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Le présent document, qui a fait l’objet d’une contradiction avec les destinataires concernés,
a été délibéré par la chambre le 30 avril 2020.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DÉFINITIVES
ENERCAL, SOCIETE NEO-CALEDONIENNE D’ENERGIE
Exercices 2012 (au 1
er
juillet) à 2018 (au 30 juin)
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
2
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
TABLE DES MATIÈRES
SYNTHÈSE
...............................................................................................................................
4
RECOMMANDATIONS
...........................................................................................................
7
INTRODUCTION
......................................................................................................................
8
1
LA GOUVERNANCE ET LA VIE SOCIALE
...................................................................
12
1.1
Le cadre législatif et réglementaire
...............................................................................
12
1.2
La répartition du capital social
......................................................................................
12
1.3
Le conseil d’administration et la direction générale
.....................................................
13
1.4
Les risques de conflit d’intérêts
....................................................................................
16
1.5
L’approbation des comptes
...........................................................................................
17
1.6
Une stratégie insuffisamment portée par le conseil d’administration
...........................
17
2
ADAPTER LES MODELES D’AFFAIRES A LA NOUVELLE DONNE
ENERGETIQUE
.................................................................................................................
20
2.1
Un marché régulé par la Nouvelle-Calédonie
...............................................................
20
LA DELIBERATION N° 195 DU 5 MARS 2012 RELATIVE AU SYSTEME
ELECTRIQUE DE LA NOUVELLE-CALEDONIE DEFINIT LES DISPOSITIONS
APPLICABLES A LA PRODUCTION D’ELECTRICITE, AU TRANSPORT ET A
LA DISTRIBUTION D’ENERGIE ELECTRIQUE ET AU SYSTEME TARIFAIRE
DE L’ENERGIE ELECTRIQUE.
.......................................................................................
20
2.2
Le transport d’énergie et la gestion du système électrique
...........................................
22
2.3
La production d’énergie
................................................................................................
24
2.4
La distribution d’énergie
...............................................................................................
25
2.5
Les enjeux de la transition énergétique
.........................................................................
26
3
UNE FRAGILITE INHERENTE AU SYSTEME TARIFAIRE
........................................
31
3.1
Des tarifs publics de vente réglementés
........................................................................
31
3.2
Le jeu de la composante de stabilisation
.......................................................................
34
3.3
L’intégration des recettes supplémentaires de Yaté
......................................................
35
3.4
Des créances incertaines qui affectent la fiabilité des comptes
....................................
37
3.5
L’évolution de la tarification
........................................................................................
40
4
DES MARGES FINANCIERES CONTRAINTES
............................................................
42
4.1
Un changement de traitement comptable des amortissements
.....................................
42
4.2
Le résultat comptable
....................................................................................................
42
Le résultat d’exploitation est relativement stable sur la période examinée et s’établit à
2,3 Mds F CFP au 30 juin 2018. Les ventes d’énergie progressent de 22,4%, alors
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
3
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
que les autres activités (hydraulique Yaté, gestion Doniambo…) sont en baisse de
15,5%.
...........................................................................................................................
42
4.3
Le financement des investissements
.............................................................................
47
4.4
L’endettement
...............................................................................................................
50
Le niveau d’endettement de la société rapporté aux capitaux propres est relativement
stable sur la période examinée et atteste d’un recours à l’emprunt maîtrisé. La
chambre note, cependant, une augmentation de l’endettement bancaire sur le
dernier exercice, qui s’établit à 3 365 MF CFP contre 2 411 MF CFP au 30 juin
précédent.
......................................................................................................................
50
4.5
Les comptes consolidés
.................................................................................................
50
4.6
Les engagements dans les entreprises liées
..................................................................
52
Au 30 juin 2018, ENERCAL détient des créances à l’encontre de sa filiale Prony
Energies pour un montant total de 7,4 Mds F CFP, dont un prêt subordonné
remboursable à compter de 2021 de 4 864 MF CFP, un compte courant d’associé
de 1 593 MF CFP et une créance de pénalités de 985 MF CFP. Les créances au
titre du prêt subordonné et du compte courant d’associé représentent 75% de la
créance totale sur Prony Energies, soit la part du capital de la filiale détenue par
ENERCAL.
...................................................................................................................
52
Le représentant légal indique, en réponse à la contradiction, que « les remboursements
du prêt subordonné et des comptes courants par Prony Energies à Enercal sont à
ce stade destinés à prioritairement financer le futur confortement du barrage de
Yaté estimé à ce jour à 6.7 milliards de F. CFP ».
........................................................
52
4.7
La prospective
...............................................................................................................
54
4.7.1 La programmation des investissements
..........................................................................
54
4.7.2 La trajectoire financière
..................................................................................................
55
5
LES RESSOURCES HUMAINES
......................................................................................
58
5.1
L’évolution des effectifs
...............................................................................................
58
5.2
Le pilotage de la masse salariale
...................................................................................
60
6
LES CONCESSIONS DE DISTRIBUTION
......................................................................
62
6.1
Un cadre réglementé
.....................................................................................................
62
6.2
Poursuivre la mise en place des indicateurs de performance
........................................
65
REPONSE
................................................................................................................................
67
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
4
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
SYNTHÈSE
ENERCAL, société néo-calédonienne d’énergie, a été créée en 1955, sous le statut de
société d’économie mixte, dans le cadre de la loi du 30 avril 1946 relative au développement
économique de l’outre-mer, pour mener à bien la construction du site hydroélectrique de la Yaté
et d’en assurer son exploitation. En 1972, la Nouvelle-Calédonie a confié à ENERCAL la
concession de transport d’électricité sur l’ensemble du territoire et la gestion du système
électrique. La société assure, par ailleurs, par concession, la distribution d’électricité dans
27 communes, hors Nouméa. ENERCAL est aujourd’hui une entreprise intégrée qui assure la
production, le transport et la distribution d’électricité.
La Nouvelle-Calédonie, qui a bénéficié en 2008 du transfert des titres de l’Etat, est
l’actionnaire majoritaire avec 54,4% du capital.
ENERCAL détient 75% du capital de Prony Energies, qui exploite une centrale
électrique au charbon, destinée notamment à l’alimentation de la distribution publique.
ENERCAL est, par ailleurs, actionnaire à hauteur de 40% de Nouvelle-Calédonie Energie, qui
porte le projet de centrale pays au gaz.
La Nouvelle-Calédonie déroge sensiblement au modèle ultramarin d’intégration
verticale transport/distribution, dit de « l’acheteur unique », en raison de la présence de deux
opérateurs de distribution. Ce modèle est régulé à travers la règlementation mise en place : le
consommateur calédonien, particulier ou professionnel, n’a pas la possibilité de choisir son
fournisseur sur le marché de la distribution d’électricité et ne peut passer directement un contrat
de fourniture avec un producteur. Le client est obligé d’acheter au concessionnaire de
distribution sélectionné par la commune de son lieu de résidence à un prix de vente fixé par le
gouvernement. Par ailleurs, la production d’électricité est soumise à une autorisation du
gouvernement et les contrats d’achat à son agrément.
Le nouveau paradigme des énergies renouvelables
Le schéma de transition énergétique (STENC) adopté par la Nouvelle-Calédonie
prévoit, à l’horizon 2030, l’alimentation à 100% de la distribution publique par des énergies
renouvelables. Le développement des énergies intermittentes et de la filière photovoltaïque
constituent un changement de paradigme pour le système électrique et un enjeu majeur pour
son gestionnaire, concessionnaire du réseau de transport, en termes d’adaptation et de
sécurisation du réseau. La commission de régulation de l’énergie souligne le caractère
capitalistique des moyens de production qui constitueront le système électrique et qui
nécessiteront des investissements importants.
Un projet insuffisamment porté par l’actionnaire de référence
La gouvernance de la société est marquée par une double ambiguïté, avec la présence
au sein du conseil d’administration de l’opérateur concurrent de distribution, EEC, et l’identité
entre l’actionnaire de référence et le régulateur du système électrique, la Nouvelle-Calédonie.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
5
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
ENGIE, maison mère d’EEC, détient 10,7% du capital social d’ENERCAL, ainsi
qu’un siège au conseil d’administration. Par ailleurs, ERAMET, actionnaire de référence de la
SLN, client et prestataire d’ENERCAL, détient 16,3% du capital, ainsi qu’un siège
d’administrateur.
La présence au sein du conseil d’administration d’ENERCAL du second opérateur de
distribution, qui constitue selon l’autorité de la concurrence un risque d’atteinte à la
concurrence, affecte la bonne gouvernance de la société.
En métropole, la fonction de régulation du système électrique est assurée par la
commission de régulation de l’énergie, autorité administrative indépendante. Celle-ci est
chargée d’une mission de régulation des réseaux et des marchés permettant le développement
d’une concurrence au bénéfice du consommateur final. La commission de régulation de
l’énergie transmet aux ministres chargés de l'économie et de l'énergie ses propositions motivées
de tarifs réglementés de vente d'électricité. En Nouvelle-Calédonie, cette fonction de régulation
est assurée par le gouvernement.
La chambre recommande à ENERCAL de formaliser sa stratégie, de la décliner en
objectifs opérationnels quantifiés et mesurables, et d’en confier la validation et le suivi au
conseil d’administration ou à un comité stratégique créé en son sein. Elle recommande à
ENERCAL de valoriser ses modèles d’affaires, en tenant compte des évolutions et des
changements liés notamment au développement des énergies renouvelables.
La chambre invite par ailleurs la société, en relation avec la Nouvelle-Calédonie, à
concrétiser la mise en place des schémas directeurs du transport et de la distribution.
Une fragilité inhérente au système tarifaire
La délibération du 5 mars 2012 relative au système électrique de la Nouvelle-
Calédonie pose le principe que les tarifs de vente d’électricité applicables à la sortie des réseaux
de transport et de distribution, qui reflètent les coûts réels de l’électricité, doivent permettre aux
opérateurs d’assurer leurs missions. Elle prévoit cependant que pour éviter ou atténuer une
augmentation des tarifs publics de l’électricité, le gouvernement peut recourir au versement
d’une compensation financière au gestionnaire du réseau public de transport. Alors que les tarifs
de l’électricité n’ont pas été révisés depuis 2008, aucune compensation financière n’a été
accordée à ENERCAL depuis 2014. Cette dernière estime à 843 MF CFP le défaut de
rémunération attendue au titre de l’exercice clos le 30 juin 2018.
Cette situation constitue un facteur de fragilité pour la société qui affecte la lisibilité
de ses perspectives financières. La chambre s’interroge, par ailleurs, sur le caractère certain de
cette créance et sur le bien-fondé de son inscription dans les comptes.
Le résultat net de la société, retraité du changement de comptabilisation des
amortissements, s’établit 1 382 MF CFP au 30 juin 2018, soit 4,5% du chiffre d’affaires.
ENERCAL est cependant confrontée à des variations conjoncturelles de ses recettes non
récurrentes, hors distribution publique (hydraulicité de Yaté, ventes « à bien plaire » aux
métallurgistes). Ce résultat doit, par ailleurs, être apprécié en tenant compte des réserves quant
à la prise en compte de la composante de stabilisation dans le chiffre d’affaires, soit un montant
de 843 MF CFP au titre de l’exercice 2017-2018.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
6
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
L’analyse de la trésorerie à un niveau infra annuel fait ressortir une mobilisation
importante du découvert bancaire autorisé sur le premier semestre 2016 et une détérioration sur
la période la plus récente. Si l’endettement de la société apparaît maîtrisé, bien qu’en
augmentation sur le dernier exercice examiné, il doit être mis en perspective avec les
investissements à venir.
Le rapprochement de ces éléments d’analyse de référentiels pertinents permettrait de
positionner la société en termes de performance financière.
Le plan stratégique de la société prévoit l’estimation et la proposition au conseil
d’administration d’une nouvelle trajectoire financière. Les changements à venir, tels que décrits
précédemment, rendent l’exercice indispensable pour la gouvernance de la société. Cette
trajectoire financière doit être la traduction des objectifs et des moyens définis conjointement
entre la société et l’actionnaire de référence, dans le cadre du système tarifaire.
En matière de gestion des ressources humaines, la chambre recommande l’élaboration
d’une trajectoire pluriannuelle d’effectifs, prenant en compte les contraintes de redéploiement
et les besoins de compétences liés à la nouvelle donne énergétique.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
7
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
RECOMMANDATIONS
Recommandation n° 1 : la chambre recommande à ENERCAL de formaliser sa statégie,
de la décliner en objectifs opérationnels quantifiés et mesurables, et d’en confier la
validation et le suivi au conseil d’administration ou à un comité stratégique créé en son
sein.
......................................................................................................................................
19
Recommandation n° 2 : la chambre recommande à ENERCAL de valoriser ses modèles
d’affaires, en tenant compte des évolutions et des changements liés notamment au
développement des énergies renouvelables.
........................................................................
30
Recommandation n° 3 : la chambre recommande à ENERCAL de rechercher auprès de la
Nouvelle-Calédonie les termes d’un accord quant à l’évolution du système tarifaire.
.......
41
Recommandation n° 4 : la chambre recommande à ENERCAL d’élaborer et de soumettre
au conseil d’administration, à l’occasion de la présentation du budget, une prospective
financière traduisant les objectifs stratégiques de la société.
..............................................
56
Recommandation n° 5 : la chambre recommande à ENERCAL de définir une trajectoire
d’effectifs à moyen terme, tenant compte des mutations structurelles en termes
d’emplois et de compétences liées au développement des énergies renouvelables.
...........
61
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
8
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
INTRODUCTION
Selon l’article 22 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999, la
Nouvelle-Calédonie est compétente en matière de production et de transport d'énergie
électrique, et de réglementation de la distribution d’énergie électrique.
Par ailleurs, en application de l’article 127 7° et 9° de cette même loi, le gouvernement
fixe les prix et les tarifs réglementés et détermine la nature et les tarifs des prestations des
services publics de la Nouvelle-Calédonie.
Le taux de dépendance énergétique de la Nouvelle-Calédonie, soit la part d’énergie
importée sur l’ensemble des besoins énergétiques, est de 97,5%
1
. Le taux de pénétration des
énergies renouvelables, soit la part d’énergie d’origine renouvelable sur l’ensemble de la
production électrique, est de 13,5%
2
.
Le prix de l’électricité basse tension et moyenne tension est gelé depuis le
1
er
décembre 2008
3
.
