde conduit la Cour à recommander de ne pas reporter sur le compte,
à l’occasion de la prochaine loi
relative aux résultats de la gestion et portant approbation des
comptes de l
année, les excédents de trésorerie disponibles au-
delà d’un montant suffisant pour
garantir la soutenabilité à court terme du compte de commerce.
1
Qui
s’explique presque entièrement par les versements ponctuels réalisés en 2017 (4,1
Md€)
, à la création du
compte, et en 2023 (0,8
Md€), suite à la reprise des activités de Natixis.
COUR DES COMPTES
2
La gestion du compte de commerce
L’exécution en
2023
n’a pas conduit à s’écarter des règles du droit budgétaire.
En termes de soutenabilité, l’encours des garanties accordées par l’État, principalement
celles relatives à
l’assurance
-crédit, diminue un peu entre fin 2022 (86
Md€) et fin 202
3
(82
Md€),
toujours très en deçà du niveau autorisé par le Parlement (119
Md€). Le risque pour
l’État d’être appelé en
garantie est maîtrisé
, même s’il est
un peu plus
élevé qu’il ne l’était à la
fin de l’exercice précédent.
Comme les années passées, le compte de commerce enregistre les recettes et les dépenses
liées à la gestion des garanties publiques pour le commerce extérieur avec un mois de décalage
par rapport au moment où elles sont réellement constatées. Il apparaît nécessaire de mettre fin
à ce décalage, et d
ans l’attente, d’en faire état dans les documents budgétaires relatifs au compte
de commerce s’il ne peut y être remédié à brève échéance.
Enfin, le mouvement de « verdissement
» des garanties lancé en 2020 s’est poursuivi et a
conduit à mettre un terme, à compter du 1
er
janvier 2023
, au soutien de l’État à tout projet
d’exportation dans le secteur des énergies fossiles, à l’exception de ceux visant à atténuer les
émissions de gaz à effet de serre.
Récapitulatif des recommandations
1.
(Recommandation reconduite) : R
everser, au profit du budget général de l’État, les
excédents de trésorerie du compte de commerce disponibles au-
delà d’un montant suffisant
pour garantir sa soutenabilité à court terme (
direction du budget et direction générale du
Trésor
).
2.
(Recommandation nouvelle) : Accélérer la production des états mensuels de trésorerie afin
de supprimer le décalage d’un mois dans l’enregistrement des flux
dans la comptabilité
budgétaire de l’État
(
direction générale du Trésor
).
Introduction
De longue date, l’État a choisi d’accompagner le financement des exportations françaises
en accordant des garanties aux entreprises exportatrices
2
lorsque le marché privé ne peut pas
intervenir, faute d’une rentabilité suffisante, ou si les risques sont trop élevés ou les volumes
trop peu importants pour permettre de les mutualiser.
Depuis 2017, la gestion de ces garanties est confiée à une filiale de Bpifrance
Bpifrance
Assurance Export, agissant au nom de l’État, sous son contrôle et pour son compte
en
remplacement de la Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur (Coface),
afin de rassembler au sein d’un même groupe la gestion de l’ensemble des dispositifs publics
financiers de soutien au développement des entreprises, en France et à l’étranger.
Concomitamment, la loi de finances pour 2017
3
a créé le compte de commerce
Soutien
financier au commerce extérieur
(programme 915) afin de retracer les recettes et les dépenses
auxquelles donne lieu la gestion des garanties, désormais accordées directement
4
par l’État
et
gérées par Bpifrance Assurance Export.
La loi de finances (LFI) pour 2023 a transféré à Bpifrance Assurance Export la gestion
des opérations de stabilisation et de couverture
de taux d’intérêt de crédits
-export qui était
assurée par Natixis depuis 1997. Ce transfert a conduit à créer une huitième section au sein du
compte de commerce dénommée « Stabilisation de taux ».
Par ailleurs, la LFI 2023 a aussi confié à Bpifrance Assurance Export la gestion des
garanties pour la construction navale
jusque-là assumée au nom et
pour le compte de l’État
par la Caisse française de développement industriel, filiale de Natixis
, sans que cela affecte
le fonctionnement de la section concernée du compte de commerce.
Le compte n’est pas doté de crédits en loi de finances. Dès lors, il fonctionne en trésorerie
(sans découvert autorisé pour 2023
) et ne fait pas l’objet d’indicateurs de performance.
L’équilibre du compte de commerce est sa situation normale, puisque les excédents de
trésorerie des sections sont versés, au début de l’année N+1, au budget général sous forme de
recettes non fiscales, tandis que les sections déficitaires sont abondées au même moment par
une dotation en provenance du programme 114 -
Appels en garantie de l’État
de la mission
Engagements financiers de l’État
du budget général.
Le directeur général du Trésor est le responsable administratif et budgétaire du compte.
Le contrôleur budgétaire et comptable ministériel du ministère chargé de l’économie est
l’assignataire et le centralisateur des opérations de recettes et de dépenses.
2
Prévues aux articles L. 432-1 à L. 432-5 du code des assurances.
3
Article 47, modifié par l’article 26 de la loi du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020
.
4
Avant 2017, l’
État garantissait la Coface, qui garantissait elle-même les entreprises.
COUR DES COMPTES
6
Compte de commerce 915 « soutien financier au commerce extérieur »
Graphique n° 1 :
r
ecettes et dépenses exécutées (en M€)
Source : Cour des comptes, à partir de Chorus
Graphique n° 2 :
é
volution du solde de trésorerie (en M€)
Source : Cour des comptes, à partir de Chorus
Chapitre I
Les résultats de l’exercice
Le tableau
suivant présente l’évolution du compte de commerce au cours de l’exercice.
Tableau n° 1 :
évolution des résultats du compte de commerce en 2023
En M€
Exécution
2022
LFI
2023
Exécution
2023
1. Assurance-crédit et assurance-investissement
521,8
78,0
327,0
2. Assurance-prospection
-95,3
-89,5
-72,5
3. Change
-2,2
0,0
1,1
4. Risque économique
0,0
0,0
0,0
5. Risque exportateur
-18,1
0,0
4,5
6. Financement de la construction navale
7,3
8,3
5,8
7. Cap Francexport et Cap Francexport +
4,2
0,5
0,8
8. Stabilisation de taux
s.o.
