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FISCALITÉ LOCALE
ET ENTREPRISES
Synthèse
Mai 2014
Conseil des prélèvements obligatoires
2
Fiscalité locale et entreprises - Synthèse - Conseil des prélèvements obligatoires - mai 2014
g
AVERTISSEMENT
Le Conseil des prélèvements obligatoires est chargé
d'apprécier l'évolution et l'impact économique, social
et budgétaire de l'ensemble des prélèvements obliga-
toires, ainsi que de formuler des recommandations sur
toute question relative aux prélèvements obligatoires
(loi n° 2005-358 du 20 avril 2005). Le présent docu-
ment est destiné à faciliter la lecture et l'exploitation
du rapport du Conseil des prélèvements obligatoires.
Seul le texte du rapport engage le Conseil.
SOMMAIRE
3
Fiscalité locale et entreprises - Synthèse - Conseil des prélèvements obligatoires - mai 2014
Introduction
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
5
1
Historiquement basée sur des assiettes aisément territorialisables, la fiscalité locale
des entreprises s’est complexifiée au fil de la décentralisation
. . . . . . . . . . . . . . . . . . .7
2
La création de la contribution économique territoriale a favorisé la compétitivité
des entreprises et a amélioré la cohérence des assiettes fiscales locales et
nationales
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1 3
3
La
fiscalité
locale
constitue
un
facteur
parmi
beaucoup
d’autres
dans les choix d’implantation des entreprises
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .1
7
4
Des
améliorations
à
la
marge
de
la
fiscalité
locale
des
entreprises
sont
possibles
mais
des
évolutions
substantielles
relèvent
d’un
débat
plus global . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .1
9
Conclusion 
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .2 5
INTRODUCTION
5
Fiscalité locale et entreprises - Synthèse - Conseil des prélèvements obligatoires - mai 2014
Le 24 juillet 2013, la Commission des
finances de l’Assemblée nationale a
saisi le Conseil des prélèvements obli-
gatoires (CPO) pour qu’il traite du
thème « fiscalité locale et entre-
prises »
(1)
.
Si la f
iscalité locale constitue un thème
d’étude régulièrement examiné, son lien
avec
les
entreprises
constitue
un
domaine peu exploré. L’approche rete-
nue dans le cadre du rapport est en ce
sens novatrice :
- d’une part, elle analyse la fiscalité
locale
sous
l’angle
du
redevable
« entreprise » et non sous l’angle des
collectivités territoriales bénéficiaires de
l’impôt, alors que la quasi-totalité des
rapports disponibles sur la fiscalité
locale
retiennent
cette
seconde
approche ;
- d’autre part, elle propose une défini-
tion et une classification de la notion de
« fiscalité locale dont sont redevables
les entreprises », laquelle ne faisait pas,
à la connaissance du CPO, l’objet d’une
acception
claire
et
communément
admise.
À
ce titre, le CPO considère que
cette notion recouvre, au-delà de la fis-
calité économique locale, l’ensemble
des impositions concernant tout ou par-
tie les entreprises au titre d’une implan-
tation locale, de manière directe ou de
manière indirecte.
Le CPO s’est prioritairement attaché à
mettre en perspective les différents
enjeux que recouvre pour les entre-
prises la problématique « fiscalité
locale et entreprises »
(2)
, sans cepen-
dant ignorer totalement le lien étroit
entre cette question et les finances
locales.
En effet, la fiscalité locale à laquelle
sont assujetties les entreprises se voit
assigner plusieurs objectifs, lesquels
sont potentiellement contradictoires :
financer les services publics locaux,
participer à la couverture des coûts
engendrés par l’implantation d’une
entreprise sur un territoire, inciter ou
corriger
des
comportements
en
termes d’économie ou d’environne-
ment, prolonger au niveau local des
politiques économiques conçues au
niveau national, le cas échéant, être
un outil d’aménagement du territoire.
_________________
(1)
Par commodité de langage, le rapport emploie indifféremment les termes « fis-
calité locale dont sont redevables les entreprises » et « fiscalité locale des entre-
prises ».
(2)
Le détail des analyses ayant nourri le rapport général est retracé dans quatre rap-
ports particuliers consultables sur le site Internet de la Cour des comptes,
www.ccomptes.fr/CPO
Fiscalité locale et entreprises - Synthèse - Conseil des prélèvements obligatoires - mai 2014
6
Après avoir dressé une cartographie de la
fiscalité locale des entreprises et analysé
la dynamique historique ayant contribué à
la façonner, le rapport s’attache à répon-
dre à trois questions :
- la réforme de la fiscalité locale des entre-
prises mise en œuvre en 2010 a-t-elle à ce
stade atteint ses objectifs pour les entre-
prises ?
- la fiscalité locale des entreprises et la
manière dont elle s’articule avec la fisca-
lité nationale constitue-elle un ensemble
cohérent
et
favorable
à
la
compétitivité
(3)
?
- la fiscalité locale des entreprises, prise
globalement, constitue-t-elle un détermi-
nant de l’attractivité des territoires pour
les entreprises ?
Bien qu’il ne s’agisse pas de son objet pre-
mier, le rapport émet certaines proposi-
tions, quand le Conseil l’a jugé opportun.
________________
(3)
Le CPO a choisi d’envisager la question de la cohérence sous l’angle des assiettes
taxables.
7
Fiscalité locale et entreprises - Synthèse - Conseil des prélèvements obligatoires - mai 2014
1
Historiquement basée sur des
assiettes aisément territoriali-
sables, la fiscalité locale des
entreprises s’est complexifiée
au fil de la décentralisation
La fiscalité locale des entreprises est
éclatée en un grand nombre d’impo-
sitions dont le montant est complexe
à évaluer
Le CPO retient dans la définition de la
« fiscalité locale dont sont redevables
les entreprises » tous les impôts et
taxes auxquels sont assujetties les
entreprises au titre de leur implanta-
tion locale
La fiscalité locale des entreprises
comprend, au-delà de la seule accep-
tion traditionnelle de la fiscalité éco-
nomique locale, l’ensemble des impo-
sitions pesant pour tout ou partie sur
les entreprises au titre d’une implan-
tation locale, de manière directe ou de
manière indirecte.