ENERCAL a été créée en 1955 par arrêté du ministre de la France d’outre-mer, sous
le statut de la loi de 1946
4
, pour mener à bien la construction du site hydroélectrique de la Yaté
et d’en assurer son exploitation. En 1972, la Nouvelle-Calédonie a confié à ENERCAL la
concession de transport d’électricité sur l’ensemble du territoire et la gestion du système
électrique. La société assure, par ailleurs, par concession, la distribution d’électricité dans
27 communes, hors Nouméa et le Mont-Dore. ENERCAL est aujourd’hui une entreprise
intégrée qui assure la production, le transport et la distribution d’électricité.
La Nouvelle-Calédonie, qui a bénéficié en 2008 du transfert des titres de l’Etat, est
l’actionnaire majoritaire avec 54,4% du capital.
Aux termes de l’article 3 des statuts, « la société a pour objet toutes entreprises et
toutes opérations concernant la production, le transport, la distribution et l'utilisation de
l'énergie ainsi qu'éventuellement l'adduction et la distribution de l'eau en Nouvelle-Calédonie,
et le cas échéant, l'exportation d'ingénierie dans le domaine des énergies nouvelles et
renouvelables dans la région du Pacifique Sud.
1
Source : Bilan énergétique Nouvelle-Calédonie 2017 - Direction de l’industrie, des mines et de l’énergie de la
Nouvelle-Calédonie (DIMENC).
2
Idem.
3
Basse tension à usage domestique (BTUD) : 32,24 F CFP/kWh ; basse tension à usage professionnel (BTUP) :
22,01 F CFP/kWh (tarif en vigueur hors prime fixe).
4
Loi n° 46-860 du 30 avril 1946 tendant à l’établissement et à l’exécution de plans d’équipement et de
développement économique et social des territoires et départements d’outre-mer.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
9
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
En conséquence, et notamment :
-
la création de toutes usines hydro-électriques ou thermiques, de postes de transformation, de lignes
de transport ou de distribution et, généralement, de toutes installations nécessaires à la réalisation
de l'objet de la société ;
-
l'obtention de toutes concessions et autorisations y relatives, leur rétrocession ou leur affermage ;
-
l'acquisition, la gestion, l'administration, l'exploitation pour son compte ou pour le compte de tous
tiers, de toutes entreprises et installations, biens et droits quelconques se rapportant à l'objet de la
société, et notamment l'acquisition et la vente de l'énergie, soit directement ou par l'intermédiaire
de toutes filiales, soit par l'affermage à d'autres organismes, ainsi que la gérance des régies de
distribution d'eau et d'électricité (…) ».
ENERCAL est le gestionnaire du réseau public de transport et du système électrique
calédonien et intervient, par ailleurs, sur le marché de la production et de distribution. Ces
activités ne font pas l’objet d’une séparation juridique (filiales dédiées) ou fonctionnelle
(autonomie de gestion).
Le groupe ENERCAL comprend plusieurs filiales, qui font l’objet d’une consolidation
comptable.
Les sociétés du groupe ENERCAL
Société
Localisation
Capital en F CFP
Contrôle
PRONY ENERGIES
Nouméa
1 794 451 024
75%
ENERCAL ENERGIES
NOUVELLES
Nouméa
1 000 000
100%
HYDRO PAALO
Nouméa
1 000 000
51%
FOCOLA
Nouméa
250 000
51%
WI HACHE OUATOM
Nouméa
1 000 000
51%
NOUVELLE CALEDONIE
ENERGIE
Nouméa
1 000 000
40%
Source : rapport d’activité 2017-2018
Prony Energies a pour activité l’exploitation d’une centrale électrique au charbon,
d’une puissance de deux fois 50 MW, située dans le sud du territoire, dans la région de Goro.
Cette centrale est destinée aux besoins du réseau public de la Nouvelle-Calédonie et de l’usine
métallurgique de VALE Nouvelle-Calédonie, à raison de 50 MW chacun. Elle constitue l’unité
de production de base pour alimenter en électricité la distribution publique de la Nouvelle-
Calédonie.
ENERCAL détient 75% du capital de Prony Energies, ENGIE 15% et EEC 10%.
Enercal Energies Nouvelles, créée en mai 2014, a pour objet l’étude, la construction
et l’exploitation de nouvelles capacités de production électrique dans le domaine des énergies
renouvelables et de capacités de stockage de l’énergie (barrage hydroélectrique). ENERCAL
est l’unique actionnaire. Enercal Energies Nouvelles détient, elle-même, 51% du capital de trois
sociétés.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
10
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Nouvelle-Calédonie Energie, créée en décembre 2016, a pour objet l’étude, la
conception, le financement et l’exploitation d’une centrale électrique sur le site de Doniambo à
Nouméa, aux fins de contribuer à la satisfaction des besoins en électricité du réseau public de
la Nouvelle-Calédonie et de la société Le Nickel SLN.
L’agence calédonienne de l’énergie, établissement public de la Nouvelle-Calédonie,
détient 50% du capital de Nouvelle-Calédonie Energie, ENERCAL 40% et ERAMET 10%.
ENERCAL entretient, depuis sa création, des relations de partenariat avec EDF, qui se
traduisent notamment par une convention générale d’appui et d’assistance.
La société a réalisé, au titre de l’exercice clos au 30 juin 2018, un chiffre d’affaires de
30,6 Mds F CFP. Elle dispose d’un effectif stable de près de 400 agents.
Lors de sa réunion du 20 août 2019, le conseil d’administration a élu
M. Guy Olivier CUENOT en qualité de président.
Le contrôle porte sur la gouvernance de la société, les modèles d’affaires, l’application
du système tarifaire, le pilotage des ressources humaines et la situation financière.
La
Chambre
territoriale
des
comptes
de
Nouvelle-Calédonie
a
arrêté
le
30 octobre 2019 les observations provisoires faisant suite au contrôle de la gestion
d’ENERCAL.
Le rapport d’observations provisoires a été notifié par lettres du 21 novembre 2019 à
M. Jean-Michel DEVEZA, directeur général
5
, M. Jean BEGAUD, ancien directeur général
6
,
M. Guy-Olivier CUENOT, président du conseil d’administration
7
, et M. Thierry SANTA,
président du gouvernement
8
.
Des extraits ont été transmis, le même jour, à M. Roger KERJOUAN, ancien président
du conseil d’administration
9
, M. Jacques LE MAITRE, commissaire aux comptes (KPMG)
10
et
Mme Anne-Marie KLOTZ, commissaire aux comptes (PricewaterhouseCoopers Professional
Services)
11
.
Les réponses suivantes ont été enregistrées au greffe de la chambre :
-
M. KERJOUAN a répondu par lettre du 4 décembre 2019, enregistrée au greffe le
3 décembre 2019 ;
-
M. DEVEZA, par courrier du 20 janvier 2020, enregistré au greffe le même jour ;
-
Mme Anne-Marie KLOTZ et M. Jacques LE MAITRE, par courrier du 10 janvier 2020,
enregistré au greffe le 22 janvier 2020.
5
Accusé réception du 22 novembre 2019.
6
Accusé réception du 2 décembre 2019.
7
Accusé réception du 22 novembre 2019.
8
Accusé réception du 22 novembre 2019.
9
CorrespondanceJF, téléchargement du 28 novembre 2019 ; accusé réception du 9 décembre 2019.
10
Accusé réception du 28 novembre 2019.
11
Accusé réception du 25 novembre 2019.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
11
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
La réponse de M. SANTA, datée du 3 mars 2020 et enregistrée au greffe le
5 mars 2020, hors délais, n’a pu être prise en compte.
En application de l’article L. 262-66 du code des juridictions financières, M. DEVEZA
et M. KERJOUAN ont été entendus, à leur demande, par la chambre le premier le
20 février 2020 et le second le 5 mars 2020.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
12
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
1
LA GOUVERNANCE ET LA VIE SOCIALE
1.1
Le cadre législatif et réglementaire
Les dispositions du code général des collectivités territoriales relatives aux sociétés
d’économie mixte locales ne sont pas applicables aux sociétés d'économie mixte constituées en
application de la loi n° 46-860 du 30 avril 1946 précitée.
Selon l’article L. 1525-3 du code général des collectivités territoriales, applicable en
Nouvelle-Calédonie
12
, « les dispositions du présent titre [Titre II : sociétés d’économie mixte
locales] ne sont pas applicables (…) 3° Aux sociétés d'économie mixte constituées en
application de la loi n° 46-860 du 30 avril 1946 tendant à l'établissement, au financement et à
l'exécution de plans d'équipement et de développement des territoires relevant du ministère de
la France d'outre-mer, à l'exception des articles L. 1523-5 et L. 1523-6 ».
Les sociétés d’économie mixte sont soumises aux dispositions du code de commerce
applicable en Nouvelle-Calédonie.
Selon l’article premier des statuts, « la société est régie par les lois en vigueur sur les
sociétés en Nouvelle-Calédonie et par les présents statuts ».
La chambre invite la société à engager une réflexion sur le maintien du statut de la loi
de 1946, en considération du transfert des titres de l’Etat à la Nouvelle-Calédonie en 2008.
1.2
La répartition du capital social
Selon l’article 6 des statuts, le capital social est fixé à la somme d’un milliard deux
cent vingt-quatre millions cent vingt-deux mille F CFP (1 224 122 000 F CFP) divisé en
612 061 actions de 2 000 F CFP chacune, dont 437 061 portant les numéros 1 à 437 061
représentant le capital originaire, 100 000 actions portant les numéros 437 062 à 537 061,
représentant l'augmentation de capital de 1968, et 75 000 actions portant les numéros 537 062
à 612 061, représentant l'augmentation de capital de 1977.
Ce capital est souscrit par les groupes suivants : la Nouvelle-Calédonie et des
collectivités publiques locales ; des souscripteurs privés (ERAMET, EDEV, SUEZ ENERGIE
SERVICES).
12
Article 8-1 de la loi n° 99-210 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
13
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
La Nouvelle-Calédonie, les provinces et les communes détiennent, ensemble, 56,9%
du capital social. La Nouvelle-Calédonie est l’actionnaire de référence avec 54,4% du capital
social.
ERAMET
13
, EDEV (EDF développement environnement)
14
et SUEZ ENERGIE
SERVICES
15
détiennent, respectivement, 16,3%, 15,9% et 10,7% du capital social.
La SLN, concessionnaire historique de la chute de Yaté, a cédé ses droits à ENERCAL
en contrepartie d’une participation au capital et d’un engagement de cette dernière de construire
et d’exploiter un nouvel aménagement hydroélectrique.
Répartition du capital social
Actionnaires
Nombre d’actions
Montant en F CFP
% du capital (arrondi)
Nouvelle-Calédonie
333 090
666 180 000
54,42
ERAMET
99 784
199 568 000
16,3
EDEV
97 796
195 592 000
15,97
SUEZ ENERGIE
SERVICES
66 045
132 090 000
10,79
Province Nord
10
20 000
Province Sud
5
10 000
Province des Iles
5
10 000
Communes
15 326
30 652 000
2,5
Totaux
612 061
1 224 122 000
100
Source : ENERCAL
1.3
Le conseil d’administration et la direction générale
Selon l’article 28 des statuts, la société est administrée par un conseil d'administration
de 13 membres composé comme suit :
Administrateurs représentant les collectivités territoriales :
-
6 sièges d’administrateurs pour la Nouvelle-Calédonie,
-
1 siège d’administrateur pour les communes,
-
3 sièges d’administrateurs pour les provinces (un administrateur pour chaque province),
Administrateurs représentant les actionnaires privés :
-
1 siège d’administrateur pour ERAMET,
-
1 siège d’administrateur pour EDEV,
-
1 siège d’administrateur pour SUEZ ENERGIE SERVICES.
Le conseil d’administration détermine les orientations des activités de la société et
veille à leur mise en œuvre. Sous réserve des pouvoirs expressément attribués aux assemblées
d’actionnaires et dans la limite de l’objet social, il se saisit de toute question intéressant la bonne
marche de la société et règle par ses délibérations les affaires qui la concernent. Le conseil
13
ERAMET détient 56% du capital de la SLN.
14
EDEV est détenue à 100% par EDF.
15
Aujourd’hui ENGIE, maison mère d’EEC ENGIE Nouvelle-Calédonie.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
14
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
d’administration procède aux contrôles et vérifications qu’il juge opportuns. Chaque
administrateur reçoit toutes les informations nécessaires à l’accomplissement de sa mission et
peut se faire communiquer tous les documents qu’il estime utiles.
La direction générale de la société est assumée, sous sa responsabilité, soit par le
président du conseil d’administration, soit par une autre personne physique choisie parmi les
membres du conseil ou en dehors d’eux, nommée par le conseil d’administration et qui porte le
titre de directeur général. Le conseil d’administration choisit entre les deux modalités
d’exercice de la direction générale.
Le directeur général est nommé par le conseil d’administration, « après consultation
d’Electricité de France qui rendra un avis compte tenu de l’expérience et de la notoriété de cette
entreprise dans le domaine de l’énergie électrique et après accord du gouvernement de la
Nouvelle-Calédonie ».
Le directeur général est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toutes
circonstances au nom de la société. Il exerce ses pouvoirs dans la limite de l’objet social et sous
réserve de ceux que la loi attribue expressément aux assemblées d’actionnaires et au conseil
d’administration. Il représente la société dans les rapports avec les tiers.
Lors de sa séance du 26 mai 2008, le conseil d’administration d’ENERCAL a décidé
que la direction générale de la société sera assurée par un directeur général.
Selon l’article 32 des statuts, le conseil d'administration se réunit aussi souvent que
l'intérêt de la société l'exige. Il s’est réuni entre quatre et six fois par exercice sur la période
examinée.
Nombre de réunions du conseil d’administration de 2014 à 2018
2014
2015
2016
2017
2018
5
4
4
6
5
Source : ENERCAL
En sa séance du 23 février 2016, le conseil d’administration a adopté son règlement
intérieur. Celui-ci comporte un article unique, portant application de l’article 32 des statuts,
selon lequel, les administrateurs, leurs représentants et les participants peuvent participer aux
séances du conseil d’administration par des moyens de visioconférence permettant leur
identification et garantissant leur participation effective à la séance du conseil d’administration.
Les administrateurs sont alors réputés présents pour le calcul du quorum et de la majorité.