0,0
-288,3
Solde
des résultats d’activité par
section (a)
417,7
-2,7
-21,6
Versements en provenance du budget général
au titre des déficits N-1 des sections
88,8
121,5
115,5
Versements au profit du budget général
des excédents N-1 des sections
-347,8
-563,1
-533,1
Solde des versements croisés (b)
158,7
-441,6
-417,6
Reversement de fonds du compte Natixis
s.o.
0,0
800,0
Avance à Bpifrance Assurance Export
s.o.
0,0
-50,0
Solde des autres mouvements (c)
s.o.
0,0
750,0
Soldes des opérations de l’exercice N (a)+(b)+(c)
576,4
-444,3
310,8
Solde du compte en fin
d’exercice
N
4 331,5
3 887,2
4 642,3
Solde reporté sur l’exercice suivant
4 331,5
s.o.
n.d.
Source : Cour des comptes, à partir des documents budgétaires et de Chorus
COUR DES COMPTES
8
La prévision en loi de finances initiale (LFI) repose sur une analyse des dépenses et des
recettes de l’exercice précédent ainsi que sur les données disponibles en cours d’exécution lors
de l’élaboration des rapports annuels de performance. Cette prévision est fragile, puisqu’elle
suppose d’anticiper, près d’un an et demi avant le terme de l’exercice concerné, les résultats
d’une activité commerciale internationale soumise à des déterminants complexes (dates de
conclusion effective des contrats et partant, du versement des primes, réalisation de sinistres,
etc.) et dépendante de la conclusion ou de l’évolution de quelques contrats à forts enjeux.
Pour 2023, la prévision budgétaire, prudente, aboutissait à un résultat global
d’activité
pratiquement
à l’équilibre (
- 2,7
M€). En
exécution, il
s’établit à
- 21,6
M€
. Il diminue
néanmoins très nettement par rapport à 2022
où il s’établ
issait à 417,7
M€
, sous le double
effet de :
-
la baisse du résultat de
l’activité d’assuranc
e-crédit, qui est la plus significative en termes
d’encours (plus de 90
% de l’encours total, fin 202
3) et dont le résultat positif rend possible
la mise en œuvre des autres garanties, notamment l’assurance
-prospection qui présente, par
construction, une sinistralité importante ;
-
le résultat déficitaire de la nouvelle section relative à la stabilisation des taux, que les
opérations de couverture positives
associées ne compensent pas puisqu’elles sont, pour
l’essentiel, antérieures à 2023 et
suivies, à ce titre, en dehors du compte de commerce
(cf. chapitre II, § 2).
Après versements croisés entre le compte et le budget général, et compte tenu des
mouvements exceptionnels de trésorerie liés à la nouvelle activité de stabilisation et de
couverture de taux (cf.
infra
),
le solde des opérations de l’exercice s’établit à
310,8
M€, ce qui
porte, fin 2023, la trésorerie disponible sur le compte à 4,6
Md€.
I -
Des recettes qui se maintiennent à un niveau élevé
Le tableau suivant détaille les recettes du compte par section. Ces dernières comprennent,
pour l’essentiel, des primes, des récupérations ou des indemnisations.
Tableau n° 2 :
détail des recettes du compte de commerce
En M€
Exécution
2022
LFI
2023
Exécution
2023
1. Assurance-crédit et assurance-investissement
935,5
709,0
1 061,7
2. Assurance-prospection
44,2
24,0
53,8
3. Change
10,8
0,0
9,9
4. Risque économique
0,0
0,0
0,0
5. Risque exportateur
6,8
0,0
5,9
6. Financement de la construction navale
7,3
8,3
5,8
7. Cap Francexport et Cap Francexport +
5,5
0,8
2,8
LES RÉSULTATS DE L’E
XERCICE
9
En M€
Exécution
2022
LFI
2023
Exécution
2023
8. Stabilisation de taux
s.o.
0,0
4,1
R
ecettes d’activité (a)
1 010,1
742,1
1 144,0
2. Assurance-prospection
84,1
97,5
95,3
3. Change
1,8
1,0
2,1
5. Risque exportateur
2,9
23,0
18,1
Versements en provenance du budget général au
titre des déficits N-1 des sections (b)
88,8
121,5
115,5
Reversement de fonds du compte Natixis (c)
s.o.
0,0
800,0
Total des recettes (a)+(b)+(c)
1 098,9
863,6
2 059,5
Source : Cour des comptes, à partir des documents budgétaires et de Chorus
Les recettes d’activité
s’établissent à un niveau supérieur à celui de l’exercice précédent
(+ 13,3
%) et s’écartent
nettement à la hausse de la prévision, prudente, retenue en loi de
finances initiale (inférieure de 26,5
% au niveau d’exécution des recettes en 202
2).
De ce fait, le niveau des recettes
d’activité
constaté en 2023 est le plus élevé depuis la
création du compte de commerce, ainsi que l’illustre le graphique suivant.
Graphique n° 3 :
évolution du montant des recettes
d’activité
du compte de commerce
Source : Cour des comptes, à partir des documents budgétaires et de Chorus
Cette progression est imputable pour l’essentiel à la section «
Assurance-crédit et
assurance investissement », du fait
notamment d’une augmentation attendue des primes,
compte tenu du rôle contracyclique de la section, et du maintien à un niveau élevé du montant
des récupérations encaissées (cf. chapitre II, § I).
Pour l’essentiel, les versements en provenance du budget général concernent la section
« Assurance prospection », à hauteur de son résultat déficitaire de 2022 (- 95,3
M€).
0
200
400
600
800
1 000
1 200
2017
2018
2019
2020
2021
2022
2023
En M€
COUR DES COMPTES
10
II -
Un niveau de dépenses inédit depuis la création du compte
Le tableau suivant détaille les dépenses du compte par subdivision.
Tableau n° 3 :
détail des dépenses du compte de commerce
En M€
Exécution
2022
LFI
2023
Exécution
2023
1. Assurance-crédit et assurance-investissement
413,7
631,0
734,7
2. Assurance-prospection
139,5
113,5
126,3
3. Change
13,0
0,0
8,8
4. Risque économique
0,0
0,0
0,0
5. Risque exportateur
24,9
0,0
1,4
6. Financement de la construction navale
0,0
0,0
0,0
7. Cap Francexport et Cap Francexport +
1,4
0,3
2,0
8. Stabilisation de taux
s.o.
