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QUATRIÈME CHAMBRE
S2024-0801
DEUXIÈME SECTION
OBSERVATIONS DÉFINITIVES
(Article R. 143-11 du code des juridictions financières)
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS
LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT
FRANÇAIS CENTRE SAINT-LOUIS
Exercices 2015-2022
Le présent document, qui a fait l’objet d’une contradiction avec les destinataires concernés,
a été délibéré par la Cour des comptes, le 26 avril 2024.
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
2
TABLE DES MATIÈRES
TABLE DES MATIÈRES
............................................................................................
2
SYNTHÈSE
....................................................................................................................
4
LISTE DES RECOMMANDATIONS
........................................................................
6
INTRODUCTION
.........................................................................................................
7
1
LES MISSIONS DE L’AMBASSADE DE FRANCE PRES LE SAINT-SIEGE 8
1.1
Les relations avec le Saint-Siège : un interlocuteur à l’influence étendue
.......
8
1.2
Les activités de l’ambassade
..........................................................................
10
1.2.1 Une ambassade de France aux attributions atypiques
.....................................
10
1.2.2 Les activités diplomatiques fondées sur les enjeux de politique étrangère et les
enjeux globaux
................................................................................................
11
1.2.2.1
Les positions de la France portées par l’ambassade auprès du Saint-Siège
..........
11
1.2.2.2
Les visites bilatérales et de représentants français
...............................................
13
1.2.2.3
Une représentation française dans certaines instances et cérémonies
..................
13
1.2.3 L’ambassade et les autres relais du dialogue
...................................................
14
1.3
Le contexte : une influence française en déclin au Saint-Siège
.....................
15
1.3.1 Une présence française moindre dans les postes à responsabilités
.................
16
1.3.2 Un déclin de la langue française au sein de la Curie
.......................................
18
2
L’ORGANISATION ET LE FONCTIONNEMENT DE L’AMBASSADE
......
20
2.1
Une ambassade aux effectifs restreints
..........................................................
20
2.1.1 Des effectifs limités, des règles de gestion diversifiées
..................................
20
2.1.1.1
Une organisation resserrée
...................................................................................
20
2.1.1.2
Les catégories de personnels employés par l’ambassade et leur rémunération
....
21
2.1.2 Une équipe diplomatique réduite au regard des enjeux
...................................
23
2.2
Les instructions données aux ambassadeurs et le suivi de leur mise en œuvre
23
2.2.1 Des instructions suivies d’un plan d’actions
...................................................
24
2.2.1.1
L’élaboration des instructions
..............................................................................
24
2.2.1.2
Les plans d’actions
...............................................................................................
24
2.2.2 Le suivi, le bilan et l’évaluation des plans d’actions
.......................................
25
2.3
Des fonctions administratives et financières mutualisées
..............................
27
2.3.1 Le secrétariat général commun d’ambassades
................................................
28
2.3.2 Un périmètre mutualisé étendu
.......................................................................
28
2.3.3 Une collaboration efficace
..............................................................................
29
2.4
Un budget de fonctionnement en progression dans un contexte économique
et réglementaire contraignant
.........................................................................
31
2.4.1 Des financements en progression
....................................................................
31
2.4.2 Une gestion contrainte
.....................................................................................
32
2.5
Un patrimoine immobilier partiellement entretenu ; des financements
extrabudgétaires à trouver
..............................................................................
34
2.5.1 Un patrimoine prestigieux, des moyens d’entretien limités
............................
35
2.5.1.1
La Villa Bonaparte
...............................................................................................
35
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
3
2.5.1.2
Une opération de cession en suspens : la Palazzina
.............................................
36
2.5.2 Une recherche active de mécénat à engager
....................................................
37
3
L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE SAINT-LOUIS
.........................................
39
3.1
Une offre de service en évolution dans le cadre d’une coopération culturelle
et d’influence ancienne
...................................................................................
40
3.1.1 Une offre de service en évolution
....................................................................
40
3.1.2 La recherche dynamique de nouveaux marchés
..............................................
42
3.2
Une mission qui se déploie suivant des axes stratégiques forts
.....................
43
3.2.1 Un pilotage stratégique renforcé
.....................................................................
43
3.2.2 L’enseignement du français
............................................................................
44
3.2.2.1
Le centre de langues
.............................................................................................
44
3.2.2.2
Un effort renforcé dans le domaine linguistique vers les autorités pontificales et
italiennes
..............................................................................................................
46
3.2.3 La coopération culturelle
.................................................................................
48
3.3
Un modèle économique renforcé par le partenariat stratégique avec les Pieux
établissements
.................................................................................................
50
3.3.1 Un taux d’autofinancement élevé mais un équilibre financier fragile
.............
51
3.3.2 Des leviers pour améliorer cette situation
.......................................................
53
3.3.2.1
La gestion financière
............................................................................................
53
3.3.2.2
Les mesures prises pour restaurer l’équilibre
.......................................................
54
3.4
Un accord pérenne avec les Pieux établissements pour renforcer l’influence
française
.........................................................................................................
57
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
4
SYNTHÈSE
L’ambassade de France près le Saint-Siège est la plus ancienne représentation
diplomatique du réseau français à l’étranger. Excepté une brève période de rupture des relations
diplomatiques, consécutive à la loi de 1905 sur la séparation de l’Église et de l’État, les relations
avec le Saint-Siège ont été entretenues de manière constante et étroite depuis le XV
ème
siècle
jusqu’à nos jours.
Le Saint-Siège, tête de l’Église catholique romaine, est la seule institution religieuse à
posséder les attributs de souveraineté d’un État. Il dispose des pouvoirs diplomatiques et sa
double identité, à la fois politique et religieuse, lui confère une autorité et une influence uniques,
compte tenu de l’organisation de l’Église dans le monde et du nombre de catholiques qui
s’établissait en 2022 à 1.390 milliard, soit près de 18 % de la population mondiale.
L’ambassade de France auprès du Saint-Siège ajoute ainsi aux missions diplomatiques
traditionnelles un rôle spécifique en faveur du rayonnement de la France. Pourtant, l’influence
française au sein du Saint-Siège et sa répercussion dans le monde, autrefois importantes,
paraissent aujourd’hui moins étendues. L’action des derniers papes – notamment du Pape
François - a eu pour conséquence l’ouverture de la gouvernance de l’Église à des responsables
extra-européens, aujourd’hui plus nombreux au sein des organes de gouvernement du Saint-
Siège.
Face à ce constat, l’ambassade de France ne dispose que de moyens limités avec
seulement deux diplomates dont la durée en poste a été au maximum de trois ans ces dernières
années, qui plus est avec de trop longues périodes d’intérim et des vacances de postes. Le temps
diplomatique utile a ainsi été très réduit, au regard du nombre et de la diversité des
interlocuteurs, du temps nécessaire pour créer le réseau de relations indispensables, et de la
charge que constitue et devrait constituer le suivi rigoureux des « Pieux établissements »
1
et de
leur patrimoine.
Sous cette contrainte, le cadre stratégique de l’action des ambassadeurs et les plans
d’actions qu’ils préparent une fois en fonction sont arrêtés en collaboration avec tous les
interlocuteurs ministériels intéressés. Cette démarche pragmatique gagnerait en efficacité si elle
était renforcée par une réelle attention au suivi et à l’évaluation des actions menées.
L’ambassade dispose d’un lieu prestigieux, la Villa Bonaparte. Alors qu’un tel
patrimoine est un atout culturel susceptible de drainer des ressources importantes de
valorisation via le mécénat, il est surtout considéré comme une charge par le ministère. Il
importe que l’ambassade se mobilise davantage pour lever les fonds nécessaires non seulement
à l’entretien et à la rénovation des locaux mais également au financement de projets de nature
à renforcer l’influence française.
Pour exercer sa mission en faveur du rayonnement de la France, l’ambassade dispose
de deux leviers supplémentaires.
1
Les Pieux établissements de France à Rome et à Lorette gèrent sous l’autorité de l’ambassadeur de France
près le Saint -Siège un patrimoine cultuel et artistique inestimable notamment l’Église nationale de la France à
Rome (Saint-Louis des Français) et l’église et le domaine de la Trinité-des-Monts, ainsi qu’un patrimoine locatif
conséquent. Le contrôle de leur gestion donne lieu à une publication distincte de la Cour des comptes.
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
5
L’Institut français Centre Saint-Louis (IFSL) cumule l’activité classique d’un institut
français à l’étranger – cours de langue, activités culturelles - et celle tournée vers les institutions
et universités pontificales. Héritier du Centre Saint-Louis créé en 1945, il a été, depuis, un foyer
de réflexion intellectuelle orienté vers les enjeux religieux. Il a longtemps été doté d’une assise
économique solide en raison du succès des cours de français et des certifications qu’il délivre.
Son taux d’autofinancement de plus de 90 % a ainsi constitué un résultat remarquable, même
s’il s’est dégradé depuis la crise sanitaire. Les efforts entrepris depuis, tant pour maîtriser ses
dépenses que pour encaisser de nouvelles recettes, sont appréciables mais ne doivent pas
conduire à affaiblir ce levier d’influence.
Si les Pieux établissements de la France à Rome et à Lorette sont restés longtemps à
l’écart de la stratégie d’influence menée par l’ambassade France près le Saint-Siège, la situation
semble évoluer en 2023. L’enjeu pour l’ambassade est de définir et mettre en œuvre une
stratégie qui contribue plus efficacement à l’influence de la France auprès du Saint-Siège et
dans le monde chrétien. Les Pieux établissements et l’Institut français Centre Saint-Louis
constituent des outils d’exception à sa disposition. Les synergies entre ces deux institutions,
sous l’égide de l’ambassade, devraient offrir une configuration unique au service du
rayonnement de la France auprès du Saint-Siège.
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
6
LISTE DES RECOMMANDATIONS
(secrétaire générale du MEAE, ambassade) : assurer un
suivi du plan d’action de l’ambassadeur, doté d’indicateurs pertinents, et évaluer son
impact, au moins à la fin de sa mission.
(secrétaire générale du MEAE) programmer les
mouvements diplomatiques de telle sorte que les mandats s’enchaînent sans
discontinuité excessive
(secrétaire générale du MEAE, ambassade) mettre en
œuvre une politique active de recherche de mécénat et de valorisation des espaces
de l’ambassade avec des objectifs quantitatifs annuels pour couvrir les besoins
d’investissement de l’ambassade pour son patrimoine historique.
(secrétaire générale du MEAE, ambassade) inscrire le
partenariat de l’IFCSL avec les Pieux établissements dans un cadre pluriannuel afin
de faciliter les projets communs, d’assurer le niveau de financement requis par un
nouveau centre d’études et d’accroître significativement les programmes de bourses
dans l’objectif d’accroître l’influence française.
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
7
INTRODUCTION
Le réseau diplomatique français est l’un des plus étendus dans le monde. Son maillage
est constitué de 264 représentations diplomatiques dont 163 ambassades, des antennes
diplomatiques, 92 consulats généraux ou consulats, 133 sections consulaires et plus de 500
consulats honoraires.
Le Saint-Siège n’accepte d’accréditer aucun ambassadeur d’un État qui le soit
également par la République italienne. En conséquence, comme 87 autres États qui ont choisi
d’avoir une représentation en tant que résident auprès du Saint-Siège, la France dispose ainsi
de deux ambassades distinctes à Rome. S’y ajoute par ailleurs sa représentation permanente
auprès de l’Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (OAA/FAO) et
du Fonds international de développement agricole (FIDA)
2
.
Si l’ambassade de France près de la République italienne couvre un périmètre
interministériel et emploie près de 180 agents, y compris les quatre consulats généraux,
l’ambassade de France près le Saint-Siège, avec un portefeuille d’activités plus étroit, est de
taille sensiblement plus modeste. Elle emploie moins de 30 agents et dispose d’un budget de
moins d’1 M€ pour son fonctionnement (hors dépenses de personnel).
Installée en 1470, l’ambassade de France auprès du Saint-Siège est la plus ancienne du
réseau. Elle constitue un outil diplomatique unique. Elle est chargée des relations avec
le
Saint-Siège, établi dans la Cité du Vatican. Cet État souverain d’une superficie de 44 hectares,
en fait le plus petit État du monde, tandis que son influence s’exerce sur l’ensemble des
continents.
Aux
missions
diplomatiques
traditionnelles
qui
incombent
aux
ambassades
(présentation des positions françaises, négociations, …), l’ambassade de France auprès du
Saint-Siège ajoute un rôle spécifique en faveur du rayonnement de la France auprès de l’Église
catholique romaine et, à travers elle, dans le monde.
Elle exerce des missions étendues et atypiques en raison de la particularité de l’État
auprès duquel elle est accréditée (I).
De taille modeste, elle met en œuvre un plan d’actions arrêté par le ministère. Elle
dispose de moyens limités gérés avec le soutien des services communs de gestion mais n’utilise
pas suffisamment le potentiel de son patrimoine prestigieux (II).
Elle dispose en outre de deux leviers d’influence (III), l’Institut français Centre Saint-
Louis, créé en 1945 (IFCSL), et les Pieux établissements de la France à Rome et à Lorette
3
.
Placés sous l’autorité de l’ambassadeur, ces derniers font l’objet d’un rapport spécifique de la
Cour des comptes.
2
78 autres pays ont fait accréditer auprès du Saint-Siège un de leurs ambassadeurs résidant dans un pays
voisin de l’Italie.
3
Les Pieux établissements de France à Rome et à Lorette gèrent sous l’autorité de l’ambassadeur de
France près le Saint -Siège un patrimoine cultuel et artistique inestimable notamment l’Église nationale de la
France à Rome (Saint-Louis des Français) et l’église et le domaine de la Trinité-des-Monts, ainsi qu’un patrimoine
locatif conséquent.
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
8
1
LES MISSIONS DE L’AMBASSADE DE FRANCE PRES LE
SAINT-SIEGE
L’ambassade de France exerce ses missions auprès d’une autorité religieuse à caractère
international qui est singulière et dont l’influence dans le monde est étendue. Cette spécificité
se traduit dans les activités de ce poste diplomatique atypique, dans un contexte où l’influence
de la France peine à se maintenir.
1.1
Les relations avec le Saint-Siège : un interlocuteur à l’influence
étendue
La double identité du Saint-Siège, à la fois politique et religieuse, lui confère une
autorité et une influence uniques, compte tenu du nombre croissant de catholiques et de
l’organisation de l’Église dans le monde.
-
Un nombre croissant de catholiques dans le monde
Les catholiques représentent, 18 % de la population mondiale en 2022. Leur nombre est
passé de 757 millions en 1978 à 1,390 milliard
4
en 2022 soit une hausse de 80 % Cette tendance,
moindre que l’augmentation de la population mondiale (+84 %)
5
, n’est pas homogène selon les
continents
6
. Sur la période 1978-2021, leur nombre augmente en Afrique (+374 % contre 207 %
pour sa population totale), en Asie (+138 % contre 85 %), en Océanie (+96 % contre 99%),
dans les Amériques (+78 % contre 75 %), et + 7% seulement en Europe.
Graphique n° 1 :
Évolution 1978-2022 de la répartition mondiale du nombre de catholiques
Source : FIDES (organe d'information des Œuvres pontificales missionnaires - Vatican)
4
Selon les chiffres du Pontifical Yearbook de 2024 et du Statistical Yearbook of the Church de 2022
5
Population dans le monde,
INSEE mars 2023
6
La proportion la plus élevée se trouve dans les Amériques avec 64,1 catholiques pour 100 habitants,
suivies par l'Europe avec 39,6 catholiques, l'Océanie avec 25,9 et l'Afrique avec 19,4. L'incidence la plus faible se
trouve en Asie avec 3,3 catholiques pour 100 habitants,
0
200
400
600
800
1 000
1 200
1 400
1 600
1978
1998
2004
2019
2021
2022
Afrique
Amériques
Asie
Europe
Océanie
Total
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
9
-
Un réseau diplomatique étendu
En près de quarante ans, l’influence diplomatique du Saint-Siège s’est étendue
progressivement à l’ensemble des continents. Cette influence grandissante se traduit notamment
par ses prises de position de portée internationale plus nombreuses sur des questions politiques,
économiques, sociales et environnementales, comme le constatent les ambassadeurs.
En janvier 2018, le Saint-Siège disposait d’une représentation diplomatique dans 183
États. Il y dispose soit d’une nonciature sur place (106), soit d’une nonciature régionale (77),
un nonce apostolique étant susceptible d’être accrédité auprès de plusieurs États. Il en est
dépourvu dans seulement 13 États dont la Chine
7
. Ce réseau caractérise l’étendue de sa présence
diplomatique dans le monde : en comparaison, la Chine a un ambassadeur dans 169 pays, les
États-Unis dans 168 pays et la France dans 163 pays.
-
Les acteurs de la diplomatie du Saint-Siège
La diplomatie vaticane repose sur un effectif de moins de 200 personnes dont une
quarantaine à la deuxième section de la Secrétairerie d’État. En tant qu’observateur, le Saint-
Siège est présent à l’UNESCO et au Conseil de l’Europe
8
. Il bénéficie du statut d'État membre
dans 11 organisations internationales intergouvernementales, telles que l’Agence internationale
de l'énergie atomique (AIEA) ou le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés
(HCR).
Le Saint-Siège dispose par ailleurs de relais d’information et d’action, notamment dans
les pays en crise, qui s’appuient, entre autres, sur les évêques (5 340 en 2022 répartis dans le
monde, les congrégations religieuses, les établissements d’enseignement, les œuvres sociales et
les grandes organisations non-gouvernementales catholiques (dont Caritas et la communauté de
Sant’Egidio).
Les relations diplomatiques entre la France et le Saint-Siège sont réciproques. Mgr
Celestino Migliore, nonce apostolique en France depuis 2020 contribue, à l’instar de
l’ambassade de France près le Saint-Siège, au dialogue entre les deux États.
Compte tenu de l’influence du Saint-Siège, non plus seulement en Europe mais aussi en
Afrique, en Amérique latine et en Asie, la qualité des relations avec lui constitue un enjeu
majeur pour l’ambassade, en vue de faciliter l’expression de positions stratégiques
convergentes.
7
Par exemple, le Saint-Siège dispose désormais de représentations diplomatiques auprès de la Russie
(2009), des Émirats arabes unis (2007) et de la Birmanie (2017), mais il n’entretient aucune relation diplomatique
officielle l’Afghanistan, le Bhoutan, la Chine populaire – sinon des accords pastoraux–, la Corée du Nord et les
Maldives. Il n’en a pas non plus avec l’Arabie Saoudite et Oman mais dispose d’une délégation apostolique pour
la Péninsule arabique. Dans certains pays, le Saint-Siège n’a pas d’ambassadeur mais des délégués apostoliques :
les Comores, la Somalie, Brunei et le Laos. Enfin, cas particulier, le Saint-Siège dispose seulement d’un «
représentant non-résident» au Vietnam.
8
Le Saint-Siège participe comme « État observateur » à de nombreux organes de l’ONU mais encore à
d’autres organisations internationales telles que la Commission internationale de l'état civil (CIEC) (Strasbourg),
l'Organisation mondiale du commerce (OMC) (Genève), l'Union latine (UL) (Paris) ou à des organisations
régionales : Conseil de l'Europe (Strasbourg), Organisation des États américains (OEA) (Washington), Union
africaine (UA) (Addis-Abeba).