Toute cette fiscalité ne relève pas seu-
lement d’une activité « économique ».
Certaines impositions sont « ponc-
tuelles » ou « évènementielles » et
leur fait générateur n’est pas expres-
sément lié à une activité économique.
Le produit de cette fiscalité est difficile
à évaluer et ne peut être approché que
par le biais d’une estimation
Au total, près de soixante-dix imposi-
tions
ont
été
recensées.
L’identification précise de ces imposi-
tions est complexe car il n'existe pas
de suivi coordonné et exhaustif au
sein de l’État. Dans ces conditions, le
recensement effectué, même s’il est
foisonnant, ne peut probablement pas
être considéré comme parfaitement
exhaustif et définitif.
La fiscalité locale des entreprises
recouvre
de facto
deux catégories
assez différentes :
- à hauteur de 43 Md€, les impositions
réellement locales sur les entreprises,
qui peuvent effectivement être terri-
torialisées ;
- à hauteur de 16 Md€, les impositions
locales sur les entreprises qui sont en
réalité des impositions nationales
allouées aux collectivités territoriales.
8
Fiscalité locale et entreprises - Synthèse - Conseil des prélèvements obligatoires - mai 2014
Historiquement basée sur des assiettes aisément
territorialisables, la fiscalité locale des entreprises
s’est complexifiée au fil de la décentralisation
______________________
(4)
Dont taxe sur les surfaces commerciales, taxe foncière sur les propriétés non
bâties, impôts sur les spectacles, jeux et divertissement, taxes sur les remontées
mécaniques etc.
Le recensement des impositions dont sont redevables les entreprises
au titre d’une implantation locale
Nom de l’imposition
Montant 2012 (Md€)
Imposition locales territorialisées sur les entreprises
Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE)
y/c taxe additionnelle pour frais de CCIR
13,2
Cotisation foncière des entreprises (CFE)
y/c taxe addi-
tionnelle pour frais de CCIR et CMRA
8
Taxe foncière sur les propriétés bâties hors taxe d’enlève-
ment des ordures ménagères
8,1
Versement transport (IDF et hors IDF)
6,9
Impositions forfaitaires sur les entreprises de réseau
(IFER)
1,5
Taxe d’enlèvement des ordures
ménagères
(TEOM)
1,2
Autres impositions
(4)
4,4
Total
43,3
Impositions nationales sur les entreprises allouées aux collectivités territoriales
Taxe intérieure sur la consommation
de produits
éner-
gétiques (TIPCE)
10,9
Taxe spéciale sur les conventions d’assurances (TSCA)
2,9
Taxe finale sur la consommation d’électricité (TFCE)
2
Autres impositions
0,5
Total
16,3
Source : DGFiP ; DGCL ; DGDDI ; traitements CPO
Historiquement basée sur des assiettes aisément
territorialisables, la fiscalité locale des entreprises
s’est complexifiée au fil de la décentralisation
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Fiscalité locale et entreprises - Synthèse - Conseil des prélèvements obligatoires - mai 2014
La mesure du produit de la fiscalité
locale des entreprises est complexe à
évaluer avec précision : d’une part,
pour certaines impositions, de l’ordre
d’environ 17 Md€
(5)
, l’administration
n’est pas en mesure de distinguer la
part acquittée par les contribuables
« entreprises » de celle des contribua-
bles « ménages » ; d’autre part, la
nature de l’information disponible
auprès de l’administration en charge
n’est
pas
toujours
parfaitement
homogène.
La principale imposition locale sur les
entreprises est la contribution écono-
mique territoriale (CET), pour un mon-
tant de 21,2 Md€ en 2012.
Elle est composée de la CVAE, à hau-
teur de 13,2 Md€, y compris la taxe
additionnelle pour les chambres de
commerce et de la CFE à hauteur de
8,0 Md€, y compris les taxes addition-
nelles sur les chambres de commerce
et
les
chambres
régionales
des
métiers et de l’artisanat. Les imposi-
tions forfaitaires sur les entreprises de
réseau (IFER), créées en même temps
que la CET, représentent un prélève-
ment de l’ordre de 1,5 Md€.
Ainsi, la fiscalité locale représente
environ 13 % de l’ensemble des prélè-
vements obligatoires dont les entre-
prises sont redevables.
L’imposition  locale  des  entreprises,
justifiée par les biens publics locaux
dont  elles  bénéficient,  présente  des
différences  sensibles  d’approche  au
sein de l’OCDE
L’existence
d’une
imposition
des
entreprises à l’échelon local est justi-
fiée dans son principe, en permettant
de couvrir l’utilisation directe et indi-
recte des biens publics résultant de
leur activité.
Par comparaison avec d’autres pays
de l’OCDE, l’imposition locale des
entreprises
présente
en
France
quelques spécificités. Si des taxes fon-
cières existent dans la grande majo-
rité des pays de l’OCDE, leur poids est
comparativement
important
en
France. Par ailleurs, à la différence de
nombreux pays de l’OCDE, aucune
fraction de l’impôt sur le bénéfice des
entreprises n’est affectée en France
aux administrations locales. La France
se distingue également comme étant
le seul pays de l’échantillon retenu
dans le rapport à disposer d’une taxe
locale assise sur les salaires : le verse-
ment transport. Enfin, le pouvoir de
modulation des collectivités territo-
riales sur les impositions des entre-
prises, bien que limité par la réforme
de la taxe professionnelle en 2010,
reste supérieur en France à ce qu’il est
en Allemagne et en Italie.
______________________
(5)
Sur la base d’approximations réalisées par la DGFiP, on peut estimer que les
entreprises représentent environ 20 % de ces 17 Md€.