0,0
292,4
D
épenses d’activité (a)
592,5
744,8
1 165,6
1. Assurance-crédit et assurance-investissement
330,0
552,0
521,8
6. Financement de la construction navale
13,9
8,3
7,2
7. Cap Francexport et Cap Francexport +
3,9
2,8
4,1
Versements au profit du budget général des
excédents N-1 des sections (b)
347,8
563,1
533,1
Avance à Bpifrance Assurance Export (c)
s.o.
0,0
50,0
Total des dépenses (a)+(b)+(c)
940,3
1 307,9
1 748,7
Source : Cour des comptes, à partir des documents budgétaires et de Chorus
Après avoir augmenté en 2021 (+ 45 %) et 2022 (+ 16
%), les dépenses d’activité
enregistrent une progression beaucoup plus marquée encore en 2023 (+ 77 % sur un an), tirées
principalement par les
versements d’indemnisation en matière d’assurance
-crédit. Elles
atteignent ainsi leur plus haut niveau depuis la création du compte, comme le montre le
graphique suivant.
LES RÉSULTATS DE L’E
XERCICE
11
Graphique n° 4 :
évolution du montant des dépenses
d’activité
du compte de commerce
Source : Cour des comptes, à partir des documents budgétaires et de Chorus
Les versements au profit du budget général concernent en presque totalité la section
« Assurance-crédit et assurance-investissement », à hauteur de son résultat excédentaire de
2022 (521,8
M€).
III -
Un solde de trésorerie qui excède les besoins du compte
L’évolution de la trésorerie disponible sur le compte depuis 2017 est détaillée dans le
graphique suivant.
Graphique n° 5 :
évolution du solde de trésorerie du compte de commerce
Source : Cour des comptes, à partir des documents budgétaires et de Chorus
0
200
400
600
800
1 000
1 200
2017
2018
2019
2020
2021
2022
2023
En M€
4 087 M€
4 642 M€
COUR DES COMPTES
12
Fin 2023
, le solde de trésorerie du compte s’établit à 4,
6
Md€, en hausse de
7,1 % sur un
an, dont l’essentiel provient du reversement
5
opéré par la Coface au moment de la création du
compte, dans le cadre du transfert de son mandat de gestion à Bpifrance Assurance Export.
Ce solde de trésorerie représente quatre
années de dépenses d’activité du compte au
rythme actuel, ce qui est manifestement disproportionné. La prochaine loi relative
aux résultats de la gestion et portant approbation des comptes de l
année devrait donc être
l’occasion de corriger cette situation en ne reportant pas sur le compte la part la plus
excédentaire de sa trésorerie, ainsi que le permet le I. de l’arti
cle 20 de la loi organique du
1
er
août 2001 relative aux lois de finances.
En réponse à la Cour, la direction générale du Trésor a indiqué souhaiter que la trésorerie
excédentaire soit conservée sur le compte, considérant que cette opération de reversement serait
neutre à tout point de de vue pour l’État
, que le compte pourrait subir au cours des prochaines
années des dépenses particulièrement importantes et que ce « matelas » de trésorerie constitue
un élément de réassurance sur la conformité du dispositif français aux règles internationales.
La direction du budget est quant à elle
favorable à un reversement d’une partie des excédents
du compte au-
delà d’un seuil correspondant à deux années de dépenses.
Si le reversement d’une partie de la trésorerie du com
pte au budget général ne modifiera
pas la situation globale de la trésorerie de l’
État, il apparaît comme une pratique de bonne
gestion et
correspond au mouvement normal prévu par l’article 20 précité de la Lolf lorsque
cette trésorerie cumulée n’a plus de
rapport avec les perspectives raisonnables de dépense.
5
Alinéa II de l’article 47 de la loi n° 2016
-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017.
LES RÉSULTATS DE L’E
XERCICE
13
___________________________ RECOMMANDATION ___________________________
La Cour formule la recommandation suivante :
1.
(Recommandation reconduite) : R
everser, au profit du budget général de l’État, les
excédents de trésorerie du compte de commerce disponibles au-
delà d’un montant suffisant
pour garantir sa soutenabilité à court terme (direction du budget et direction générale du
Trésor).
Chapitre II
Les recettes et les dépenses par section
L’objet et l’exécution budgétaire en 202
3 de chacune des huit subdivisions du compte
sont exposés dans le présent chapitre.
I -
La section « Assurance-crédit et assurance-investissement »
A -
L’objet de la section
Activité
historique et présente dans l’offre de toutes les agences nationales
étrangères de
crédit-
export, l’assurance
-crédit est le « produit phare » des garanties publiques de soutien au
commerce extérieur. Elle représente environ 95 % du total des encours, tous types confondus
de garanties, mais
ne bénéficie qu’à un nombre réduit d’entreprises.
L’assurance
-
crédit concerne principalement de grands contrats de biens d’équipement
dans les secteurs militaire, de la construction aéronautique et des navires de croisière, qui
impliquent de lourds et complexes montages financiers.
À ce titre, elle vise à couvrir, à moyen ou long termes (plus de deux ans), deux types de
risques : d’une part, celui subi par l’exportateur en cas d’interruption de l’exécution du contrat
et, d
’autre part, celui subi par le financeur en cas de non
-remboursement du crédit octroyé à
l’acheteur étranger (crédit acheteur accordé par une banque ou crédit fournisseur accordé par
l’exportateur lui
-même).
La garantie attachée à l’assurance
-investissemen
t ne protège pas d’un risque lié à une
opération d’exportation, mais du risque politique susceptible de peser sur un investissement à
l’étranger, support des exportations dans le pays concerné. Ce risque se matérialise par
l’impossibilité d’exercer les droits attachés à l’investissement, la destruction totale ou partielle
de l’actif, l’empêchement de le faire fonctionner normalement et le risque de non
-transfert des
sommes dues à l’investisseur français.
B -
Les recettes et les dépenses
Le tableau suivant détaille les recettes de la section en 2023.