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
10
1.2
Les activités de l’ambassade
L’ambassade exerce auprès du Saint-Siège les missions classiquement dévolues aux
ambassades : agir dans le monde pour la paix, la sécurité et le respect des droits de l'homme ;
contribuer à l'organisation d'une mondialisation qui assure un développement durable et
équilibré ; assurer la présence des idées, de la langue et de la culture français tout en servant la
diversité culturelle. Dans cette perspective, par ses notes d’analyse, la chancellerie restitue des
informations utiles à son administration centrale en vue, notamment, de préparer les échanges
bilatéraux et les visites officielles.
Toutefois, ses missions de par la nature du Saint-Siège, portent sur un périmètre
particulier qui la distingue des autres ambassades bilatérales ou des représentations
permanentes multilatérales qui traitent de problématiques transversales, de dossiers
géographiques particuliers ou d’évènements internationaux majeurs.
1.2.1
Une ambassade de France aux attributions atypiques
Continues depuis le XVème siècle et seulement rompues entre 1904 et 1920, en raison
du contexte lié à l’adoption de la loi du 9 décembre 1905 sur la séparation de l’Église et de
l’État, les relations diplomatiques entre la France et le Saint-Siège ont été reprises en 1921.
Régulières depuis lors, elles visent à dégager des synergies sur des positions communes mais
aussi à aplanir les divergences de vues, parfois sensibles sur les plans militaire et sociétal
(avortement, migrants, fin de vie, bioéthique, orientation sexuelle et genre, …) entre l’État et le
Saint-Siège.
L’ambassade s’attache à promouvoir et défendre auprès de ce dernier les positions
nationales françaises et à échanger des informations portant sur les conflits locaux ou régionaux
où le Saint-Siège est actif, notamment lorsqu’ils impliquent les communautés catholiques et
chrétiennes. Elle est chargée d’organiser les déplacements des personnalités françaises à la
Curie en coordination avec la direction du protocole du ministère. Elle a également pour
mission d’analyser les positions du Pape ou émanant de la Curie, leurs éventuelles inflexions et
l’impact qu’elles peuvent avoir en France. Ses analyses transmises au fil de l’eau sont exploitées
par les différentes directions ministérielles concernées selon leurs compétences respectives, et
donnent lieu à une information ciblée suivant l’importance des sujets (cabinets de ministres,
Premier ministre, Présidence de la République, …) et de l’actualité. Un point régulier, tous les
quinze jours, a lieu entre le directeur de l’Europe méditerranéenne au ministère des affaires
étrangères et le ministre-conseiller de l’ambassade.
L’activité politique de l’ambassade repose sur sa chancellerie, composée de six agents
dont trois cadres : l’ambassadeur, le ministre-conseiller et le conseiller ecclésiastique, qui est
un religieux français sous contrat. Autrefois, elle disposait également d’un conseiller politique
supplémentaire dont la suppression en 2006 a été régulièrement regrettée par les ambassadeurs
successifs, et ce d’autant que le ministre-conseiller a par ailleurs la responsabilité de la
députation administrative qui dirige les Pieux établissements, ce qui occupe près du tiers de son
temps de travail. À la faveur d’un rehaussement du plafond d’emplois du ministère intervenu
en lois de finances initiale pour 2024 (+164 ETP), ce poste devrait être rétabli en 2024.
La chancellerie est fréquemment sollicitée par les missions de représentation, prépare
avec la Curie non seulement les échanges bilatéraux au Vatican et les visites des personnalités
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
11
françaises qui ont obtenu une audience auprès du Pape, mais encore l’organisation
d’événements associant l’Église catholique de France et son réseau caritatif. Les réceptions,
évènements et manifestations constituent autant d’opportunités pour agir de manière informelle
sur certaines questions
9
.
L’ambassade a disposé jusqu’en 2008 d’une section consulaire qui gérait la situation
administrative des ressortissants français, principalement des religieux, travaillant au Vatican.
Peu nombreux, ceux-ci relèvent désormais du consulat général de France à Rome, qui dépend
de l'ambassade auprès de la République italienne.
De même, depuis 2009, dans un souci d’optimisation des moyens et d’efficience, la
plupart des tâches financières et administratives assurées jusque-là par l’ambassade auprès du
Saint-Siège a été transférée à un secrétariat général commun aux trois représentations de la
France en Italie, excepté le protocole qui, compte-tenu de ses particularités avec le Saint-Siège,
ne peut être mutualisé.
1.2.2
Les activités diplomatiques fondées sur les enjeux de politique
étrangère et les enjeux globaux
Les activités diplomatiques entretenues avec le Saint Siège visent à expliquer les
positions internationales de la France, à négocier des textes bilatéraux, à participer à la
construction de positions communes, ainsi qu’à identifier des divergences de vue. L’ambassade
porte les positions de la France selon plusieurs modalités parmi lesquelles sa contribution à
l’organisation de visites bilatérales.
1.2.2.1
Les positions de la France portées par l’ambassade auprès du Saint-
Siège
Dans le cadre de ses relations bilatérales avec le Saint-Siège, l’ambassadeur soutient les
positions convergentes de la France et du Saint-Siège, mais a également pour mission
d’expliquer leurs divergences «
assumées
».
-
Les points de convergence
Parmi les points de convergence actuels, la position du Saint-Siège s’inscrit durablement
en faveur du climat, de la biodiversité et de la lutte contre le dérèglement climatique. Le Saint-
Siège a ainsi mobilisé la communauté internationale
10
, notamment en amont de la COP21, et
maintient son influence auprès de pays peu investis sur ce sujet.
9
Interview
du
Chef
du
protocole
au
Vatican
Mgr
Joseph
Murphy
du
27
mai
2023
10
Encyclique « Laudato Si » du 24 mai 2015 sur la sauvegarde de la maison commune »
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
12
Sur le thème des migrations, la France et le Saint-Siège ont adhéré au Pacte mondial
pour une migration sûre, ordonnée et régulière
11
, le Pape appelant par ailleurs
12
l’Europe à
trouver un équilibre entre le devoir moral de protéger ses propres citoyens et celui de garantir
l’assistance et l’accueil des migrants, tout en prenant en compte les capacités d’intégration des
pays.
-
Les points de divergence
Ils portent principalement sur les armes nucléaires et les questions sociétales.
Le Saint-Siège, sous le Pape François comme ses prédécesseurs, considère la possession
d’armes nucléaires comme « hautement immorale »
13
, s’opposant ainsi directement à la doctrine
française de dissuasion, réaffirmée par tous les Présidents de la République
14
.
L’Église catholique demeure opposée au divorce (elle admet en revanche des procédures
de constat de nullité d’un mariage), à l’avortement, à toute forme de procréation médicale
assistée, a fortiori au bénéfice d’un couple homosexuel, et à la gestation pour autrui. Elle
demeure attentive aux travaux en cours sur la fin de vie, privilégiant l’accompagnement et les
soins palliatifs et rappelant l’interdiction de mettre fin à la vie.
Ces points de divergences ne sont toutefois pas jugés comme des obstacles rédhibitoires
aux relations avec le Saint-Siège. Au contraire les relations, avec celui-ci sont denses, soit dans
un cadre diplomatique, soit à la faveur d’autres relais catholiques.
11
Préparé sous l’égide des Nations Unies, le Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et
régulières (A/RES/73/195) a été adopté lors d’une conférence intergouvernementale sur la migration à Marrakech,
au Maroc, le 10 décembre 2018.
12
Encyclique « Fratelli tutti » du 3 octobre 2020 sur la fraternité et l'amitié sociale.
13
Discours du Pape François aux membres du corps diplomatique accrédités auprès du Saint-Siège pour
la présentation des vœux pour la nouvelle année du 10 janvier 2022
14
Discours du Président de la République à l’École militaire, le 7 février 2020.
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SAINT-LOUIS
13
1.2.2.2
Les visites bilatérales et de représentants français
La chancellerie contribue à l’organisation des visites du Président de la République
15
,
des membres du Gouvernement
16
et de représentants français
17
auprès du Pape, des membres
de la Curie ou de ses dicastères. Sa charge de travail est liée à leur fréquence
18
.
Formellement invité en France tant par le Président de la République que par la
Conférence des évêques de France, le Pape François a déclaré vouloir se rendre en France en
septembre 2015, mais ce projet a été repoussé en l’absence d’ambassadeur de France auprès du
Saint-Siège. Renouvelant son intention de déplacement en 2016, le Pape a toutefois rappelé
l’usage d’éviter des voyages en période électorale. Son déplacement les 22 et 23 septembre
2023 à Marseille, présenté comme une visite « à Marseille » à l’occasion de la conférence des
évêques et des jeunes de la Méditerranée et non une visite bilatérale « en France », a constitué
sa seconde visite sur le territoire national, après un déplacement à Strasbourg au Conseil de
l’Europe en novembre 2014.
1.2.2.3
Une représentation française dans certaines instances et cérémonies
La chancellerie tient un rôle actif en participant à certaines instances et cérémonies.
15
Le Président de la République française reçoit lors de sa première visite bilatérale, le titre de chanoine
de Saint-Jean-de-Latran. Les présidents Charles de Gaulle, Valéry Giscard d’Estaing, Jacques Chirac, Nicolas
Sarkozy et Emmanuel Macron ont pris possession de ce titre, à la différence de Georges Pompidou, François
Mitterrand et François Hollande. Louis XI reçut le premier le titre de « premier et unique chanoine honoraire de
l’archibasilique du Latran » (cf. rapport sur les Pieux établissements).
16
Telles que la visite du ministre de l’intérieur à l’occasion de la béatification de Charles de Foucauld en
2022, celle du Premier ministre Jean Castex en octobre 2021 et celles du ministre de l’Europe et des affaires
étrangères, Jean-Yves Le Driant (en 2019 et 2020), , Gérald Darmanin (2020), ou celle de l’envoyé spécial du
Président de la République pour la protection de la planète, Nicolas Hulot (en 2014)..
17
L’Assemblée nationale a ainsi constitué un Groupe d’études à vocation internationale sur les relations
avec le Saint-Siège, dont une délégation se rend périodiquement à Rome et publie ensuite un rapport d’information.
La chancellerie est mobilisée par toutes les visites parlementaires, par exemple celle du député Michel Fanget,
chargé par le Premier ministre d’une mission sur les relations diplomatiques entre la France et le Saint-Siège (en
2020). Ce député a alors rencontré différents représentants du Saint-Siège et de la Communauté de Sant’Egidio
afin de mener à bien sa mission qui devait permettre d’envisager des « actions communes entre la France et le
Vatican ».
18
Le Président Hollande a été officiellement reçu en janvier 2014 dans un contexte de tensions entre la
France et le Vatican, liés aux débats sur le mariage pour tous, puis en 2016, lors d'une rencontre privée trois
semaines après l'assassinat du père Hamel et l'attentat de Nice. Ce Président et le Pape se sont revus une dernière
fois le 24 mars 2017, à l'occasion du 60
eme
anniversaire du traité de Rome, lorsque le pape François avait invité
tous les dirigeants des pays de l'Union européenne à le rejoindre en Italie.
Le Président Macron a été reçu par le Pape François à trois reprises depuis son entrée à l’Élysée. En juin
2018, l’attention s’est portée sur les questions mondiales d’intérêt commun, telles que la protection de
l’environnement, les migrations et l’engagement multilatéral en matière de prévention et de résolution des conflits,
et en particulier le désarmement. Un échange de vues a eu lieu sur les diverses situations de conflit, en particulier
au Moyen-Orient et en Afrique, et une réflexion commune s’est engagée sur les perspectives du projet européen.
En novembre 2021, outre les thématiques précitées, ont été évoquées les perspectives de la présidence française
de l’Union Européenne. Le 24 octobre 2022, le Pape a reçu le Président de la République dans un contexte de
tensions internationales liées à la guerre en Ukraine.
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
14
-
Les consistoires et nominations des évêques
Il est de tradition que le Gouvernement français soit représenté aux
consistoires réunis
pour la création des cardinaux lorsqu’un cardinal français est nommé. Le nombre et le rôle des
cardinaux français ou francophones peuvent jouer au moment des conclaves élisant un nouveau
pape.
Le Gouvernement est également consulté pour avis préalablement à la nomination des
évêques de France selon une procédure acceptée par la France
19
.
-
Les évènements cultuels
Les cérémonies de béatification et de canonisation s’inscrivent également dans le cadre
des relations diplomatiques. Il est d’usage qu’un membre du Gouvernement du pays dont la
personne canonisée ou béatifiée est issue et des élus de sa ville ou de sa région d’origine
représentent la France lors des cérémonies qui se tiennent à Rome. Depuis 2013, le Pape
François a reconnu par décret huit personnalités religieuses françaises comme saintes et dix
personnalités françaises comme bienheureuses. En dernier lieu, le 15 mai 2022, le ministre de
l’intérieur et des outre-mer français s’est rendu à Rome pour assister à la canonisation de
Charles de Foucauld. L’organisation de ces cérémonies constitue autant d’opportunités
d’échanges avec le Souverain Pontife et les membres de la Curie.
En outre, l’ambassadeur de France près le Saint-Siège est à la fois co-organisateur et
invité d’honneur des messes solennelles annuelles qui continuent à rassembler de hauts
responsables ecclésiastiques, le corps diplomatique et la communauté française : messe de
Sainte Pétronille, patronne de la France, le 31 mai à la basilique Saint-Pierre de Rome, messe
pour la France à la basilique Saint-Jean de Latran
le 13 décembre, messe de la Saint Louis le
25 août à Saint-Louis des Français et à la basilique de Lorette, …
1.2.3
L’ambassade et les autres relais du dialogue
L’ambassade de France est également une interface avec les autres relais de l’Église.
-
La Conférence des évêques de France
Instance créée en 2002, la Conférence des évêques de France et ses représentants
assure
la coordination de l’Église catholique en France. Elle a un rôle dans la vie nationale, notamment
lorsqu’elle exprime des positions sur des sujets sociétaux ou à résonance politique. La
Conférence des évêques joue également un rôle dans les processus de nomination des évêques
ou des ecclésiastiques impliquant l’intervention du Gouvernement au niveau national.
19
Le Saint-Siège ne consulte pas systématiquement le Gouvernement français pour les collectivités
d’outre-mer. Les diocèses de Strasbourg et de Metz relevant du droit concordataire français, c’est le Président de
la République qui signe le décret de nomination après entente préalable avec le Saint-Siège, puis une bulle
pontificale est enregistrée par le Conseil d’État. L'archidiocèse de Strasbourg et le diocèse de Metz sont placés
directement sous l'autorité du Saint-Siège (et non sous celle d'un primat ou d'un métropolite), L’évêque aux armées
est nommé par le Saint-Siège en accord avec le Gouvernement français, conformément au statut du 11 avril 1988.
Il est agent de l‘État et titulaire d’un grade dans l’armée.
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15
-
Les relations avec les associations catholiques
De même, la chancellerie entretient des relations avec les organisations ou associations
catholiques caritatives les plus importantes dont le siège est à Rome, telles que Caritas
20
,
Sant’Egidio
21
, et l’Ordre de Malte
22
car les évènements qu’elles organisent constituent autant
d’opportunités de développer directement ou indirectement les relations bilatérales.
Le Président de la République est ainsi intervenu lors de son déplacement d’octobre
2022 à la conférence internationale sur la paix organisée par la communauté Sant’Egidio. De
même le Secrétaire d’État du Saint-Siège, à l’occasion de la conférence internationale de Caritas
et du Saint-Siège à l’UNESCO en 2022, a rencontré la Première ministre avec laquelle il a
abordé plusieurs sujets d’intérêt commun dont l’Ukraine, les relations entre la France et le
Saint-Siège, la laïcité et la place de la religion en France.
1.3
Le contexte : une influence française en déclin au Saint-Siège
La Cité du Vatican, créée par les accords du Latran en 1929 entre le Saint-Siège et le
Royaume d’Italie, est une enclave territoriale dans Rome sur laquelle s’exerce la souveraineté
du Pape qui tient entre ses mains les pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire. La Cité du Vatican
ne constitue que le support territorial du Saint-Siège et de sa Curie qui, seuls, concentrent les
actes de gouvernement.
La présence de ressortissants nationaux au sein du gouvernement de l’Église à Rome est
de nature à faciliter le dialogue sur les positions respectives de la France et du Saint-Siège, et
au-delà, à les relayer sur l’ensemble des continents. De tous temps, les grandes nations
chrétiennes européennes ont cherché à occuper une position d’influence auprès du Pape, y
compris à travers leurs ressortissants travaillant auprès du Souverain Pontife.
Tandis que, depuis deux décennies, l’influence des pays asiatiques et africains au sein
de la Curie progresse, celle de la France et plus généralement celle de l’Europe déclinent. Cette
tendance constitue un sujet de préoccupation qui se fonde en partie sur la diminution du nombre
des interlocuteurs français et de la place de la langue française au Vatican.
20
En France, le Secours catholique en constitue l’une des branches, parmi les 164 organisations que
compte cette confédération.
21
La communauté est fondée à Rome en février 1968 par un groupe d'étudiants italiens du lycée Virgilio,
dont Andrea Riccardi. La communauté est d'abord vouée à l'aide aux plus pauvres, et l'alphabétisation. Dès les
années 1980, elle s'engage pour des actions diplomatiques dans des zones de conflits. En 1986, la communauté
internationale de Sant ‘Egidio a été reconnue officiellement comme « Association de fidèles » par l'Église
catholique.
22
L’Ordre de Malte, dont le siège est désormais à Rome, compte plus de 13 000 membres dans le monde,
assistés de 100 000 bénévoles réguliers et 25 000 professionnels. Il et est actif dans l’action humanitaire, sanitaire
et sociale.
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
16
1.3.1
Une présence française moindre dans les postes à responsabilités
L’administration du Saint-Siège, la Curie, a été reconfigurée en dernier lieu dans la
constitution apostolique sur la Curie romaine et son service à l’Église dans le monde
«
Praedicate evangelium
» du 19 mars 2022. Cette organisation comprend, pour les structures
les plus importantes, une Secrétairerie d’État en relation quotidienne avec le Saint-Père (le
Secrétaire d’État est l’équivalent d’un Premier ministre), quinze dicastères (anciennement
dénommés « Congrégations » et équivalents de ministères) qui organisent l’activité du Saint-
Siège selon les priorités du Pape, des organes de justice, des organismes économiques et des
institutions rattachées au Saint-Siège.
La présence française dans ces institutions est aujourd’hui moindre qu’elle ne le fût,
sous l’effet de la crise des vocations en France et la distance accrue entre l’État ou la société
française et le Saint-Siège, conséquence notamment de leurs points de vue divergents. À titre
d’exemple l’Académie pontificale ecclésiastique qui a pour but de former le corps diplomatique
du Saint-Siège n’avait pas accueilli de Français depuis plusieurs années jusqu’en 2018, et peu
de nonces français sont en activité.