L’article 40 des statuts (Titre III, conseil d’administration - direction générale) prévoit
qu’un commissaire du gouvernement sera désigné par le ministre chargé de la Nouvelle-
Calédonie. La société a précisé que depuis la cession des actions de l’Etat à la Nouvelle-
Calédonie, en 2008, cette disposition, inhérente au statut des sociétés d’économie mixte de la
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
15
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
loi de 1946
16
, n’était plus en vigueur. Ce constat renvoie à la question de fond du maintien de
ce statut dérogatoire.
Certains actionnaires privés, représentés au conseil d’administration d’ENERCAL,
sont en position de concurrence avec cette dernière sur le marché de l’électricité ou sont liés
par des relations contractuelles portant notamment sur l’achat ou la vente d’électricité.
Ainsi, EEC, filiale d’ENGIE, assure, comme ENERCAL, la distribution d’énergie
électrique dans plusieurs communes du territoire, dont la commune de Nouméa. Par ailleurs, la
SLN, filiale d’ERAMET, achète à ENERCAL 90% de l’énergie produite par le barrage de Yaté.
La présence au sein du conseil d’administration d’un représentant de SUEZ ENERGIE
SERVICES (ENGIE) a été présentée par ENERCAL, dans le cadre de l’instruction, comme une
contrainte forte en termes de gouvernance. EEC, filiale d’ENGIE, est le concurrent
d’ENERCAL pour la distribution d’énergie, tous deux candidats à l’appel d’offres de la
concession de Nouméa.
De fait, de nombreux sujets d’importance ne sont pas évoqués au conseil
d’administration, comme la stratégie du groupe ou, récemment, la candidature d’ENERCAL à
l’appel d’offres de Nouméa.
A l’occasion d’une affaire relative à la prise de contrôle d’actifs de la SAS QUADRAN
par la SAS ALIZES ENERGIE dans le secteur de la production d’électricité
17
, la Nouvelle-
Calédonie a considéré que la présence du groupe GDF SUEZ au conseil d’administration
d’ENERCAL « soulevait un doute sérieux d’atteinte à la concurrence (…) car elle lui permet
d’accéder et même de participer aux décisions stratégiques de son concurrent. Cette situation
peut avoir un effet négatif sur l’intensité concurrentielle ».
L’autorité de la concurrence de la Nouvelle-Calédonie, dans un avis du
18 juillet 2019
18
, a repris à son compte l’analyse du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie :
« L’autorité de la concurrence partage l’analyse du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie
quant au risque d’atteinte à la concurrence résultant de la participation capitalistique du groupe
Engie au sein d’Enercal le conduisant à disposer d’un siège au conseil d’administration en ce
qu’il lui permet de connaître les décisions stratégiques de son principal concurrent sur les
marchés de la production et de la distribution d’énergie électrique en Nouvelle-Calédonie »
19
.
16
Selon l’article 1
er
du décret n° 51-1459 du 20 décembre 1951 portant organisation du contrôle des sociétés d’Etat
et des sociétés d’économie mixte, « l’activité de chacune des sociétés d’Etat et des sociétés d’économie mixte
créées en application de l’article 2 de la loi du 30 avril 1946 (…) est suivie par un commissaire du Gouvernement
désigné par arrêté du ministre de la France d’outre-mer ».
17
Arrêté du 26 mai 2015 relatif à la prise de contrôle exclusif d’actifs (six filiales) de la SAS QUADRAN par la
SAS ALIZES ENERGIE dans le secteur de la production d’électricité. ALIZES ENERGIE est détenue à 100%
par le groupe GDF SUEZ ENERGIE SERVICE détenu lui-même à 100% par GDF SUEZ. Ce dernier détient des
participations dans EEC et dans ENERCAL (présentation des parties à l’opération). Rapports au gouvernement
n° AG15-3151-703 du 22 mai 2015 et n° AG15-3151-1326 du 6 octobre 2015.
18
Avis n° 2019-A-02 relatif au renouvellement du contrat de concession de la distribution d’énergie électrique de
la commune de Nouméa.
19
« (…) A défaut d’une cession volontaire de la participation du groupe Engie au capital de la société Enercal, et
à tout le moins d’une modification volontaire des statuts de la société Enercal ou d’un éventuel pacte d’actionnaires
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
16
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
La chambre invite ENERCAL, au vu de ce qui précède, à prendre toutes dispositions
utiles permettant le plein exercice des prérogatives du conseil d’administration et la bonne
gouvernance de la société.
Dans cette perspective, un courrier du 7 août 2019 de l’administrateur d’ENERCAL
représentant Engie Energie Services, a été remis au rapporteur lors de l’entretien de fin de
contrôle.
Par ce courrier, Engie, prenant acte de l’avis précité de l’autorité de la concurrence,
évoque la cession de sa participation au capital d’ENERCAL et son retrait du conseil
d’administration de la société : « (…) En conséquence, nous vous proposons que nos services
juridiques travaillent dans un premier temps et dès que possible avec les équipes d’Enercal sur
la rédaction de ce pacte d’actionnaires [voir note 16]. Nous pourrons ensuite travailler avec le
Territoire de la Nouvelle-Calédonie sur la cession de notre participation au sein du capital
d’Enercal, tout comme au sein de notre filiale commune Prony Energie.
Dans l’intervalle, nous vous informons que nous ne participerons plus à aucun Conseil
d’Administration de la société Enercal (…) ».
1.4
Les risques de conflit d’intérêts
Le cumul de la présidence de la société avec la fonction de secrétaire général de la
province Sud comportait un risque de conflit d’intérêts et, le cas échéant, de prise illégale
d’intérêts
20
. L’ancien président du conseil d’administration a exercé les fonctions de secrétaire
général de la province Sud jusqu’en mai 2019.
L’article 19 de la délibération n° 81 du 24 juillet 1990 portant droits et obligations des
fonctionnaires territoriaux dispose que « les fonctionnaires ne peuvent prendre, par eux-mêmes
ou par personne interposée, dans une entreprise soumise au contrôle de l’administration à
laquelle ils appartiennent ou en relation avec cette dernière, des intérêts de nature à
compromettre leur indépendance ».
Par ailleurs, selon l’article 20 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999, « chaque
province est compétente dans toutes les matières qui ne sont pas dévolues à l’Etat ou à la
Nouvelle-Calédonie par la présente loi, ou aux communes par la législation applicable en
Nouvelle-Calédonie (…) ». Les provinces sont compétentes notamment en matière de gestion
des titres miniers et de police des mines, et de protection de l’environnement (autorisation des
entre la société Enercal et le groupe Engie pour retirer à ce dernier le droit de siéger au conseil d’administration
de la société Enercal, la Mairie de Nouméa pourrait notamment exiger une attestation des présidents des deux
entreprises s’engageant à n’échanger aucune information relative au renouvellement de la concession d’énergie
électrique de Nouméa (…) ».
20
Selon l’article 432-12 du code pénal, « le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée
d'une mission de service public ou par une personne investie d'un mandat électif public, de prendre, recevoir ou
conserver, directement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une entreprise ou dans une opération dont
elle a, au moment de l'acte, en tout ou partie, la charge d'assurer la surveillance, l'administration, la liquidation ou
le paiement, est puni de cinq ans d'emprisonnement et d'une amende de 500 000 €, dont le montant peut être porté
au double du produit tiré de l'infraction ».
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
17
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
installations classées).
Un courrier du 16 avril 2018 du président de la province Sud au directeur général de
la SLN, concernant un projet de réduction des achats d’énergie sur le barrage de Yaté, illustre
ce risque de conflit d’intérêts : « (…) J’en déduis que, sauf à diminuer votre production de
nickel, vous envisagez d’augmenter la production électrique de votre centrale de Doniambo, ce
qui m’apparaît contraire aux obligations [autorisations dérogatoires] rappelées ci-dessus (…) ».
1.5
L’approbation des comptes
Selon l’article L. 225-100 du code commerce, « l'assemblée générale ordinaire est
réunie au moins une fois par an, dans les six mois de la clôture de l'exercice, sous réserve de
prolongation de ce délai par décision de justice (…). Le conseil d'administration ou le directoire
présente à l'assemblée son rapport ainsi que les comptes annuels et, le cas échéant, les comptes
consolidés accompagnés du rapport de gestion y afférent ».
Les comptes annuels de la société et du groupe ont été approuvés par l’assemblée
générale ordinaire conformément aux dispositions ci-dessus.
Dates d’approbation des comptes par l’assemblée générale
2013-2014
2014-2015
2015-2016
2016-2017
2017-2018
4 décembre 2014
18 décembre 2015
2 décembre 2016
6 décembre 2017
5 décembre 2018
Source : ENERCAL
1.6
Une stratégie insuffisamment portée par le conseil d’administration
ENERCAL affirme, dans sa feuille de route, telle qu’elle figure au rapport d’activité
2017-2018, « l’ambition d’être la société néo-calédonienne de référence en matière énergétique,
au service du développement durable du pays ». La stratégie de la société se décline en six
axes :
-
garantir durablement l’optimisation et la sûreté du système électrique calédonien ;
-
être l’acteur majeur de la transition énergétique en favorisant la maîtrise de l’énergie,
l’émergence des nouvelles technologies et le développement des énergies renouvelables ;
-
satisfaire nos clients et les collectivités locales en développant des solutions innovantes et
adaptées à leurs attentes ;
-
améliorer durablement la rentabilité financière de l’entreprise pour assurer ses missions et
sa contribution à l’économie calédonienne ;
-
adapter l’entreprise aux transformations du secteur en s’appuyant sur les plans de
performance par métier ;
-
mobiliser et former les femmes et les hommes au service de la stratégie de l’entreprise.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
18
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Ces orientations, dans leur déclinaison opérationnelle et leur suivi, ne font pas l’objet
d’une appropriation et d’un accompagnement par le conseil d’administration, ce qui en affaiblit
la légitimité et la portée.
La stratégie de la société, dans sa déclinaison opérationnelle, doit être actée par le
conseil d’administration et donc par l’actionnaire majoritaire.
La stratégie ENERCAL a fait l’objet d’une mise à jour 2019.
A titre indicatif, pour l’axe 1, « garantir durablement l’optimisation et la sûreté du
système électrique calédonien », les actions 2019 sont les suivantes :
-
consolider/renforcer durablement le rôle d’ENERCAL dans la gestion du système
électrique calédonien : études, schémas directeurs, vision et anticipation moyen terme et
long terme, communication idoine ;
-
conseiller le gouvernement, la DIMENC dans les choix structurant à faire sur le mix
énergétique et sur les usages de l’électricité (véhicules électriques…) ;
-
SCADA (Supervisory Contrôle and Data Acquisition) : délivrer en temps et heure voulu,
communiquer sur ce nouvel outil au service du schéma de transition énergétique de la
Nouvelle-Calédonie ;
-
rendre possible le développement des énergies renouvelables et les systèmes électriques de
demain.
Pour l’axe 3, « améliorer durablement la rentabilité financière de l’entreprise pour
assurer ses missions et sa contribution à l’économie calédonienne », les actions sont les
suivantes :
-
4
ème
période tarifaire : préparation, lobbying, négociations ;
-
lancer la réforme du modèle tarifaire ;
-
actualiser et sécuriser le plan de financement long terme de nos investissements ;
-
trouver un accord avec VALE sur les cendres de Prony énergies et leur réutilisation autour
du projet « Lucy »
21
;
-
produire des argumentaires et lobbying face aux menaces que connaît ENERCAL
(revendication Yaté SLN ; consistance économique et comptable des paramètres du modèle
tarifaire).
Ces éléments ne constituent pas une stratégie, mais des items d’actions à mener à
moyen terme portés par un niveau de décision non adéquat.
21
Ce projet concerne la mise en place d’un procédé innovant qui permettra de traiter et de stocker les résidus secs
produits par l’usine.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
19
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Le représentant légal indique, dans sa réponse à la contradiction, « qu’il existe bien
une stratégie élaborée par le Comité de Direction et partagée avec le Président du conseil
d’administration » et que « cette stratégie est développée ensuite sous forme de feuilles de
routes par métier ». La chambre considère, cependant, que les objectifs définis restent très
généraux et qu’il convient de renforcer le caractère opérationnel de la stratégie de la société,
qui doit être actée par le conseil d’administration.
Recommandation n°
1 : la chambre recommande à ENERCAL de formaliser sa stratégie,
de la décliner en objectifs opérationnels quantifiés et mesurables, et d’en confier la
validation et le suivi au conseil d’administration ou à un comité stratégique créé en son
sein.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
20
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
2
ADAPTER LES MODELES D’AFFAIRES A LA NOUVELLE
DONNE ENERGETIQUE
2.1
Un marché régulé par la Nouvelle-Calédonie
La délibération n° 195 du 5 mars 2012 relative au système électrique de la Nouvelle-
Calédonie définit les dispositions applicables à la production d’électricité, au transport et à la
distribution d’énergie électrique et au système tarifaire de l’énergie électrique.
Son titre 1 est consacré au système électrique de la Nouvelle-Calédonie.
Selon l’article 1
er
, le système électrique de la Nouvelle-Calédonie est organisé pour
assurer l’approvisionnement en électricité sur l’ensemble de la Grande-Terre et dans les îles,
dans le respect de l’intérêt général.
Selon l’article 2, le service public de l’électricité couvre les missions suivantes :
I – Le développement équilibré de l’approvisionnement en électricité, qui vise à réaliser les
objectifs définis dans la programmation pluriannuelle des investissements de production
électrique et garantir l’approvisionnement en électricité sur l’ensemble de la Grande-Terre et
dans les îles.
Cette mission est assurée par les sociétés productrices d’électricité en conformité avec les
dispositions du titre 2.
II – Le développement et l’exploitation des réseaux publics de transport et de distribution, qui
consistent à assurer la desserte rationnelle du territoire, ainsi que le raccordement et l’accès des
consommateurs et producteurs dans des conditions équitables et non discriminatoires.
Cette mission est assurée par les sociétés gestionnaires des réseaux du transport et de
distribution, dans les conditions prévues au titre 3 de la présente délibération et dans les cahiers
des charges des concessions afférentes.
III – La fourniture d’électricité, par le raccordement aux réseaux publics de transport et de
distribution ou, le cas échéant, la mise en œuvre d’installations de production d’électricité de
proximité pour alimenter des habitats en site isolé. Cette mission est assurée par les sociétés
gestionnaires des réseaux du transport et de distribution, selon les conditions tarifaires prévues
au titre 4 de la présente délibération.