COUR DES COMPTES
16
Tableau n° 4 :
détail des recettes de la section 1. « Assurance-crédit
et assurance investissement »
En M€
Exécution
2022
LFI
2023
Exécution
2023
Primes et commissions d’engagement
406,5
377,0
530,9
Récupérations
418,6
332,0
443,9
Recettes de réassurance
106,7
0,0
71,6
Recettes diverses et accidentelles, et produits
financiers
3,7
0,0
15,3
Total des recettes d’activité de la section
935,5
709,0
1 061,7
Versements en provenance du budget général au
titre des déficits N-1 de la section
0,0
0,0
0,0
Total des recettes de la section
935,5
709,0
1 061,7
Source : Cour des comptes, à partir des documents budgétaires et de Chorus
Après avoir fortement progressé en 2022 (+ 36 %), les recettes de la section se
maintiennent à un niveau élevé en 2023 (+ 13 %).
L’augmentation des primes
et des
récupérations
6
reflète la performance commerciale toujours soutenue de la procédure de
l’assurance
-crédit, par nature contracyclique
7
. Ainsi, le montant des garanties publiques
accordées s’est maintenu à un niveau élevé en 20
23 (18,9
Md€, contre 15,8
Md€
8
en 2022, mais
11,7
Md€ en 2019). Cette progression est
aussi le résultat, selon la direction générale du Trésor,
du renforcement des moyens accordés depuis trois ans à Bpifrance Assurance Export.
En revanche, après avoir atteint un niveau inédit en 2022 (+ 70 % par rapport à 2021 et
+ 440 % par rapport à 2018), les recettes de réassurance
9
diminuent, le secteur aéronautique
poursuivant son rétablissement.
En regard de ces recettes, les dépenses de la section en 2023 sont détaillées dans le tableau
suivant.
6
Lorsqu’une créance est réglée après qu’elle a donné lieu à une indemnisation, Bpifrance
Assurance Export
récupère une partie du règlement, calculée au prorata de la fraction garantie de la créance.
7
Dès lors qu’elle intervient
en substitution d’acteurs financiers privés qui privilégient les projets les moins risqués
.
8
Nonobstant la prise e
n garantie d’un contrat d’exportation dans le secteur aéronautique militaire d’un montant
de 14,5
Md€.
9
Primes, récupérations ou indemnisations au titre de contrats cédés par des assureurs privés.
LES RECETTES ET LES DÉPENSES PAR SECTION
17
Tableau n° 5 :
détail des dépenses de la section 1. « Assurance-crédit
et assurance investissement »
En M€
Exécution
2022
LFI
2023
Exécution
2023
Indemnisations, frais accessoires sur sinistres, frais
juridiques et autres frais directement liés
316,0
631,0
670,9
Dépenses de réassurance
86,7
0,0
51,4
Restitutions de primes aux assurés
8,7
0,0
11,6
Dépenses diverses et accidentelles et charges
financières
2,3
0,0
0,8
Total des
dépenses d’activité de la section
413,7
631,0
734,7
Versements au profit du budget général des
excédents N-1 de la section
330,0
552,0
521,7
Total des dépenses de la section
743,7
1 183,0
1 256,4
Source : Cour des comptes, à partir de Chorus
En 2023
, les dépenses d’activité de la section
ont progressé de manière beaucoup plus
significative (+ 75 %) que les recettes en raison de plusieurs indemnisations significatives :
180
M€ sur le sinistre
du projet d’exploita
tion de gaz naturel liquéfié dit « Yemen LNG »,
65
M€
et 51
M€
sur des projets au Pakistan et en Colombie, etc.
II -
La section « Stabilisation de taux »
A -
L’objet de la section
L’article 151 de la loi n° 2022
-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023 a créé,
à compter du 1
er
janvier 2023, une huitième section afin de retracer les opérations de
stabilisation de taux d
intérêt
des crédits à l’exportation
et de couverture du risque de taux qui
en résulte, opérations qui étaient, avant cette date, suivies de manière extrabudgétaire.
Cette c
réation s’accompagne
de la cessation du mandat de Natixis DAI
10
: la mission
principale de stabilisation est désormais confiée à Bpifrance Assurance Export, tandis que la
mise en place et l’exécution de
swaps de couverture du risque de taux sont désormais assurées
par
l’Agence France Trésor
11
.
Le mécanisme de stabilisation a pour objet de permettre aux banques et établissements
financiers
qui accordent des crédits à l’exportation
à des emprunteurs étrangers (crédits
10
Direction des activités institutionnelles.
11
Natixis DAI continue de gérer de manière extrabudgétaire
et extinctive jusqu’en 2036
le stock de swaps de
couvertures conclus avant le 1
er
janvier 2023.
COUR DES COMPTES
18
acheteurs) ou à des exportateurs français (crédits fournisseurs) de se prémunir du risque de taux
et de s’assurer
une marge prédéterminée.
Les recettes et les dépenses de la section correspondent au différentiel, respectivement
positif ou négatif, entre le taux fixe de référence servi par
l’emprunteur et le taux variable de
refinancement du prêteur, minoré ou majoré
d’une marge
prédéfinie.
B -
Les recettes et les dépenses
Le tableau suivant détaille les recettes de la section en 2023.
Tableau n° 6 :
détail des recettes de la section 8. « Stabilisation de taux »
En M€
Exécution
2022
LFI
2023
Exécution
2023
Intérêts favorables sur stabilisation en euros
s.o.
0,0
3,6
Intérêts favorables sur swaps en euros
s.o.
0,0
0,0
Intérêts favorables sur stabilisation en USD
s.o.
0,0
0,4
Intérêts favorables sur swaps en USD
s.o.
0,0
0,0
Intérêts favorables sur stabilisation en devises
s.o.
0,0
0,1
Intérêts favorables sur swaps en devises
s.o.
0,0
0,0
Recettes au titre des coûts de rupture
s.o.
0,0
0,0
Total des recettes d’activité de la section
s.o.
0,0
4,1
Versements en provenance du budget général au
titre des déficits N-1 de la section
s.o.
s.o.
s.o.
Reversement de fonds du compte Natixis
s.o.
0,0
800,0
Total des recettes de la section
s.o.
0,0
804,1
Source : Cour des comptes, à partir des documents budgétaires et de Chorus
Compte tenu de la situation des taux dégradée en 2023 par rapport aux années
précédentes, les liquidations positives des stabilisations de taux ont été limitées. Le transfert
d’activité à Bpifrance
Assurance a, par ailleurs, donné lieu au reversement des fonds
LES RECETTES ET LES DÉPENSES PAR SECTION
19
disponibles (800
M€
12
) sur le compte
de dépôt de fonds au Trésor qu’opérait
auparavant Natixis
DAI.