-
Une présence réduite aux postes à responsabilité au sein de la Curie
Dans l’organisation de la Curie resserrée par la constitution
Praedicate evangelium,
sur
les 157 postes désormais identifiés, seuls huit sont pourvus par des ressortissants français,
contre 57 par des ressortissants italiens, douze par des Espagnols, six par des Allemands et
quatre par des Britanniques. Les ressortissants français occupent 5 % des postes au sein de la
Curie : un des neuf postes de la Secrétairerie d’État
23
; aucun des trois postes au secrétariat
général du synode des évêques ; cinq au sein des 88 postes dans les 15 dicastères (quatre au
dicastère de la communication qui comprend 25 postes, et un sur les neuf postes du dicastère
de la doctrine de la foi).
La présence française est plus significative dans les organismes judiciaires. Sur les six
postes concernés, deux sont pourvus par des ressortissants nationaux : un au Tribunal Suprême
de la Signature Apostolique (tribunal administratif), et le second au Tribunal de la Rote
Romaine (tribunal canonique). En revanche la présence française est inexistante tant dans les
organismes économiques du Saint-Siège qu’au sein des institutions rattachées à la Curie tels
que définis dans la constitution
Praedicate evangelium
.
Dans l’environnement économique du Saint-Siège, le représentant légal de l’Institut
pour les Œuvres de Religion (IOR), président du Conseil de surintendance, est un ressortissant
laïc français. Cet Institut a pour mission d’«
assurer la garde et l'administration des biens
meubles et immeubles transférés ou confiés à l'Institut par des personnes physiques ou morales
et destinés à des œuvres de religion ou de bienfaisance
». Il assure par ailleurs, à titre exclusif
depuis 2022, la gestion des liquidités et actifs financiers du Saint-Siège
24
.
La présence française est en revanche plus significative et dynamique dans les
académies pontificales sollicitées ponctuellement par le Pape sur des problèmes contemporains.
Par exemple, les précédents administrateurs des Pieux établissements de la France à Rome et à
23
Mgr Guillaume Millot est chargé de la section francophone et assure notamment la traduction en
français des discours du Pape.
24
Rescrit papal publié le 23 août 2022.
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
17
Lorette ont été ou sont actuellement présidents du Comité pontifical des sciences historiques
(jusqu’en 2023) et de l’Institut pontifical de théologie Jean-Paul II pour les sciences du mariage
et de la famille.
-
Les cardinaux de nationalité française en nombre moindre au sein de la Curie et
du collège des cardinaux électeurs
Associés à certains actes de gouvernement dans le cadre du Collège cardinalice,
anciennement dénommé Sacré-Collège, et pour les moins âgés à l’élection du Souverain Pontife
en conclave
25
, les cardinaux peuvent représenter le Pape («
légat
a latere
») lors de célébrations
solennelles ou d’assemblées. Tel a été le cas du Secrétaire d’État du Saint-Siège, qui a pris la
tête de la délégation du Saint-Siège à la COP 26 en novembre 2021 à Glasgow (Ecosse) et a
délivré le message personnel du Pape à la COP 28 en décembre 2023 à Dubaï (Émirats Arabes
Unis).
L’âge avancé de la plupart des cardinaux fait ressortir l’importance des renouvellements
récents et à venir à l’égard des poids respectifs des différentes nationalités au sein du Collège
cardinalice. L’évolution de la composition du Collège cardinalice illustre les priorités
géographiques de la stratégie vaticane et constitue un indice assez fiable de l’influence
respective des États.
Jusqu’en 2014, les cardinaux européens représentaient plus de la moitié du Collège,
mais la nomination en grand nombre de cardinaux ressortissants d’autres continents a modifié
cette configuration jusque-là pérenne. Ainsi, au 30 septembre 2023, date du dernier consistoire
convoqué par le Pape François, celui-ci a porté, à travers neuf consistoires successifs, le nombre
de cardinaux électeurs à 128. La désignation de 90 nouveaux cardinaux a conduit à un
renouvellement de la composition du collège à plus des deux tiers. Les cardinaux européens ne
représentent plus que 39 % du collège en 2023.
Parmi eux, la France compte huit cardinaux dont seuls six cardinaux électeurs, contre
sept en 1978. Ce nombre quasi stable contraste avec les nominations de cardinaux espagnols
dont le nombre a doublé. Les cardinaux italiens demeurent les plus nombreux parmi les
cardinaux européens en dépit de leur diminution, la plus significative, qui a ramené leur nombre
à 14 cardinaux aujourd’hui contre 26 en 1978.
25
Au 8 avril 2024, le Collège cardinalice compte 238 cardinaux, dont 128 cardinaux électeurs (ceux de
moins de 80 ans) et 110 cardinaux non votants, plus âgés. Ils sont associés ponctuellement aux actes de
gouvernement du Saint-Siège aux termes des art. 350 et 353 du code de droit canonique. Ils se réunissent en
consistoires, à la demande du Pape, en associant cardinaux, prélats et représentants civils, selon les sujets à traiter.
Seuls parmi le collège cardinalice, les cardinaux électeurs, réunis en conclave, élisent en leur sein le Souverain
Pontife.
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
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18
Tableau n° 1 :
Évolution du nombre de cardinaux électeurs de 1978 à 2023
Continent
Jean-Paul II
Benoît XVI
François
1978
2005
2013
2024 (*)
Europe, dont :
55
58
61
52
Italie
26
20
28
14
Espagne
4
5
6
8
France
7
5
4
6
Afrique
12
11
11
17
Amérique du Nord
13
17
17
17
Amérique
du
Sud,
centrale
et
Caraïbes
18
18
16
18
Asie
9
12
11
21
Océanie
4
1
1
3
Total
111
117
117
128
(*) Données à jour au 9 avril 2024
Source : Bureau de presse du Saint-Siège et Wikipédia
-
Une attention particulière aux responsables en devenir : l’école des nonces
Les nonces apostoliques sont des agents diplomatiques du Saint-Siège, accrédités
comme ambassadeurs auprès des États ayant établi des relations avec le Saint-Siège. Ce corps
diplomatique agit à travers 106 nonciatures. Les promotions de nonces sont limitées à environ
une quinzaine par an. Leur formation s’effectue pendant deux ans à l’Académie pontificale
ecclésiastique. Cette, institution fondée par Clément XI en 1701 est la plus ancienne école
diplomatique au monde. Ce sont les évêques qui suggèrent aux prêtres ordonnés, âgés de moins
de trente ans, de se former pour devenir nonce.
La désignation des nonces, à l’instar de celle des cardinaux, constitue pour la France un
enjeu d’influence. Or la baisse des vocations sacerdotales en France a une incidence sur le vivier
de candidats français éligibles à ces responsabilités. Seuls trois nonces apostoliques français
exercent actuellement cette responsabilité
26
.
1.3.2
Un déclin de la langue française au sein de la Curie
Si l’italien est la langue officielle du Vatican, et le latin celle du Saint-Siège, le français
reste une des principales langues diplomatiques. Comme le relèvent les ambassadeurs
successifs près le Saint-Siège, de manière tendancielle, le dynamisme de l’action pastorale
26
Mgr Christophe Pierre (États-Unis), Mgr Jean-Marie Speich (Kosovo) et Mgr Nicolas Thévenin
(délégué apostolique auprès de la Ligue arabe).
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
19
étendue à l’ensemble des continents a de fait réduit l’usage du français, bien que celui-ci reste
une langue importante dans le continent africain. Par ailleurs, en réponse aux mesures de
confinement strictes mises en œuvre en Italie et au Vatican pendant la pandémie de COVID-19
à partir de 2020, le Saint-Siège s’est pleinement emparé des outils numériques, accélérant ainsi
une communication à caractère mondial, multi-langues.
Le pontificat actuel est marqué par une accélération de ce processus. Le français est de
moins en moins utilisé notamment par la salle de presse du Vatican, le Pape François étant le
premier Souverain Pontife à ne pas s’exprimer en français devant le corps diplomatique.
L’ambassade mobilise l’Institut français Centre Saint-Louis (IFCSL) dont elle dispose
pour promouvoir la langue et la culture françaises (cf. infra). Les formations linguistiques
dispensées par l’Institut en sont l’un des principaux vecteurs, notamment auprès de la
diplomatie vaticane. Pour ce faire, des cours sont offerts à des prélats en fonction à la Curie et
des bourses à des étudiants des universités pontificales. Mais cet effort – qui a été notamment
inspiré par le dynamisme de l’Institut Cervantès, agence du rayonnement culturel de l’Espagne
dans le monde - demeure limité (moins de 100 000 €/an
27
), notamment en raison de contraintes
budgétaires et, également, des réticences exprimées jusque récemment par les Pieux
établissements à en assumer une partie de la charge. Les bourses et les cours de l’IFCSL
constitueraient cependant un levier efficace, et même déterminant, du renforcement de
l’influence française dans la Rome pontificale (cf. infra).
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ______________________
L’ambassade de France près du Saint Siège exerce la plupart des missions
classiquement dévolues aux ambassades, mais dispose en outre d’attributions atypiques en
raison des spécificités de son interlocuteur diplomatique, le Saint-Siège qui, en raison de sa
double identité politique et religieuse, lui confère une autorité et une influence uniques dans le
monde. Elle entretient de manière constante et étroite des relations avec le Saint-Siège dans un
contexte caractérisé par un déclin de l’influence de la France et de la pratique de la langue
française dans la Rome pontificale. L’ambassade dispose de l’Institut français Centre Saint-
Louis (IFCSL) pour promouvoir la culture française et endiguer cette tendance
.
27
Financements issus de l’ambassade, de l’IFCSL et des Pieux établissements
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
20
2
L’ORGANISATION ET LE FONCTIONNEMENT DE
L’AMBASSADE
Si les missions de l’ambassade de France près le Saint Siège traduisent la spécificité de
son interlocuteur, son organisation et son fonctionnement ne diffèrent pas de ceux des autres
postes, notamment en ce qu’ils séparent les fonctions diplomatiques dites « métier », des
fonctions de gestion dites « support ». Le particularisme ne vient que de sa taille restreinte .
2.1
Une ambassade aux effectifs restreints
L’ambassade de France près le Saint Siège est une structure de taille modeste aux
effectifs limités. L’équipe diplomatique parait d’autant plus réduite au regard des enjeux que
les taux de rotation et les vacances de postes limitent son temps de travail utile.
2.1.1
Des effectifs limités, des règles de gestion diversifiées
Sur l’ensemble de la période sous revue, tant les effectifs que leur répartition entre la
chancellerie et les autres services sont stables.
2.1.1.1
Une organisation resserrée
-
La chancellerie
La chancellerie comprend en 2023 huit agents, dont trois agents de statut diplomatique :
l’ambassadrice, un ministre-conseiller qui assume les fonctions de chargé d’affaires en cas de
vacance du poste d’ambassadeur et un conseiller ecclésiastique sous contrat de catégorie A ou
assimilé. Ce dernier assure les relations entre l’ambassade et l’Église de France et gère
notamment les contacts avec les nombreux ecclésiastiques venant à Rome.
L’équipe de la chancellerie emploie une secrétaire chef de poste (titulaire de catégorie
C), trois assistants (agents de droit local - ADL) et un agent affecté au centre d’archives et de
documentation (titulaire de catégorie C)..
-
Les autres services
L’ambassade emploie un conseiller de coopération et d’action culturelle (COCAC)
directeur de l’Institut français Centre Saint-Louis, assisté d’une secrétaire générale et de trois
chargés de mission (deux pour les missions pédagogiques et un pour la communication). Ces
postes sont financés sur le programme 185 « Diplomatie culturelle et d'influence ». En revanche
la dotation de la chancellerie au titre du programme 185 exclut les dépenses de rémunération.
Les effectifs de l’ambassade comprennent également une attachée de presse (ADL) et
cinq personnels de soutien (ADL) : un conducteur, un agent de sécurité et d’accueil et trois
agents d’accueil. Pour l'entretien de l'ensemble du site, le poste dispose de deux techniciens et
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
21
de l'apport de deux jardiniers (dont une partie en contrat externe). L’effectif spécifiquement
attaché à la résidence est de quatre agents (deux cuisiniers, un maître d’hôtel, ADL) placés sous
l'autorité de l'intendant (contractuel)
Les agents de ces services sont rémunérés sur les crédits de deux programmes : le
programme 105 « Action de la France en Europe et dans le monde » et le programme 185
précité
28
, selon la répartition suivante :
Tableau n° 2 :
Répartition 2022 des agents par programme
Catégorie
P 105
P 185
Total
Titulaires ou CDI réseau
4
1
5
Contractuels
2
1
3
Agents de droit local
17
0
17
Volontaires internationaux
3
3
Total
23
5
28
Source : secrétariat général commun d’ambassades à Rome
2.1.1.2
Les catégories de personnels employés par l’ambassade et leur
rémunération
Au 31 décembre 2022, l’ambassade employait 28 agents (27,5 ETP). Elle comprend
cinq fonctionnaires sous contrat (deux agents de catégorie A, un agent de catégorie B, deux
agents de catégorie C), ainsi que trois contractuels
29
(deux de catégorie A et un autre de
catégorie C), trois volontaires internationaux et 17 agents de droit local recrutés par l’ambassade
(ADL).
Le périmètre « employeur » de l’ambassade au regard des organismes italiens chargés
de recouvrer les cotisations sociales
30
, est néanmoins plus vaste, puisqu’il s’étend à l’ensemble
des agents relevant du droit du travail italien et employés dans des administrations placées sous
sa responsabilité, à savoir ceux de l’Institut français Centre Saint-Louis (28 agents) et ceux des
Pieux établissements (23 agents).
Les agents de droit local, pour l’essentiel de nationalité italienne, sont les plus
nombreux
31
. À l’exception d’un agent titulaire au centre d’archives et de documentation, ils
sont affectés aux fonctions support (agents d’accueil, agents de sécurité, chauffeur, auxiliaire
de presse, cuisinier …). Leur contrat à durée déterminée ou indéterminée est régi par le droit
28
Cf. infra la définition de ces deux programmes (2.4).
29
Le conseiller de coopération et d’action culturelle, directeur de l’institut français Centre Saint-Louis
(A) et l’intendant (C).
30
Institut national d’assurance contre les accidents du travail et Institut national de protection sociale.
31
12 agents sont de nationalité italienne, deux sont de nationalité française, deux sont binationaux, le
dernier est d’une nationalité tierce (non connue)
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
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22
italien. La gestion administrative de ces personnels est assurée par le secrétariat général
commun des ambassades à Rome.
Leur rémunération est fixée par un cadre salarial applicable depuis le 1
er
janvier 2017 et
adopté au niveau local par le comité technique de proximité à l’étranger
32
, décliné en catégories
d’emplois. Ce cadre prévoit une augmentation annuelle des rémunérations de 0,8 % au titre de
l’ancienneté, une revalorisation automatique au titre du coût de la vie ainsi qu’une rémunération
complémentaire attribuée au mérite. Le droit italien comporte également des spécificités. Les
agents reçoivent le versement d’un treizième mois et peuvent bénéficier de mesures
individuelles ponctuelles telles que les possibilités de reclassement dans une catégorie d’emploi
supérieure. En outre l’employeur est tenu au versement d’une prime de fin de contrat
(« traitement de fin de rapport » (TFR))
33
dans les 30 jours de la rupture du lien contractuel.
Son versement explique les augmentations de la masse salariale des agents de droit local en
2019 et 2021.
Tableau n° 3 :
Évolution de la masse salariale 2015-2022 des ADL en euros (P105)
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
2022
Total
588758
615 566
617 854
615 726
740 566
646 016
692 212
673 060
Variation
+4,6%
+0,4%
-0,3%
+20,3%
-12,8%
+7,2%
-2,7%
Source : secrétariat général commun d’ambassades à Rome
Depuis l’entrée en vigueur le 1
er
janvier 2012 de la réforme italienne des retraites, le
droit italien a supprimé l’âge légal de départ. En 2016, les agents de droit local de plus de 67
ans représentaient plus d’un tiers des effectifs. À la suite du départ de trois d’entre eux, ils
n’étaient plus que deux, âgés respectivement de 71 et 72 ans en 2022. Mécaniquement, sur la
période, leur âge moyen a diminué, les agents recrutés pour les remplacer étant un peu plus
jeunes. De 57 ans en 2016, cet âge moyen
est six ans plus tard de 53 ans, mais c’est l’ancienneté
qui marque l’inflexion la plus significative : de 23 ans en 2016, elle n’est plus que de 15 ans en
2023.
32
Décret n° 2014-1000 du 3 septembre 2014 relatif aux comités techniques de proximité dans les services
de l'État à l'étranger, articles 2 et 7.
Ce décret précité a été abrogé par le décret n° 2022-874 du 9 juin 2022 qui a
substitué aux comités techniques de proximité des comités sociaux d'administration de proximité dans les services
de l'État à l'étranger, institués auprès de chaque mission diplomatique ou représentation permanente auprès d’une
organisation internationale.
33
Cette prime est précomptée mensuellement sur la rémunération brute salariale et retenue par
l’employeur. Elle est conservée par l’employeur jusqu’à la fin du contrat de travail ou sa rupture, et ce quel qu’en
soit le motif, puis versée dans les 30 jours suivant la fin du contrat. Les montants versés correspondent à la
capitalisation des précomptes annuellement réévalués selon un taux fixe de 1,5% et de 75% de l'augmentation de
l'indice des prix. Au moment de la liquidation, le TFR est soumis à l’impôt sur le revenu et cotisations sociales.
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
23
2.1.2
Une équipe diplomatique réduite au regard des enjeux
La taille de l’ambassade est réduite puisqu’elle ne comprend que deux diplomates de
carrière, le conseiller pour les affaires religieuses étant un ecclésiastique. Ceci conduit à ce que
se succèdent des périodes de vacances parfois importantes, pendant lesquelles soit le ministre-
conseiller, soit l’ambassadeur, se retrouve seul à porter de front toutes les responsabilités et les
activités de cette ambassade.
Pour l’exercice des missions politiques, les ambassadeurs successifs ont tous sollicité le
rétablissement d’un poste de conseiller politique chargé de l’activité internationale du Saint-
Siège, poste supprimé en 2006 au départ de son titulaire. Ils ont souligné que les chancelleries
d’ambassade de taille comparable demeuraient dotées, outre l’ambassadeur, de trois cadres A.
Ils relèvent par ailleurs que l’ambassade de France près le Saint-Siège est tenue à des activités
de représentation importantes et de participation à des nombreux événements (cérémonies,
colloques, ateliers, rencontres universitaires).
Le renforcement de ces effectifs apparait aux ambassadeurs d’autant plus nécessaire que
le ministre-conseiller assume également la responsabilité de président de la députation
administrative des Pieux établissements, ce qui, selon les équipes qui se sont succédé, occupe
en moyenne le tiers de leur activité. Tous les rapports de fin de mission des ambassadeurs et
des chargés d’affaires se sont faits l’écho, depuis une vingtaine d’années, de l’importance de
cette charge et des enjeux qui s’y attachent.
Les constats dressés par la Cour des comptes lors de son contrôle de la gestion des Pieux
établissement l’ont confirmé. Ils ont mis en évidence de graves dérives de gestion et démontré
que les effectifs de diplomates étaient insuffisants pour à la fois assurer l’activité diplomatique
et piloter efficacement les Pieux établissements placés sous l’autorité de l’ambassadeur. Cette
charge nécessite en outre des ressources particulièrement compétentes dans les domaines
administratifs et financiers et dans un cadre juridique franco-italien, compétences dont
l’ambassade ne dispose plus depuis 2009, l’acculturation à la gestion étant désormais surtout
située au secrétariat général commun des ambassades de France en Italie (cf. infra).