Les caractéristiques du marché calédonien de l’électricité sont décrites comme suit par
le gouvernement : « Contrairement au secteur de l’électricité en France et plus largement en
Europe, il n’y a pas lieu de distinguer, en Nouvelle Calédonie comme dans les autres territoires
d’outre-mer, un marché du négoce et un marché de la fourniture au détail d’électricité (…).
En effet (…) le modèle d’affaires typique pour les territoires ultramarins est celui de
« l’acheteur unique », avec une intégration verticale transport/distribution caractérisée par un
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
21
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
seul opérateur de transport et de distribution assurant l’équilibre du système. La Nouvelle-
Calédonie déroge légèrement à ce modèle d’intégration verticale transport/distribution en
raison de la présence de deux opérateurs de distribution (…). Ce modèle est régulé à travers la
règlementation mise en place : le consommateur calédonien, quel qu’il soit (particulier ou
professionnel), n’a pas la possibilité de choisir son fournisseur sur le marché de la distribution
d’électricité et ne peut passer directement un contrat de fourniture avec un producteur. Le client
est obligé d’acheter au concessionnaire de distribution sélectionné par la commune de son lieu
de résidence à un prix de vente fixé par le gouvernement (…) »
22
. Par ailleurs, comme il sera
dit ci-après, la production d’électricité est soumise à une autorisation du gouvernement et les
contrats d’achat à son agrément.
En métropole, la fonction de régulation du système électrique est assurée par la
commission de régulation de l’énergie (CRE), autorité administrative indépendante.
La loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service
public de l’électricité, codifiée dans le code de l’énergie, a confié à la CRE la mission de réguler
les marchés de l’énergie. Sa mission principale est de concourir « au bon fonctionnement des
marchés de l’électricité et du gaz naturel au bénéfice des consommateurs finals et en cohérence
avec les objectifs de la politique énergétique ».
Les missions de la CRE se déclinent en deux volets. D’une part, une mission de régu-
lation des réseaux d’électricité et de gaz naturel consistant à garantir aux utilisateurs
(entreprises,
collectivités
territoriales,
consommateurs,
producteurs)
un
accès
non
discriminatoire aux infrastructures de transport et de distribution, tout en assurant la sécurité
d’approvisionnement. D’autre part, une mission de régulation des marchés permettant le
développement d’une concurrence libre et loyale au bénéfice du consommateur final
23
.
En métropole, les tarifs réglementés de vente sont encadrés par les dispositions du code
de l’énergie. La CRE transmet aux ministres chargés de l'économie et de l'énergie ses
propositions motivées de tarifs réglementés de vente d'électricité. Le gouvernement peut s’y
opposer dans les trois mois suivant la proposition de la CRE.
Le système électrique calédonien présente la singularité que son régulateur, la
Nouvelle-Calédonie, soit également l’un de ses opérateurs, via la société ENERCAL, dont elle
est l’actionnaire de référence.
L’autorité de la concurrence de la Nouvelle-Calédonie, dans son avis précité du
18 juillet 2019, estime « qu’une réflexion mériterait d’être engagée à l’échelle de la Nouvelle-
Calédonie pour améliorer le dispositif de régulation du secteur de l’énergie électrique ». Elle
relève « que le législateur considère traditionnellement que pour assurer le bon fonctionnement
de ces marchés [de réseaux] l’idéal est d’instaurer une autorité de régulation indépendante du
gouvernement, d’une part, et des opérateurs économiques, d’autre part (…) ».
22
Rapport au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie du 6 octobre 2015 précité.
23
Commission de régulation de l’énergie, rapport d’activité 2017.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
22
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
2.2
Le transport d’énergie et la gestion du système électrique
Le titre 3 de la délibération du 5 mars 2012 définit les dispositions applicables au
transport et à la distribution d’énergie électrique.
Selon l’article 19, le gestionnaire du réseau public de transport d’électricité exerce ses
missions dans les conditions fixées par un cahier des charges de concession établi par la
Nouvelle-Calédonie.
Le gestionnaire du réseau public de transport exploite et entretient le réseau public de
transport d’électricité. Il est responsable de son développement afin de permettre le
raccordement des producteurs, des réseaux publics de distribution et des clients directs.
Le schéma de développement du réseau public de transport est élaboré par le
gestionnaire du réseau public de transport en cohérence avec le bilan prévisionnel et la
programmation pluriannuelle des investissements de production électrique qui en découle. Ce
schéma a pour but de donner une vision d’ensemble des zones de fragilité électrique de la
Nouvelle-Calédonie. Il porte sur la planification du développement du réseau public de
transport.
En cohérence avec le schéma de développement du réseau public de transport, le
gestionnaire du réseau public de transport élabore périodiquement un programme
d’investissement. Le schéma de développement du réseau public de transport et le programme
d’investissement sont approuvés par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.
Selon l’article 20, le gestionnaire du réseau public de transport assure à tout instant
l’équilibre des flux d’électricité sur le réseau en s’assurant que la production d’électricité soit
égale à la consommation. Le contrat de délestage de consommation conclu entre ENERCAL et
la SLN permet de garantir cet équilibre, sans affecter la distribution publique.
Selon ce même article, le gestionnaire du réseau de transport assure de manière non
discriminatoire, l’appel des installations de production électrique raccordées au réseau de
transport. Sous réserve des contrats en vigueur, les modalités d’appel des installations doivent
concourir à un prix compétitif de l’énergie électrique.
Par convention du 25 août 1972, la Nouvelle-Calédonie a concédé à ENERCAL le
transport et la répartition de l’énergie électrique.
Selon l’article 1
er
du cahier des charges, la concession a pour objet le transport et la
répartition de l’énergie sur l’ensemble du territoire de la Nouvelle-Calédonie en vue de
l’alimentation des concessionnaires des distributions publiques d’énergie électrique et des
abonnés directs susceptibles de se raccorder directement au réseau en vue d’une alimentation
sous une tension minimale de 30 kV.
La durée de la concession est fixée à 75 ans.
Le réseau de transport représente, en 2018, 555 km de lignes de 150 kV et 649 km de
lignes de 33 kV. Il est relativement stable sur la période examinée.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
23
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
La société a indiqué, lors de l’instruction, que le schéma de développement du réseau
public de transport, qui est prévu depuis juin 2012, était en cours de réalisation.
La chambre invite ENERCAL, en lien avec la Nouvelle-Calédonie, à concrétiser cette
démarche structurante.
Le représentant légal indique, en réponse à la contradiction, que la PPI votée en 2016
ne comportait pas de spacialisation et qu’il n’a pas été possible d’étudier le besoin d’adaptation
du réseau de transport, mais que, depuis 2017, ENERCAL Transport a opté pour un
accompagnement du gouvernement en réalisant les études de réseau au cas par cas.
Evolution du réseau de transport de 2014 à 2018 (en km)
Au 30 juin
2014
2015
2016
2017
2018
Var.
2018/2014
150 kV
554,2
551,2
551,2
555,5
555,5
+1,3
33 kV
641,3
648,1
649,4
649,4
649,4
+8,1
Source : rapports d’activité
Les ventes d’énergie de la concession de transport à la distribution publique et aux
clients directs représentent, en volume, 764,5 GWh en 2018 contre 709,7 GWh en 2014, soit
une augmentation de 7,7%.
Les ventes à ENERCAL distributeur augmentent de 28,9% et celles aux clients directs
diminuent de 19,7%. La diminution des ventes à EEC à compter de 2017 s’explique par le
changement de concession du Médipôle et par le développement de l’autoconsommation.
Le rapport de gestion au 30 juin 2018 rapproche, en variation annuelle, la baisse des
ventes en valeur de 2,8% à la hausse des ventes en volume de 0,2%. Ce constat s’explique à la
fois par la structure du tarif et par la baisse de l’indice d’actualisation du tarif de vente à la sortie
du réseau de transport (IT), liée au gel des tarifs de distribution (cf. infra
3
).
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
24
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Ventes d’énergie de la concession de transport (en GWh)
Au 30 juin
2014
2015
2016
2017
2018
Var.
2018/2014
EEC - Engie
461,5
472
484,7
473,2
462,9
0,3%
Variation
annuelle
0,3%
2,3%
2,7%
-2,4%
-2,2%
ENERCAL
210,5
221,8
245,3
259,2
271,2
28,9%
Variation
annuelle
4%
5,4%
10,6%
5,6%
4,7%
Clients directs
(société
Le
Nickel-SLN)
24
37,8
29,9
33,4
30,3
30,3
19,7%
Variation
annuelle
-5,5%
-20,9%
11,5%
-9,2%
0,2%
Total
709,7
723,7
763,4
762,7
764,5
7,7%
Variation
annuelle
1,1%
2%
5,5%
-0,1%
0,2%
Source : réponse ENERCAL
2.3
La production d’énergie
La production d’électricité sur le territoire calédonien est soumise à une autorisation
d’exploitation délivrée par le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, sur la base de critères
définis et en fonction d’une programmation pluriannuelle des investissements de production
électrique également adoptée par celui-ci. Le marché de la production d’électricité est donc
fortement règlementé, même si n’importe quel opérateur peut soumettre un projet de production
d’électricité à la suite d’un appel d’offres du gouvernement. Compte tenu de la forte régulation
du marché (accès, tarification…), la concurrence dans ce secteur joue donc plus « pour le
marché » (par la soumission de projets) que « sur le marché »
25
.
La production thermique opérée par ENERCAL s’établit à 2 105 GWh en 2018 contre
1 852 GWh en 2014, soit une hausse de 13,6%. La production hydraulique, qui connait des
évolutions contrastées liées au niveau d’hydraulicité, est de 282 GWh en 2018 contre 423 GWh
en 2014, en diminution de 33,3%.
Doniambo et Prony Energies, d’une part, et Yaté, d’autre part, représentent
respectivement, en 2018, 83% de la production thermique et 92% de la production hydraulique.
La production propre d’électricité d’ENERCAL représente, sur ce dernier exercice,
1 298 GWh, soit 52,7% de la production totale.
La part des énergies renouvelables dans la production opérée et achetée par ENERCAL
est, en 2018, de 14,6%, dont 11,5% pour l’hydraulique, 1,8% pour l’éolien et 1,3% pour le
photovoltaïque.
Cette part globale est inchangée par rapport à 2015.
24
Ventes aux centres miniers de la SLN.
25
Rapport au gouvernement précité.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
25
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Production thermique et hydraulique opérée par ENERCAL (en GWh)
Au 30 juin
2014
2015
2016
2017
2018
Var.
2018/2014
Production
thermique
Doniambo
910,5
1 081,2
1 124,7
1 025,3
1 066,5
17,1%
Népoui
247,2
281,4
325,7
229,1
281,1
Prony Energies
669,1
604,1
607,1
674,6
691,2
3,3%
Ducos
8,8
21,9
24,6
14,8
25
184%
Centrales
diesel
16,8
17,4
18,3
18,3
18,1
7,7%
Autres
0
17,6
62,8
45,1
23,3
Total
1 852,4
2 023,6
2 163,2
2 007,3
2 105,2
13,6%
n/n-1
9,2%
6,8%
-7,2%
4,8%
Production
hydraulique
Yaté
399,5
251,7
232
353,4
261
-34,6%
Néaoua
27,6
27,4
15,9
19,5
15,5
-43,8%
Thu
5,4
7,7
3,6
6,6
5,8
7,4%
Micro-
centrales
0,2
0,3
0,4
0,4
0,2
0%
Total
423,7
287,1
251,9
379,9
282,5
-33,3%
n/n-1
-32,2%
-12,2%
50,8%
-25,6%
Source : rapports d’activité
2.4
La distribution d’énergie
Les dispositions de la délibération du 5 mars 2012 relatives à la distribution d’énergie
électrique et au réseau public de distribution sont le miroir de celles relatives au transport et au
réseau public de transport.
Le gestionnaire du réseau public de distribution exerce ses missions dans les conditions
fixées par le cahier des charges de la concession. Le gouvernement arrête un cahier des charges
type de concession de distribution.
Dans sa zone de desserte exclusive, le gestionnaire du réseau public de distribution
exploite et entretient ledit réseau. Il est responsable de son développement afin de permettre le
raccordement des consommateurs.
Le gestionnaire du réseau public de distribution élabore un schéma directeur, en tenant
compte de la programmation pluriannuelle des investissements de production électrique. En
cohérence avec le schéma directeur, le gestionnaire du réseau public de distribution élabore
périodiquement un programme d’investissement.
Le nombre total de clients d’ENERCAL distributeur est de 42 196 en 2018, dont
41 264 pour la basse tension, contre 36 469 en 2014, soit une augmentation de 15,7%. Le
nombre de clients est en croissance régulière sur l’ensemble de la période examinée. En 2017,
le nombre total de clients du second opérateur de distribution est de 65 496, soit un rapport de
1,6.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
26
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Evolution du nombre de clients de 2014 à 2018
Au 30 juin
2014
2015
2016
2017
2018
Evolution
2018/2014
Haute tension
345
364
377
390
407
17,9%
Solaire
504
500
520
513
525
4,1%
Basse tension
35 620
37 168
38 406
39 701
41 264
15,8%
Total
36 469
38 032
39 303
40 604
42 196
15,7%
Variation
annuelle
4,8%
4,3%
3,3%
3,3%
3,9%
Source : ENERCAL - rapports d’activité
De 2014 à 2018, les ventes d’énergie augmentent de 27,1% en volume et de 22,7% en
valeur. Cette dernière augmentation résulte uniquement de l’effet volume et du mix tarifaire
26
,
les tarifs de la distribution n’ayant pas augmenté depuis 2008.
Ventes d’énergie de 2014 à 2018 (ENERCAL distributeur)
Au 30 juin
2014
2015
2016
2017
2018
Evolution
2018/2014
En GWh
Haute tension
79
81
98
109
117
48,1%
Basse tension
138
147
153
155
159
15,2%
Total
217
228
251
264
276
27,1%
Variation
annuelle
4,9%
5,1%
9,9%
5,4%
4,5%
En MF CFP
Haute tension
1 644
1 706
1 994
2 176
2 331
41,7%
Solaire
17
17
18
18
19
11,7%
Basse tension
5 136
5 471
5 692
5 876
5 991
16,6%
Total
6 797
7 194
7 704
8 070
8 341
22,7%
Variation
annuelle
5,7%
5,8%
7,1%
4,7%
3,3%
Source : ENERCAL - rapports d’activité
Selon le représentant légal, le « duopole [de la distribution] est de nature à renchérir le
service par l’existence et l’augmentation de doublons associés essentiellement aux fonctions
support (…) » et par « la concurrence en milieu régulé au moment des renouvellements des
contrats ce qui conduit à une inflation d’engagements de services (…) ».