En regard de ces recettes, les dépenses de la section en 2023 sont détaillées dans le tableau
suivant.
Tableau n° 7 :
détail des dépenses de la section 8. « Stabilisation de taux »
En M€
Exécution
2022
LFI
2023
Exécution
2023
Intérêts défavorables sur stabilisation en euros
s.o.
0,0
209,5
Intérêts défavorables sur swaps en euros
s.o.
0,0
0,0
Intérêts défavorables sur stabilisation en USD
s.o.
0,0
82,9
Intérêts défavorables sur swaps en USD
s.o.
0,0
0,0
Intérêts défavorables sur stabilisation en devises
s.o.
0,0
0,0
Intérêts défavorables sur swaps en devises
s.o.
0,0
0,0
Total des dépenses d’activité de la section
s.o.
0,0
292,4
Versements au profit du budget général des
excédents N-1 de la section
s.o.
s.o.
s.o.
Avance à Bpifrance Assurance Export
s.o.
0,0
50,0
Total des dépenses de la section
s.o.
0,0
342,4
Source : Cour des comptes, à partir de Chorus
Pour sa
première année de fonctionnement, la section enregistre d’importantes d
épenses
de liquidation liées à la stabilisation de taux en raison du niveau des taux, nettement supérieur
en 2023 par rapport aux années précédentes.
Elle enregistre, par ailleurs, le
versement d’
une avance budgétaire (50
M€)
à Bpifrance
Assurance Export au titre de sa nouvelle mission
pour le compte de l’État
.
III -
Les autres sections
En comparaison avec les sections examinées
supra
, les six autres sections du compte de
commerce portent des enjeux financiers plus modestes.
12
Sur un solde de 892
M€ au 31 décembre 2022, le reste devant permettre à Natixis de gérer les opératio
ns de
couverture conclues antérieurement au 1
er
janvier 2023.
COUR DES COMPTES
20
A -
La section « Assurance-prospection »
L’assurance prospection permet de couvrir les entreprises dont le chiffre d’affaires annuel
est inférieur à 500
M€ contre le risque d’échec des activités de prospection
13
de marchés à
l’
étranger et de leur offrir un relais de trésorerie.
Considérée comme indispensable pour inciter les entreprises, petites, moyennes et de
taille intermédiaire, à se tourner vers des marchés étrangers, cette famille de garanties fait
l’objet d’une attention particulière de la part de l’État, qui cherche régulièrement à en améliorer
le fonctionnement et l’efficacité :
-
en 2012, une « assurance prospection premiers pas » (A3P), destinée aux entreprises primo
exportatrices, avait été créé par la Coface pour répondre à leurs besoins de simplification
et d’accompagnement dans leurs démarches de prospection ;
-
en 2018, les modalités du dispositif ont été révisées pour en faire un produit d’avance en
trésorerie, dénommé AP208, et non plus seulement de remboursement
a posteriori
sur
présentation de factures ;
-
en 2021, l’assurance prospection
-accompagnement (APA) est lancée dans le cadre du plan
de relance
; l’octroi de la garantie est conditionné à une prestation d’accompagnement
obligatoire pour les TPE et les primo-arr
ivants sur les activités d’export.
Les recettes de la section recouvrent notamment les primes d’assurance prospection et les
reversements. Les dépenses sont principalement constituées des indemnités versées aux
entreprises exportatrices.
L’assurance
-prospe
ction génère une dépense immédiate (l’indemnisation des frais de
prospection), mais une recette incertaine à terme (le remboursement des indemnités si les
recettes d’exportation le permettent), de sorte qu’il s’agit d’une activité toujours déficitaire pour
l’État, alors même que ce dernier cherche à la rendre attractive auprès des entreprises.
Ainsi, en 2023
, les recettes d’activité
progressent (+ 21,7 % par rapport à 2022) tandis
que les dépenses diminuent légèrement (- 9,4 %)
en raison d’une distribution
plus contenue et
sélective de la garantie. Elles
s’établi
ssent, respectivement à 53,8
M€ et
126,3
M€, soit un
résultat déficitaire (- 72,5
M€)
moins important que celui de 2022 (- 95,3
M€).
B -
La section « Change »
La garantie de change permet à l’entreprise
exportatrice qui a remis une offre
commerciale en devise étrangère de se couvrir contre le risque de réduction du produit de la
vente en cas de dépréciation de la devise concernée par rapport à l’euro.
La mutualisation des achats d’instruments sur le
marché et des risques à couvrir
au
moyen d’un modèle statistique de taux de conclusion de contrats observés historiquement sur
l’ensemble de ses assurés –
limite le risque budgétaire auquel l’État est exposé.
13
Les dépenses couvertes sont de natures variées : participation à des salons, création ou renforcement d’un service
export, création d’une filiale commerciale, prestations de conseil, etc.
LES RECETTES ET LES DÉPENSES PAR SECTION
21
De fait, en 2023
, les recettes d’activité de
la section (9,9
M€) ont été
un peu supérieures
à ses dépenses (8,8
M€), d’où un résultat
bénéficiaire (+ 1,1
M€) pour la première fois
depuis 2020.
C -
La section « Risque économique »
La garantie du risque économique visait, en période de forte inflation, à protéger les
exportateurs français contre le risque d’accroissement de leurs coûts pendant l’exécution de
leurs contrats.
La section « risque économique » ne comptabilise plus de dépenses ni de recettes depuis
plusieurs années. La garantie la plus récemment octroyée courai
t jusqu’en 2023.
D -
La section « Risque exportateur »
La garantie du risque exportateur assure la banque de l’exportateur contre le risque de
défaut de remboursement des crédits de préfinancement ou des cautions qu’elle a octroyés à
son client.
Cette catégorie de garantie comprend :
-
la « garantie des cautions » : dans la très grande majorité des contrats d’exportation,
l’acheteur étranger exige dès la remise des offres la mise en place de diverses cautions
(bancaires ou non) au cas où l’exportateur n’exécuterait pas correctement le contrat
envisagé
; le cas échéant, l’acheteur étranger peut alors appeler la caution auprès du
financeur de l’exportateur français ;
-
la « garantie des préfinancements »
: l’exportateur peut avoir besoin de contracter
un
emprunt pour financer le démarrage de sa production. La banque qui le finance court alors
le risque qu’il ne la rembourse pas. En contractant une garantie de préfinancement, le risque
encouru par la banque est couvert, ce qui facilite l’octroi du prêt
.