Historiquement basée sur des assiettes aisément
territorialisables, la fiscalité locale des entreprises
s’est complexifiée au fil de la décentralisation
Fiscalité locale et entreprises - Synthèse - Conseil des prélèvements obligatoires - mai 2014
10
La fiscalité locale des entreprises s'est
fondée  à  l'origine  sur  des  assiettes
aisément  territorialisables,  mais  les
transferts  de  ressources  issus  de  la
décentralisation  ont  conduit  à  une
prolifération d'impositions
La fiscalité locale des entreprises a été
traditionnellement
basée
sur
des
assiettes facilement rattachables à un
territoire. La France a en effet choisi à
l’origine de l’asseoir sur la taxation des
facteurs de production, ce qui permet-
tait de territorialiser l’imposition locale.
Cependant, la nécessité de transférer
des recettes en parallèle du processus
de décentralisation a fait évoluer le pay-
sage fiscal local, notamment par le biais
de l’affectation progressive aux collecti-
vités du produit d’impositions sur les
entreprises. Or, la fiscalité transférée
dans le cadre de la décentralisation est
d’une nature différente de celle de la
fiscalité traditionnelle dont étaient
bénéficiaires les collectivités territo-
riales. En effet, une partie des impôts
transférés peut être assimilée à de
quasi-dotations,
sans
marges
de
manœuvre sur l’assiette et le taux.
En conséquence, des impositions sur les
entreprises
de
nature
réellement
locales coexistent aujourd’hui avec des
impositions nationales affectées aux
collectivités territoriales et la fiscalité
locale des entreprises se caractérise
par une pluralité d’assiettes : des
assiettes encore majoritairement fon-
cières, des assiettes de nature secto-
rielle dynamiques, des assiettes spéci-
fiques à un territoire…
En outre, des taxes au rendement par-
fois très faibles viennent s’ajouter au
système de taxation locale des entre-
prises. Les travaux du CPO ont permis
d’identifier, hors IFER, une quinzaine
d’impositions locales dont le produit
individuel est inférieur à 35 M€.
Conséquence de cet émiettement, la
charge administrative que représente la
gestion de la fiscalité locale par les
entreprises n’est pas négligeable. Les
entreprises rencontrées dans le cadre
du rapport n’ont pas été en mesure
d’identifier les coûts correspondants
aux obligations déclaratives liées à la
fiscalité locale, mais elles ont toutes mis
en avant les coûts répétés de modifica-
tion des systèmes d’information liés à la
création de nouvelles taxes et aux évo-
lutions de taxes plus anciennes, ainsi
que la multiplicité des déclarations
devant être réalisées.
Une  part  encore  significative  du  pro-
duit de la fiscalité directe locale sur les
entreprises  est  prise  en  charge  par
l'État
Avec la réforme de la fiscalité locale en
2010, la part de la fiscalité directe
locale prise en charge par l’État a dimi-
nué pour les communes, leurs groupe-
ments dotés d’une fiscalité propre et les
départements. Elle représente 15 %
pour les communes, 24 % pour les EPCI
et 13 % pour les départements.
Concernant plus particulièrement la
CET et les IFER, la part prise en charge
par l’État a également sensiblement
diminué avec la réforme. Elle s’élevait à
45 % en 2009 et à 22 % en 2012.
Historiquement basée sur des assiettes aisément
territorialisables, la fiscalité locale des entreprises
s’est complexifiée au fil de la décentralisation
Fiscalité locale et entreprises - Synthèse - Conseil des prélèvements obligatoires - mai 2014
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Le manque de lisibilité et de connais-
sance  de  l'imposition  locale  des
entreprises est accentué par des pro-
cessus de conception et de suivi écla-
tés et parcellaires
La fiscalité locale des entreprises fait
l’objet d’une conception et d’un suivi
non coordonné au niveau de l’État
En effet, la France ne dispose pas
d’une base de données centralisée et
exhaustive
sur
l’ensemble
des
mesures à caractère fiscal local en
vigueur. Les documents budgétaires –
l’annexe budgétaire des « voies et
moyens », le rapport sur les prélève-
ments obligatoires – sont soit incom-
plets,
soit
agrègent
des
impôts
« autres » ou « divers ». Par ailleurs,
plusieurs administrations sont en
charge du suivi de la fiscalité locale et
le suivi financier de son produit n’est
que partiellement réalisé au niveau
central. En conséquence, il n’existe
aucun document offrant la possibilité
d’évaluer et de suivre le niveau de la
pression fiscale locale.
Les associations de collectivités terri-
toriales analysent la fiscalité locale des
entreprises sous l’angle des recettes
Ces associations n’opèrent pas un
suivi agrégé de la fiscalité locale des
entreprises. Leur travail d’analyse et
de suivi se concentre sur les grandes
masses (fiscalité des ménages, fisca-
lité économique, fiscalité directe, fis-
calité indirecte) et sur les principales
impositions (CET, IFER, TASCOM) et a
pour seul objectif d’en mesurer les
recettes réelles et potentielles. Par ail-
leurs, elles font état d’un manque de
visibilité de leurs ressources fiscales.
Les organisations patronales abordent
la fiscalité sous un angle global
Les entretiens menés avec les princi-
pales organisations patronales dans le
cadre des travaux du CPO ont permis
de
constater
qu’en
dehors
des
périodes où des réformes sont à
l’étude, celles-ci apprécient le poids
des prélèvements obligatoires des
entreprises essentiellement sous un
angle global. Elles ne disposent pas
d’une approche spécifique de la fisca-
lité locale et des relations avec les col-
lectivités territoriales.
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Fiscalité locale et entreprises - Synthèse - Conseil des prélèvements obligatoires - mai 2014
2
La création de la contribution
économique territoriale a
favorisé la compétitivité des
entreprises et a amélioré la
cohérence des assiettes fiscales
locales et nationales
La taxe professionnelle renchérissait
les  coûts  de  production,  pénalisait
les  secteurs  exposés  à  la  concur-
rence  internationale  et  une  part
croissante de son coût était prise en
charge par l’
État
À l'origine, la taxe professionnelle
reposait sur une assiette composite.
Cette assiette comprenait, d'une part,
la valeur comptable des biens passi-
bles de la taxe foncière et des équipe-
ments et biens mobiliers, correspon-
dant aux investissements productifs
des entreprises et les salaires, d’autre
part. Elle correspondait à une taxation
des facteurs de production et non à
celle des capacités de production de
richesse des entreprises. L’objectif
visait à apporter des ressources sta-
bles aux collectivités territoriales.