2.5
Les enjeux de la transition énergétique
La prégnance de l’industrie métallurgique et des mines constitue une spécificité
calédonienne en matière de consommation d’électricité par usages. L’activité métallurgique et
minière représente 76% de la consommation totale d’électricité contre 24% pour la distribution
publique. La consommation des professionnels, d’une part, et la consommation des particuliers,
26
Différenciation des tarifs en fonction de la consommation du client.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
27
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
d’autre part, représentent respectivement 63% et 37% de la distribution publique. Ce constat
met en relief l’acuité des relations d’affaires et du partenariat entre les industriels, les opérateurs
du système électrique et la Nouvelle-Calédonie.
Consommation d’électricité par usages
Usages
Part relative
Métallurgistes et mines (SLN, KNS, VALE)
76%
Distribution publique
24%
-
dont professionnels
63%
-
dont particuliers
37%
Source : ENERCAL - Système électrique calédonien : Bilan 2018 et perspectives
Le schéma pour la transition énergétique de la Nouvelle-Calédonie (STENC) a été
adopté par délibération du 23 juin 2016
27
.
Le STENC a pour objectifs de réduire les consommations énergétiques, d’accroître la
part du renouvelable et de réduire les émissions de gaz à effet de serre.
Les objectifs en matière d’énergie renouvelable consistent à atteindre, à l’horizon
2030, une production équivalente à la consommation électrique de la distribution publique et
l’autonomie électrique des îles Loyauté.
Selon l’article 5 de la délibération précitée, les objectifs à atteindre d’ici 2030 sont
fixés comme suit :
1. consommations énergétiques :
-
réduire de 20 % la consommation d’énergie primaire de la Nouvelle-Calédonie ;
-
réduire de 25 % la consommation d’énergie finale de la Nouvelle-Calédonie, hors secteur de la
mine et la métallurgie.
2. énergies renouvelables :
-
atteindre une production d’origines renouvelables équivalente à la consommation électrique de la
distribution publique ;
-
atteindre l’autonomie électrique des îles Loyauté.
3. émissions de gaz à effet de serre :
-
réduire de 10 % les émissions dans le secteur de la mine et la métallurgie ;
-
réduire de 15 % les émissions dans le secteur du transport ;
-
réduire de 35% les émissions dans le secteur du résidentiel et tertiaire.
La programmation pluriannuelle des investissements de production électrique de la
Nouvelle-Calédonie sur la période 2016 à 2030 traduit la mise en œuvre de ces orientations
28
.
27
Délibération n° 135 portant approbation du schéma pour la transition énergétique de la Nouvelle-Calédonie.
28
Arrêté n° 2016-1931/GNC du 13 septembre 2016 relatif à la programmation pluriannuelle des investissements
de production électrique de la Nouvelle-Calédonie sur la période 2016 à 2030, modifié par arrêté
n° 2018-1221/GNC du 29 mai 2018.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
28
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Sur les 23 projets validés dans le cadre de la programmation pluriannuelle des investissements,
4 projets ont été attribués à Enercal énergies nouvelles, tous au titre de l’exercice 2017
29
.
Programmation relative aux installations de production d’énergie renouvelable
(Grande Terre)
Filière
Puissance
autorisée au
31/12/2015
Puissance supplémentaire autorisée par rapport au 01/01/2016
2020
2025
2030
Total
Hydroélectrique
avec retenue
68 MW
0 MW
44 MW
44 MW
112 MW
Hydroélectrique fil
de l’eau
9,4 MW
12 MW
18 MW
30 MW
39,4 MW
Eolien
54 MW
0 MW
5 MW
15 MW
69 MW
Photovoltaïque
avec ou sans
stockage
22 MWc
95 MWc
105 MWc
105 MWc
127 MWc
Biomasse
0,3 MW
2 MW
3 MW
4 MW
4,3 MW
Total
153,7 MW
109 MW
66 MW
23 MW
351,7 MW
Source : CTC - arrêté du 13 septembre 2016 modifié
Le mix énergétique représente la répartition des différentes sources d’énergies
primaires utilisées pour les besoins énergétiques dans une zone géographique donnée.
Le charbon et le fuel représentent, en 2018, dans des proportions équivalentes, 83%
du mix énergétique de la distribution publique. La part des énergies renouvelables, soit
l’hydraulique, le solaire et l’éolien, s’établit à 17% sur ce dernier exercice contre 15% en 2015.
Selon ENERCAL, l’augmentation de la part des énergies renouvelables dans le mix
énergétique devrait avoir une incidence sur les coûts du système électrique et sur les comptes
de la société.
Le directeur général souligne, à l’occasion de l’examen du budget 2018-2019, que « le
mix de production sera impacté par une forte augmentation des énergies renouvelables avec
notamment +58 GWh par rapport à l’exercice précédent du fait de la mise en service de
nouvelles centrales éoliennes et photovoltaïques (par exemple, la mise en service de la centrale
éolienne de Eole Yaté en 2019 va injecter 20 MW de plus sur le réseau). Cela aura un impact
sur les comptes d’ENERCAL et sur les coûts du système, à savoir
+338 millions de F.CFP
30
(si on compare le coût des EnR [énergies renouvelables] par rapport au coût marginal des
productions thermiques substituées) ». Si le coût des énergies renouvelables a vocation à
diminuer, la société doit intégrer des projets déjà autorisés dont le coût de production est plus
élevé.
29
ENERCAL, Le système électrique calédonien, bilan 2018 et perspectives.
30
En gras dans le texte.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
29
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Le mix énergétique (distribution publique)
En %
2015
2016
2017
2018
Evolution
2018/2015
(en points)
Charbon
24,1
27,3
31
41
16,9
Fuel
60,2
60,1
51
42 (fuel et
kérosène)
-18,2
Kérosène
0,8
0,9
1
Hydraulique
10,2
9,4
14
6
-4,2
Solaire
0,4
0,4
1
6
5,6
Eolien
4,3
1,8
2
5
0,7
Part des énergies
renouvelables
(arrondie)
15
12
17
17
2
Source : ENERCAL - Système électrique calédonien : Bilan et perspectives
Le développement des énergies renouvelables est porteur d’enjeux techniques, liés à
la gestion de l’intermittence et à la régulation du système électrique
31
, et d’enjeux financiers,
tenant aux coûts de production et aux investissements nécessaires. Il se traduira par des
modifications structurelles en termes d’emplois et de compétences.
Le « défi » du développement des énergies renouvelables est décrit ainsi : « Il faut
noter que ces moyens n’offrent pas de puissance garantie, qu'ils ne fournissent pas les « services
systèmes » techniques indispensables au bon fonctionnement du système électrique et enfin,
qu'il s'agit de moyens de production intermittents ; en conséquence, l’augmentation de la part
des EnR [énergies renouvelables] exige que des moyens de production complémentaires soient
sanctuarisés ou développés en parallèle : ceux-ci sont là soit pour compenser l’absence de
production lorsque les moyens EnR ne fonctionnent pas faute de vent ou de soleil, soit pour
fournir les services systèmes vitaux au système électrique ».
La commission de régulation de l’énergie évoque un changement radical de
paradigme. Elle souligne l’impact considérable du développement des énergies renouvelables
et le caractère capitalistique des moyens de production qui nécessiteront des investissements
importants
32
.
Les enjeux financiers devront être évalués et pris en compte dans la prospective
financière à moyen terme et dans la programmation des investissements. Ils supposent une
lisibilité par la société de ses marges de manœuvre budgétaires et la sécurisation de son
financement dans le cadre du système électrique.
31
Conseil d’administration du 27 février 2018 : Centrale électrique de Népoui - alternatives au projet Népoui 2020.
32
« Si le système électrique calédonien à l’horizon 2030 présente un coût variable de production faible, les moyens
de production qui le constituent sont très capitalistiques et nécessiteront des investissements importants pour la
collectivité (…). La trajectoire d’investissement devra également tenir compte des capacités financières du
gestionnaire de réseau ». Rapport du 25 octobre 2018, Expertise portant sur la PPI 2019-2030 de la Nouvelle-
Calédonie.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
30
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Au questionnement sur ses modèles d’affaires, la société renvoie, d’une part, à la
distinction entre ses activités régulées et non régulées, et d’autre part à ses initiatives en matière
de production d’énergies renouvelables par le biais de sa filiale dédiée.
Recommandation n°
2 : la chambre recommande à ENERCAL de valoriser ses modèles
d’affaires, en tenant compte des évolutions et des changements liés notamment au
développement des énergies renouvelables.
ENERCAL et la Pacific Power Association (PPA)
La pacific power association est une agence intergouvernementale, membre du conseil
des organisations régionales du pacifique, chargée de promouvoir la coopération des
compagnies d'électricité des îles du pacifique dans les domaines de la formation technique, de
l'échange d'informations, du partage des compétences en matière de gestion, d'ingénierie et
autres activités.
L'objectif de la PPA est d'améliorer la qualité de l'énergie dans la région grâce à un
effort de coopération entre les services publics et le secteur privé. Elle compte 25 compagnies
d'électricité, dont les deux distributeurs calédoniens, opérant dans 22 pays insulaires du
pacifique.
La PPA réalise et publie des analyses comparatives faisant état d’indicateurs
techniques, financiers, de ressources humaines et de gouvernance. ENERCAL, qui ne figure
pas dans les tableaux comparatifs, a précisé, en cours d’instruction, que son système
d’information devrait lui permettre, dorénavant, de communiquer les informations nécessaires.
Ces analyses doivent être interprétées avec prudence compte tenu du caractère
déclaratif des données recueillies et de la diversité des compagnies membres. Elles constituent
cependant des documents de référence permettant de positionner ces dernières dans leurs
résultats et leurs performances. La chambre souligne l’intérêt pour ENERCAL de la
valorisation de son adhésion à cette instance et de sa contribution à ses travaux d’analyse.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
31
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
3
UNE FRAGILITE INHERENTE AU SYSTEME TARIFAIRE
3.1
Des tarifs publics de vente réglementés
La délibération du 5 mars 2012 définit les principes généraux du système tarifaire et
les principes de rémunération des activités de production, de transport et de distribution de
l’énergie électrique.
Les tarifs de vente d’électricité applicables à la sortie des réseaux de transport et de
distribution sont classés par catégorie d’usage, l’ensemble des tarifs constituant la grille
tarifaire. Celle-ci doit permettre aux opérateurs du système électrique d’assurer les missions du
service public.
Les tarifs sont révisés trimestriellement par l’application d’indices d’actualisation dont
les formules de calcul sont déterminées par arrêté du gouvernement. Les tarifs sont révisés en
tenant compte des coûts d’achat à la production, ainsi que des coûts d’investissement et
d’exploitation des gestionnaires de réseaux de transport et de distribution. Les formules de
calcul tiennent compte de l’évolution de ces coûts. Elles peuvent également prendre en compte,
d’une part, le rattrapage sur une période de sous ou sur-rémunérations antérieures et, d’autre
part, l’existence d’une compensation financière.
Selon l’article 29 alinéa 2 de la délibération précitée, « pour éviter ou atténuer une
augmentation des tarifs publics de l’électricité, le gouvernement peut recourir au versement
d’une compensation financière à l’attention du gestionnaire du réseau public de transport qui
en répercute les effets sur l’ensemble de la chaîne tarifaire, afin notamment de maintenir la
rémunération attendue par les opérateurs. Dans ce cas, une convention d’objectif et de moyen
est établie entre la Nouvelle-Calédonie et le gestionnaire de réseau public de transport afin de
définir les modalités d’attribution de la compensation financière ».
Le principe de rémunération de l’activité de production
Les gestionnaires du réseau public de transport et de distribution sont tenus d’établir
un contrat définissant les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations
raccordées à leur réseau. Dans le cas où les gestionnaires des réseaux publics concernés et les
producteurs ne sont pas des personnes morales distinctes, des protocoles règlent leurs relations.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
32
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Les contrats et protocoles font apparaître le tarif de l’électricité vendue, son mode
d’actualisation, la durée d’application et la puissance installée. Ils sont soumis à l’agrément du
gouvernement, après avis de la commission des coûts du système électrique
33
.
Le refus d’agrément ne peut être motivé que par le caractère excessif ou non adapté au
niveau de service fourni par le producteur concerné des conditions de vente de l’électricité ou
par le caractère non incitatif à l’optimisation des coûts de production de la tarification.
L’agrément est publié par arrêté du gouvernement, qui précise le mode de
comptabilisation des coûts d’achat à la production dans le calcul des tarifs publics de
l’électricité.
Le principe de rémunération de l’activité du transport et de la distribution
Les tarifs publics de l’énergie électrique applicables au transport et à la distribution
tiennent compte des coûts d’investissement et des coûts d’exploitation supportés
respectivement par les gestionnaires de réseaux publics de transport et de distribution.
La rémunération de l’investissement comporte une part d’amortissement et une part
de rémunération financière du capital immobilisé. La rémunération de l’exploitation est
déterminée à partir de l’ensemble des coûts opérationnels nécessaires au fonctionnement des
réseaux de transport et de distribution.
La période tarifaire désigne la période pour laquelle le gouvernement arrête les
principes de rémunération des investissements et les principes de rémunération de
l’exploitation, à prendre en compte pour le calcul des tarifs de vente de l’électricité applicables
sur cette période.
La présentation au congrès de la réforme tarifaire fait ressortir l’intérêt d’une prise en
charge par le consommateur du coût réel de l’électricité avec, cependant, la possibilité pour la
Nouvelle-Calédonie de ne pas répercuter une hausse des tarifs sur le client final, par le biais
d’une subvention versée au concessionnaire du réseau de transport :
« (…) En réponse à la requête du conseil d’administration d’Enercal, une augmentation des prix
de l’électricité semble, donc, aujourd’hui inéluctable et il revient au gouvernement de fixer les
prix de vente de l’électricité. Néanmoins, étant donné la structure des coûts de production de
l’électricité pour Enercal, si l’augmentation des prix du pétrole depuis 2006 était intégralement
répercutée, les prix au consommateur seraient augmentés de l’ordre de 17 %.