En 2023
, les recettes d’activité (
5,9
M€) ont
été largement suffisantes pour couvrir les
dépenses d’indemnisation (
1,4
M€), plus faibles qu’attendues en raison du report de plusieurs
d’entre elles en 2024
, ce qui conduit à constater un résultat bénéficiaire de 4,5
M€.
Cependant,
les recettes intègrent
une recette d’assurance
-crédit de 6,7
M€
imputée par erreur à la section,
de sorte que son résultat d’activité devrait en réalité
être déficitaire et
s’établir
à -2,2
M€.
E -
La section « Financement de la construction navale »
Dans le cadre du dispositif prévu par la loi du 30 décembre 2005 de finances rectificative
pour 2005
14
, l’État peut octroyer directement sa garantie à des établissements accordant des
cautionnements, garanties ou préfinancements aux entreprises du secteur de la construction
navale pour la réalisation d’opérations de construction de navires civils dont le prix de vente
est supérieur à 40
M€.
14
Article 119
, modifié par l’article 108 de la loi du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015.
COUR DES COMPTES
22
À
compter de 2023, la gestion de cette garantie, dont l’encours est plafonné à 3
Md€, est
transférée de la Caisse française de développement industriel (CFDI) à Bpifrance Assurance
Export, sans incidence sur le fonctionnement de la section.
En 2023, les recettes
d’activité
de la section se sont élevées à 5,8
M€, tandis que ses
dépenses ont été nulles
en l’absence de sinistre
.
F -
La section « Cap Francexport et Cap Francexport + »
À la suite de la crise de 2008, un dispositif public de réassurance à court terme avait été
instauré, reposant sur un mécanisme de partage des risques entre l’État et les assureu
rs-crédits
privés. D’abord mis en place pour le marché domestique, le dispositif a été étendu en 2009 aux
opérations d’exportation.
Finalement tombé en désuétude après la crise, le produit a été relancé fin 2018 dans le but
de réassurer les assureurs privés sur des couvertures de court-
terme d’opérations réalisées dans
des pays particulièrement risqués. Très peu utilisé par les entreprises lors de sa réactivation, le
dispositif a été révisé
15
dans le cadre du plan d’urgence de mars 2020 en vue d’éviter un
sengagement massif des assureurs privés susceptible de provoquer l’arrêt brutal des
opérations
d’exportation.
Le
dispositif,
qui
devait
initialement
prendre
fin
au
31 décembre 2021, puis au 31 mars 2022, a été pérennisé, mais est à nouveau limité aux
opérations d’exportation vers les pays les plus risqués.
Deux types de garanties sont possibles
: Cap Francexport permet de réassurer jusqu’à
deux tiers de la part assurée du crédit, tandis que Cap Francexport+ permet de réassurer jusqu’à
95 % de cette der
nière. Ces garanties s’adressent aux entreprises exportatrices françaises dont
le chiffre d’affaires est inférieur à 1,5
Md€.
La normalisation du dispositif, engagée en 2022,
s’est poursuivie en 2023, conduisant
à
une nouvelle
baisse de l’encours et à un n
iveau rapproché de recettes (2,8
M€)
et de dépenses
(2
M€), d’où un résultat
faiblement excédentaire (+ 0,8
M€).
15
La liste des pays éligibles a été élargie et l
e plafond global de réassurance par l’État est passé de 1
Md€ à 5
Md€.
Chapitre III
La gestion du compte de commerce
Si l’exécution en 202
3
n’a pas conduit à s’écarter des règles du droit budgéta
ire, trois faits
caractéristiques de la gestion du compte de commerce méritent d’être relevés.
I -
La soutenabilité du compte de commerce
La soutenabilité budgétaire du compte de commerce s’apprécie en examinant le niveau,
fin 2023
, de l’encours des garanties accordées par l’État, principalement celles relatives au
soutien du commerce extérieur, et le risque qu’elles débouchent sur des appels en garanties.
A -
L’encours des garanties publiques pour le commerce extérieur
Entre fin 2010 et fin 2015, l’encours des garanties d’assurance
-crédit a connu une forte
progression, passant de 59
Md€ à 75
Md€ (hors promesses). Cette situation a conduit le
législateur à prévoir
16
que le montant des nouveaux risques couverts à partir du 1
er
janvier 2016,
diminué du montant des engagements éteints, ne peut, sauf autorisation expresse du Parlement,
excéder de plus de 35
Md€ le montant des encours d’assurance
-crédit (y compris les promesses)
et d’assurance
-prospection fin 2015, qui était de 84
Md€, soit une limite de 119
Md€.
Cette autorisation
est sensiblement supérieure au niveau de l’encours, ainsi que l’illustre
le graphique suivant.
16
Article 104 de la LFR pour 2015.
COUR DES COMPTES
24
Graphique n° 6 :
encours commercial
des garanties publiques pour le commerce extérieur
Source : Cour des comptes, à partir des données fournies par la
direction générale du Trésor
Au 31 décembre 2023
, l’encours des garanties d’assurance
-
crédit et d’assurance
-
prospection
s’établit à 8
2
Md€, soit
69 % du seui
l d’autorisation parlementaire.
B -
Le risque d’appel en garantie
Le programme 114 -
Appels en garantie de l’État
de la mission
Engagements financiers
de l’État
du budget général porte les dépenses budgétaires qui découlent de la mise en jeu des
garanties octroyées par l’État pour soutenir le commerce extérieur.
Les projets et rapports annuels de performances du programme présentent les résultats de
la mesure de l’indice moyen pondéré du portefeuille des risques pays
17
de l’assurance
-crédit,
qui recouvre l’essentiel des enjeux financiers pour l’État. L’indice vise à refléter les ri
sques pris
par l’État dans son rôle de garant et sa capacité à maintenir une dispersion suffisante des
catégories de risques garantis.
Le graphique suivant présente l’évolution de l’indice depuis 2013 selon qu’il porte sur les
prises en garantie en cours d
’année ou sur l’encours total de garanties en fin d’année. Le
graphique comporte l’indication des valeurs basse (2,0) et haute (4,5) entre lesquelles la valeur
de l’indice doit évoluer dans les deux cas, conformément à l’objectif fixé par la direction
générale du Trésor.