Le ministère soutient que le format de cette ambassade n'est pas particulièrement réduit
à l'échelle du réseau, d'autant qu'elle n'exerce pas de missions consulaires et s'appuie sur un
secrétariat général mutualisé avec l'ambassade de France en Italie. Cependant, à la faveur d’un
rehaussement du plafond d'emplois du ministère, un poste supplémentaire a été programmé en
2024. La nature de ce poste n’est pas encore définie mais le rapport de la Cour relatif aux Pieux
établissements de France à Rome et à Lorette appelle à une nécessaire remise en ordre de leur
gestion et à un pilotage et un suivi effectifs et étroits. Ceci suppose qu’un effort soit consenti
pour renforcer l’ambassade, au moins jusqu’au redressement des errements constatés par la
Cour et à la mise en place d’une organisation plus rigoureuse.
2.2
Les instructions données aux ambassadeurs et le suivi de leur mise en
œuvre
L‘ambassadeur reçoit ses instructions de la direction de l’Union européenne (sous-
direction de l’Europe méditerranéenne) du ministère des affaires étrangères ; elle est également
en lien avec le conseiller pour les affaires religieuses placé auprès du ministre. Les étapes qui
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
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24
jalonnent le mandat des ambassadeurs prévoient à ce stade trois rendez-vous : l’élaboration des
instructions, celle du plan d'action, et le rapport de fin de mission, auxquelles s'ajoutent des
inspections systématiques des primo-partants.
Pendant la période sous revue, ce cycle a été très diversement mis en œuvre s’agissant
de l’ambassade près le Saint-Siège.
2.2.1
Des instructions suivies d’un plan d’actions
Dès l’annonce du départ d’un ambassadeur en poste, la direction de l’Union européenne
prépare un dossier d’information et d’instruction pour son successeur, utilisé pour déterminer
les priorités d’actions qui seront retenues dans le plan. Cette procédure devrait, selon le
ministère, évoluer en vue d’une plus grande efficacité.
2.2.1.1
L’élaboration des instructions
À la cessation de fonctions d’un ambassadeur, la direction de l’Union européenne
recueille leurs observations et orientations auprès des autres directions du ministère ainsi que
des autres ministères éventuellement concernés, en l’espèce de la culture, de l’enseignement
supérieur et de la recherche. Ces derniers fournissent des fiches descriptives et problématiques
des enjeux de la relation avec le Saint-Siège dans leur domaine de compétence, enjeux dont
l’ambassade est
in fine
porteuse auprès du Vatican. Les ambassadeurs nouvellement nommés
disposent ainsi des éléments d’information nécessaires à la prise du poste.
Jusqu’en 2019, ces fiches étaient examinées dans une réunion interministérielle
d’instructions, en présence de l’ambassadeur nommé. Entre 2019 et 2023, pour le poste auprès
du Saint-Siège ces réunions ont été supprimées, le constat ayant été fait qu’elles se tenaient à
un niveau hiérarchique insuffisamment élevé et apportaient peu par rapport à la lecture des
notes transmises par les administrations concernées. Toutefois, pour les ambassades aux enjeux
plus stratégiques, ces réunions ont été maintenues au niveau du secrétaire général et des
directeurs intéressés.
La fréquence des changements des ambassadeurs en poste près le Saint-Siège a
cependant rendu difficile la mise en œuvre dans la continuité des priorités des ministères
concernés. En dix ans, quatre ambassadeurs se sont ainsi succédé. En outre, les nominations
sont intervenues après des vacances de poste particulièrement longues : les intérims ont ainsi
duré 15 mois entre mars 2015 et mai 2016, neuf mois de juillet 2018 à avril 2019 et cinq mois
en 2022. Ce constat, mis en regard de la stabilité des interlocuteurs de la Curie, a pu fragiliser
la continuité de l’action tant dans le domaine diplomatique que dans celui de la gestion du poste.
2.2.1.2
Les plans d’actions
Au terme de quatre à six mois à compter de sa nomination, l’ambassadeur en fonction
élabore et transmet au ministère un plan d’actions dans lequel il doit fixer un cadre stratégique,
des priorités d’action. Ce plan fait l’objet d’un échange avec les différentes directions,
coordonnées par la direction générale des affaires politiques et de sécurité. Pendant la période
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
25
examinée par la Cour, les plans d’action proposés par les ambassadeurs en poste près le Saint-
Siège ont été retenus sans modification par le secrétariat général. Ils ont ensuite été approuvés
par le ministre .
Trois grandes priorités d’action émergent des plans successifs. Elles portent sur les
relations bilatérales, l’influence de la France et la francophonie, et s’inscrivent dans une certaine
continuité, le dernier plan d’action étant toutefois plus diversifié. En dépit de cette continuité,
les plans d’actions ne sont pas homogènes d’un ambassadeur à l’autre, ce qui traduit,
notamment, l’évolution des sujets qui dominent l’actualité.
En 2016, les actions prioritaires retenues n’étaient guère éloignées des missions
classiquement dévolues aux ambassades (échanges de vue, portage des valeurs de la République
et promotion de la culture française). En revanche, entre 2016 et 2019, leur nombre a plus que
doublé, et a continué à augmenter en 2022. Cette tendance témoigne d’une volonté d’action en
amont de plus en plus précise et reflète l’évolution des préoccupations stratégiques. Non
seulement leur champ s’étend, mais encore leur spécialisation s’accroit.
Les actions ne sont pas toujours déclinées par axe stratégique, induisant leur
multiplication alors même que des synergies entre elles sont possibles. Il en est par exemple
ainsi pour le renforcement de l’influence française, sous-jacente à de nombreuses actions.
L’Institut français Centre Saint-Louis en constitue l’une des pièces maîtresses. Or d’autres
actions portées par des thématiques distinctes pourraient s’inscrire dans ce même axe. Par
exemple, les actions relatives à la communication et l’image de la France, pratiques et
concrètes, ainsi que celle relative à l’administration des Pieux établissements limitée au suivi
attentif du « travail des nouveaux trésorier et administrateur », ne s’articule pas avec le
renforcement de l’influence française, alors qu’elles devraient constituer des leviers au service
de cet axe stratégique.
Le processus d’élaboration des plans d’action est lent, ce qui conduit à leur notification
tardive alors que l’ambassadeur en poste a déjà largement entamé son mandat. Le dernier,
élaboré pendant le contrôle de la Cour, a ainsi été approuvé près d’un an après la prise de
fonction de son titulaire. Le ministère indique vouloir faire évoluer le processus en place, en
accélérant l’élaboration des plans d’action.
En définitive, en dépit de sa lourdeur, l’exercice de cadrage mis en œuvre par le
ministère apparaît pragmatique. Il a le mérite de mobiliser l’ensemble des acteurs ministériels
pertinents et les directions du ministère pour apporter au nouvel ambassadeur une vision
complète de l’état des relations avec le Saint-Siège, des enjeux et des objectifs de la France
qu’il aura à défendre. S’il permet de déterminer des objectifs prioritaires avec le ministère et
d’actualiser les éléments d’information disponibles sur chacun d’entre eux, il importe
cependant que les objectifs soient priorisés et illustrés d’actions concrètes, elles-mêmes
adossées à des indicateurs de résultats. Il importe également qu’il s’accompagne d’un suivi et
d’une évaluation des actions entreprises.
2.2.2
Le suivi, le bilan et l’évaluation des plans d’actions
Le suivi des plans d’actions est à ce jour très inégal et peu documenté. Pendant son
déroulement, le plan d’actions fait l’objet d’un suivi informel par la direction générale des
affaires politiques au gré des échanges périodiques et, le cas échéant, d’un point d’étape. Le
ministère indique vouloir introduire un suivi du plan d’actions à 12-18 mois de la prise de
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
26
fonctions. Une telle évolution serait utile à condition que le dialogue soit l’occasion d’un
véritable bilan.
Or, la réconciliation entre les relevés d’instruction, les plans d’action et leurs bilans se
révèle souvent peu aisée en raison de leur caractère littéraire. Excepté le plan d’actions le plus
récent élaboré pendant le contrôle de la Cour et que l’ambassadrice en fonctions a assorti
d’indicateurs concrets, les plans d’action n’étaient jusqu’à présent accompagnés d’aucun
indicateur. Cette démarche positive gagnerait à être systématisée et surtout déboucher sur une
évaluation de sa réalisation.
Jusqu’à présent, cette évaluation n’a reposé que sur le rapport de fin de mission que
fournit chaque ambassadeur à sa cessation de fonction,. Ce rapport, plus ou moins étoffé, ne
constitue toutefois pas un bilan permettant de rapprocher les actions initialement définies et les
résultats obtenus. La courte durée des mandats des ambassadeurs auprès du Saint-Siège (deux
à trois ans) se prête peu à un exercice d’évaluation d’autant que l’approbation du plan d’actions
par le ministre intervient tardivement. À titre d’exemple, le mandat de l’ambassadeur en
exercice en 2016 avait une durée résiduelle de 17 mois quand il a reçu la lettre du ministre
fixant son plan d’actions.
Tableau n° 4 :
Les étapes d’un mandat d’ambassadeur entre 2016 et 2018
Décret de nomination de l’ambassadeur
12 mai 2016
Prise de fonction de l’ambassadeur (Rome)
1
er
juin 2016
Remise des lettres de créance au Pape François (Rome)
23 juin 2016
Réunion d’instructions (Paris)
1
er
juillet 2016
Réunion d’examen du projet de plan d’action (Paris)
11 janvier 2017
Lettre du ministre des affaires étrangères et du
développement
International approuvant le plan d’action
13 février 2017
Cessation des fonctions de l’ambassadeur
3 juillet 2018
Évaluation du plan d’actions
9 juillet 2018
Source : MEAE
Pendant la période sous revue, seul un rapport de fin de mission mentionne des données
telles que le nombre de visites auprès du Saint-Siège de personnalités représentant l’État
français ou membres de ses institutions, ainsi que la liste et le nombre de notes d’analyse
élaborées durant sa mission. Cette initiative est pertinente, car elle permet d’objectiver la charge
de l’ambassade.
Enfin, la capitalisation des informations recueillies et des actions entreprises revêt, dans
un contexte caractérisé par la forte mobilité des personnels de la chancellerie, un enjeu de
continuité de l’action administrative. Or les dispositifs d’archivage sont insuffisamment
robustes et les outils de pilotage, tels que des tableaux de bord ou systèmes d’information dédiés
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
27
à l’activité de l’ambassade, absents. Ces lacunes créent un risque avéré de perte d’informations
d’autant plus préjudiciable que l’ambassade est de petite taille.
L’évaluation des bilans des ambassadeurs successifs, qui devrait notamment comporter
une appréciation sur leurs rapports de fin de mission, devrait être systématique et pourrait
impliquer la présence d’un évaluateur indépendant, comme l’inspection générale du ministère,
ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. Même si elle est d’une portée limitée pour certains
ambassadeurs, nommés à ce poste prestigieux en fin de carrière, l’évaluation est indispensable
pour réorienter les stratégies et apporter un éclairage indispensable à leurs successeurs.
En s’appuyant sur le renforcement programmé de ses effectifs, le ministère prévoit de
faire évoluer à partir de 2024 les dispositifs en place pour l’ensemble des ambassadeurs, ce qui
bénéficiera notamment au poste du Saint-Siège. Il prévoit notamment,
« d’accélérer la
préparation des plans d’action », « d’intégrer un suivi du plan d’action à 12-18 mois de la
prise de fonctions », « d’organiser une réunion de présentation du rapport de fin de mission »
et « d’améliorer la continuité de service en renforçant les passations
». Ces progrès, s’ils sont
obtenus, sont de nature à améliorer significativement l’efficacité de l’action diplomatique du
poste, mais aussi de sa gestion. Dans le cas particulier de l’ambassade près le Saint-Siège, le
ministère s’engage à «
accompagner de façon très attentive la prise de fonctions du futur
successeur de l’actuelle ambassadrice
», ce qui traduit en creux sa conscience des faiblesses
relevées jusqu’à présent par la Cour.
2.3
Des fonctions administratives et financières mutualisées
La réforme des réseaux de l’État à l’étranger s’est traduite en 2011 par la mise en place
d’une mutualisation des emplois et crédits de soutien aux ambassades. En 2017, cette
mutualisation a été élargie aux autres réseaux de l’État à l’étranger
34
et, conformément aux
recommandations de 2015 de la Cour
35
, la trésorerie de France à Rome a été supprimée
36
.
La gestion budgétaire et comptable de l’ambassade de France près le Saint-Siège est
ainsi assurée par un secrétariat général commun d’ambassades. Dénommé « service commun
de gestion (SCG) », son appellation a été transformée en 2019 en « secrétariat général
d’ambassade » (SGA) et son champ d’intervention a été étendu à cette occasion.
34
Avant cette réforme, chaque ministère ou service extérieur disposait d’emplois et de ressources relevant
de son propre programme budgétaire pour ses fonctions support. Plus de huit ministères et près de quarante
programmes budgétaires finançaient leurs fonctions. Sa mise en œuvre a prévu le transfert au MEAE des emplois
et crédits issus des autres départements ministériels. En outre, le MEAE est désormais le seul affectataire du
patrimoine immobilier de l’État à l’étranger.
35
Rapport public annuel de 2015 « Les trésoreries auprès des ambassades de France : une survivance
injustifiée », tome 1, volume n°2
36
Suppression au 31 mai 2017
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
28
2.3.1
Le secrétariat général commun d’ambassades
En Italie, le SGA est compétent à la fois pour l’ambassade bilatérale, l’ambassade près
le Saint-Siège et la représentation permanente auprès de l’Organisation des Nations-Unies pour
l’alimentation et l’agriculture (OAA). Placé sous l’autorité directe des trois ambassadeurs, il est
désormais responsable du service unique interministériel de gestion des moyens de support sur
les plans administratif et financier.
Les secrétariats généraux commun d’ambassades
Une circulaire du 18 juillet 2005 a mis en place au sein du ministère des affaires étrangères des
services administratifs et financiers uniques à l’étranger unifiés (SAFU) chargés de l’ensemble des
fonctions de gestion des services du ministère au sein des ambassades. Leur compétence a été ensuite
étendue en 2011 aux fonctions de gestion de l’ensemble des services relevant de l’ambassadeur, quel
que soit leur ministère de rattachement, donnant ainsi naissance aux services administratifs et financiers
unifiés à vocation interministérielle (SAFUI).
Dans le cadre de la RGPP, il a été décidé d’acter le principe d’une généralisation des services
communs à l’étranger avec la mise en place de services communs de gestion (SCG). Une circulaire
interministérielle a été signée en ce sens le 30 décembre 2010. Ces transferts sont devenus effectifs en
2011. Les SCG, sous l’autorité de l’ambassadeur, exercent les fonctions de support administratif et
financier.
La gestion budgétaire de l’ambassade près le Saint-Siège est régie depuis 2009 par une
convention de délégation de gestion avec l’ambassade de France en Italie.
2.3.2
Un périmètre mutualisé étendu
Les services du secrétariat général couvrent, sous la responsabilité du chef de poste :
-
les processus d’élaboration, d’exécution et de suivi du budget ;
-
les processus comptables ;
-
la gestion des ressources humaines (gestion des agents expatriés et de droit local
des ambassades au sens strict, rémunérations en lien avec le centre de services
des ressources humaines du ministère dont il est le correspondant, logements de
fonction et valorisation) ;
-
les procédures de passation, de suivi et d’exécution des marchés ;
-
la gestion du parc automobile ;
-
la gestion immobilière et mobilière.
En revanche, il n’est pas compétent pour gérer les frais de représentation et de protocole.
Ces frais relèvent de la compétence exclusive des chefs de poste qui disposent chacun d’un
compte dédié.
La direction spécialisée des finances publiques pour l’étranger (DSFiPE) est le
comptable assignataire unique des dépenses et recettes du ministère des affaires étrangères et,
à l’étranger, de l’ensemble des dépenses et recettes civiles de l’État pour l’ensemble des
ministères. C’est elle qui prend en charge les opérations comptables générées par la gestion de
l’ambassade.
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
29
En 2022, le ministère a déployé dans le réseau de secrétariats généraux une application
partagée avec la DSFiPE sur certains modules (régie, habilitations, carte achat, gestion).
Désormais les gestionnaires assurent la comptabilité du poste (réception des factures,
numérisation des pièces justificatives) dans CROCUS, système d’information qui se substitue
aux applications CORREGE utilisée pour la gestion relevant du programme 105 et PRISME
pour celle du programme 185. Les écritures impactent directement la comptabilité de l’État, via
des interfaces entre les systèmes.
Si la dématérialisation de l’information financière a permis de réduire le coût des
transmissions antérieurement assurées par la valise diplomatique, elle rend aujourd’hui plus
complexe la revue analytique de l’exécution budgétaire des exercices antérieurs. Pour assurer
le paiement des menues dépenses, et consécutivement à la suppression de la trésorerie à Rome,
une régie a été mise en place au secrétariat général et des sous-régies au sein des ambassades.
Ainsi l’intendant de l’ambassade de France près le Saint-Siège dispose d’un mandat du
régisseur du secrétariat général pour un montant de dépenses annuelles n’excédant pas
15 000 €, assorti d’une obligation de compte-rendu mensuel.
2.3.3
Une collaboration efficace
Les modalités de gestion en place associent étroitement les chefs de poste non seulement
au processus budgétaire, mais encore aux aspects « techniques » de la gestion. Ils bénéficient
d’une expertise locale dans le domaine de la sécurité et en matière immobilière avec le soutien
du service des travaux et bâtiments en Italie (STBI) placé auprès de l’ambassade bilatérale, qui
est compétent pour le patrimoine immobilier de la France en Italie (cf. rapport sur les Pieux
établissements).
Graphique n° 2 :
Coordination chef de poste et secrétariat général
Source : Cour des comptes à partir d’un document de présentation du secrétariat général commun
d’ambassades à Rome
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
30
Dans le domaine de la dépense, la programmation et le suivi de la consommation des
crédits comprennent trois étapes principales :
-
en septembre, l’ambassadeur adresse une note de présentation de ses propositions
budgétaires pour l’année suivante, qui donnent lieu en octobre et novembre à un
dialogue, au niveau central du ministère, avec la direction financière de la direction
générale de l’administration et de la modernisation;
-
en janvier, un comité de gestion notifie les crédits effectivement alloués ;
-
courant juin un point de gestion intermédiaire permet d’examiner la consommation des
crédits, ouvrant la voie à des ajustements éventuels par l’octroi de dotations
complémentaires par l’administration centrale. En effet, la réglementation italienne
conjuguée à l’évolution des prix et aux impondérables liés au fonctionnement de
l’administration locale en cours de gestion peuvent avoir une incidence budgétaire sur
la programmation initiale.