Cet impôt était caractérisé par un très
fort dynamisme de ses bases et de ses
taux. La dispersion des taux induisait
des distorsions de concurrence entre
entreprises, selon leur localisation. Par
ailleurs, elle renchérissait les coûts de
production et pénalisait particulière-
ment les secteurs à forte intensité
capitalistique. Elle était complexe à
administrer et peu lisible pour le rede-
vable.
Enfin, une part croissante du coût de
la taxe professionnelle versée aux col-
lectivités territoriales était
de facto
supportée par l’État.
Le  remplacement  de  la taxe  profes-
sionnelle  par  la  contribution  écono-
mique  territoriale  atteint  globale-
ment son objectif de compétitivité
L’assiette « valeur ajoutée » qui consti-
tue le cœur de la réforme de 2010
répond à l’objectif d’une taxation de la
création de richesse par l’entreprise.
L’impact de la réforme s’analyse en
deux temps :
- elle porte d’abord sur l’effet initial de
la réforme, qui s’est traduite par un
allègement global de la fiscalité éco-
nomique locale, agissant comme une
mesure de soutien conjoncturel aux
entreprises et avec des effets durables
sur le niveau des impositions écono-
miques locales ;
La création de la contribution économique territoriale a
favorisé la compétitivité des entreprises et a amélioré la
cohérence des assiettes fiscales locales et nationales
14
Fiscalité locale et entreprises - Synthèse - Conseil des prélèvements obligatoires - mai 2014
- elle met ensuite en évidence l’effet
dynamique de la réforme, qui a modi-
fié la répartition sectorielle de la
charge fiscale résultant des imposi-
tions économiques locales en faveur
de l’industrie et des PME.
Dans les conditions fiscales de 2010,
toutes entreprises confondues, et en
tenant compte du dégrèvement tran-
sitoire, l’impôt économique local des
entreprises a baissé de 7,5 Md€ en
2010 par rapport à ce qu’il aurait été
en l’absence de réforme et le gain est
de l’ordre de 4 Md€ en régime de croi-
sière. 60 % des entreprises sont
gagnantes, 15 % ne voient pas leur
situation évoluer et 25 % sont per-
dantes.
Conformément à ses objectifs assu-
més, la réforme a été favorable à l’in-
dustrie et aux PME
Le secteur de l’industrie est le premier
bénéficiaire de la réforme. En valeur
absolue,
l’industrie
profite
d’une
baisse de sa charge fiscale de près de
2 Md€, soit 26 % de l’allègement glo-
bal, alors qu’elle produit 18,9 % de la
valeur ajoutée nationale. La réforme
bénéficie
également
aux
PME,
puisque les entreprises de moins de
1 M€ de chiffre d’affaires concentrent
35 % du gain fiscal initial de la
réforme, alors qu’elles représentent
seulement 14 % de la valeur ajoutée
nationale. Au total, l’ensemble des
entreprises dont le chiffre d’affaires
est inférieur à 3 M€ concentre la moi-
tié du gain fiscal initial de la réforme,
alors qu’elles représentent le quart de
la valeur ajoutée produite.
Cependant, la mise en œuvre de la
réforme s’est accompagnée d’effets
non prévus pour les entreprises assu-
jetties à la cotisation minimale de CFE
L’augmentation du nombre d’assujet-
tis à la CFE a été mécanique. En pre-
mier lieu elle résulte de la disparition
des équipements et biens mobiliers de
l’assiette de l’imposition, qui a fait pas-
ser des contribuables en-dessous du
seuil de base minimum, les faisant
alors entrer dans le dispositif. En
second lieu elle s’explique par les
effets de la jurisprudence du Conseil
constitutionnel sur le dispositif initial
de CET pour les bénéfices non com-
merciaux. Celle-ci a entraîné, pour les
professions libérales, un rétrécisse-
ment de leur base d’imposition à la
seule valeur foncière du local utilisé
et, lorsque la valeur du local était infé-
rieure à la base minimum de CFE, à
une imposition au titre de la cotisation
minimale de la CFE. En dernier lieu,
cette hausse a dépendu des politiques
locales des assemblées délibérantes
des communes et des EPCI en matière
de fixation des bases minimum.
Au total l’évolution de la CFE mini-
mum s’est révélée dans un premier
temps imparfaitement adaptée aux
facultés contributives des contribua-
bles les plus modestes en raison de
son caractère forfaitaire et vulnérable
aux effets de seuil. Les dispositions de
la loi de finances pour 2014 élargis-
sent encore les outils à la disposition
des collectivités pour piloter le sys-
tème de la cotisation minimale de CFE
et pour lisser les effets de seuils pour
les plus petits contribuables entre-
prises.
La création de la contribution économique territoriale a
favorisé la compétitivité des entreprises et a amélioré la
cohérence des assiettes fiscales locales et nationales
15
Fiscalité locale et entreprises - Synthèse - Conseil des prélèvements obligatoires - mai 2014
La réforme produit des effets structu-
rels durables sur la répartition secto-
rielle des impositions économiques
locales
Le principal gagnant structurel de la
réforme de la taxe professionnelle est
le secteur de l’industrie manufactu-
rière. Sa part relative dans le panier
d’impositions économiques locales
baisse de 3,8 points et se stabilise
autour de 21 % de la charge fiscale. En
valeur absolue, la baisse est de 2 Md€.
Par ailleurs, la réforme s’est traduite
par un allègement substantiel de la
cotisation acquittée par les entre-
prises dont le chiffre d’affaires est
inférieur à 10 M€ : leur part dans l’im-
position totale diminue de 8,5 points,
passant de 29,5 % de la cotisation du
panier théorique de taxe profession-
nelle en 2010 à 21,0 % du panier de
CET – IFER en 2012.
La fiscalité économique locale a connu
depuis 2010 une évolution modérée
conformément aux objectifs de la
réforme
Les niveaux d’imposition ont été
moins dynamiques en raison de l’ab-
sence de pouvoir de taux des collecti-
vités territoriales sur la CVAE et d’une
activation limitée du levier fiscal sur
les taux de CFE.
