Le lundi 5 février 2024, le maire du Havre, M. Édouard Philippe, ancien Premier ministre, a présenté au conseil municipal du Havre le rapport d’observations définitives de la chambre régionale des comptes sur la gestion de la ville au cours de la période 2018-2021.
Une situation financière consolidée
Au cours de cette période, la ville du Havre, la plus importante de la région Normandie par le nombre d’habitants (172 067 habitants en 2021) a vu une amélioration de sa situation financière, avec des ressources fiscales stables, des dotations et participations substantielles de l’Etat, et des charges maîtrisées, malgré des dépenses de personnel restant à un niveau élevé en dépit de la décrue des effectifs municipaux, notamment en raison d’une augmentation sensible du recours aux emplois non permanents.
La ville a réussi à mener à bien un programme d’équipement ambitieux (entre 41 et 43 millions d’euros par an, sauf en 2020), tout en parvenant à réduire de près de 20 % son encours de dette, ramené à 228 millions d’euros. La programmation pluriannuelle des investissements, si elle s’est améliorée, reste perfectible : le contenu de certaines autorisations de programme gagnerait à être précisé.
Un respect relatif des prérogatives du conseil municipal
La chambre a constaté que l’assemblée délibérante n’était pas toujours saisie par l’exécutif de l’ensemble des questions relevant de sa compétence (bilan annuel des marchés publics, procédures de cessions immobilières, décisions d’occupation du domaine public, définition de certaines composantes des primes versées au personnel municipal, avantages en nature, débat annuel sur la formation des élus, etc.).
Une gestion patrimoniale perfectible
L’essentiel du travail de la chambre a porté sur la politique de gestion et de valorisation du patrimoine immobilier de la ville (en 2021, 630 000 m2, 519 équipements et bâtiments).
La politique de cessions peine à s’inscrire dans une démarche ambitieuse, à l’exception de quelques programmes coordonnés, comme « Réinventer le Havre ». D’un point de vue strictement budgétaire, le coût total des acquisitions réalisées au cours de la période sous revue (21,5 millions d’euros) a été supérieur de plus de 4 millions d’euros aux produits de cession (17,5 millions d’euros).
La déclinaison de cette politique souffre de procédures insuffisamment transparentes. La chambre a ainsi constaté que les avis des domaines portant sur l’évaluation des biens à céder n‘étaient pas produits au conseil municipal, sans que l’argument de la confidentialité des négociations puisse être valablement invoqué par la ville.
La gestion des occupations du domaine public (plus de 900 bénéficiaires) est éclatée entre plusieurs directions et les instruments de gestion ne sont pas harmonisés. La chambre a constaté plusieurs dizaines de conventions d’occupation conclues pour des durées anormalement longues au regard du principe de précarité de l’occupation, ainsi que l’inclusion irrégulière dans le domaine public de plusieurs locaux commerciaux et des entorses au caractère personnel et concurrentiel de l’occupation.
Le principe de l’occupation du domaine public à titre onéreux est devenu l’exception. En 2021, sur les 4 610 conventions conclues avec des associations, 160 seulement l’avaient été à titre onéreux, et sur les 275 conventions avec des preneurs non associatifs, 105 l’avaient été à titre gratuit, sans délibération du conseil municipal, seul compétent pour accorder la gratuité. La réévaluation des redevances et des charges dues par les occupants est apparue erratique, ce qui pose la question globale de la valorisation de ce vaste patrimoine.
La chambre a recommandé à la ville du Havre de définir un schéma directeur immobilier, outil qui permettrait de planifier les décisions immobilières stratégiques, en les fondant sur une connaissance précise de l’état des bâtiments, un chiffrage prévisionnel de leur entretien et sur une cartographie des usages du domaine public.
La nécessité de développer le contrôle interne, pour maîtriser les risques de gestion
L'importance du budget de la ville et les engagements pris à l’égard d’organismes périphériques (en 2021, 409, dont 341 associations) justifieraient la mise en place d'un dispositif opérationnel de maîtrise des risques juridiques, financiers et comptables, en particulier pour les marchés publics (en moyenne, près de 65,3 millions d’euros par an).
Dans ce dernier domaine, la chambre a constaté que les achats d’un montant inférieur au seuil réglementaire de 90 000 euros HT ne faisaient l’objet d’aucune contrôle interne et qu’aucune famille d’achats n’avait été définie pour distinguer les besoins homogènes récurrents en matière de travaux, de sorte que le respect des seuils de la commande publique n’était pas garanti. La ville gagnerait, à cet égard, à mettre en place un pilotage coordonné des achats, depuis leur programmation jusqu’au bilan des consommations, et à anticiper ses besoins à l’échelle de l’ensemble des services communaux.
Un contrôle du temps de travail à améliorer
La chambre a constaté que la ville avait attendu juin 2021 pour aligner la durée annuelle du temps de travail effectif des agents municipaux sur les 1 607 heures réglementaires et qu’un nombre important d’agents bénéficiaient toujours d’heures supplémentaires sans être astreints à pointer lorsque la réglementation l’exige.
***
Contacts presse :
Mme Sabra Bennasr-Masson
Magistrate
02 76 27 72 82
07 81 67 34 34
sabra.bennasr-masson@crtc.ccomptes.fr
Retrouvez toutes les publications et l’actualité de la Chambre régionale des comptes Normandie sur : https://www.ccomptes.fr/fr/crc-normandie
Télécharger le communiqué de presse