17
Le risque des différents pays est évalué par l’
Organisation de coopération et de développement économique
(OCDE) sur une échelle de 0 à 7 : plus le risque financier lié au pays est important, plus la catégorie à laquelle
appartient ce pays est élevée.
0
10
20
30
40
50
60
70
80
90
100
2016
2017
2018
2019
2020
2021
2022
2023
En Md€
Assurance-crédit
Promesses d'assurance-crédit
Assurance-prospection
Autres garanties
LA GESTION DU COMPTE DE COMMERCE
25
Graphique n° 7 :
indice moyen pondéré du portefeuille
de risque pays de
l’assurance
-crédit
Source : Cour des comptes, à partir des données fournies par la direction
générale du Trésor
Sur la période considérée, la valeur de l’indice appliqué au flux
annuel des prises en
garanties varie un peu plus fortement que lorsqu’il est calculé pour l’encours en fin d’année.
Dans ce dernier cas, il est relativement stable depuis plusieurs années et toujours compris dans
l’intervalle précité
, ce qui traduit une bonne maîtrise du risque.
C’est aussi le cas p
our 2023
, la valeur de l’indice s’
élevant à 3,15
pour le flux de l’année
et à 2,85
pour l’encours au 31
décembre, en hausse légère dans les deux cas par rapport aux
valeurs de 2022. La direction générale du Trésor attribue cette évolution à la dégradation de
l’environnement
international et
l’
augmentation d
u niveau d’
endettement de certains pays
émergents (Sénégal, Égypte, etc.) vis-à-
vis desquels l’État est particulièrement exposé en tant
que garant.
II -
L’enregistrement décalé des flux de trésorerie sur le compte
Dans le cadre de son mandat de gestion, Bpifrance Assurance Export doit notamment
transmettre à la direction générale du Trésor un état mensuel des encaissements et des
décaissements intervenus au cours du mois écoulé.
Le contrôleur budgétaire et comptable ministériel (CBCM) du ministère de l’économie,
des finances et de la souveraineté industrielle et économique est ensuite chargé de procéder aux
enregistrements comptables nécessaires.
La conséqu
ence de ce processus est que l’exécution budgétaire du compte de commerce
pour l’année N retrace les encaissements et décaissements intervenus du 1
er
décembre N-1 au
30 novembre N, ce qui ne donne pas une image fidèle à la réalité des flux de trésorerie liés à la
gestion des garanties publiques.
Au surplus, les prévisions élaborées
à l’automne dans le cadre du projet de loi de finances
initiale sont d’autant plus difficiles à commenter
a posteriori
qu’elles portent sur la totalité de
0,0
1,0
2,0
3,0
4,0
5,0
6,0
7,0
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
2022
2023
Appliqué au stock en fin d'année
Appliqué au flux de l'année
COUR DES COMPTES
26
l’exercice N+1, alors q
ue seuls ses onze premiers mois sont effectivement pris en compte en
exécution et que décembre est un mois atypique, qui enregistre notamment les annulations liées
au Club de Paris
18
.
Le tableau suivant permet d’apprécier la différence, parfois significativ
e, entre les flux de
trésorerie nets enregistrés sur le compte de commerce (avant versements en provenance du
budget général ou au profit de celui-
ci) et ceux réellement constatés au cours de l’année civile
par Bpifrance Assurance Export.
Tableau n° 8 :
comparaison entre les flux de trésorerie enregistrés sur le compte de
commerce (hors construction navale et stabilisation de taux) et ceux
constatés par Bpifrance Assurance Export
En M€
2018
2019
2020
2021
2022
2023
Résultats d’activité
des garanties export
402,1
634,9
237,4
245,0
410,4
260,9
(-) Recettes nettes des dépenses constatées
en décembre N-1 par Bpifrance Assurance
Export, mais enregistrées début N sur le
compte
-83,8
-259,9
-89,5
-118,2
-119,8
-161,6
(+) Recettes nettes des dépenses
constatées en décembre N par Bpifrance
Assurance Export, mais enregistrées début
N+1 sur le compte
259,9
89,5
118,2
119,8
161,6
163,6
(=) Résultats d’activité retraités
578,2
464,5
266,1
246,6
452,2
262,9
Source : Cour des comptes, à partir de Chorus
Il apparaît ainsi que, en l’absence du décalage d’un mois dans la comptabilisation des
recettes et des dépenses, l’État aurait été amené, en 2018, à prélever significativement
davantage de trésorerie qu’il ne l’a fait et, en
2019, à en prélever moins, tandis que, à partir de
2020, les écarts sont moins importants.
Sept ans après avoir repris la gestion des garanties publiques pour le commerce extérieur,
il serait souhaitable que Bpifrance Assurance Export soit en mesure de tr
ansmettre l’état de
trésorerie du mois de décembre (N) dans des délais compatibles avec les opérations de fin
d’exercice budgétaire (achevées le 20 janvier N+1 à l’issue de la période complémentaire).
En avançant de quelques jours seulement en janvier la production des états mensuels de
trésorerie et en réduisant la durée des contrôles du CBCM, une suppression du décalage actuel
est atteignable.
Dans l’intervalle, les documents relatifs au compte de commerce qui accompagnent les
projets de loi de finances
et de règlement du budget et d’approbation des comptes devraient
faire état de ce décalage, pour la correcte information de leurs destinataires.
18
Groupe informel de créanciers publics qui compte vingt-deux États membres permanents et dont le rôle est de
trouver des solutions coordonnées et durables aux difficultés de paiement de pays endettés.
LA GESTION DU COMPTE DE COMMERCE
27
La direction générale du Trésor n’estime pas souhaitable d’entamer un tel chantier
opérationnel, considérant l’
extension récente du champ des missions confiées à Bpifrance
Assurance Export. En revanche, elle est disposée à faire état de l’enregistrement décalé des flux
de trésorerie dans les documents budgétaires.
III -
Le « verdissement » des garanties publiques pour le
commerce extérieur
Les garanties publiques sont, de longue date,
un axe important de l’action de l’État en
faveur du commerce extérieur, que ce dernier oriente en fonction de ses priorités économiques
et politiques, et des risques pays. L’objectif premier
que constitue l’amélioration de la
compétitivité des exportations française n’est cependant pas exclusif d’autres préoccupations,
notamment dans le domaine de la responsabilité sociale et environnementale.