L’évolution des assiettes fiscales de la
CVAE et de la CFE reste en revanche
encore incertaine
Les bases de CFE sont dynamiques,
notamment sous l’effet du dispositif
des
bases
minimum
de
CFE.
L’évolution des bases de CVAE est plus
complexe à analyser. Le fort ralentis-
sement de la croissance des bases de
CVAE reflète d’abord la dégradation
de la conjoncture en 2012 et les fluc-
tuations constatées de 2010 à 2012
pèsent avec un effet de décalage sur
le produit de CVAE reversé aux collec-
tivités territoriales.
La réforme de la fiscalité locale des
entreprises va se poursuivre avec la
révision des valeurs locatives cadas-
trales 
Le système existant d’évaluation des
valeurs locatives est déconnecté des
valeurs de marché et excessivement
complexe à administrer. Le niveau
relatif de ces valeurs ne tient pas
compte de la diversité et de la dispa-
rité des évolutions des marchés loca-
tifs à travers le territoire.
Une réforme des valeurs locatives des
locaux commerciaux et profession-
nels
(6)
a donc été initiée et aura des
impacts sur les taxes foncières, la CFE
et la répartition de la CVAE entre col-
lectivités.
______________________
(6)
Les locaux industriels et les locaux d’habitation sont hors du champ de la
réforme.
Fiscalité locale et entreprises - Synthèse - Conseil des prélèvements obligatoires - mai 2014
16
La création de la contribution économique territoriale a
favorisé la compétitivité des entreprises et a amélioré la
cohérence des assiettes fiscales locales et nationales
Le dispositif prévoit de stabiliser la
répartition entre locaux d’habitation
et locaux professionnel afin d’éviter
un report mécanique de l’imposition
foncière des ménages vers les entre-
prises. En revanche, la réforme engen-
drera des transferts de charge entre
entreprises, variables selon les diffé-
rents marchés locatifs locaux.
In fine
, l’évaluation des effets redistri-
butifs de la réforme ne pourra pas
être effectuée avant la fixation des
nouveaux paramètres d’évaluation
par les commissions départemen-
tales. Le CPO estime nécessaire que
l’administration fiscale et les collecti-
vités territoriales organisent dès que
cela sera possible une communication
adaptée sur les modalités et les effets
de la réforme à l’attention des entre-
prises.
Localement  comme  nationalement,
la  fiscalité  des  entreprises  s’oriente
vers  une  taxation  davantage  basée
sur  la  richesse  produite  que  sur  les
facteurs de production  
La création de la CVAE, les réflexions
récentes sur l’EBE ou celles menées
au sein des
Assises de la fiscalité de
l’entreprise
témoignent
de
la
recherche d’assiettes fiscales davan-
tage assises sur la richesse produite.
Au niveau local, la coexistence de la
CVAE avec la CFE paraît constituer un
bon compromis au regard des conclu-
sions de la théorie économique, qui
estime adéquat pour la fiscalité locale
de conjuguer une assiette assise sur le
foncier et une autre assise sur la
valeur ajoutée. Aujourd’hui, la réparti-
tion de la charge fiscale locale au sein
des secteurs économiques est relati-
vement conforme à celle de la valeur
ajoutée. Les secteurs les plus taxés
par la fiscalité locale ne sont pas les
plus exposés à la concurrence interna-
tionale.
17
3
La fiscalité locale constitue un
facteur parmi beaucoup d’autres
dans les choix d’implantation des
entreprises
La moindre utilisation du levier fiscal
comme facteur d’attractivité des ter-
ritoires a été renforcée par les évolu-
tions récentes, au bénéfice de l’acti-
vation d’impositions facultatives sur
les entreprises
La suppression de la taxe profession-
nelle n’a eu qu’un impact relatif sur
l’autonomie financière des collectivi-
tés territoriales. En matière de fiscalité
économique directe locale, la réforme
a réduit le pouvoir de vote des taux
par les collectivités territoriales selon
une intensité variable, sans incidence
toutefois sur le pouvoir existant en
matière de fiscalité indirecte.
La réduction de l’autonomie fiscale
(7)
a renforcé la limitation de la concur-
rence fiscale entre collectivités
Antérieures à la suppression de la taxe
professionnelle, les études acadé-
miques
ne
permettent
pas
de
conclure avec certitude sur la réalité
de la concurrence fiscale entre collec-
tivités et sur son impact quant aux
choix de localisation des entreprises.
La spécialisation de la fiscalité écono-
mique depuis 2010 semble en tout
état de cause ne plus permettre une
concurrence verticale entre les terri-
toires fondée sur les taux d’imposi-
tion. Par ailleurs, la spécialisation des
impositions ne semble pas conduire à
une concurrence fiscale accrue entre
collectivités territoriales de même
niveau.
Les
leviers
fiscaux
semblent
aujourd’hui davantage utilisés par les
collectivités pour augmenter leurs res-
sources que pour être un facteur d’at-
tractivité
Pour faire face à l’effet de ciseau en
cours sur leurs ressources, les collecti-
vités territoriales tendent à utiliser
tous les leviers fiscaux disponibles
pour les augmenter. On note en effet
un mouvement perceptible d’activa-
tion des impositions facultatives sur
les entreprises et de recours aux taux
plafonds quand existe un coefficient
de modulation.
Fiscalité locale et entreprises - Synthèse - Conseil des prélèvements obligatoires - mai 2014
______________________
(7)
Dans le rapport, on entend par autonomie fiscale le pouvoir de modulation des
taux par les collectivités territoriales.
La fiscalité locale constitue un facteur parmi beaucoup
d’autres dans les choix d’implantation des entreprises
18
Fiscalité locale et entreprises - Synthèse - Conseil des prélèvements obligatoires - mai 2014
La fiscalité locale et les exonérations
liées  constituent  un  élément  parmi
d’autres dans les politiques d’attrac-
tivité des territoires
Pour les collectivités, ces politiques
d’attraction des entreprises sur leur
territoire correspondent à la capacité
à attirer et à retenir des activités nou-
velles et des facteurs de production.