La souplesse de gestion sera localement renforcée en 2024. Le secrétariat général à
Rome est en effet l’un des neuf postes pilotes retenus pour expérimenter une déconcentration
du dialogue de gestion portant sur un périmètre limité de dépenses de fonctionnement (en sont
par exemple exclus les crédits liés à la sécurité et les frais de représentation). En effet, jusqu’à
présent, le poste était tenu de demander l’autorisation de l’administration centrale pour
l’engagement de certaines dépenses
37
ou pour procéder à la fongibilité de crédits entre différents
domaines fonctionnels. À compter de 2024, la direction des affaires financières du ministère
déléguera en début d’année un budget de fonctionnement équivalent aux dotations initiales de
2023 et n’interviendra plus dans la gestion du poste. La charge administrative liée aux échanges
avec l’administration centrale devrait donc être réduite, dans un contexte d’extension du
périmètre de gestion des SGA.
Le processus budgétaire ainsi expérimenté devrait avoir néanmoins pour contrepartie
une responsabilisation accrue des chefs de poste et du secrétaire général, car les crédits alloués
sur le périmètre de dépenses le seront en début d’année pour la totalité de l’exercice, sans qu’il
soit possible en principe de les abonder en cours d’année. Cette responsabilisation doit conduire
le secrétaire général à développer davantage les dispositifs de maîtrise des risques en place.
37
Exemple extrait du compte-rendu du comité de gestion de l’ambassade de France auprès du Saint-Siège du
25
janvier 2023 :
« Le poste remercie le Département pour l’accord de principe concernant la chambre froide et tient
à lui rappeler que la résidence ne dispose, à l’heure actuelle, que d’un frigidaire. Il veillera à transmettre un devis
actualisé avant le dialogue de mi-gestion ».
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
31
2.4
Un budget de fonctionnement en progression dans un contexte
économique et réglementaire contraignant
2.4.1
Des financements en progression
Dans un contexte budgétairement contraint, l’ambassade est financée via les deux
programmes précités de la mission « Action extérieure de l’État ». Les dotations budgétaires à
la disposition de l’ambassade n’intègrent pas les dépenses de personnel rémunérés par
l’administration centrale et pas davantage les investissements immobiliers qu’elle supporte
également. Les crédits votés de ces deux programmes sont équivalents en autorisation
d’engagement et crédits de paiement. Les programmes sont les suivants :
-
« Action de la France en Europe et dans le monde » (P 105) :
Ce programme finance les crédits de fonctionnement et d’investissement. Au niveau
ministériel, ils sont pilotés par les départements de la direction générale de l’administration et
de la modernisation, dont celui des affaires financières, des immeubles et de la logistique (DIL)
et de la sécurité diplomatique (DSD).
-
« Diplomatie culturelle et d’influence » (P 185) :
La dotation de l’ambassade imputée sur ce programme finance la promotion de la langue
française au travers de films, de bourses de stage ou de recherche, à destination des membres
ou personnels de la Curie ou des dicastères ou des étudiants des universités pontificales (cf.
infra) ainsi que d’un prix d’excellence de la recherche universitaire des établissements
universitaires pontificaux (prix Lubac). Ces actions sont mises en œuvre par l’IFCSL. Ce
programme finance également des subventions à l’IFCSL qui fluctuent en fonction de ses
résultats. (cf. infra).
Tableau n° 5 :
Programmation budgétaire 2015-2022 hors Titre 2 en euros
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
2022
P105
- Action de la
France en Europe
et dans le monde
560 557
655 374
592 167
831 735
598 567
626 013
916 449
711 418
P185 - Diplomatie
culturelle
et
d’influence
145 685
132 590
48 203
133 091
126 710
182 350
159 394
355 844
Total
706 242
787 964
640 370
964 826
725 277
808 363
1 075 843
1 067 262
Source : données produites par le secrétariat général commun d’ambassades à Rome
L’ambassade dispose par ailleurs de recettes en numéraire issues de dons et de
ressources en nature qui sont affectées au financement des réceptions de la fête nationale. Les
fonds en numéraire récupérés sont versés au ministère dans le cadre d’un fonds de concours qui
les reverse ensuite à l’ambassade. La part restant éventuellement à la charge du budget de
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
32
l’ambassade pour l’organisation de cette manifestation est financée par la dotation des frais de
réception du chef de poste. Cette réception accueille annuellement entre 450 et 750 personnes,
selon le budget disponible.
Le dispositif mis en place par le ministère il y a une dizaine d’années pour financer la
célébration de la fête nationale est à la fois lourd, peu rentable et consommateur de temps pour
les ambassadeurs, en vue de réunir quelques milliers d’euros ou les contributions en nature
nécessaires à l’organisation de la réception.
Tableau n° 6 :
Fonds de concours attribué à l’ambassade auprès du Saint-Siège au titre de la fête
nationale 2015-2022 en euros
2015
2016
2017
2018
2019
2020*
2021
2022
Recettes en numéraire
3 500
3 500
6 500
19 000
14 500
NA
0
28 500
Nbre de contributeurs
2
2
4
6
5
NA
0
7
Valorisation des contributions
en nature
NC
NC
45 650
24 428
20 264
NA
19 052
15 300
Nbre de donateurs en nature
(Prestations,
denrée,
boissons)
7
8
22
18
18
NA
15
12
Source : données produites par le secrétariat général commun d’ambassades à Rome
(*) Il n’y a pas eu de réception du 14 juillet en 2020 en raison de la pandémie de COVID 19.
Un autre fonds de concours est destiné à recueillir les sommes collectées dans le cadre
d’opérations de valorisation. Des visites guidées payantes des espaces verts de l'ambassade,
plusieurs fois par semaine et en plusieurs langues, et la participation de l'ambassade à des
initiatives de portes-ouvertes en lien avec des institutions italiennes de renom ont été organisées
en 2023. Le montant des fonds ainsi recueillis n’a pas été communiqué.
Le dispositif de fonds de concours est toutefois jugé par l’ambassade peu incitatif à la
collecte de ressources extrabudgétaires. En effet, pour l’organisation de ces visites, il mobilise
des ressources en personnel, et les fonds collectés dans le cadre de locations donneraient lieu à
des reversements pour partie au ministère selon qu'il s'agisse de locations sans autre prestation,
ou de locations impliquant pour l’ambassade des frais annexes (par exemple des frais de
restauration). Le circuit en place pour l’ambassade contraste avec celui de l’IFCSL (voir infra),
qui bénéficie de plus de souplesse grâce à son statut et peut ainsi conserver l’intégralité des
ressources extra-budgétaires qu’il a collectées.
Si, à l’avenir, de telles locations ou prestations devaient se développer, il conviendrait
que leurs tarifs soient fixés à des niveaux suffisamment élevés pour contribuer au financement
de projets tout en maintenant la rareté de ces occasions. L’ambassade pourrait y être incitée.
2.4.2
Une gestion contrainte
L’ambassade près le Saint-Siège, accompagnée par le secrétariat général commun aux
trois ambassades, a mené une stratégie de rationalisation des dépenses courantes.
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
33
2.4.2.1
Des contraintes réglementaires importantes
Alors que les pratiques commerciales italiennes insèrent aux contrats des clauses
d’indexation des prix sur l’inflation, telles que définies par un indice national (indice ISTAT) à
l’instar de l’indice INSEE, les chefs de poste ont pu négocier ces clauses, voire procéder à de
nouveaux appels d’offres pour obtenir de meilleurs prix. Ainsi, la renégociation et la
mutualisation du contrat de téléphonie ont permis une diminution de ce poste de charge.
Globalement contenu entre 1 et 2 % par an jusqu’en 2020, le taux d’inflation s’est établi
en 2022 à 8,1 %, soit son plus haut niveau depuis 1985, ce qui éclaire la progression des
dotations qui tient compte de cette réalité économique. Ainsi, les crédits ouverts pour les
dépenses d’énergie ont été augmenté de 176 % en 2023 pour l’ensemble des implantations
italiennes.
Les ambassades situées à Rome doivent par ailleurs appliquer la réglementation locale
à la gestion de leur patrimoine monumental. Ainsi, l’ensemble immobilier constitué par les
locaux de l’ambassade de France près le Saint-Siège, la Villa Bonaparte, son parc (16 500 m
2
)
ainsi que « la Palazzina » qui désigne les anciens communs de la Villa, relève d’un patrimoine
classé au titre des monuments historiques. Il est de ce fait soumis aux contrôles et
recommandations de la Surintendance italienne pour les biens culturels et de la commune de
Rome. L’ambassade n’est donc pas libre de ses choix pour l’élaboration des cahiers des charges
portant tant sur les investissements que sur l’entretien courant. Il en est notamment ainsi de
l’entretien des espaces verts avec un contrat annuel de 37 800 € en 2022 auquel s’ajoutent des
frais d’entretien hors contrats, tels que l’élagage et le traitement annuel des insectes xylophages.
De manière plus marginale, les ambassades à Rome sont depuis 2015 assujetties aux taxes
d’enlèvement et de traitement des ordures ménagères (12 000 € en 2023), alors qu’elles en
étaient jusqu’à cette date exonérées.
2.4.2.2
Des dépenses qui progressent, une mise en concurrence régulière
La consommation des crédits de fonctionnement relatifs aux dépenses courantes, hors
dépenses de gros entretien, a progressé entre 2015 et 2022 de plus de 50 % sous l’effet des
contraintes précitées et de la poursuite de la sécurisation des locaux entreprise depuis 2016.
L’analyse de l’écart entre le budget initial de l’ambassade et sa consommation effective est
cependant limitée. En effet, l’utilisation de systèmes d’information différents sur la période
(CORREGE puis CROCUS) et des incertitudes sur le périmètre des dépenses exécutées
restituées par ces systèmes, selon qu’elles sont gérées par le secrétariat général ou par
l’administration centrale, entravent les tentatives de consolidation.
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
34
Tableau n° 7 :
Exécution du budget de fonctionnement-(P105) 2015-2023 en euros
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
2022
Var. en
%
2015-
2022
Contrats
86 072
79 130
72 278
77 367
76 121
80 929
86 149
84 244
-2%
Fonctionnement
51 482
67 894
55 874
144 536
71 698
105 616
111 480
112 377
118%
Voyages
et
missions
4 164
4 474
1 857
3 641
4 440
2 846
1 390
2 834
-32%
Télécom
20 437
21 174
17 581
18 563
20 377
18 897
19 757
16 381
-20%
Représentation
61 500
59 585
76 015
72 384
90 980
69 560
67 893
76 659
25%
Énergies
et
fluides
63 890
60 672
63 182
51 360
49 050
55 432
34 670
102 446
60%
Petits travaux
23 797
36 676
35 170
50 033
83 252
107 185
81 084
86 621
264%
Sécurité
71 616
87 147
104 758
105 209
105 207
105 207
105 207
104 768
46%
Total
382 958
416 752
426 715
523 093
501 125
545 672
507 630
586 330
53%
Source : secrétariat général commun d’ambassades à Rome
Sur la période, outre l’impact de l’inflation déjà évoquée, les évolutions sont liées aux
vacances de poste (2017) et à des efforts de rationalisation de la dépense. Les ambassadeurs
successifs, avec l’aide du secrétariat général, se sont inscrits avec continuité dans cette
démarche à travers notamment des mutualisations possibles entre les différents postes établis
en Italie (par exemple : le contrat de la gestion de la paie des ADL ou la location de bennes
pour les déchets). Ainsi la renégociation des contrats de téléphonie et le changement du courtier
en assurance ont permis de substantielles économies. L’ambassade a poursuivi ces efforts en
2022 et s’est engagée dans une procédure de mise en concurrence des prestataires pour
l’entretien de ses locaux dont la charge est lourde compte tenu de la nature historique du bâti.
L’examen des dépenses exécutées n’a pas révélé d’irrégularités. Les dépenses sont
fondées sur des contrats (rédigés pour la plupart en italien), qui comportent pour les prestataires
intervenant dans l’enceinte de l’ambassade une clause de confidentialité dont l’inobservation
entraîne
de facto
la rupture. Les contrats et le suivi des dépenses font l’objet d’une gestion
ordonnée et régulière.
2.5
Un patrimoine immobilier partiellement entretenu ; des financements
extrabudgétaires à trouver
Les investissements immobiliers de l’ambassade sont financés par l’administration
centrale par le programme 105 mais peuvent l’être aussi par le programme 723 « Opérations
immobilières et entretien des bâtiments de l’État », pour lequel chaque ministère dispose d’un
budget opérationnel de programme (BOP). Les crédits alloués sont exprimés en autorisation
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
35
d’engagement et crédits de paiement. Ce programme est alimenté par un compte d’affectation
spéciale issu des produits de cession, des redevances et loyers des propriétés de l’État. Les
montants reçus par l’ambassade à ce titre sur la période sont particulièrement modestes et se
sont taris depuis 2018. Ainsi l’essentiel des travaux d’investissement sont assurés par le
programme 105.
Tableau n° 8 :
Crédits du P 723 destinés aux opérations immobilières de l’ambassade auprès du
Saint-Siège en M€
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
2022
AE
1
0,87
0,73
0
0
0
0
0
CP
0,1
0,19
0,58
0,01
0
0
0
0
Source : données produites par le secrétariat général commun d’ambassades à Rome
La restauration et la maintenance lourde des immeubles affectés à l’ambassade
demeurent un sujet de préoccupation persistant en dépit des financements du programme 105.
2.5.1
Un patrimoine prestigieux, des moyens d’entretien limités
2.5.1.1
La Villa Bonaparte
L’ambassade de France auprès du Saint-Siège est installée depuis juillet 1951 dans la
Villa Bonaparte, également appelée Villa Paolina, construite vers 1750. Le site, d’une
superficie totale de 18 279 m², comprend plusieurs bâtiments et un parc de 16 500 m².
L’ensemble est limité au nord par le Mur d’Aurélien, en bordure du Corso d’Italia, et borde la
« Porta Pia » qui le sépare de l’ambassade du Royaume-Uni. La Villa elle-même est la résidence
de l’ambassadeur de France et inclut les lieux de réception.
La Villa Bonaparte
L’édifice a été construit aux alentours de 1750 pour le cardinal Silvio Valenti Gonzaga,
Secrétaire d’État du pape Benoît XIV. Le cardinal transforma en jardins des vergers et fit élever au
centre le pavillon dont la décoration et l’ameublement devinrent vite célèbres : la collection de papiers
chinois, la table mécanique de la salle à manger et les plantes exotiques du jardin constituaient autant
de curiosités dans la Rome du XVIIIème siècle. Après la chute de l’Empire, une partie de la famille
Bonaparte, la mère de l’empereur Napoléon, le cardinal Fesch, son oncle, et certains de ses frères se
sont installés à Rome sous la protection du pape Pie VII. Une sœur de Napoléon, Pauline, princesse
Borghèse, qui avait suivi l’Empereur déchu à l’île d’Elbe, les a rejoints en 1815 et a acquis la Villa
Valenti. Elle y a entrepris d’importants travaux inscrivant ainsi le style Empire dans l’architecture
romaine du XVIIIème siècle.
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
36
À la mort de Pauline Bonaparte en 1825, la Villa est devenue la propriété de ses neveux puis
descendants jusqu’en 1906, date à laquelle elle a été vendue au gouvernement de l’Empire allemand.
Celui-ci y a installé sa Légation auprès du Saint-Siège en 1908. Entre 1920 et 1944, la Villa Bonaparte
a abrité l’ambassade d’Allemagne. Les biens du IIIème Reich étant confisqués en 1945 par les Alliés,
la France en a fait l’acquisition le 7 avril 1951. La propriété du domaine a été reconnue à la France par
un décret du Président de la République italienne du 20 juillet 1951.
La superficie totale des bâtiments représente 3 560 m² répartie comme suit : la résidence
de l’ambassadeur (1 272 m²), les bureaux (718 m²) et les logements (361 m²) de la chancellerie,
une maisonnette (49 m²) et les anciens communs de la Villa, la Palazzina (1 160 m²).
L’ensemble est une emprise classée au titre des monuments historiques par le ministère italien
des biens et des activités culturelles.
La Villa Bonaparte a fait l’objet de travaux de rénovation importants en 2017 sous la
maîtrise d’ouvrage du service des travaux et bâtiments en Italie (STBI) de l’ambassade de
France en Italie, et la maitrise d’œuvre de M. Repellin, architecte en chef des monuments
historiques à Rome de 1995 à 2015. Le chantier, de près d’1 M€ sur les 3 M€ qui auraient été
nécessaires pour une rénovation complète de la résidence de l’ambassadeur, a porté sur la
réfection des toitures, le ravalement des façades et la restauration des éléments de sculpture,
ornements et décorations
38
.
Le bâti et ses œuvres (notamment des fresques) demeurent sensibles à l’humidité et tant
les façades récemment rénovées que l’intérieur de la Villa se dégradent, ce qui nécessite des
investissements et une vigilance constante. Une enveloppe de 0,26 M€ a été ouverte en 2022
en vue notamment de sécuriser le passage autour de la résidence, les corniches des façades de
la Villa menaçant de tomber. D’autres travaux apparaissent également indispensables, voire
urgents : comme le souligne l’ambassadrice en fonction dans son plan d’action, l’installation
électrique date de l’année d’acquisition de la Villa et nécessite une remise à niveau.
2.5.1.2
Une opération de cession en suspens : la Palazzina
L’essentiel des investissements portés par la direction des immeubles et de la logistique
du ministère a prioritairement concerné les locaux fonctionnels. Ainsi la Palazzina (les anciens
communs de la Villa Bonaparte) n’a pas fait l’objet d’investissements lourds. D’une surface
utile brute de 810 m², il s’agit d’un immeuble d’habitation comportant deux niveaux assortis de
deux box de stationnement, d’un local pour la chaufferie, d’un entrepôt et d’une cour de 345 m².
Il comporte huit appartements de surfaces diverses, dont six appartements occupés par des
agents de droit local qui concourent directement au service de la résidence ou à la sécurité du
site, ainsi que deux studios (28 m² chacun). Cet ensemble immobilier est séparé du jardin de la
Villa par une grille et dispose d’un accès indépendant.
En 2010, un avis de la commission interministérielle chargée d’émettre un avis sur les
biens de l’État à l’étranger (CIME) a rendu un avis positif pour sa cession, avec un prix attendu,
38
D’autres investissements de moindre ampleur ont été réalisés tels que la rénovation des sous-sols
(0,06 M€) et, pour le parc, l’achat d’un mini tracteur, la remise en service d’un puit artésien permettant un arrosage
nocturne en cas de fortes chaleurs.
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
37
à cette date, de 3 M€. Des travaux préparatoires à la vente ont été engagés en 2014, pour un
coût de 45 000 €. Cette même année, il a ensuite été envisagé une cession partielle
39
, induisant
la transformation de l’appartement du ministre-conseiller (235 m
2
)
en trois appartements en vue
de reloger les agents déplacés et d’écarter les risques contentieux. Le schéma directeur
immobilier pour l’Italie présenté en juin 2015 devant la CIME, a ouvert la voie à d’autres pistes
de réflexion : cession ou conservation en densifiant l'immeuble, notamment par l’accueil
d’autres services.
Après des prises de position critiques sur la politique de cession des biens à l’étranger
40
,
la mission conduite sur l’ambassade près le Saint Siège par l’inspection générale des affaires
étrangères en 2020 s’est prononcée pour le maintien de la Palazzina dans le patrimoine de l’État.
Bien qu’en 2021, la séparation cadastrale de la parcelle de la Palazzina du reste de la Villa
Bonaparte ait été acceptée par les autorités italiennes, la Palazzina n’est à ce jour pas inscrite
au plan de cession.