À cet égard, l’OCDE a émis une série de recomman
dations non contraignantes à
l’intention de ses États membres,
en particulier celle dite des « Approches communes »
19
. Cette
dernière reconnaît
« la responsabilité qu’ont les Adhérents de mettre en œuvre les engagements
pris par les Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements
climatiques »
.
La recommandation prévoit donc un devoir de diligence environnementale et sociale,
conduisant à réaliser un examen approfondi des risques que font courir, dans ces deux
domaines, les opé
rations d’exportation, dès lors qu’elles sont susceptibles de bénéficier de
crédits et garanties de crédits publics.
S’agissant des garanties publiques pour le commerce extérieur, cette volonté s’est
traduite, dans la période récente, par une restriction
de leur champ d’éligibilité. En effet, la loi
de finances n° 2019-1479 pour 2020 a modifié le code des assurances (article L. 432-1) de telle
manière que la garantie de l’État ne puisse plus être accordée pour des opérations
20
dans le
domaine du charbon, des hydrocarbures gazeux ou liquides recourant à la fracturation
hydraulique, et aux autres méthodes « non-conventionnelles », ou nécessitant un torchage de
routine
21
.
La loi de finances pour 2020 a aussi significativement renforcé l’obligation du
gouverneme
nt d’informer le Parlement en prévoyant, notamment, l’établissement d’un
rapport
22
qui détaille les moyens (méthodologiques, techniques, économiques, etc.) de mieux
prendre en compte la dimension environnementale dans l’octroi des garanties publiques pour
le commerce extérieur et propose différents scénarios à cette fin. Dans le prolongement de ce
rapport, un mécanisme incitatif, dit « bonus climatique », a été mis en place à compter du
19
Recommandation sur des approches communes pour les c
rédits à l’exportation bénéficiant d’un soutien public
et le devoir de diligence environnementale et sociale, adoptée le 28 juin 2012 et révisée le 6 avril 2016.
20
De recherche, d’exploitation et de production de minerai ou d’énergie, de prêts à des achete
urs étrangers en vue
d’exporter des biens et des services dans le cadre de telles activités.
21
F
ait de brûler en continu le gaz émis lors de l’exploitation d’un gisement d’hydrocarbures liquides.
22
Rapport du Gouvernement au Parlement,
Plan climat pour les financements export
, octobre 2020.
COUR DES COMPTES
28
1
er
janvier 2021
, consistant à augmenter l’assiette de l’assurance
-crédit dont peuvent bénéficier
les projets ayant un impact positif sur la transition écologique.
En novembre 2021, à l’occasion de la 26
e
Conférence des parties (COP 26) sur les
changements climatiques, la France a signé la déclaration sur le financement public
international pour la transition vers les énergies propres.
L’engagement qui en a résulté s’est traduit
23
par l’avancement, au 1
er
janvier 2023, de la
cessation du soutien de l’État par le jeu de sa garantie à tout projet d’exportation dans le secteur
des énergies fossiles, à l’exception de ceux visant à atténuer les émissions de gaz à effet de
serre.
Enfin, au niveau international, deux avancées sont signalées en 2023 :
-
d’
une
part, une version modernisée de l’Arrangement OCDE
24
sur le crédit export est entrée
en vigueur le 15 juillet 2023 : il inclut désormais une liste plus large de secteurs éligibles à
un soutien financier bonifié et retient des normes de performance environnementale
inspirées de la taxonomie européenne ;
-
d’
autre part, des discussions ont été
engagées pour modifier l’article 6 de l’Arrangement
OCDE afin
d’aboutir à
l’interdiction par l’ensemble des participants
du financement de
nouveaux projets dans le domaine des hydrocarbures.
23
Article 152 de la loi n° 2022-1726 du 30 décembre 2022 de finances pour 2023.
24
Convention non contraignante (
Gentlemen’s Agreement
) de 1978 dénommée « Arrangement sur les crédits à
l’exportation bénéficiant d’un souti
en public » et communément appelée « Arrangement OCDE », qui encadre la
façon dont les États participants peuvent aider leurs entreprises à remporter des marchés à l’export, puis à sécuriser
leur exécution et leur paiement.
LA GESTION DU COMPTE DE COMMERCE
29
___________________________ RECOMMANDATION ___________________________
La Cour formule la recommandation suivante :
2.
(Recommandation nouvelle) : Accélérer la production des états mensuels de trésorerie afin
de supprimer le décalage d’un mois dans l’enregistrement des flux
dans la comptabilité
budgétaire de l’État
(direction générale du Trésor).
Annexes
COUR DES COMPTES
32
Annexe n° 1 :
liste des publications récentes de la Cour des comptes en
lien avec les politiques publiques concernées par la NEB
Les soutiens publics nationaux aux exportations agricoles et agroalimentaires
, référé du
Premier président, mars 2019.
SFIL (ex-Société de financement local)
, rapport d’observations définitives, septembre 2021.
Business France
Exercices 2015 à 2019
, rapport d’observations définitives, octobre 2021.
Les dispositifs de soutien à l’exportation
, rapport public thématique, octobre 2022.
Le soutien aux exportations de matériel militaire
, rapport public thématique, janvier 2023.
ANNEXES
33
Annexe n° 2 :
suivi des recommandations formulées au titre
de
l’exécution
budgétaire 2022
Recommandation formulée au sein
de la note d’exécution budgétaire
2022
Réponse de l
administration
Analyse de la Cour
Appréciation
par la Cour
du degré de
mise en
œuvre
1
Reverser, au profit du budget général
de l’État, les excédents de trésorerie
du compte de commerce disponibles
au-
delà d’un montant suffisant pour
garantir sa soutenabilité à court
terme.
Plusieurs éléments conduisent à ne
pas souhaiter le reversement d’une
partie de cet excédent de trésorerie
au budget général :
- cette opération serait neutre à tout
point de vue pour l’État
;
- le compte de commerce pourrait
subir au cours des prochaines années
des dépenses particulièrement
importantes, pour lesquelles il
convient de conserver un montant de
trésorerie suffisant.
Au-
delà du risque conduisant l’État
de pouvoir assurer ses
décaissements, le résultat de la
procédure accumulé sur le compte de
trésorerie est un élément de
réassurance à l’international sur la
conformité du dispositif français aux
règles internationales (absence de
caractère subventionnel).
En l
absence d
éléments nouveaux,
la Cour reconduit sa
recommandation.
Non mise en
œuvre