Les aides et les prestations non moné-
tisées constituent le premier moyen
d’attractivité des territoires sur lequel
les collectivités investissent massive-
ment. Par ailleurs, la disponibilité de
l’offre foncière en faveur des entre-
prises est un levier important d’at-
tractivité qui peut être renforcé en
mobilisant certains leviers fiscaux.
Dans ce cadre, les exonérations fis-
cales, bien que limitées dans leur por-
tée et leur montant, sont considérées
par les entreprises comme un signal
positif dont l’impact ne doit pas être
négligé.
19
4
Des améliorations à la marge
de la fiscalité locale des
entreprises sont possibles mais
des évolutions substantielles
relèvent d’un débat plus global
Sur la base des acquis de la réforme
de 2010, il existe des voies d’amélio-
ration de la fiscalité locale des entre-
prises
Premier axe : consolider les acquis de
la réforme en matière de compétitivité
grâce à certaines simplifications
Est-il souhaitable d’affiner le calcul de
la CVAE pour certains secteurs écono-
miques ?
Le secteur financier, dont le secteur
des
assurances,
fait
l’objet
d’un
régime spécifique pour le calcul de la
valeur ajoutée fiscale. L’absence de
prise en compte des dotations et des
reprises de provisions sur immobilisa-
tions financières dans son calcul
accroît sa volatilité et, en consé-
quence, l’instabilité des ressources
des collectivités territoriales.
En première analyse, la prise en
compte de l’ensemble des agrégats
relatifs aux placements des entre-
prises d’assurances, y compris les
dotations et les reprises pour dépré-
ciation de la valeur des placements,
permettrait de lisser la volatilité de la
valeur ajoutée et donc celle des res-
sources des collectivités locales. Sur
moyenne période, la CVAE payée par
le secteur resterait identique, sans
accroissement de la charge fiscale
pour les entreprises d’assurance.
Si une intégration des dotations et des
reprises de provisions pour déprécia-
tion d’immobilisations financières
dans la valeur ajoutée devait être
admise pour les entreprises d’assu-
rance, il apparaîtrait difficile de ne pas
étendre cette mesure à l’ensemble
des entreprises du secteur financier.
En outre, une mesure transitoire d’ex-
clusion des reprises des provisions
antérieurement constituées et non
déduites de la valeur ajoutée initiale-
ment devrait être mise en œuvre. Les
premières années d’application de
cette mesure entraîneraient dès lors
une baisse de la base imposable des
sociétés d’assurances. Cette mesure
serait complexe à suivre et aurait un
coût pour les collectivités territoriales
lors des premières années d’applica-
Fiscalité locale et entreprises - Synthèse - Conseil des prélèvements obligatoires - mai 2014
Fiscalité locale et entreprises - Synthèse - Conseil des prélèvements obligatoires - mai 2014
20
Des améliorations à la marge de la fiscalité locale des
entreprises sont possibles mais des évolutions substantielles
relèvent d’un débat plus global
tion. Enfin, il n’est pas possible d’anti-
ciper à quel rythme se feraient les
dotations et les reprises.
Ce changement de méthode semble
donc présenter à court terme des
inconvénients
non
négligeables.
Aussi, nécessiterait-il en amont des
simulations très poussées sur son
impact financier, tant pour les redeva-
bles que pour les affectataires de la
CVAE concernée.
Est-il possible d’alléger la complexité
des règles régissant certaines imposi-
tions ?
Entre 2010 et 2012, le produit de la
taxe locale sur la publicité extérieure,
dont l’instauration est facultative, a
été multiplié par plus de trois pour
atteindre 153 M€. Cette taxe fait l’ob-
jet de critiques récurrentes de la part
des entreprises compte tenu de l’opa-
cité de ses règles d’établissement et
de gestion. Il n’existe aucun imprimé
CERFA pour sa déclaration : chaque
collectivité territoriale qui la met en
place est libre du procédé de déclara-
tion utilisé ; en outre toute installation
ou modification d’une enseigne ou
d’un panneau donne lieu à une décla-
ration nouvelle.
Sans remettre en cause l’existence de
cette imposition, qui répond notam-
ment à un objectif de limitation de la
prolifération des affichages publici-
taires, le CPO estime qu’il est néces-
saire que soit élaboré un imprimé
CERFA standardisé et que les déclara-
tions de taxe locale sur la publicité
extérieure soient annualisées.
Est-il possible d’aligner les modalités
de déclaration des effectifs de CVAE
sur ceux de la DADS ?
Les déclarations annuelles néces-
saires à la territorialisation de la CVAE
supposent que les entreprises répar-
tissent leurs effectifs en fonction de
leurs implantations géographiques
(établissement, mise à disposition de
salariés au profit d'une autre entre-
prise, chantier). En parallèle, les entre-
prises procèdent déjà par ailleurs à
une déclaration des effectifs dans le
cadre de la déclaration annuelle des
données sociales (DADS), sans toute-
fois localiser précisément les lieux
d'emplois.
Une mutualisation des deux déclara-
tions est techniquement possible mais
emporterait l’obligation d’harmoniser
la manière de décompter les effectifs,
ce qui ne serait pas sans conséquence.
Il faudrait :
- soit aligner le décompte des effectifs
CVAE sur la méthode DADS mais en
remettant ainsi partiellement en
cause le principe de territorialisation
de la CVAE, notamment pour les éta-
blissements installés sur plusieurs
communes ;
Fiscalité locale et entreprises - Synthèse - Conseil des prélèvements obligatoires - mai 2014
21
- soit aligner les modalités de calcul
des effectifs DADS sur ceux de la
CVAE, ce qui impliquerait une forte
complexification du processus de
déclaration des données sociales
puisque
des
établissements
« virtuels » devraient être créés pour
des besoins fiscaux, pour les sites ins-
tallés sur plusieurs communes.
En fonction de cette analyse, le CPO
est réservé sur les possibilités d’ali-
gnement des modalités de déclara-
tion des effectifs dans le cadre de la
CVAE et de la DADS.