Dans ce contexte et compte tenu des besoins de financement importants pour l’entretien
et la rénovation du patrimoine immobilier et mobilier prestigieux de l’ambassade de France
près le Saint-Siège, son potentiel non seulement symbolique mais aussi économique doit être
valorisé. Il appartient à l’ambassade de mobiliser tous les moyens en sa possession notamment
les opportunités ouvertes par les lois sur le mécénat, pour trouver les ressources supplémentaires
au financement de ses projets les plus importants.
2.5.2
Une recherche active de mécénat à engager
S’agissant d’un patrimoine historique de première importance, qui plus est lié
indirectement à Napoléon, personnage historique suscitant beaucoup de curiosité et d’intérêt
dans le monde, il devrait être possible de rechercher de manière active du mécénat, notamment
auprès des entreprises françaises ayant des filiales en Italie. Alors qu’il est habituel de financer
des projets de restauration de bâtiments historiques appartenant à l’État par mécénat
41
, aucun
des immeubles de l’ambassade ou des Pieux établissements n’en a bénéficié. Ceci a conduit,
dans le cas de la Villa Bonaparte, à différer des travaux nécessaires et, à l’instar des
Pieux
établissements, à utiliser les ressources propres pour financer des travaux au détriment d’autres
actions ou projets.
L’ambassade a recruté une chargée de mission en 2023 en vue de développer le mécénat
et l’a affectée aux Pieux établissements. Cette démarche va dans le bon sens mais pourrait être
39
La surface qu’il était envisagé de conserver était modeste : 100 m2 correspondant au local technique et
garages.
40
La politique de cession avait notamment été critiquée dans le rapport d’information déposé par la
commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale du 13 novembre 2019 relatif à l’audit et au contrôle
des processus de gestion de postes diplomatiques :
Vos rapporteurs estiment que les cessions immobilières ne font
qu’appauvrir l’État et appellent donc à trouver d’autres sources de financement pour rénover nos emprises à
l’étranger. Ces derniers saluent la hausse des crédits budgétaires inscrite dans le budget pour 2020, même si les
moyens restent largement en deçà des besoins d’entretien
»
41
Réduction de 60 % de l’impôt sur les sociétés et contreparties pouvant s’élever à 25 %, en l’occurrence
sous forme de location d’espaces ou d’événements de prestiges à organiser dans les espaces patrimoniaux de
l’ambassade
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
38
amplifiée au regard des enjeux. Le ministère devrait fixer des objectifs quantitatifs en matière
de mécénat à l’ambassade dans son plan d’actions, tout en respectant certaines limites.
A cet égard, le ministère se référant à une doctrine de la mission d’appui au patrimoine
immatériel de l’État (APIE) actualisée en
2019 qu’il n’a pas produite, souligne que les actions
de valorisation, qui sont distinctes du mécénat, doivent «
se faire dans le respect de la nature
diplomatique de ces emprises, qui n’ont pas vocation à devenir des centres de profits au sein
de l’État d’accueil
» et souligne à juste titre que ces opérations «
doivent être compatibles avec
le respect des conditions de sécurité
»,. S’il fait de surcroît valoir qu’il faut demeurer attentif à
la «
simplification des tâches des agents des secrétariats généraux des ambassades et des
résidences
», ce qui en creux signifie sa crainte que ces opérations donnent davantage de travail
administratif et technique aux agents du poste, il omet de préciser que ce surcroît de travail
devrait être mis en rapport avec les ressources ainsi générées.
(Secrétaire générale du MEAE, ambassade) : Assurer un suivi du
plan d’action de l’ambassadeur, doté d’indicateurs pertinents, et évaluer son impact, au moins
à la fin de sa mission.
(Secrétaire générale du MEAE) Programmer les mouvements
diplomatiques de telle sorte que les mandats s’enchaînent sans discontinuité excessive.
(Secrétaire générale du MEAE, ambassade) Mettre en œuvre une
politique active de recherche de mécénat et de valorisation des espaces de l’ambassade avec
des objectifs quantitatifs annuels pour couvrir les besoins d’investissement de l’ambassade
pour son patrimoine historique.
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ______________________
Pour conduire ses missions l’ambassade de France près le Saint Siège
s’appuie sur un
personnel diplomatique resserré. Le dimensionnement actuel de cette équipe lui permet
d’assurer les missions diplomatiques qui lui sont dévolues mais parait insuffisant pour assurer
le suivi des mesures correctrices nécessaires à la remise en ordre rapide de la gestion des Pieux
établissements.
Le dispositif des instructions données à l’ambassadeur à sa nomination, du cadrage des
actions de l’ambassade pendant son mandat et d’évaluation de l’action conduite à la cessation
de fonctions, apparaît pragmatique. Il mobilise l’ensemble des services compétents au sein du
ministère et au niveau interministériel de manière à assurer l’information et les directives les
plus complètes possibles de l’ambassadeur avant sa prise de fonctions. Des améliorations sont
cependant nécessaires. La démarche devrait permettre de prioriser en commun les actions que
l’ambassade doit mettre en œuvre. Le processus nécessite d’être adossé à des outils de suivi,
des indicateurs et, au sein de l’ambassade, à la mise en place d’outils d’archivage plus
performants.
Au-delà, alors que les instructions insistent sur l’importance du réseau de relations à
créer ou développer et sur le dialogue à entretenir avec les autorités pontificales dans leur
diversité, il y a un paradoxe à nommer à ce poste des diplomates dont l’affectation est inférieure
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
39
à trois ans, qui plus est avec de trop longues périodes d’intérim. Compte tenu de la taille réduite
de l’équipe diplomatique face au nombre et à la diversité des interlocuteurs, du temps
nécessaire pour créer le réseau de relations indispensables et des nombreuses vacances de
postes, le temps diplomatique utile apparaît ainsi trop réduit.
Sous l’autorité du chef de poste, la collaboration en place avec le secrétariat général
commun est efficace. Elle libère l’ambassade des activités de gestion administrative de ses
personnels qui obéissent à des cadres de gestion diversifiés, et permet une optimisation des
dépenses courantes.
Le budget de l’ambassade, en augmentation sur la période, ne couvre pas
les dépenses d’investissements immobiliers, dont le financement demeure de la compétence de
l’administration centrale.
La Villa Bonaparte, dans un cadre réglementaire contraint, nécessite en tout cas des
investissements importants, non financés à ce jour. Le projet de cession d’une partie de son
emprise un temps envisagé a été abandonné. Une démarche plus active de recherche de
mécénat, soutenue par l’administration centrale,
doit être entreprise en vue de maintenir en
état
et de valoriser ce patrimoine historique qui contribue au rayonnement de la France.
3
L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE SAINT-LOUIS
Les postes diplomatiques, comme celui près le Saint-Siège, s'appuient le plus souvent
sur un institut français établi dans leur pays de résidence. Jouissant du statut d’établissement à
autonomie financière (EAF) créé par le décret du 24 août 1976
42
, les instituts sont financés par
le programme 185 « Diplomatie culturelle et d'influence » du budget de l’État. Partout où cela
était possible, les services de coopération et d’action culturelle (SCAC) des ambassades et les
instituts français ont été rapprochés entre 2009 et 2013 en un dispositif placé sous l’autorité
unique de l’ambassadeur, assisté du conseiller de coopération et d’action culturelle (COCAC)
de l’ambassade, par ailleurs directeur de l’institut français
43
.
Les établissements à autonomie financière (EAF) à l’étranger
A vocation culturelle ou de recherche à l’étranger, les EAF n’ont pas de personnalité morale et
sont rattachés, pour ce qui est de leur existence en droit local, aux services des ambassades. En revanche,
ils jouissent d’une autonomie financière, budgétaire et comptable, avec leurs propres budgets et
comptes. Le budget général de l'État n’enregistre pas leurs recettes et corrélativement, leurs dépenses
42
Décret n° 76-832 du 24 août 1976 pris en application de l'article 66 de la loi de finances pour 1974 Les
instituts génèrent des recettes propres, qui représentaient près de 153 M€ en 2022. En 2023, ce réseau est composé
de 137 SCAC et cinq services pour la science et la technologie au sein des ambassades, de 118 établissements à
autonomie financière (EAF) dont 93 instituts français pluridisciplinaires.
43
Sauf exception (comme en Italie), les différentes instituts et centres culturels de la France dans un même
pays ont progressivement été regroupés au sein d’un institut français par pays, doté le cas échéant d’antennes.
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
40
ne sont pas davantage programmées au budget annuel du poste diplomatique dont ils relèvent. Ils
peuvent disposer de recettes propres leur permettant d'adapter le volume et la nature de leur activité à
leurs revenus locaux, ce qui leur confère une plus grande agilité dans la conduite de leur action.
Leurs ressources locales comprennent en général
44
les recettes des cours et examens de français
qu’ils organisent, de billetterie d’activités culturelles (spectacles, cinémas, conférences …) ou de
mécénat. Ils financent directement leurs dépenses de fonctionnement et leurs activités. Leur taux
d’autofinancement est, de fait, en général élevé.
La loi organique n° 2021-1836 du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion
publique a désormais rendu compatible avec la LOLF le statut dérogatoire de ces établissements, comme
l’avait longtemps recommandé la Cour.
En l’espèce, l’Institut français Centre Saint-Louis (IFCSL) est rattaché à l’ambassade
de France près le Saint-Siège. Il jouit du statut d’EAF qui lui permet de conserver ses recettes
propres pour financer son activité. Le COCAC de l’ambassade exerce en même temps les
fonctions de directeur de l’IFCSL.
3.1
Une offre de service en évolution dans le cadre d’une coopération
culturelle et d’influence ancienne
L’IFCSL, dont le nom résonne avec celui de Saint-Louis des Français, paroisse
nationale des Français à Rome, fêtera son 80
ème
anniversaire en 2025, année du Jubilé. Il a en
effet été créé au lendemain de la Seconde Guerre mondiale par Jacques Maritain, philosophe et
théologien chrétien, lorsqu’il était ambassadeur de France près le Saint-Siège. Le Centre Saint-
Louis-de-France a alors fonctionné comme un centre d’études avec pour but de nourrir,
représenter et diffuser la pensée et la culture chrétiennes d’origine française auprès de toutes
les personnes travaillant au Saint-Siège et plus largement à Rome, de quelque nationalité́
qu’elles soient, mais aussi de faire connaître la pensée et la culture de la France laïque auprès
du clergé́ et des religieux de tous les pays.
Le Centre, par les débats et les études qu’il a menés, a eu une influence certaine à
plusieurs moments charnières de l’histoire récente de l’Église, comme lors du concile Vatican
II. Depuis sa création, en 1945, il demeure un instrument majeur d’influence de l’ambassade
auprès du Saint-Siège à Rome et auprès des institutions pontificales.
3.1.1
Une offre de service en évolution
S’il s’adressait initialement à un public essentiellement ecclésiastique ou intéressé par
les débats de nature religieuse, le Centre s’est ouvert progressivement à tous les publics. Il
représente désormais pour le public romain, au sens large, un lieu reconnu de rencontres et de
débats d’idées autant que de promotion de la culture française (littérature, théâtre, cinéma, arts
44
Dans certains pays, les Alliances françaises ont le monopole des cours et donc de leurs recettes
(Amérique latine, …)
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
41
visuels…) et de la langue française, avec sa médiathèque et son activité de cours et d’examens.
L’Institut est accessible à un public varié : étudiants, entreprises, public scolaire et familial.
L’IFCSL est aujourd’hui le seul établissement à autonomie financière du réseau culturel
français dans la capitale italienne. Il assure, outre les missions qui lui sont historiquement
dévolues, les activités autrefois réparties entre l’antenne romaine de l’Institut français Italia
45
fermée en 1995, et l’Alliance française de Rome
46
, association italienne dissoute en 2005. Il est
l’un des instruments du dispositif d’influence de la France à Rome, avec d’autres institutions à
forte renommée comme la Villa Médicis et l’École française de Rome, mais encore avec
l’Institut français Italia, institut culturel qui dépend de l’ambassade de France auprès de la
République italienne avec lequel il coopère étroitement..
L’IFCSL offre donc de nombreuses activités classiques des EAF du réseau culturel, sans
négliger sa mission première d’influence et de rayonnement auprès des institutions du Saint-
Siège. En effet, il conserve des spécificités par rapport aux autres instituts, et notamment un
public religieux fidèle ainsi qu’une attention particulière aux étudiants des universités
pontificales, issus de tous les continents, qui poursuivent leur formation à Rome, notamment
lorsqu’ils sont francophones.
L’Institut a engagé dès 2019 sa transformation numérique, soutenue ensuite par le plan
à la transformation numérique ministériel
47
. Lors de la crise sanitaire, il a ainsi pu mettre en
place une offre à distance qui a permis de limiter la dégradation de son chiffre d’affaires et de
conserver ses publics.
L’organigramme illustre la diversité des champs investis par l’Institut (enseignement,
culture, médiathèque, communication), la gestion administrative et financière étant assurée par
le directeur et la secrétaire générale, avec le concours d’un pôle de trois assistantes. Le
secrétariat général de l’Institut est donc distinct de celui commun aux trois ambassades à Rome
(SGA).
45
L’Institut français Italia dispose d’antennes à Milan, Florence, Naples et Palerme
46
Les associations de l’Alliance française sont notamment présentes à Turin, Bari, Bologne, Gênes,
Latina, Venise ou Aoste.
47
Le plan de transformation numérique du ministère adopté en juillet 2021 prévoit, dans l’action 4 de son
axe 3, «
la transformation numérique du réseau culturel à l’étranger (…) notamment pour développer de nouvelles
offres de formation et d’accès aux contenus culturels et artistiques (modèles hybrides d’enseignement,
dématérialisation des certifications, réflexion sur la production et la diffusion de contenus numériques
) ».
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
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42
Organigramme n° 1 :
L’IFCSL
Source : IFCSL
3.1.2
La recherche dynamique de nouveaux marchés
La recherche d’autofinancement a conduit l’Institut à identifier de nouveaux marchés et
à répondre à la demande avec célérité. Ainsi, l’IFSCSL a réalisé en 2022 une étude de marché
en vue d’identifier son positionnement sur l’offre d’apprentissage des langues et de certification
linguistique sur les segments lucratif et non lucratif à Rome. L’étude a examiné la nature des
services proposés par les prestataires concurrents et exploré des pistes d’amélioration pour
dégager une plus grande rentabilité (parrainage, points clients, adossement aux cours de langues
de l’accès aux activités culturelles organisées par l’Institut…).
Cette étude a établi que l’offre de cours collectifs en présentiel de l’IFCSL est dans la
norme des prix pratiqués parmi les neuf prestataires identifiés ; par ailleurs les cours collectifs
sont logiquement les plus rentables. En revanche les tarifs de l’IFCSL sont nettement plus
élevés que ceux des concurrents pour les cours individuels ou semi-individuels en présentiel.
L’étude a proposé d’explorer la possibilité de mettre en place des cours dits « comodaux »
offrant simultanément un enseignement en présence et à distance. Ce dispositif permet en effet
d’étendre l’offre de cours tout en maitrisant les coûts de fonctionnement, notamment celui des
personnels mobilisés. Des investissements ont été réalisés en 2023 dans trois salles de cours sur
les six pour les équiper des matériels nécessaires.
Par ailleurs, attentif aux offres concurrentes, l’IFCSL a cherché à gagner également en
visibilité. Il accompagne désormais ses actions d’indicateurs, comme le nombre d’abonnés à
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43
l’Institut sur les réseaux sociaux. Cet indicateur met en évidence une audience sur les réseaux
sociaux encore modeste mais en augmentation constante.
Tableau n° 9 :
Présence de l’IFCSL sur les réseaux sociaux en nombre d’abonnés
Réseaux sociaux
2018
2019
2020
2021
2022
Facebook
6 526
7 442
8 475
8 834
9506
Twitter
Inconnu
?
?
1 102
NC
Instagram
Inconnu
819
970
208
NC
Autres
Inconnu
?
100
10 054
NC
Total Réseaux sociaux
Inconnu
8 261
9 545
20 198
NC
Source : IFCSL, récapitulatif
2022
3.2
Une mission qui se déploie suivant des axes stratégiques forts
Comme tous les EAF, le Centre Saint-Louis, au-delà des spécificités de sa mission, met
en œuvre un programme d’apprentissage de la langue française (cours, examens, …) qui
participe de la mission de promotion de la langue française et développe un programme
d’activités culturelles (cinéma, théâtre, …) et de débat d’idées (colloques, échanges, …) qui
vise à toucher le plus large public et favoriser le développement de l’influence française. Du
fait de son histoire, il apporte une attention particulière aux enjeux religieux.
3.2.1
Un pilotage stratégique renforcé
Les orientations du Centre sont définies en collaboration étroite avec l’ambassadeur près
le Saint-Siège. Un cadrage renforcé a été mis en place à compter de 2019. Conformément aux
instructions du ministère, l’examen de la programmation et du budget de l’Institut, comme celui
des autres SCAC-EAF s’est ainsi inscrit dans le cadre d’un conseil d’orientation stratégique
(COS), présidé par l’ambassadrice. Le COS est une instance de réflexion qui doit permettre de
décliner dans le dispositif de coopération et d’action culturelle les objectifs transversaux de la
politique d’influence du poste diplomatique. À ce titre, il aide à définir et valider la stratégie de
l’IFCSL, à lui fixer des objectifs annuels, à déterminer ses actions et à les évaluer, à assurer une
bonne articulation avec les partenaires de l’Institut. Afin d’assurer des échanges et une
ouverture sur les enjeux de société, le COS a été, dès l’origine, élargi par l’ambassadrice à
diverses personnalités, laïcs et religieuses mais aussi au directeur de l’Institut français Italia.
Le COS s’est réuni une fois par an depuis fin 2019. Ses conclusions ont chaque fois fait
l’objet d’une note diplomatique résumant la situation, les enjeux et les actions emblématiques
retenues. Elles ont permis d’enrichir et d’élaborer la feuille de route de l’Institut. Les trois
exercices menés ont mis en évidence que si la spécificité religieuse de l’IFCSL s’est atténuée,
son attractivité sur ces sujets reste forte dans la Rome pontificale et notamment en ce qui
concerne la vie intellectuelle française et les positions françaises sur des sujets de débats.
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SAINT-LOUIS
44
La programmation de l’IFCSL vise donc à organiser des débats sur
« les sujets qui
« travaillent
l’Église
» et à donner l’occasion de s’exprimer à «
des acteurs du changement
»,
comme l’indiquait l’ambassadrice en 2019. Ainsi, ont été par exemple traités les sujets des abus
sexuels dans l’Église, de la place des femmes, du transhumanisme. Le COS a souligné l’intérêt
d’associer à ces débats d’idées les institutions et universités pontificales ainsi que les italiens
pour ne pas rester cloisonné dans une sphère qui peut parfois être considérée comme exclusive
d’autres publics. Enfin, en 2022, le COS a approuvé un projet de centre d’études « religions et
société » qui reprend la tradition et les objectifs du centre d’études originel fondé par Jacques
Maritain.
3.2.2
L’enseignement du français
Le français est une langue officielle du Saint-Siège pour le dialogue avec les
catholiques. L’usage de l’anglais est cependant de plus en plus répandu. La mission
d’enseignement du français est le cœur de l’activité de l’IFCSL avec un public religieux
désormais très minoritaire.