Si une telle augmentation saurait difficilement être acceptable, une révision à la hausse
des tarifs est néanmoins nécessaire car la collectivité ne peut se substituer durablement au
consommateur, ce qui masquerait la réalité des prix et créerait des distorsions (…).
33
Selon l’article 31 de la délibération du 5 mars 2012, la commission des coûts du système électrique est composée
de quatre experts sélectionnés pour leur compétence technique. Le gouvernement, la chambre de commerce et
d’industrie de la Nouvelle-Calédonie et les deux gestionnaires de distribution désignent chacun un expert.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
33
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Le principe de révision proposé consiste à appliquer un indice d’actualisation aux tarifs,
afin d’ajuster le niveau tarifaire à la hausse comme à la baisse en fonction des coûts constatés
de production et d’acheminement de l’électricité. Ainsi, il sera possible de calculer un tarif de
l’électricité représentatif du prix de production, de transport et de distribution de cette
électricité (…).
Toutefois, selon ce mécanisme, la Nouvelle-Calédonie garde la possibilité de ne pas
répercuter une hausse des tarifs sur le client final. Pour cela, une subvention est versée au
concessionnaire du réseau de transport qui répercute ensuite les effets sur le reste de la chaîne
tarifaire (…) »
34
.
Le graphique ci-dessous, extrait de la documentation d’ENERCAL, positionne la
Nouvelle-Calédonie en termes de tarifs basse tension domestique.
Comparatif des tarifs basse tension domestique (kWh en F CFP)
35
Source : ENERCAL, Système électrique calédonien : Bilan 2018 et perspectives
Le système tarifaire, tel que sommairement présenté ci-dessus, se révèle, dans ses
modalités de mise en œuvre, fort complexe et maîtrisé par un nombre limité d’acteurs du secteur
électrique. Une meilleure vulgarisation de celui-ci, en relation avec la direction de l’industrie,
des mines et de l’énergie de la Nouvelle-Calédonie, favoriserait l’appréhension des enjeux qui
s’y attachent et la lisibilité des modèles d’affaires de la société.
34
Congrès de la Nouvelle-Calédonie, compte rendu intégral des débats, session budgétaire de novembre -
décembre 2008 et janvier 2009 : lecture du rapport n° 102 du 29 décembre 2008 de la commission des
infrastructures publiques et de l’énergie.
35
Pour Wallis et Futuna, processus d’application de la péréquation tarifaire avec la métropole d’ici 2020.
16,62
18,51
19,52
20,1
28,99
32,34
36,29
36,29
57,98
95
0
10
20
30
40
50
60
70
80
90
100
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
34
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
3.2
Le jeu de la composante de stabilisation
La composante de stabilisation constitue la variable d’une formule de calcul destinée
à stabiliser les tarifs à la sortie des réseaux de distribution.
La composante de stabilisation apparait comme un montant calculé qui agit comme la
variable pivot du système tarifaire afin de neutraliser l’augmentation des tarifs de vente de la
distribution (maintien de l’indice distribution ID à 1). Ce maintien est obtenu en impactant
mathématiquement à la baisse, par l’effet de la composante de stabilisation, l’évolution du tarif
d’achat au concessionnaire du transport.
Le montant de la composante de stabilisation est fixé trimestriellement par arrêté du
gouvernement. L’arrêté n° 2019-745/GNC du 26 mars 2019 fixe le montant de la composante
de stabilisation applicable au 2
ème
trimestre 2019 : « Conformément à l’article 1
er
de l’arrêté
modifié n° 2013-1905/GNC du 23 juillet 2013 susvisé
36
et à l’article 29 de la délibération n° 195
du 5 mars 2012 susvisée, la composante de stabilisation applicable au 2
ème
trimestre 2019, notée
CS, est fixée à 756 730 000 F CFP ».
Les tarifs publics de l’électricité en sortie des réseaux de distribution n’ont pas été
révisés depuis 2008 et la composante de stabilisation a été actionnée sur l’ensemble de la
période examinée.
Le rapport au gouvernement sur les tarifs publics de l’électricité au 1
er
trimestre 2019
illustre le décalage entre ces derniers et la réalité des coûts, et le jeu de la composante de
stabilisation : « (…) avec une composante de stabilisation nulle, les tarifs publics de l’électricité
en sortie des réseaux de transport augmenteraient de 18,9% et ceux en sortie des réseaux de
distribution de 10,47% au 1
er
janvier 2019 par rapport aux tarifs appliqués en décembre 2012.
Toutefois,
en fixant la composante de stabilisation à 629,23 millions de francs CFP
,
les tarifs en sortie du réseau de transport n’augmenteraient que de 0,9% par rapport à 2012 (…)
ce qui permettrait de
stabiliser les tarifs applicables aux clients raccordés aux réseaux de
distribution
(…) »
37
.
Ainsi qu’il est mentionné au schéma pour la transition énergétique de la Nouvelle-
Calédonie
38
, « les tarifs de l’électricité ont augmenté de 8,5% entre 2001 et 2012, lorsque
l’inflation a atteint 22% et que le cours du baril de Brent a été multiplié par 4 ». Le décrochage
entre les tarifs administrés de l’électricité et l’évolution du prix du pétrole est illustré par le
graphique ci-dessous.
36
Relatif à l’indice d’actualisation des tarifs de vente du transport ; Cs : Composante de stabilisation en vigueur
au trimestre t exprimée en franc CFP, égale à 0 sauf décision contraire exprimée par arrêté du gouvernement.
37
Passages en gras dans le texte.
38
La réglementation du secteur de l’électricité : garantir un tarif public compétitif de l’électricité en Nouvelle-
Calédonie, page 45.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
35
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Evolution de l’inflation, du baril de Brent et du tarif de l’électricité (base 100 en
2001)
Source : schéma pour la transition énergétique de la Nouvelle-Calédonie
La commission de régulation de l’énergie, dans un rapport de février 2017
39
, relève
que « les tarifs d’électricité de la distribution publique n’ont pas évolué depuis 2008, ni en
niveau ni en structure (…) » [et] « recommande en conséquence de réfléchir à une réforme du
modèle tarifaire en vigueur, notamment afin d’accompagner le développement de
l’autoconsommation et d’envoyer des signaux incitant à une meilleure maîtrise de la
consommation d’électricité ».
3.3
L’intégration des recettes supplémentaires de Yaté
Par convention de concession du 28 février 1956, le territoire a concédé à ENERCAL
la construction et l’exploitation d’une usine hydroélectrique dite « de Yaté », ainsi que la
concession de transport d’énergie électrique de Yaté à Nouméa.
La fixation du prix de vente par ENERCAL à la SLN de l’électricité produite par le
barrage de Yaté a fait l’objet d’un litige entre les deux parties, qui ont choisi de s’en remettre à
un arbitrage.
39
Rapport CRE du 12/07/2017, Expertise portant sur le renouvellement des groupes 1 et 2 de la centrale de Népoui
en Nouvelle-Calédonie.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
36
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Selon l’exposé du litige, « par convention du 28 février 1956 a été accordée à la société
ENERCAL
la
« concession
d’établissement
et
d’exploitation
de
l’aménagement
hydroélectrique de la chute de Yaté » en Nouvelle-Calédonie, pour une durée de 75 ans, avec
un cahier des charges contenant les deux dispositions essentielles suivantes :
- 90% de l’électricité produite par le barrage concédé sera réservé, à sa demande, à
SLN, le reliquat étant destiné au réseau local (article 16) ;
- le tarif est fixé par l’article 21, qui détermine les tarifs maxima (…) ».
Le tribunal arbitral, en date du 14 décembre 2012, a dit : « qu’Enercal est en droit de
se prévaloir de l’article 21 du contrat pour fixer le prix de l’électricité au tarif maximum prévu
par le contrat de concession ; qu’en revanche, en imposant ce tarif maximum à compter du
1
er
janvier 2012, en procédant de manière brutale, sans préavis ni négociation véritable, Enercal
a commis un abus dans l’exécution du contrat ; que le préjudice résultant pour SLN de cet abus
est réparé par le report au 1
er
juillet 2013 de l’application du tarif maximum (…) »
40
.
En application du cahier des charges de la concession et de la sentence arbitrale, le
prix de l'électricité produite au barrage de Yaté, vendue à la SLN par ENERCAL, est passé au
1
er
juillet 2013 de 2,6 F CFP/kWh à 13 F CFP/kWh.
Les recettes supplémentaires générées par la révision du tarif ont été intégrées dans le
système tarifaire, pour un montant annuel de 3 510 MF CFP, réduisant d’autant le montant de
la composante de stabilisation
41
.
Cette disposition revient à faire supporter une partie du coût de l’électricité par des
activités non régulées, hors distribution publique. Son principe est rappelé dans le cadre du
schéma pour la transition énergétique de la Nouvelle-Calédonie
42
.
« Sur la base de cette nouvelle méthode tarifaire, des contrats de production en cours et des
niveaux de revenus octroyés à EEC et ENERCAL sur la 1
ère
période tarifaire, les tarifs de
l’électricité auraient dû augmenter de 17,7 % au 1
er
janvier 2013 pour que le système électrique
s’autofinance.
C’est ENERCAL, en tant que gestionnaire de réseau de transport, qui a pallié à cette absence
de hausse de tarif pour le consommateur final. Ce manque à gagner a été compensé par les
recettes supplémentaires générées par l’arbitrage rendu sur le tarif de vente de l’énergie de Yaté
à la SLN, applicable à compter du 1
er
juillet 2013. Le gouvernement a cependant la possibilité,
si les recettes supplémentaires dégagées par ce nouveau tarif ne couvraient pas le déficit causé
par la stabilisation des tarifs, d’octroyer une compensation financière au concessionnaire du
réseau de transport afin de maintenir sa rémunération attendue ».
Aucune compensation financière n’a été octroyée à ENERCAL depuis 2014, dans le
cadre des dispositions de l’article 29 de la délibération du 5 mars 2012.
40
Tribunal de grande instance de Paris, expédition exécutoire d’une sentence arbitrale, du 11 mars 2013, rendue
dans le différend opposant la SA SLN à la société ENERCAL.
41
Article 2 de l’arrêté n° 2016-1927/GNC du 13 septembre 2016 : « contribution théorique du barrage de Yaté,
fixée à 3 510 000 000 francs CFP ».
42
Juin 2016 ; page 46.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
37
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Le président du gouvernement, en réponse à un courrier du président de la SLN sur les
relations avec Enercal
43
, apporte un éclairage sur le contexte de la revalorisation du prix de
l’électricité du barrage de Yaté vendue à cette société : « (…) annoncée dès août 2009, cette
revalorisation avait pour but de rapprocher ces tarifs du prix de revient moyen de l’électricité
injectée sur le réseau public à haute tension (…) en 1955, un consensus avait été trouvé avec le
territoire pour construire le barrage de Yaté, de sorte que la SLN puisse n’assumer que le tiers
seulement des investissements nécessaires pour augmenter sa production de 9 000 à 19 000
tonnes par an de nickel, tout en se voyant octroyer à la fois un régime fiscal privilégié de longue
durée et une participation significative dans Enercal. La contrepartie de cet arrangement avait
été annoncée clairement à l’époque : l’énergie produite devait revenir au territoire au bout d’une
quarantaine d’années (ce fut finalement 54 ans). Puisqu’il fallait dans le même temps garantir
à la SLN de pouvoir, si elle n’avait pas d’autre solution, recevoir la quantité d’énergie
nécessaire, le contrat de concession avait prévu une formule d’actualisation relativement large,
et c’est bien cette voie qui a été utilisée depuis la mi 2013 (…) ». Aucun document remis dans
le cadre de l’instruction ne mentionne ces éléments.
La commission de régulation de l’énergie a proposé, en date du 16 avril 2019, de mettre
en place un nouveau contrat long terme comportant une clause de partage des risques et
bénéfices entre ENERCAL et la SLN, sur la base d’une indexation du prix de vente de
l’électricité de Yaté à la SLN selon le cours du nickel.
Toutes choses égales par ailleurs, une diminution des recettes d’ENERCAL liées au
barrage de Yaté se traduirait automatiquement par une hausse à due concurrence de la
composante de stabilisation, autrement dit par une charge potentielle pour la Nouvelle-
Calédonie.
Au jour du dépôt du rapport, une négociation est en cours entre ENERCAL et la SLN.
Il ne serait pas envisagé de revenir sur les termes de l’arbitrage et sur le prix de vente de
l’électricité. Une remise de 1 Md F CFP, indexée sur le cours du nickel, serait accordée par
ENERCAL à la SLN. Par ailleurs, 2 Mds F CFP seraient pris en charge par l’Etat au titre de la
loi de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer
44
.
3.4
Des créances incertaines qui affectent la fiabilité des comptes
Selon les éléments apportés par la société en cours d’instruction, le défaut de
rémunération au 30 juin 2018, lié à la stabilisation des tarifs, porterait sur un montant total de
2,5 Mds F CFP, dont 843 MF CFP au titre de l’exercice clos, montant reconnu par le système
tarifaire, et 1 697 MF CFP, montant non reconnu par le système tarifaire.
Par ailleurs, à titre indicatif, le montant de la composante de stabilisation pour la
période du 1
er
juillet 2018 au 30 juin 2019, tel que fixé par arrêtés du président du
43
Réponse du 13 avril 2018.
44
Loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer et portant autres
dispositions en matière sociale et économique.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
38
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
gouvernement, est de 2 125 MF CFP. Le montant de cette même composante de stabilisation
pour le précédent exercice fiscal était de 315 MF CFP.
La diminution observée sur les deux derniers exercices sous revue s’explique, comme
indiqué ci-dessus, par l’intégration dans le système tarifaire des recettes générées par la révision
du tarif de Yaté.
Evolution de la composante de stabilisation de 2014 à 2019 (en MF CFP)
Source : ENERCAL
La composante de stabilisation figure dans les comptes de la société, est prise en
compte dans le calcul du chiffre d’affaires et du résultat et est incluse dans l’assiette de l’impôt
sur les sociétés.