Second axe : renforcer la gouvernance
de la fiscalité locale des entreprises
pour prévenir son émiettement et ren-
forcer son efficacité
Les travaux de CPO ont permis d’iden-
tifier certaines faiblesses dans la gou-
vernance de la fiscalité locale des
entreprises.
En
premier
lieu,
sa
conception et son suivi peu coor-
donné favorisent son opacité et sa
prolifération ; en second lieu, les col-
lectivités territoriales manquent de
visibilité sur le niveau attendu de leurs
ressources fiscales au moment du
vote de leur budget.
Afin d’améliorer la coordination de la
conception et du suivi de la fiscalité
locale des entreprises, il pourrait être
envisagé :
- d’une part, de réunifier la maîtrise
d’œuvre de la fiscalité locale des
entreprises au sein d’une seule direc-
tion rattachée au ministère de l’éco-
nomie et des finances, y compris
lorsque les dispositions prévues sont
appelées à être codifiées dans un
code autre que le code général des
impôts (code général des collectivités
territoriales, code de l’urbanisme,
code du tourisme….) ;
- d’autre part, de systématiser le
recours aux fiches d’évaluation préa-
lable pour toute mesure de nature fis-
cale, ainsi que le prévoient les articles
51 et 53 de la loi organique relative
aux lois de finances.
Depuis la réforme de 2010, la direc-
tion générale des finances publiques
(DGFIP) a accru son effort de commu-
nication d’informations aux collectivi-
tés territoriales : depuis janvier 2012,
elle communique aux principales
associations représentatives d’élus
locaux le calendrier national qui plani-
fie sur l’année la transmission des
données fiscales. Le suivi et le bilan
sont réalisés aux cours de réunions
semestrielles. Elle met par ailleurs à
disposition des comptables publics et
des services de la fiscalité directe
locale des DRFiP et des DDFiP des
outils de simulation pour répondre
aux demandes des collectivités terri-
toriales.
Des améliorations à la marge de la fiscalité locale des
entreprises sont possibles mais des évolutions substantielles
relèvent d’un débat plus global
Cependant, les différentes associa-
tions d’élus locaux rencontrées ont
regretté le caractère trop tardif de ces
transmissions, notamment concer-
nant les simulations de CVAE, interve-
nues en 2013 entre le 25 novembre et
le 6 décembre, alors que de plus en
plus
de
collectivités
territoriales
votent leur budget N+1 au mois de
décembre. Par ailleurs, les associa-
tions d’élus constatent que les collec-
tivités territoriales ne sont pas consul-
tées lors de la préparation du projet
de loi de finances.
Afin d’assurer une meilleure informa-
tion aux collectivités territoriales, le
CPO suggère que soit explorée la pos-
sibilité :
- d’avancer le délai de transmission à
chaque collectivité locale des mon-
tants de CVAE simulés pour N+1 et de
donner en milieu d’année N des ten-
dances nationales sur l’évolution de la
CVAE qui sera reversée en N+1 ;
- de s’appuyer de manière complé-
mentaire sur le rôle-relais joué au plan
national par les associations de collec-
tivités territoriales pour la communi-
cation de toute information relative à
une réforme ou un nouveau dispositif.
Troisième axe : supprimer certaines
petites taxes et resserrer autour des
grandes impositions le panier de res-
sources fiscales des collectivités terri-
toriales
Comme l’ont souligné des travaux
antérieurs du CPO et un récent rap-
port de l’Inspection générale des
finances, la création de multiples
taxes correspondant à des situations
locales très spécifiques présente de
nombreux inconvénients.
Le panier de ressources des collectivi-
tés territoriales issu de la fiscalité sur
les entreprises pourrait être resserré
autour de quelques grandes imposi-
tions
Au sein du panier d’impositions
locales sur les entreprises identifiées
dans le cadre de ce rapport, on relève
que les neuf impositions, dont le pro-
duit individuel dépasse 1 Md€, repré-
sentent plus de 90 % du produit
annuel total des impositions pour les-
quels la part des entreprises peut être
distinguée de la part des ménages ;
les quinze impositions, hors IFER, dont
le produit individuel est inférieur à
35 M€ représentent un montant glo-
bal de l’ordre de 150 M€. Un examen
du bien-fondé de ces petites taxes
Fiscalité locale et entreprises - Synthèse - Conseil des prélèvements obligatoires - mai 2014
22
Des améliorations à la marge de la fiscalité locale des
entreprises sont possibles mais des évolutions substantielles
relèvent d’un débat plus global
devrait être mené en tenant compte
toutefois des situations locales.
Les ressources fiscales des collectivi-
tés territoriales prélevées sur les
entreprises pourraient ainsi s’appuyer
sur un nombre limité de grandes
impositions : CVAE, CFE, IFER et taxe
foncières/TEOM, qui matérialisent le
lien entre une activité et un territoire
d’une part ; d’autre part, un nombre
limité d’impositions à caractère natio-
nal – droits de mutation, taxe spéciale
sur les conventions d’assurance - qui
leurs ont été affectées pour faire face
aux dépenses issues des transferts de
compétence.
Compte tenu du principe de libre
administration des collectivités terri-
toriales, celles-ci devraient trouver des
compensations à la suppression de
certaines taxes via la diminution de
leurs dépenses, le cas échéant via une
augmentation des taux des imposi-
tions sur lesquelles elles disposent
d’un pouvoir de modulation.
La possibilité de recourir à des taxes
optionnelles, mises en œuvre au gré
des délibérations des exécutifs, pour
trouver des sources ponctuelles de
financement, pourrait en revanche
être abandonnée ou fortement limi-
tée, en tenant cependant compte, là
aussi, de certaines situations locales
spécifiques. Les mesures proposées
plus haut, relatives à l’amélioration de
la gouvernance de la fiscalité locale,
devraient favoriser la limitation de la
création de taxes optionnelles ou très
spécifiques.