3.2.2.1
Le centre de langues
Les cours et certifications de français constituent de très loin la principale ressource de
l’IFCSL. La crise sanitaire a eu un impact considérable sur cette activité mais, grâce à l’appui
de l’Institut français de Paris, des solutions de rechange en ligne ont pu être trouvées en
quelques jours.
Le centre de langues de l’IFCSL qui organise et dispense les cours et certifications,
repose sur une équipe d’une vingtaine d’agents en 2022, dont 11 agents disposant d’un CDI à
temps plein, six d’un CDD et trois d’un CDI à temps partiel, auxquels sont adjoints cinq agents
administratifs. Le centre offre une gamme diversifiée de prestations : cours collectifs, cours
individuels en entreprise, cours dans des universités mais également des cours en auto-
apprentissage et, largement développés depuis la crise sanitaire, des cours en ligne. Des
partenariats avec des universités, comme l’Université privée catholique LUMSA
48
, et des
entreprises ont été également passés par l’IFCSL pour des prestations d’apprentissage du
français.
Les activités linguistiques représentant près de 95 % des recettes propres de
l’établissement, la solidité du modèle économique est très dépendante de leur évolution. À la
fin des années 2010, la demande de cours de français à Rome a commencé à s’éroder et le
nombre d’inscriptions à marquer le pas, notamment pour les cours collectifs généraux, par
ailleurs les plus rentables. Cette tendance était liée à certains facteurs comme la baisse de
l’attractivité du français – soulignée de longue date par l’ambassade et l’Institut – depuis une
quinzaine d’années, la dématérialisation des cours et l’apparition d’une offre concurrente à coût
plus faible.
48
Libera Universita Maria Santissima Assunta
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45
Tableau n° 10 :
Évolution des recettes et de l’activité des cours de français
Années
Nombre d’inscriptions
Nombre
d’heures-élèves
Chiffre
d’affaires (en €)
2011
4 205
184 166
1 349 182
2015
4 148
152 413
1 337 829
2016
4 107
149 156
1 272 900
2017
3 943
138 228
1 323 384
2018
4275
141 637
1 3887 90
2019
3882
133 621
1 223 263
2020
3152
99 219
1 00 3653
2021
3361
99 004
973 397
2022
2921
115 721
1 004 361
Source : IFCSL, contrôle de gestion
Depuis 2015, le nombre de nouveaux apprenants a stagné (-6,5 % en 2019) puis a chuté
avec la pandémie (-29,6 % en 2022 par rapport à 2015). Le nombre d’heures-élèves a diminué
de façon marquée (-24,4 % en 2022 par rapport à 2015 ; -37 % par rapport à 2011). Cette
tendance n’a pas provoqué pour autant un effondrement de recettes. En effet, la durée de chaque
cours a été réduite et leurs tarifs ont été rehaussés. Pour 2023, à fin novembre, les estimations
étaient en légère hausse (1 081 000 €).
Graphique n° 3 :
Évolution du nombre d’heures d’enseignement de français et d’heures-élèves 2009-
2022
Source : Cour des comptes à partir des données de l’IFCSL
0
50000
100000
150000
200000
2009
2010
2011
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
2022
Total NOMBRE TOTAL D'HEURES-ELEVES
Total NOMBRE TOTAL D'HEURES D'ENSEIGNEMENT
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46
Outre les cours, l’IFCSL fait passer les certifications de français pour lesquelles il
perçoit des recettes. Les résultats liés à cette activité se sont également dégradés, à la suite de
la crise sanitaire, mais se sont redressés depuis.
Tableau n° 11 :
Chiffre d’affaires des certifications 2015-2022 en euros
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
2022
Certifications
270 405
291 875
264 870
306 320
304 735
116 405
226 811
249 946
Source : IFCSL
Leur évolution à la hausse puis leur reprise ont permis d’amortir la diminution du chiffre
d’affaires lié à l’apprentissage de la langue.
Graphique n° 4 :
Chiffre d’affaires des activités pédagogiques depuis 2009
Source : Cour des comptes à partir des données de l’IFCSL
3.2.2.2
Un effort renforcé dans le domaine linguistique vers les autorités
pontificales et italiennes
En matière de coopération linguistique, les actions de l’ambassade près le Saint Siège
s’exercent prioritairement dans le domaine de la formation linguistique et reposent sur le Centre
Saint-Louis. Les efforts de l’Institut et du poste couvrent plusieurs actions, renforcées depuis la
fin de la crise sanitaire.
Un des objectifs prioritaires du poste est la formation linguistique des diplomates,
notamment au sein de l’Académie pontificale ecclésiastique des nonces (cf. supra), avec
laquelle un partenariat privilégié a été noué. L’IFCSL assure lui-même l’enseignement du
français auprès des étudiants de l’Académie et également de la Secrétairerie d’État du Vatican,
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47
avec laquelle un accord a été signé par l’ambassadrice en 2019. Il est également l’opérateur du
réseau pour la formation linguistique des fonctionnaires du ministère des affaires étrangères
italien, de la Présidence du Conseil des ministres italien, du Sénat de la République italienne et
de la Banque d’Italie. Le poste a reçu à ce titre une subvention de 11 500 € du fonds
d’intervention linguistique en 2022
49
.
Par ailleurs, l’une des cibles principales de l’Institut est constituée par les étudiants des
institutions et universités pontificales. Le Saint-Siège réunit à Rome 22 institutions
d’enseignement supérieur qui accueillent en formation environ 20 000 professeurs et étudiants,
clercs et laïcs, de près de 120 nationalités. Ils représentent environ 5 % des élèves des cours
collectifs dispensés par l’Institut (soit 100-120 étudiants) tandis que plusieurs grandes
institutions universitaires pontificales ont passé des accords avec l’IFCSL pour un
enseignement à leurs étudiants.
Le graphique suivant montre la diversité des partenariats conclus par l’IFCSL qui génère
près de 300 000 € par an.
Graphique n° 5 :
Partenariats conclus par l’IFCSL (2020)
Source : Cour des comptes à partir des données de facturation de l’IFCSL
Des programmes de bourse ont été également ouverts, notamment un programme de
bourses de formation linguistique
50
. Existant depuis 2010, à hauteur de 25 à 30 bourses par an,
ce dernier a connu une amplification à partir de 2020 (37 bénéficiaires, 50 en 2021 et 40 en
2022). Ces bourses sont déployées grâce au financement apporté par les Pieux établissements
depuis 2019 (22 bourses sur 40 sont financées par ces derniers pour un montant de 36 000 €, la
49
Dans le cadre de la stratégie de promotion du français comme langue de la diplomatie européenne, la direction
générale de la mondialisation au ministère des affaires étrangères cofinance des formations linguistiques mises en œuvre par
le réseau, prioritairement à destination de diplomates et de fonctionnaires en charge du suivi des dossiers européens. Ce co-
financement est réalisé à travers le fonds d’intervention linguistique (FIL).
50
Les bourses de formation linguistique financent un séjour d’un ou deux mois pendant l’été́ (juillet et août) en
France dans une université́ catholique.
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48
part du poste étant de 32 400€ pour 18 bourses). Ces bourses sont destinées à des étudiants des
universités pontificales issus de tous les continents et doivent permettre à terme la constitution
d’un réseau d’étudiants boursiers appelés à rejoindre leurs diocèses d’origine ou des
congrégations missionnaires à l’issue de leur séjour en France. La diversité d’origine de ces
étudiants est un facteur d’intérêt pour la France : parmi les 26 pays d’origine, l’Italie, le Brésil,
la Pologne, la Colombie, le Vietnam et le Nigéria sont les principaux pays des lauréats. Le
nombre de candidats s’accroît chaque année, ce qui souligne l’attractivité de ce programme
pour les étudiants (200 candidats en 2021 de plus de 150 nationalités). Le succès de ce
programme montre qu’un accroissement du budget disponible pour les bourses répondrait à une
augmentation des besoins et de la capacité de rayonnement du français et de la France.
Des bourses de séjour scientifique de haut niveau sont également financées pour des
doctorants des universités du Vatican souhaitant effectuer un séjour de recherche en France afin
de mener à bien leurs travaux scientifiques en matière religieuse, terminer leurs doctorats ou
thèses et faciliter les échanges interuniversitaires. Ce programme qui a démarré avec trois
bourses en 2020 devait concerner huit chercheurs en 2023 pour un financement à hauteur de
34 600 €. Le même constat peut être fait de la modestie des moyens accordés à cette action
définie comme stratégique.
Enfin, objectif majeur de l’IFCSL, mentionné dans le plan d’actions de l’ambassadrice
(2023), la création d’un réseau d’alumni vise à conserver et entretenir les contacts avec les
anciens boursiers ou bénéficiaires de cours gratuits offerts aux membres de la curie ou de
l’École des nonces.
On peut regretter l’absence d’un tel dispositif à l’IFCSL jusqu’à présent.
Le nombre limité de bourses et les financements modestes accordés constituent autant
d’opportunités manquées de créer d’utiles relais pour l’avenir alors même que l’ambassade
dispose des capacités financières des Pieux établissements qui n’ont pas été mobilisées. Seule
une cinquantaine de bourses sont accordées pour environ 100 000 € de financements, dont à
peine le tiers en provenance des Pieux établissements.
3.2.3
La coopération culturelle
L’IFCSL agit dans ces domaines comme tout institut français à l’étranger qui développe
des activités dans les domaines du cinéma, du livre ou du débat d’idées, en émargeant pour
partie aux financements et aux projets élaborés par l’Institut français de Paris dans le cadre
notamment d’appels d’offres.
L’Institut dispose d’un atout important avec une salle de cinéma
située dans ses locaux
au centre de Rome, dans un périmètre où l’offre en la matière est rare. Cette salle qui a été
numérisée dès 2014 accueille une programmation dynamique. Avec environ 90 films, 160
projections, 8 000 spectateurs et 8 000 € de recettes par an, elle se classerait en 2019, dernière
année complète avant la pandémie, parmi les 15 premières salles numérisées des instituts
français.
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
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49
L’offre, diversifiée
51
, suscite l’intérêt du public laïc comme religieux et est utilisée pour
stimuler le débat d’idées. Outre les programmes proposés par l’Institut français de Paris,
l’IFCSL a développé un festival du film francophone (Le Francofilm) qui en est à sa 13
ème
édition et s’appuie sur le soutien financier du groupe des ambassades francophones à Rome.
La collaboration avec l’Institut français d’Italie qui dispose de plusieurs salles dans ses
antennes, notamment à Milan et Florence, est étroite, bien qu’elle ne soit pas encore pleinement
aboutie. En effet, à ce jour l’IFCSL n’est pas intégré au réseau des salles de cinéma animé par
l’Institut français de Paris. Toutefois, le ministère indique que l’IFCSL travaille à son
rapprochement avec ce réseau, notamment dans la perspective de bénéficier des droits négociés
en commun et des sous-titrages pris en charge par le réseau.
La fréquentation de la médiathèque souffre en revanche d’une baisse qu’il convient
d’inverser en attirant un nouveau public. En 2022, 77 % des « apprenants » inscrits aux cours
de langues déclaraient ne pas la fréquenter. La médiathèque, bien que disposant d’un fonds
important, issu notamment de la vocation originelle de centre d’études de l’IFCSL et du
transfert en 2008 du fonds documentaire du poste bilatéral, pâtit aujourd’hui d’un aménagement
inadapté et d’une offre ne répondant plus aux attentes de ses publics. En juin 2019, une mission
d’expertise a recommandé de réorganiser les espaces et de moderniser l’offre mais rien n’a
encore été réalisé. Un projet de transformation numérique est en cours.
Enfin, la programmation dans le domaine du débat d’idées est, selon l’Institut, un
instrument de dialogue avec le Saint-Siège qu’il convient de poursuivre et de développer.
L’objectif est de développer des thèmes qui résonnent avec l’actualité du Vatican et en
élargissant les publics, notamment en direction des femmes. L’Institut participe également à la
Nuit des Idées au Saint-Siège
52
. Dans ce cadre, le poste a reçu un soutien financier de l’Institut
français de Paris à hauteur de 7 000 €.
L’IFCSL, au regard de ses moyens tant financiers qu’humains, fait preuve de
dynamisme pour assurer ses missions culturelles. Les recettes qui s’y rapportent sont certes
modestes (moins de 4 % pour le cinéma et le théâtre) par rapport à celles liées à ses activités
principales, mais progressent néanmoins régulièrement. Elles ne reflètent qu’imparfaitement
l’impact de cette programmation.
Tableau n° 12 :
Recettes liées aux activités culturelles et activités accessoires (en €)
2019
2020
2021
2022
Parrainage des sponsors
4 000
4 000
11 300
19 400
Billetterie du cinéma
8 357
5 390
3 030
7 845
51
L’IFCSL programme entre 4 et 5 séances de cinéma par semaine et sa salle est plus avancée que celles
de l’Institut français d’Italie en termes de programmation, notamment grâce à l’acquisition de droits de projection
de films nouveaux, qui représentent aujourd’hui plus de la moitié de la programmation.
52
Chaque année depuis 2016, l’Institut français de Paris invite les lieux de culture et de savoir, en France
et à l’étranger, à célébrer la libre circulation des idées et des savoirs en proposant pendant une soirée des
conférences, forums, tables rondes, projections, performances artistiques et ateliers jeunesse, autour d’un thème
que chaque institution décline comme elle le souhaite.
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50
Autres prestations de service : Théâtre et histoire
0
46 364
47 899
44 423
Abonnements à la médiathèque
5 390
2 390
2 900
5 720
Total des recettes liées aux activités culturelles (1)
17 747
58 144
65 129
77 388
Locations (coworking) (2)
1 650
750
1 840
23 546
Total des recettes culturelles et diversifiées (1+2)
19 397
58 894
66 969
100 934
Total des recettes d'exploitation
1 792 157
1 386 418
1 426 164
1 689 679
% de recettes liées aux activités culturelles (1)
0,99%
4,19%
4,57%
4,58%
% de recettes liées aux activités culturelles et diversifiées (1+2)
1,08%
4,25%
4,70%
5,97%
Source : Cour des comptes depuis le rapport de gestion de l’ordonnateur de l’IFCSL de 2022
Il faut relever que, à la recherche de ressources pour accomplir l’ensemble de ses
missions, l’IFCSL élargit ses activités notamment par le développement du partage de ses
espaces de travail à des tiers (coworking) qui contribue, modestement, à le faire connaitre.
D’autres pistes, plus prometteuses, sont néanmoins à l’étude afin de renforcer son influence à
Rome dans le cadre d’un partenariat renouvelé avec les Pieux établissements (cf. infra) qui
permettrait de consolider un modèle économique aujourd’hui fragilisé.
3.3
U
n modèle économique renforcé par le partenariat stratégique avec les
Pieux établissements
Jusqu’à la fin des années 2010, le modèle économique de l’IFCSL est apparu solide et
même enviable. En effet, son monopole sur les cours et les certifications de français à Rome,
lié à la disparition de l’Institut français d’Italie puis de l’Alliance française à Rome, lui a garanti
un niveau de ressources propres très élevé et un autofinancement important de l’ordre de 90 %,
le solde étant principalement couvert par des dotations du poste.
Depuis, la situation financière de l’Institut s’est dégradée. À compter de 2015, le budget
était encore à l’équilibre en recettes (subventions comprises) et en dépenses, par l’anticipation
d’un prélèvement sur fonds de roulement. La conjoncture défavorable conjuguée à cette
stratégie budgétaire l’ont placé dans une situation financière difficile. L’augmentation
importante des subventions reçues en 2022 (302 000 €) a certes restauré l’équilibre financier,
mais ce dernier demeure toutefois fragile, le ministère ayant indiqué qu’il n’envisageait pas de
reconduire un tel effort.
Ce diagnostic doit toutefois être relativisé : d’une part, l’IFCSL est toujours aujourd’hui
largement autofinancé et ses difficultés résultent notamment des conditions du bail conclu avec
les Pieux établissements. Par ailleurs, la mise en place d’un partenariat durable entre ces deux
leviers de l’influence française à Rome, placés tous les deux sous l’autorité de l’ambassade près
le Saint Siège, devrait permettre de développer des projets nouveaux.
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51
3.3.1
Un taux d’autofinancement élevé mais un équilibre financier fragile
Bien que largement autofinancé grâce à son haut niveau de ressources propres, l’IFCSL
enregistre seulement deux résultats bénéficiaires sur les huit exercices clos sous revue.
Tableau n° 13 :
Évolution 2015-2022 du compte de résultat en euros
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
2022
Var
2015-
2022
en %
Produits
d'exploitation (I)
1 978 577
1 892 618
1 830 757
1 948 034
1 792 157
1 386 418
1 426 164
1 689 679
-15%
Charges
d’exploitation (II)
2 209 202
1 963 009
1 856 391
1 915 001
1 915 334
1 550 565
1 500 432
1 594 197
-28%
RÉSULTAT
D'EXPLOITATION
(I-II)
-230 625
-70 391
-25 634
33 033
-123 177
-164 146
-74 268
95 482
Produits financiers (I)
0
91
0
7
7
51
21
190
Charges
financières
(II)
0
0
0
0
0
0
0
0
RÉSULTAT
FINANCIER (I-II)
91
7
7
51
21
190
Produits
exceptionnels (I)
8 370
18 818
1 048
2 109
5 467
0
0
0
Charges
exceptionnelles (II)
0
0
0
0
0
0
0
0
RESULTAT
EXCEPTIONNEL(I-
II)
8 370
18 818
1 048
2 109
5 467
0
0
0
TOTAL
DES
PRODUITS
1 986 947
1 911 527
1 831 806
1 950 150
1 797 632
1 386 469
1 426 185
1 689 869
-15%
TOTAL
DES
CHARGES
2 209 202
1 963 009
1 856 391
1 915 001
1 915 334
1 550 565
1 500 432
1 594 197
-28%
EXCEDENT
ou
DEFICIT
-222 255
-51 482
-24 585
35 148
-117 703
-164 095
-74 247
95 672
-
Source : comptes financiers de l’IFCSL
La contraction des dépenses entre 2015 et 2022, de -28 %, met en évidence les efforts
entrepris pour les diminuer, ainsi que l’impact de la crise sanitaire.