Selon les dispositions de l’article 3 de l’arrêté du 13 septembre 2016
45
, « (…) Si des
composantes de stabilisation non nulles ont été votées sur au moins l’un des 4 trimestres de
l’exercice comptable concerné, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie peut fixer le
montant de la variable KP
46
en tenant compte également des composantes de stabilisation votées
et de l’éventuelle compensation financière accordée au gestionnaire du réseau de transport
(…) ».
Le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, saisi d’une requête en annulation
d’arrêtés fixant le montant de la composante de stabilisation
47
, établit une distinction entre la
composante de stabilisation et la compensation financière : « Considérant, enfin, que la
45
Arrêté n° 2016-1927/GNC portant modification de l’arrêté n° 2013-1905/GNC du 23 juillet 2013 fixant les
règles de calcul des tarifs de vente de l’électricité et de l’arrêté modifié n° 2013-1909/GNC du 23 juillet 2013
portant agrément de contrats, avenants et protocoles d’achat d’électricité et fixant le mode de comptabilisation des
coûts d’achat à la production dans le calcul des tarifs publics de l’électricité.
46
Variable de correction des écarts de prévision à la production.
47
Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, 3 juillet 2014, MM.X., Y. et Mme Z.
3 666
4 093
3 868
1 159
315
2 125
0
500
1 000
1 500
2 000
2 500
3 000
3 500
4 000
4 500
2014
2015
2016
2017
2018
2019
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
39
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
composante de stabilisation correspond à la somme permettant de stabiliser le tarif applicable
aux consommateurs ; qu'elle résulte du paramètre Cs utilisé dans la formule de calcul
mentionnée à l'article 1
er
de l'arrêté n° 2013-1905/GNC et n'a pas trait à la compensation
financière de l'article 29 de la délibération du 5 mars 2012 qui peut être versée au gestionnaire
du réseau de transport ; que c'est donc à juste titre que les montants fixés à l'article 1
er
des arrêtés
contestés n'ont pas été inscrits au budget de la Nouvelle-Calédonie ».
Cette même juridiction, saisie par ENERCAL d’une requête portant sur le même objet,
a considéré que les arrêtés attaqués ont seulement pour objet de réviser la grille tarifaire par
application d’un indice d’actualisation trimestriel dont la formule de calcul est déterminée par
arrêté du gouvernement
48
.
Le président d’ENERCAL rappelait, à ce sujet, lors du conseil d’administration du
4 septembre 2014, qu’« une analyse juridique des services de la Nouvelle-Calédonie indique
que la composante de stabilisation n’est qu’un paramètre qui s’intègre dans la formule
d’actualisation du prix de l’électricité alors que la compensation financière prévue à l’article 29
de la délibération de 2012 ne doit être versée par le gouvernement que si le concessionnaire
n’est pas en mesure de supporter ses charges d’exploitation. Le fait pour le gouvernement de
fixer la valeur de la composante de stabilisation à 1 000 millions XPF, ne signifie donc pas que
ce dernier se trouve dans l’obligation de verser à ENERCAL une compensation financière d’un
même montant ».
Les commissaires aux comptes, dans un courrier adressé à ENERCAL
49
, ont pris acte
de l’interprétation des services juridiques de la Nouvelle-Calédonie de « l’utilisation du terme
« pouvoir » dans l’article 29 de la délibération 195 du 5 mars 2012 comme signifiant la non
automaticité de la compensation ». Ils portent à la connaissance des actionnaires, dans leur
rapport sur les comptes consolidés clos au 30 juin 2018, la note « Méthode tarifaire » de
l’annexe qui expose les principes retenus en ce qui concerne la reconnaissance de la composante
de stabilisation et des variables de correction des indices tarifaires.
La chambre s’interroge, au vu de ce qui précède, sur le caractère certain de la créance
d’ENERCAL et, conséquemment, sur le bien-fondé de son inscription dans les comptes.
Les commissaires aux comptes indiquent, en réponse à la contradiction, que les
écritures correspondantes sont faites dans un compte de régularisation et qu’« il serait ainsi
inexact de conclure à la lecture des comptes qu’ENERCAL détient une créance auprès de la
Nouvelle-Calédonie ». Cet élément de réponse confirme l’analyse de la chambre.
Ils relèvent la volonté d’amorcer des discussions sur le sujet tendant à la
reconnaissance de ces variables à l’actif de la société et établissent un rapprochement avec le
dispositif métropolitain et le mécanisme de compensation des charges de service public de
l’énergie. Ils concluent au bien-fondé de l’enregistrement dans les comptes d’ENERCAL des
produits à recevoir du modèle tarifaire.
48
Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, 28 mai 2019, société néo-calédonienne d’énergie (ENERCAL).
49
En date du 18 novembre 2014 (procès-verbal du conseil d’administration du 28 novembre 2014).
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
40
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
En conclusion, les commissaires aux comptes considèrent qu’« il n’en est pas moins
essentiel que des mesures soient prises à courte échéance pour préserver la pérennité du modèle,
avant notamment que le déficit de compensation ne soit trop important au regard des capacités
de remboursement du budget de la Nouvelle-Calédonie ».
Il n’est pas discuté, comme ils le notent, que « soit un ajustement des tarifs, soit une
indemnisation permettrait au concessionnaire du transport d’obtenir la rémunération qui lui est
dévolue par la réglementation ».
Il n’en demeure pas moins, au vu des éléments développés ci-dessus, et corroborés par
l’analyse du juge administratif, que le caractère certain de la créance d’ENERCAL et,
conséquemment, le bien-fondé de son inscription dans les comptes soit critiquable.
3.5
L’évolution de la tarification
ENERCAL a bénéficié, jusqu’en 2012, d’avances de trésorerie de la Nouvelle-
Calédonie et d’une avance en compte courant d’associé pour un montant global de
3 300 MF CFP. Un abandon de créance de 1 882 MF CFP est intervenu en 2013 et le solde à
rembourser, à ce jour, est de 1 417 MF CFP. L’abandon de créance correspond à la composante
de stabilisation du 1
er
semestre 2013.
La convention d’objectifs et de moyens du 13 décembre 2013 entre la Nouvelle-
Calédonie et la société acte cette compensation, financée par une transformation de l’avance en
compte courant d’associé et d’une partie de l’avance de trésorerie à court terme en subvention
d’équipement
50
.
Cette convention fixe les conditions et les modalités de versement de la participation
financière de la Nouvelle-Calédonie à ENERCAL, mais ne définit pas d’objectifs de gestion ou
de performance.
A la demande de remboursement de l’avance de trésorerie, à l’échéance de décembre
2018, la société évoque des « prévisions de trésorerie [qui] montrent que le remboursement de
cette avance risquerait d’engendrer un dépassement inacceptable de notre découvert autorisé
par nos banques partenaires ».
50
Délibération n° 302 du 28 août 2013 relative au budget supplémentaire 2013 de la Nouvelle-Calédonie - budget
principal (articles 14 à 16) :
L’avance à court terme accordée pour l’exercice 2013 à la société ENERCAL est réduite de huit cent quatre-vingt-
deux millions cent cinquante-quatre mille francs (- 882 154 000 XPF) pour être portée à un milliard quatre cent
dix-sept millions huit cent quarante-six mille francs (1 417 846 000 XPF).
L’avance en compte courant d’associé accordée à la société ENERCAL est reprise en totalité à hauteur d’un
milliard (1 000 000 000 XPF).
Une subvention d’équipement est attribuée à la société ENERCAL pour un montant d’un milliard huit cent quatre-
vingt-deux millions cent cinquante-quatre mille francs (1 882 154 000 XPF) au titre de travaux de gros entretien
sur les ouvrages du réseau de transport et sur des aménagements hydrauliques.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
41
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
A cette occasion, la société fait un rapprochement entre cette avance de trésorerie et le
versement de la composante de stabilisation : « ENERCAL est prêt à étudier avec vous, la
possibilité de rembourser cette avance de trésorerie selon un échéancier à mettre en place, dès
lors que le modèle tarifaire assurera le versement financier d’une composante de stabilisation
au niveau idoine ».
Le solde restant à rembourser peut également être rapproché de la trésorerie nette de
la société au terme de l’exercice 2018, soit 447 MF CFP.
La question du versement de la compensation financière est sous-jacente au recours
formé par ENERCAL devant le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, évoqué ci-
dessus, visant à l’annulation des deux arrêtés fixant le montant de la composante de stabilisation
pour les 3
ème
et 4
ème
trimestre 2018.
La chambre note que ces divergences de vues sur un point essentiel de l’application
du système électrique ne peuvent qu’affecter la définition et la mise en œuvre d’une stratégie
commune entre ENERCAL et son actionnaire majoritaire, préjudiciable aux intérêts du service
public. Cette situation met en évidence l’ambiguïté de la spécificité calédonienne tenant à la
confusion des rôles d’opérateur et de régulateur du système électrique.
Les incertitudes sur le versement de la compensation financière par la Nouvelle-
Calédonie constituent un facteur de fragilité pour la société et affectent la lisibilité de ses
perspectives financières. La chambre relève, à cet égard, la suggestion du représentant d’EDF,
lors du conseil d’administration du 4 septembre 2014, de « l’engagement d’une réflexion sur
un modèle tarifaire robuste dans la durée et qui soit totalement désensibilisé de tout effet
conjoncturel (…) ».
La sécurisation de la rémunération attendue par le gestionnaire du système électrique
doit s’inscrire dans un cadre définissant des objectifs chiffrés et mesurables en termes de
performance et d’efficience de gestion. A cet effet, une expertise indépendante et l’apport de
référentiels pertinents apparaissent essentiels.
Les développements qui précèdent conduisent la chambre à formuler la
recommandation ci-après.
Recommandation n°
3 : la chambre recommande à ENERCAL de rechercher auprès de
la Nouvelle-Calédonie les termes d’un accord quant à l’évolution du système tarifaire.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
42
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
4
DES MARGES FINANCIERES CONTRAINTES
4.1
Un changement de traitement comptable des amortissements
L’exercice clos le 30 juin 2018 a été marqué par deux évènements, ayant une incidence
significative sur les comptes. Le premier est le contrôle fiscal portant sur la période du
1
er
juillet 2012 au 30 juin 2015
51
, le second, un jugement du tribunal administratif de Nouvelle-
Calédonie qualifiant juridiquement la fin de la concession du SIVM Sud
52
.
Le contrôle fiscal a entrainé un changement de méthode comptable concernant les
amortissements de caducité pratiqués par la société
53
. Ce changement de méthode a été appliqué
de manière rétroactive sur les comptes clos au 30 juin 2018. Il s’est traduit par un redressement
d’un montant de 518 MF CFP, dont 42 MF CFP de pénalités de retard.
Le tribunal administratif a considéré que le terme de la concession du SIVM Sud devait
s’analyser comme un non renouvellement de concession, ce qui implique, comptablement, la
cession des immobilisations concédées dans les comptes de la société. Le traitement comptable
a été réalisé dans les comptes clos au 30 juin 2017 pour le SIVM Sud et dans les comptes clos
au 30 juin 2018 pour les concessions arrivées à leur terme de 2015 à 2017.
Les comptes sociaux et les comptes consolidés ont fait l’objet d’une présentation
retraitée dans le rapport financier au 30 juin 2018. Un retraitement complémentaire a été réalisé
par la société, en cours d’instruction, à la demande du rapporteur, afin de lisser les effets du
changement de méthode comptable sur l’ensemble des exercices sous revue.
4.2
Le résultat comptable
Le résultat d’exploitation est relativement stable sur la période examinée et s’établit à
2,3 Mds F CFP au 30 juin 2018. Les ventes d’énergie progressent de 22,4%, alors que les autres
activités (hydraulique Yaté, gestion Doniambo…) sont en baisse de 15,5%.
Le résultat net comptable reflète la même tendance et s’établit à 1,3 Md F CFP au
30 juin 2018, soit à un niveau identique à celui enregistré au 30 juin 2014
54
et au 30 juin 2015.
51
Direction des services fiscaux, réponse aux observations du contribuable, 13 décembre 2017.
52
27 avril 2017, société ENERCAL c/ syndicat intercommunal à vocation multiple.
53
L'amortissement de caducité est un amortissement financier qui permet la reconstitution, au plus tard à
l'expiration de la concession, de la totalité des capitaux investis par le concessionnaire.
54
L’exercice clos le 30 juin 2014 intègre un report déficitaire qui se traduit par une minoration d’impôt évaluée
par ENERCAL à 771 MF CFP, soit un résultat net retraité de 1 318 MF CFP.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
43
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Le retraitement des comptes, comme explicité ci-dessus, améliore le résultat net des
exercices considérés, mais ne modifie pas de façon significative les tendances observées
55
.
Ces résultats doivent cependant être appréciés en tenant compte des réserves formulées
ci-avant (§ 3.4) sur la prise en compte de la composante de stabilisation dans le chiffre
d’affaires, soit un montant de 843 MF CFP au titre de l’exercice 2017-2018 à rapprocher du
résultat de 1 382 MF CFP.
Selon les éléments apportés par la société lors de l’entretien de fin de contrôle, le
résultat prévisionnel au 30 juin 2019 serait de 125 MF CFP. Celui-ci doit être apprécié en
considération de la même réserve relative à la composante de stabilisation.
Le résultat net comporte une part récurrente et une part non récurrente, cette dernière
résultant notamment des ventes hors distribution publique. Une information sur la situation
financière du groupe ENERCAL et sa capacité à financer sa stratégie, présentée au conseil
d’administration du 21 juin 2016, souligne la pertinence de cette approche pour l’analyse et la
prospective financière. Il était noté « que le résultat net pour les exercices 2013/2014 et
2014/2015 était constitué d’une partie non récurrente importante. Cette part non récurrente s’est
effondrée sur l’exercice 2015-16 (…). L’augmentation du résultat net à 2 090 millions de FCFP
en 2013/2014 correspond à des ventes à bien plaire à KNS et à une hydraulicité record de Yaté.
Toutefois, à partir de l’exercice suivant le résultat net n’a cessé de chuter (1 174 millions de
FCFP en 2014/2015 et 206 millions de FCFP prévus pour 2015/2016) ».
Cette présentation au conseil d’administration faisant ressortir la part récurrente et la
part non récurrente des recettes n’a pas été renouvelée, privant celui-ci de déterminants sur la
structure des modèles d’affaires.
