COMMUNIQUÉ DE PRESSE
Le 8 avril 2025
Communication à la commission des finances du Sénat
LES TÉLÉCONSULTATIONS
Les téléconsultations ont pour objet de permettre à un professionnel médical de réaliser
une consultation à distance à un patient, au moyen d’un dispositif utilisant les technologies
de l’information et de la communication. Lors des confinements sanitaires liés à la pandémie
de covid-19, elles ont permis d’assurer la continuité des soins : leur nombre est passé de
moins de 140 000 en 2019 à plus de 18 millions en 2020. Selon les objectifs affichés par les
pouvoirs publics, les téléconsultations constituent un levier de transformation du système
de soins puisque d’une part, elles favorisent l’accès aux soins dans les zones souffrant d’un
déficit d’offre médicale et pour des publics cibles ; d’autre part, elles permettent de libérer
du temps médical et donc d’augmenter le nombre de patients examinés par les médecins.
Une place modeste dans l’offre de soins
La part des téléconsultations dans l’offre de consultation occupe une place modeste et en
érosion depuis la fin de la pandémie de covid-19 jusqu’à atteindre un niveau inférieur à celui
fixé par la convention d’objectifs et de gestion passée entre l’État et la Caisse nationale de
l’assurance maladie (Cnam) pour la période 2019-2022. En effet, ces téléconsultations
représentent une faible part des actes médicaux : elle s’élève en 2023 à 3,2 % pour les médecins
libéraux et les centres de santé et à 1,4 % pour le secteur hospitalier. De même, l’assurance
maladie a remboursé 266 M
€
d’actes à distance, soit 3 % des remboursements de l’ensemble
des consultations (8,1 Md
€
). Ces niveaux sont très inférieurs à ceux constatés dans les pays
nordiques, au Royaume-Uni et en Espagne.
L’État a choisi de ne plus fixer d’objectifs quantitatifs
à la Cnam dans la convention qui les lie pour la période 2023-2027 ; il n’en demeure pas moins
que le nombre de téléconsultations réalisées est insuffisant pour que celles-ci répondent aux
attentes associées à leur potentiel.
Une divergence entre les pratiques et les objectifs poursuivis
Depuis leur prise en charge dans le droit commun de l’assurance maladie en 2018,
les téléconsultations se sont développées sans qu’une stratégie claire des pouvoirs publics,
assortie de leviers identifiés et d’indicateurs pertinents pour atteindre ces cibles, n’ait
réellement été arrêtée. Afin que ces actes ne se résument pas à une simple modalité alternative
à des consultations en présence du patient, la stratégie des pouvoirs publics doit désormais
être affinée et reposer davantage sur le rôle de chef de file confié à la direction générale de
l’offre de soins du ministère chargé de la santé. Contrairement au principal objectif recherché,
les téléconsultations ont jusqu’à présent eu un impact faible sur l’accès aux soins dans les zones
d’intervention prioritaire, caractérisées par une offre de soins insuffisante. Le profil moyen d’un
patient qui téléconsulte est jeune et très urbain ; à elle seule, l’Île-de-France concentre plus de
la moitié des téléconsultations réalisées en France. De même, à ce jour, les personnes âgées et
celles en situation de handicap résidant dans des établissements sociaux et médico-sociaux
bénéficient très insuffisamment de ces actes. L’usage des téléconsultations est également
faible pour les patients souffrant de maladies chroniques et les personnes placées sous-main
de justice, en dépit des enjeux associés. En revanche, les plateformes de téléconsultation
peuvent visiblement apporter une réponse à des patients dépourvus de médecin traitant, et,
dans une moindre mesure, aux bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire. Par ailleurs,
les téléconsultations sont faiblement intégrées dans les pratiques des professionnels de santé
et trop peu utilisées pour prendre en charge les soins non programmés caractérisés par un
degré d’urgence plus ou moins élevé. Les communautés professionnelles territoriales de santé
et les maisons de santé pluriprofessionnelles ne les intègrent pas suffisamment pour assurer
une disponibilité médicale indispensable à la mise en place d’usages territorialisés de la
télémédecine. Ainsi, en septembre 2024, seules 37 structures étaient référencées pour
organiser des téléconsultations dans un cadre territorial et près des trois quarts des
départements
n’avaient
aucune
organisation
référencée
permettant
de
respecter
la convention organisant les rapports entre les organismes d’assurance maladie et les médecins
libéraux signée le 4 juin 2024. Enfin, le développement des téléconsultations pourrait
permettre de dégager des économies significatives (en évitant notamment des déplacements
et des passages aux urgences). Les assises de la téléconsultation, qui devraient se tenir à l’été
2025, doivent être mises à profit pour définir une nouvelle stratégie qui explicite l’intégration
efficiente des téléconsultations, notamment des plateformes, dans l’offre de soins.
Un développement souhaitable des téléconsultations sous certaines conditions
La Cour estime souhaitable que certains aménagements soient envisagés pour favoriser
le développement des téléconsultations, au regard de leur potentiel en termes d’amélioration
de l’offre de soins. Concernant le cadre juridique global, bien que le plafond d’activité
en télémédecine ait été assoupli, quelques aménagements supplémentaires gagneraient à être
examinés. Le plus important d’entre eux consisterait à supprimer la condition tenant
à l’absence de médecin traitant désigné pour les patients résidant dans des zones
d’intervention prioritaire, voire la condition tenant à l’absence d’organisation territoriale
référencée.
Par ailleurs, il est souhaitable de prévoir et développer la possibilité pour les sociétés
de téléconsultation d’intervenir à titre subsidiaire pour prendre en charge des demandes
de soins non programmés dans le cadre des services d’accès aux soins. Les sociétés
de téléconsultation, dont le statut est en cours de mise en
œ
uvre, doivent respecter des
exigences en matière de structuration juridique et de gouvernance, de déontologie, de qualité
des soins et de sécurité, ainsi que d’interopérabilité des solutions numériques utilisées. En
revanche, une régulation trop stricte des téléconsultations pourrait freiner les usages et, par
suite, leur contribution à l’accès aux soins.
Les limites cliniques inhérentes aux téléconsultations
appellent une attention accrue de l’ensemble des acteurs et des études complémentaires pour
garantir la qualité et la sécurité des diagnostics et des prescriptions à distance.
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