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
52
Tableau n° 14 :
Évolution 2015-2022 du bilan en euros
ACTIF
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
2022
ACTIF
IMMOBILISE
NET
242 972
189 241
137 234
84 423
56 004
50 064
57 800
46 232
Immobilisations
incorporelles
4 265
2 415
0
0
0
0
0
0
Immobilisations
corporelles
238 707
186 826
137 234
84 423
56 004
50 064
57 800
46 232
ACTIF
CIRCULANT
890 541
888 372
863 212
1 022 565
940 493
814 910
843 635
958 306
Créances
140 438
59 025
59 340
12 620
77 630
75 504
26 313
64 440
Trésorerie
750 074
829 347
803 872
1 009 945
862 863
739 406
817 323
893 866
Charges constatées.
d'avance
29
0
TOTAL ACTIF
1 133 513
1 077 613
1 000 446
1 106 988
996 498
864 974
901 435
1 004 538
PASSIF
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
2022
FONDS PROPRES
694 999
643 517
618 933
654 081
536 378
372 281
298 034
393 706
Réserves
917 276
694 998
643 517
618 933
654 081
536 377
372 281
298 034
Résultat de l'exercice
-222 277
-51 481
-24 584
35 148
-117 703
-164
097
-74 247
95 672
DETTES
438 514
434 096
381 513
452 907
460 121
492 693
603 401
610 832
Provisions
301 539
353 248
381 513
418 740
460 121
481 076
545 339
610 832
Dettes d’exploitation
67 765
43 043
0
0
0
11 617
58 062
0
Dettes diverses
90
0
0
3 698
0
0
0
0
Produits
constatés
d'avance
69 120
37 805
30 468
TOTAL PASSIF
1 133 513
1 077 613
1 000 446
1 106 988
996 498
864 974
901 435
1 004 538
Source : comptes financiers de l’IFCSL
L’équilibre entre les produits et les charges n’a pu être assuré que par des prélèvements
sur fonds de roulement. Les fonds propres de l’IFCSL se sont dès lors amenuisés jusqu’à
atteindre un niveau critique : en 2021, ils étaient inférieurs de plus de moitié à ceux de 2018 et
des années antérieures. Seuls des financements supplémentaires, dont des subventions à
caractère exceptionnel de l’ambassade en 2022, lui ont donné la sécurité nécessaire pour couvrir
ses engagements.
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
53
Pour réduire la nécessité de prélever sur ce fonds de roulement, les leviers mobilisables
à sa disposition sont limités sur la période examinée : l’Institut ne peut différer le paiement de
ses dettes (principalement la masse salariale et les loyers) et la réduction des délais de paiement
par ses clients est un levier peu efficace, car les créances à recouvrer sont peu nombreuses à la
clôture des exercices.
Les subventions complémentaires de l’État ont été indispensables pour atteindre
l’équilibre.
Tableau n° 15 :
Subventions 2015-2023 de l’État et de ses opérateurs en euros
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
2022
Subventions
de
l’État
127 716
109 620
108 498
120 100
120 710
173 350
153 394
430 044
Dont dotation de
fonctionnement
95 000
100 000
100 000
100 000
134 000
107 000
302 200
Dont
dotation
d’intervention
127 716
9 620
8 498
20 100
20 710
22 350
16 394
118 844
Dont
dotation
d’investissement
5 000
20 000
30 000
9 000
Autres subventions
opérateurs de l’État
5 985
11 880
10 500
5 500
1 500
1 500
1 500
0
Total des subventions
133 701
121 500
118 998
125 600
122 210
177 850
154 894
430 044
Sources : comptes financiers de l’IFCSL
Entre 2015 et 2021, les financements de l’État apparaissent globalement stables, prenant
en compte pour partie le financement d’actions (bourses), exceptés en 2020 : (+50 000 €) et
2022 (+300 000 €), en raison notamment du contexte sanitaire.
3.3.2
Des leviers pour améliorer cette situation
La gestion budgétaire et comptable de l’IFCSL est assurée avec rigueur. L’Institut a
mobilisé l’ensemble des leviers à sa disposition pour améliorer sa situation financière, mais les
faibles synergies en place en limitent
de facto
le nombre.
3.3.2.1
La gestion financière
L’ambassade est tenue régulièrement informée de la situation financière de l’Institut
ainsi que des actions qu’il a entreprises pour équilibrer ses comptes. La gestion administrative
et financière de l’IFCSL repose sur trois agents (un comptable à 70 %, une assistante comptable
et une assistante administrative). Ceux-ci utilisent un système d’information spécifiquement
développé dans les EAF qui comprend, depuis 2015, un module de contrôle interne. Si les
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
54
comptes ont été produits, le rapport de l’agent comptable est cependant manquant pour chaque
exercice, ce qui est anormal.
Depuis 2020, des opérations de fiabilisation des comptes, notamment des actifs
immobilisés de l’Institut, ont été mises en œuvre. Les discordances constatées dans le calcul du
fonds de roulement par le comptable d’une part et par l’ordonnateur d’autre part, traduisent des
normes de comptabilisation différentes
53
.
Le taux d’exécution du budget met en évidence une prévision réaliste et un suivi
efficace, les décisions modificatives enregistrant des mouvements tant à la hausse qu’à la
baisse. Ces taux s’établissent rarement en deçà de 90 % en dépenses, l’exercice 2020 exclu en
raison de sa singularité.
3.3.2.2
Les mesures prises pour restaurer l’équilibre
Des efforts importants ont été accomplis ces dernières années pour améliorer la
rentabilité des activités de l’IFCSL et augmenter ainsi son autofinancement. Dans le domaine
des cours de langues, centre principal de ressources, l’objectif de l’IFCSL est de relancer
l’activité en dépit du contexte financier délicat (baisse de la rentabilité des cours, inflation des
coûts de fonctionnement) et du contexte concurrentiel important.
L’Institut français d’Italie et l’IFCSL se sont rapprochés pour mutualiser et donc réduire
certaines dépenses par une remise en concurrence et la renégociation de contrats de prestataires
communs (abonnements aux plateformes numériques, formation, logiciel de gestion
partagé …), réaliser des économies d’échelle et renforcer la cohérence du réseau français dans
la péninsule italienne. Le site internet et l’agence comptable sont ainsi mutualisés.
La recherche de recettes nouvelles a conduit l’IFCSL à diversifier ses activités. Ainsi,
les locations d’espaces ou le coworking ont progressé (23 500 € en 2022 pour le coworking
contre 1 000 € auparavant), mais ces activités sont limitées par la disponibilité de ses
infrastructures. D’autres sources de financement, telles que le mécénat ou le sponsoring
devraient être recherchées. Des pistes diverses ont été évoquées, mais non suivies d’effet,
comme par exemple :
-
le transfert du centre de langues à l’Institut français d’Italie, proposé par
l’inspection générale des affaires étrangères en 2020. Il aurait supprimé un
instrument d’influence qui fonctionne bien, privé l’IFCSL de ressources
considérables, ainsi qu’affaibli les relations avec le Saint-Siège sans que l’on
mesure bien les avantages attendus de ce transfert ;
53
L’ordonnateur, dans une logique budgétaire, exclut du calcul les charges non décaissables
(amortissements et provisions, notamment celles des provisions pour indemnités de fin de contrat des agents
locaux) ainsi que la valeur nette des immobilisations. Le fonds de roulement ainsi déterminé correspond aux
capitaux propres. Le comptable, en revanche, retient les charges décaissables et la valeur nette des emplois pour
sa détermination. Les modalités de calcul retenues nécessiteraient d’être explicitées dans le rapport de fin de
gestion de l’ordonnateur, et ce d’autant que le calcul du fonds de roulement a une incidence sur la détermination
du besoin en fonds de roulement.
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
55
-
le recours à la Banque islamique de développement pour le financement de bourses
de recherche vers le Saint-Siège à travers l’éligibilité à d’autres programmes
comme la théologie de l’Islam …
Les efforts de gestion ont toutefois buté sur l’importance de la masse salariale et des
dépenses de loyer qui représentaient en 2022 plus du tiers (37 %) des dépenses de
fonctionnement, hors masse salariale.
Graphique n° 6 :
La répartition des charges de fonctionnement 2022, hors masse salariale en %
Source : rapport de l’ordonnateur de l’IFCSL 2022
Sur ces deux postes de dépenses, la marge d’action de l’IFCSL a été réduite.
Les effectifs sur la période sont stables et les fluctuations sont pour l’essentiel liées à
l’application du droit italien et de la convention salariale applicable. Pour autant, des mesures
de convergences telles que le remboursement pour moitié de la carte de transport, ou le
remboursement ponctuel de primes exceptionnelles pour la reconnaissance du mérite,
versement pourtant non prévu par les contrats, ont été mises en œuvre. Des inquiétudes sont
nées sur l’application de la fiscalité italienne aux rémunérations perçues à l’IFCSL. Ainsi, des
contentieux avec les autorités fiscales italiennes sont en cours auprès de certains salariés de
l’Institut auxquels est réclamé le paiement de l’impôt sur le revenu.
Si la masse salariale constitue un poste de dépenses difficilement compressible, le
plafond d’emplois, fixé à 27 ETP et 35 emplois stables sur la période, est également un frein au
déploiement d’activités nouvelles qui pourraient être génératrices de ressources. Les activités
culturelles consomment de la ressource en emploi tout en étant moins rentables que les activités
d’enseignement.
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
56
Tableau n° 16 :
Évolution de la masse salariale 2015-2022 en euros
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
2022
Masse salariale
1 046 058
960 416
936 339
979 271
1 026 159
983 693
933 939
997 664
Sources : Comptes financiers de l’IFCSL
S’agissant des dépenses de loyer, le bail conclu avec les Pieux établissements prévoit
une revalorisation annuelle de 75 % de l’indice ISTAT, applicable aux loyers en Italie. Les
termes du bail ont appelé de nombreuses observations :
-
sur les modalités de valorisation des locaux, certes situés dans un quartier prestigieux
de Rome, à proximité immédiate de l’église Saint-Louis de Français et de la Piazza
Navone, mais dont l’état, notamment des bureaux, n’est pas optimal ;
-
sur
l’estimation
du
loyer
du
sous-sol,
comprenant
l’amphithéâtre
dont
l’aménagement a été intégralement financé par l’IFCSL.
L’évolution des dépenses de loyers s’établit comme suit :
Tableau n° 17 :
Évolution des dépenses de loyers auprès des Pieux établissements en euros
2015
2016
2017
2018
2019
2020
2021
2022
168 000
168 000
168 672
170 190
171 381
137 789
113 400
169 614
Source comptes financiers de l’IFCSL
Un différend a existé depuis de nombreuses années entre l’IFCSL et les Pieux
établissements sur le montant du loyer comme sur la prise en charge des travaux. Lors de la
crise sanitaire, les Pieux établissements ont consenti à l’IFCSL, comme aux commerçants et à
certains de leurs locataires particuliers, des réductions de loyer de 30 %.
Dans un
contexte
aggravé par l’application des taux de revalorisation légaux, la situation financière de l’Institut,
est néanmoins devenue difficilement soutenable ce qui a conduit le ministère à accorder une
contribution exceptionnelle. Dans le même temps, une négociation tendue a opposé les Pieux
établissements et l’IFCSL à la fin de 2022, les premiers souhaitant récupérer des salles de classe
pour les transformer en appartements de prestige, réduisant d’autant les locaux disponibles pour
les activités de l’institut et fragilisant encore sa situation financière. L’ambassadeur n’est pas
intervenu pour arbitrer entre les positions divergences des deux administrations placées sous
son autorité. Un amendement au bail a été signé en mai 2023, entérinant la restitution d’une
partie des locaux utilisés et entraînant mécaniquement une réduction des loyers.
La situation n’a évolué en faveur de l’IFCSL que très récemment. L’administrateur des
Pieux établissements nouvellement nommé, a proposé que soit consentie une libéralité de 30 %
du loyer mensuel dû à compter du dernier trimestre 2023 et jusque fin 2024. Cette proposition
a été approuvée par l’ambassadrice après avoir reçu l’avis favorable de la congrégation générale
des Pieux établissements du 6
juillet 2023. Toutefois, cette disposition n’a pas été inscrite par
avenant dans le bail et sa pérennité n’est pas assurée. L’IFCSL, compte tenu de sa faible marge
de manœuvre pour conduire ses actions, a besoin de sécuriser cet engagement qui pourrait sinon
être remis en cause. Par ailleurs, l’échéance de cette libéralité paraît trop proche pour que
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
57
l’Institut puisse déployer des projets ou des actions destinées à lui procurer des recettes
supplémentaires.
L’inscription prévue de cet accord dans un cadre plus large et pérenne de coopération
avec les Pieux, sous l’autorité de l’ambassadrice, offrirait des perspectives positives à l’IFCSL
et, par suite, à la politique d’influence de l’ambassade de France près le Saint-Siège.
3.4
Un accord pérenne avec les Pieux établissements pour renforcer
l’influence française
À la fin 2023, l’IFCSL et les Pieux établissements ont négocié un accord qui couvre
plusieurs enjeux.
Ce projet d’accord prévoit une mutualisation des espaces pour un accueil commun des
apprenants, des pèlerins, des touristes, des abonnés à la médiathèque, …Cet accueil serait
localisé à l’Institut. Les pèlerins bénéficiaient auparavant d’un espace dédié au Centre d’accueil
des Pieux établissements, rue Giovanna d’Arco (cf. rapport sur les Pieux établissements).
L’IFCSL récupèrerait les espaces libérés par le Centre d’accueil pour ses activités de cours. En
contrepartie, les Pieux établissements pourraient pérenniser la baisse de loyer de l’IFCSL. Avec
la baisse liée à la réduction de la superficie des locaux, le loyer serait ainsi réduit en année de
pleine de près de 100 000 €. Cette réduction serait une contribution très significative à la
maîtrise des coûts de l’Institut.
Cet accord prévoirait par ailleurs une collaboration pour le financement et la création
d’un centre d’études « Religions et sociétés » évoqué supra. Ce projet «
permettrait à des
étudiants et des chercheurs de toutes les rives de la Méditerranée de se rencontrer à Rome pour
un temps d’étude sur ses enjeux. Le financement ne devrait pas peser sur l’EAF : les Pieux
établissements et des partenaires privés devraient y participer »
.
Ce projet de l’Institut et du poste a pour objectif de recréer un courant d’échanges
structuré avec le Saint-Siège, portant en particulier sur les relations entre religion et société. Il
s’agirait, en partenariat avec les universités pontificales et la recherche francophone en matière
de religions, de promouvoir la recherche francophone sur les religions dans le monde et l’étude
du fait religieux en Méditerranée et en Afrique subsaharienne. En partenariat avec l’École
française de Rome, le centre pourrait accueillir des doctorants ou post-doctorants poursuivant
des travaux sur les mondes méditerranéens. Les axes de ce centre d’études ainsi que ses
modalités de fonctionnement
54
sont en cours de définition (annexe n°1).
La concrétisation de ce projet constitue une avancée, et elle est doit à ce titre être
encouragée. En effet, l’IFCSL jouit d’une assise historique réelle avec le centre
qui, depuis sa
54
Un programme à cinq ans est défini, incluant les principaux colloques à venir. Chaque année un
programme des activités conjointes sera élaboré avec un budget prévisionnel. En 2023, 30 000 € ont été versés à
ce titre par les Pieux établissements et 50.000€ le seront sur 2024. Une comptabilité analytique sera élaborée,
distinguant les activités du centre, subventionnables, et celles, habituelles, de l’EAF, non éligibles à ce
financement. Le programme de recherche et universitaire intègrera deux partenaires locaux (pouvant être une
université pontificale, une académie, un dicastère …) et français ou francophone (université ou centre de
recherche).
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
58
fondation en 1945, avait accueilli nombre de personnalités politiques, intellectuelles et
religieuses dont plusieurs Papes (Jean XXIII, Paul VI, Jean-Paul II).
Cet accord global doit permettre d’apporter des financements complémentaires
importants à l’Institut pour ses activités stratégiques. L’apport actuel des Pieux établissements,
de l’ordre de 57 000 € en 2023 et de 104 000 € en 2024, sous forme de réduction de loyer, ne
constitue pas une ressource pérenne puisque limitée à fin 2024 et ne permet pas d’augmentation
des programmes de bourses destinés aux ecclésiastiques. Par ailleurs, à ce stade, le volume des
bourses demeure inchangé (22 financées par les Pieux en 2024 comme en 2023), ainsi que le
financement de cours de langue au bénéfice de membres de la Curie et de l’École des nonces,
soit un apport de seulement 65 000 €.
Compte tenu de l’importance des ressources des Pieux, un engagement financier plus
fort et pérenne est souhaitable, notamment pour le financement des bourses linguistiques et de
recherche. La remise en ordre attendue de leur gestion est de surcroît susceptible de dégager
des marges financières supplémentaires dont une partie pourrait être utilisable pour soutenir le
rayonnement et l’influence de la France auprès du Saint-Siège à travers l’IFCSL.
Le ministère souscrit à l'inscription dans un cadre pluriannuel du partenariat entre les
Pieux établissements et I'IFCSL, mais indique que ce partenariat «
pourra éventuellement être
déconnecté du renouvellement stricto sensu du bail
» qui lie I'IFCSL aux Pieux établissements.
Il est cependant nécessaire de répondre durablement aux enjeux liés à la localisation de l’Institut
et au poids de sa charge immobilière, alors même que les Pieux établissements et l’Institut
relèvent de la même autorité et que les premiers disposent d’un niveau très élevé de ressources.
(Secrétaire générale du MEAE, ambassade) Inscrire le partenariat de
l’IFCSL avec les Pieux établissements dans un cadre pluriannuel afin de faciliter les projets
communs, d’assurer le niveau de financement requis par un nouveau centre d’études et
d’accroître significativement les programmes de bourses dans l’objectif d’accroître l’influence
française.
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ______________________
L’IFCSL a une activité multiple correspondant à celle d’un établissement à autonomie
financière classique du ministère des affaires étrangères, mais aussi héritière du Centre Saint-
Louis qui, depuis 1945, a été un foyer de réflexion intellectuelle tourné vers le Saint-Siège et
les enjeux touchant la religion. Seul centre culturel français à Rome, l’IFCSL a longtemps été
doté d’une assise économique solide en raison du succès des cours de français et des
certifications qu’il délivre. Son taux d’autofinancement de plus de 90 % a constitué un résultat
remarquable, même s’il s’est dégradé récemment avec la crise sanitaire. Les efforts entrepris
depuis, tant pour maîtriser les dépenses que pour rechercher de nouvelles recettes, sont
appréciables mais la recherche d’économies ne doit pas conduire à affaiblir cet instrument
efficace d’influence dont dispose la France à Rome et près le Saint-Siège alors que d’autres
voies sont possibles.
Le partenariat enfin envisagé avec les Pieux établissements est un pas important qui
augure d’une collaboration constructive et utile au renforcement de l’influence française
auprès du Saint-Siège. Les financements apportés doivent permettre notamment la mise en
L’AMBASSADE DE FRANCE PRÈS LE SAINT-SIÈGE ET L’INSTITUT FRANÇAIS CENTRE
SAINT-LOUIS
59
œuvre d’un projet de centre d’études qui constituerait une opportunité de valoriser la recherche
française sur les religions et pourrait constituer un pont vers les universités et académies
pontificales. La création récemment décidée d’un réseau d’alumni pourra venir appuyer
l’effort fait sur le dispositif de bourses. Celles-ci connaissent un succès important qui devrait
logiquement conduire à renforcer l’effort financier correspondant pour accroître leur nombre.
Dans cette perspective, il est impératif que le partenariat avec les Pieux soit pérennisé
et que leurs financements aux actions de l’IFCSL, centre de recherche et bourses soient accrus.
L’enjeu pour l’ambassade est de définir et mettre en œuvre une stratégie qui contribue plus
efficacement à l’influence de la France auprès du Saint-Siège et dans le monde chrétien.
L’Institut français Centre Saint-Louis et les Pieux établissements constituent des outils
d’exception à sa disposition. Cette configuration unique est au service de l’objectif partagé par
ces deux acteurs de renforcer le rayonnement de la France auprès du Saint-Siège, et plus
largement à Rome.