Des  évolutions  plus  significatives
relèvent  de  débats  plus  larges  por-
tant d’une part sur l’ensemble de la
fiscalité  de  l’entreprise  et  d’autre
part sur l’objectif premier à assigner
à la fiscalité locale des entreprises
Appréhender globalement la fiscalité
des entreprises
Les débats récents confirment la
nécessité d’apprécier globalement la
fiscalité des entreprises. Ainsi, le prin-
cipal objectif poursuivi par le gouver-
nement dans le contexte des
Assises
de la fiscalité de l’entreprise
vise une
simplification du cadre fiscal global
des entreprises, englobant notam-
ment la fiscalité locale. Du côté de cer-
taines fédérations patronales le moin-
dre intérêt d’une diminution du taux
de l’impôt sur les sociétés au profit
d’une diminution du taux de la CVAE
repose sur une analyse du poids total
de la fiscalité ; ainsi, la demande d’une
diminution du taux de la CVAE n’était
pas liée à son caractère local mais à
son caractère universel.
Fiscalité locale et entreprises - Synthèse - Conseil des prélèvements obligatoires - mai 2014
23
Des améliorations à la marge de la fiscalité locale des
entreprises sont possibles mais des évolutions substantielles
relèvent d’un débat plus global
Fiscalité locale et entreprises - Synthèse - Conseil des prélèvements obligatoires - mai 2014
24
Arbitrer plus clairement entre finance-
ment stable des collectivités territo-
riales et efficacité économique de la
fiscalité locale des entreprises
Les collectivités territoriales étant
soumises à la règle d’or, elles ont
besoin
de
ressources
stables.
L’assiette foncière permet de sécuriser
leurs ressources fiscales grâce à des
bases taxables captives, mais elle est
plus distorsive pour l’activité écono-
mique que la taxation de la richesse
produite.
L’objectif premier de la fiscalité locale
est-il d’assurer un financement dyna-
mique et stable aux collectivités terri-
toriales ou de disposer d’une fiscalité
en phase avec le cycle économique ?
La « crise des bases minimum de
CFE » en 2013 a ainsi été symptoma-
tique de cette tension difficile à résou-
dre. Cette tension a été illustrée par la
hausse du nombre d’entreprises rede-
vables de la CFE minimum, constatée
entre 2010 et 2011 (+ 14,4 %) et entre
2011 et 2012 (+ 11,8 %).
De fait, la CET se trouve à la croisée
des deux problématiques majeures
des finances locales :
- du point de vue des entreprises, elle
s’apprécie au regard de l’objectif de
modération de la charge fiscale et de
l’adaptation de l’imposition écono-
mique locale aux facultés contribu-
tives des contribuables ;
- du point de vue des collectivités, elle
se
comprend
au
regard
de
la
recherche d’un dynamisme accru des
ressources fiscales résultant du panier
d’impositions économiques locales.
S’il n’appartient pas au CPO de répon-
dre à cette question dans ce rapport -
elle excède le cadre du mandat qui lui
a été confié et elle implique des arbi-
trages politiques entre le choix d’un
financement des collectivités par le
biais de la fiscalité ou sur la base de
dotations – , il relève cependant que la
question de « La fiscalité locale et
entreprises » qui lui a été posée ren-
voie
in fine
au choix politique de défi-
nir l’objectif premier qui est assigné à
la fiscalité locale des entreprises.
Des améliorations à la marge de la fiscalité locale des
entreprises sont possibles mais des évolutions substantielles
relèvent d’un débat plus global
Fiscalité locale et entreprises - Synthèse - Conseil des prélèvements obligatoires - mai 2014
25
H
istoriquement
fondée
sur
des
assiettes territorialisées qui symbo-
lisaient le lien entre l’entreprise et son
territoire, la fiscalité locale des entre-
prises s’est complexifiée parallèlement
au
processus
de
décentralisation,
jusqu’à pouvoir aujourd’hui incarner à
elle seule le foisonnement des « petites
taxes », dont l’opacité et le manque de
lisibilité produisent des effets non sou-
haitables soulignés tant par les entre-
prises que par les parlementaires et le
gouvernement.
Le CPO a ainsi identifié de l’ordre de
soixante-dix impositions locales dont les
entreprises sont susceptibles d’être
redevables. Une partie d’entre elles
constitue des impositions réellement
locales, pour un produit annuel de l’or-
dre de 43 Md€ ; l’autre partie relève
davantage d’impositions nationales qui
sont affectées aux collectivités territo-
riales, à hauteur d’un produit annuel de
l’ordre de 16 Md€. Par ailleurs, ont été
recensées des impositions locales pour
lesquelles les systèmes d’information de
l’administration fiscale ne permettent
pas de distinguer la part assumée par
les redevables entreprises de celle des
redevables ménages.
Remplaçant depuis 2010 la taxe profes-
sionnelle, laquelle était dénoncée pour
son caractère antiéconomique et désin-
citatif à l’investissement, la CET consti-
tue aujourd’hui le cœur de la fiscalité
locale des entreprises. La réforme a
atteint l’objectif de favoriser la compéti-
tivité des entreprises. En choisissant une
imposition locale principale fondée,
d’une part, sur la création de richesse et,
d’autre part, sur une assiette foncière
qui maintient le lien entre l’entreprise et
son territoire, l’introduction de la CET a
favorisé la pertinence de la fiscalité
locale des entreprises ainsi que sa cohé-
rence avec les assiettes privilégiées pour
la fiscalité nationale. Pour parachever la
réforme de 2010, il reste maintenant à
mettre en œuvre la révision des valeurs
locatives des locaux commerciaux et
professionnels.
Après l’introduction de la CET, les évolu-
tions envisageables de la fiscalité locale
des entreprises sont à chercher principa-
lement dans la voie d’une meilleure gou-
vernance de celle-ci, afin de prévenir son
émiettement et dans celle d’une ratio-
nalisation du nombre d’impositions et
de leur simplification, lesquelles s’inscri-
raient dans les orientations nationales
actuelles visant à limiter le nombre de
taxes à faible rendement.
Enfin, le CPO estime nécessaire que soit
clarifié le rôle premier assigné à la fisca-
lité locale des entreprises : assurer un
financement stable et pérenne aux col-
lectivités territoriales ou favoriser la
compétitivité des entreprises.
CONCLUSION