55
Le résultat net de l’exercice clos au 30 juin 2014, retraité de l’incidence du report déficitaire, est de
1 522 MF CFP.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
44
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Résultat comptable de 2014 à 2018
En MF CFP
Au 30 juin
2014
2015
2016
2017
2018
2018
retraité
Var. 2018
retraité
/2014
Produits
d’exploitation
Ventes d’énergie
14 899
17 052
17 404
16 457
18 248
18 248
22,4%
Autres activités
14 641
13 386
11 595
12 199
12 368
12 368
-15,5%
Chiffre d’affaires
29 541
30 438
29 000
28 657
30 616
30 616
3,6%
Total des produits
d’exploitation
32 632
33 084
32 338
33 898
34 476
34 476
5,6%
Charges
d’exploitation
30 236
32 048
31 684
30 934
32 098
32 098
6,1%
Dont achats
d’énergie
12 611
13 623
13 714
14 046
14 067
14 067
11,5%
Résultat
d’exploitation
2 395
1 035
654
2 964
2 378
2 378
-0,7%
Produits financiers
127
93
64
91
85
85
-33%
Charges financières
229
148
110
100
112
112
-51%
Résultat financier
-101
-54
-46
-8
-26
-26
Résultat courant
2 293
981
608
2 955
2 351
2 351
2,5%
Produits
exceptionnels
268
1 326
261
1 127
9 209
254
-5,2%
Charges
exceptionnelles
8
1
50
2 274
5 112
25
Résultat
exceptionnel
260
1 325
211
-1 147
4 096
228
-12,3%
Total des produits
33 028
35 018
32 665
35 117
43 771
34 816
5,4%
Total des charges
30 939
33 844
32 233
34 149
38 521
33 433
8%
Résultat net
comptable
2 089
1 174
431
968
5 250
1 382
-33,8%
n/n-1
-43,8%
-63,2%
124,5%
42,7%
Résultat net
comptable retraité
2 293
1 911
681
1 194
5 250
1 382
-39,7%
n/n-1
-16,6%
-64,3%
75,3%
15,7%
Source : rapports financiers
Le ratio de rentabilité, qui rapporte l’excédent brut d’exploitation au chiffre d’affaires,
est de 17% au 30 juin 2018 contre 20,7% au 30 juin 2014. Une comparaison avec une valeur
de référence permettrait d’en mesurer la portée.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
45
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Evolution du ratio de rentabilité de 2014 à 2018
En MF CFP
Au 30 juin
2014
2015
2016
2017
2018
Var.
2018/2014
Chiffre
d’affaires
(CA)
29 541
30 438
29 000
28 657
30 616
3,6%
CA VALE NC
3 678
4 626
4 856
4 790
4 869
32,4%
Excédent brut
d’exploitation
(EBE)
5 362
3 910
3 134
3 669
4 378
-18,3%
Ratio EBE/CA
18,1%
12,8%
10,8%
12,8%
14,3%
-3,8 points
CA hors
VALE NC
25 863
25 812
24 144
23 867
25 747
-0,4%
Ratio EBE/CA
hors VALE
NC
20,7%
15,1%
12,9%
15,3%
17%
-3,3 points
Source : CTC - ENERCAL
L’évolution du chiffre d’affaires par activités distingue les ventes d’énergie, la
production d’énergie et les travaux et prestations.
Les ventes d’énergie augmentent globalement de 14,4% du 30 juin 2014 au
30 juin 2018 (tableau n° 15 ci-dessous). Le transport et les ventes d’énergie haute tension
enregistrent l’incidence de la relocalisation du Médipôle sur Dumbéa, dans le cadre d’une
concession d’ENERCAL. L’évolution du transport est affectée par la diminution de l’indice
d’actualisation du modèle tarifaire (IT)
56
. Les ventes basse tension augmentent uniquement sous
l’effet volume, en raison du gel des prix à la sortie des réseaux de distribution.
Selon les données des rapports financiers, l’hydraulique de Yaté et les ventes à VALE
NC représentent, au 30 juin 2018, un montant cumulé de 8,6 Mds F CFP, soit 28% du chiffre
d’affaires.
56
Lors de la présentation du budget de l’exercice 2017/2018 au conseil d’administration, la baisse du chiffre
d’affaires transport liée à celle de l’indice transport est évaluée 248 MF CFP.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
46
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Evolution du chiffre d’affaires par activités de 2014 à 2018
En MF CFP
Au 30 juin
2014
2015
2016
2017
2018
Var.
2018/2014
Transport
8 920
9 135
9 430
9 099
8 652
-3%
Haute tension
1 643
1 705
1 994
2 175
2 331
41,8%
Basse tension/solaire
5 153
5 488
5 710
5 832
6 004
16,5%
Modèle tarifaire
-818
553
40
5
58
Energie en compteurs
34
62
5
Total ventes d’énergie
14 899
16 882
17 210
17 174
17 051
14,4%
Hydraulique Yaté
4 728
3 672
3 512
4 359
3 726
-21,1%
Gestion Doniambo
1 095
1 126
1 139
1 187
1 227
12%
SLN, KNS, autres
3 487
2 406
581
298
882
-74,7%
Prony Energies, Vale NC
3 684
4 728
4 886
4 864
4 961
34,6%
Modèle tarifaire
169
194
-717
1 196
Total production
d’énergie
12 995
12 103
10 314
9 993
11 994
-7,7%
Travaux et prestations
1 022
963
997
999
1 105
8,1%
Activités annexes
624
488
477
489
463
-25,8%
Total travaux et
prestations
1 646
1 452
1 475
1 489
1 569
-4,6%
Chiffre d’affaires
29 541
30 438
29 000
28 657
30 616
3,6%
Source : rapports financiers
La comptabilité analytique permet d’appréhender le résultat de chacune des fonctions
exercées par la société, qui reflète l’application du système tarifaire et l’incidence sur la
fonction transport du gel du prix de l’énergie à la sortie des réseaux de distribution. En tendance,
le résultat du transport est déficitaire, hors convention Yaté, et le résultat de la distribution
positif. Au 30 juin 2017, le premier représente une valeur de -2 986 MF CFP, le second, une
valeur de 689 MF CFP.
Evolution du résultat analytique de 2014 à 2017
En MF CFP
Au 30 juin
2014
2015
2016
2017
Transport
-3 611
-3 440
-3 101
-2 986
Convention Yaté
4 409
3 176
2 955
3 820
Distribution
105
323
310
689
Source : CTC – ENERCAL
Le représentant légal indique, en réponse à la contradiction, que « le chiffre d’affaires
d’ENERCAL est soumis à de grandes variations liées à des éléments exogènes à la société :
l’hydraulicité de Yaté (…), les ventes aux métallurgistes (…), l’impact des variables du modèle
tarifaire (…) ». Il précise qu’ « entre le 30 juin 2018 et le 30 juin 2014 les ventes d’énergie DP
progressent de 22,4% dont seulement 8,4% sont dus à une progression du Chiffre d’affaires
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
47
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
fiduciaires, la différence est liée à la progression des variables du modèle tarifaire, qui elles sont
non fiduciaires ».
4.3
Le financement des investissements
Le tableau de financement fait ressortir, en ressources, une diminution de la capacité
d’autofinancement et un recours accru à l’emprunt. La capacité d’autofinancement s’établit à
2,3 Mds F CFP au 30 juin 2018 contre 4,8 Mds F CFP au 30 juin 2014 et 3,8 Mds F CFP au
30 juin 2015. La société a mobilisé 1 414 MF CFP d’emprunt sur l’exercice clos au
30 juin 2018 contre 627 MF CFP sur l’exercice précédent.
Les investissements et les travaux provisionnés sont en augmentation sensible sur la
période examinée et représentent, en cumul, une valeur moyenne par exercice de
2,6 Mds F CFP.
La variation du besoin en fonds de roulement est de 1 950 MF CFP au 30 juin 2018
contre -1 451 MF CFP au 30 juin 2017.
La trésorerie de l’exercice connait une évolution irrégulière et ressort à -399 MF CFP
au 30 juin 2018 contre 1 535 MF CFP au 30 juin de l’année précédente. En cumul, la trésorerie
est de 1 152 MF CFP au 30 juin 2018 contre 1 551 MF CFP au 30 juin 2017.
Comme indiqué ci-dessus, la trésorerie est affectée par le non versement de la
composante de stabilisation par la Nouvelle-Calédonie, mais bénéficie du non remboursement
par la société de l’avance de trésorerie due à cette dernière.
Le fonds de roulement, dégradé en début de période (- 3 030 MF CFP au 30 juin 2013),
se reconstitue et présente une valeur de 2 503 MF CFP au 30 juin 2018, soit 28 jours de charges
d’exploitation.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
48
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Tableau de financement de 2014 à 2018
En MF CFP
Au 30 juin
2014
2015
2016
2017
2018
2018
retraité
Var. 2018
retraité/2014
Résultat net
2 090
1 174
432
968
5 250
1 382
-33,8%
Capacité
d’autofinancement
4 807
3 849
2 954
2 169
213
2 302
-52,1%
CAF retraitée
3 869
3 366
2 750
1 983
213
2 302
-40,5%
Emprunts à appeler
autorisés
-1
661
0
627
1 414
1 414
Cessions
d’immobilisations
888
1 280
1 280
Avances de la
Nouvelle-Calédonie
-1 882
0
0
0
0
0
Ressources
2 924
4 510
2 954
3 684
2 907
4 997
70,8%
Investissements
1 776
1 623
2 125
2 207
2 057
2 057
15,8%
Dividendes
61
61
61
61
Travaux
provisionnés
590
553
820
803
868
868
47,1%
Emprunts à
rembourser
autorisés
802
840
729
530
460
460
-42,6%
Besoin en fonds de
roulement
(variation)
-1 769
1 430
307
-1 451
-139
1 950
Emplois
1 399
4 446
4 042
2 150
3 306
5 396
285,7%
Trésorerie nette
1 526
64
-1 088
1 535
-399
-399
Trésorerie cumulée
1 040
1 104
16
1 551
1 152
1 152
10,7%
Fonds de roulement
-830
1 225
1 220
2 036
2 503
Source : CTC - ENERCAL
ENERCAL dispose d’une autorisation de découvert de 1,9 Md F CFP auprès des
établissements bancaires.
L’analyse de la trésorerie à un niveau infra-annuel fait ressortir une mobilisation
importante de ce découvert sur le premier semestre 2016
57
, avec un montant de près de
2 Mds F CFP au cours du mois de mai, et une détérioration de la trésorerie sur la période la plus
récente. Ces constats illustrent la fragilité de la situation financière de la société.
57
La commission de découvert et les intérêts des comptes courants créditeurs auprès des établissements bancaires
ont représenté, en 2018, des montants respectifs de 4 664 000 F CFP et de 407 407 F CFP.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
49
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Evolution de la trésorerie de juillet 2015 à juin 2018
Source : CTC – ENERCAL
Le ratio d’immobilisation des capitaux permanents permet d’apprécier la couverture
de l’actif immobilisé par des ressources de long terme. Ce ratio, qui rapporte les capitaux
permanents à l’actif net immobilisé, est égal à 1 depuis l’exercice clos le 30 juin 2015 et
n’appelle pas d’observations.
Evolution du ratio d’immobilisation des capitaux permanents de 2014 à 2018
En MF CFP
Au 30 juin
2014
2015
2016
2017
2018
Capitaux permanents
38 691
41 943
42 878
44 474
45 578
Actif net immobilisé
40 632
41 886
42 563
43 358
44 203
Ratio d’indépendance financière
0,95
1,00
1,01
1,03
1,03
Source : CTC - ENERCAL
-1 500 000
-1 000 000
-500 000
0
500 000
1 000 000
1 500 000
2 000 000
2 500 000
1 2 3 4 5 6
7 8
9 101112131415161718192021222324252627282930313233343536
En KF CFP
Au terme du mois (1 à 36)
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
50
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
4.4
L’endettement
Le niveau d’endettement de la société rapporté aux capitaux propres est relativement
stable sur la période examinée et atteste d’un recours à l’emprunt maîtrisé. La chambre note,
cependant, une augmentation de l’endettement bancaire sur le dernier exercice, qui s’établit à
3 365 MF CFP contre 2 411 MF CFP au 30 juin précédent.
Evolution de l’endettement de 2014 à 2018
En MF CFP
Au 30 juin
2014
2015
2016
2017
2018
2018 retraité
Endettement bancaire
n-1
4 024
3 221
3 043
2 314
2 411
2 411
Emprunts appelés
0
661
0
627
1 414
1 414
Emprunts remboursés
-802
-840
-729
-530
-460
-460
Endettement bancaire
n
3 221
3 043
2 314
2 411
3 365
3 365
Trésorerie
1 040
1 104
16
1 551
1 152
1 152
Endettement net
2 181
1 939
2 297
860
2 214
2 214
Capitaux propres
12 439
13 613
13 983
14 890
20 079
16 211
Ratio endettement /
capitaux propres
17,5%
14,2%
16,4%
5,8%
11%
13,7%
Source :
CTC - ENERCAL
4.5
Les comptes consolidés
Selon l’article L. 233-16 du code de commerce, « I - Les sociétés commerciales
établissent et publient chaque année à la diligence du conseil d'administration, du directoire, du
ou des gérants, selon le cas, des comptes consolidés ainsi qu'un rapport sur la gestion du groupe,
dès lors qu'elles contrôlent de manière exclusive ou conjointe une ou plusieurs autres entreprises
ou qu'elles exercent une influence notable sur celles-ci (…) ».
Les sociétés du groupe sont consolidées selon la méthode de l’intégration globale, sous
réserve de Nouvelle-Calédonie Energie, qui est consolidée selon la méthode de la mise en
équivalence.
Le résultat net du groupe ENERCAL au 30 juin 2018, après retraitement, s’établit à
2,2 Mds F CFP. Prony Energies contribue à hauteur de 1 Md F CFP à la formation de ce résultat.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
51
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Evolution du résultat net consolidé de 2014 à 2018 (part du groupe ENERCAL)
En MF CFP
Au 30 juin
2014
2015
2016
2017
2018
2018
retraité
Var. 2018
retraité/2014
ENERCAL
1 506
1 279
410
943
3 977
1 269
-15,7%
PRONY
ENERGIES
22
401
804
955
1 036
1 036
GIE PRONYFI
263
264
173
0
0
0
ENERCAL
ENERGIES
NOUVELLES
0
-2
0
1
1
HYDRO PAALO
0
0
1
1
FOCOLA
-1
0
1
1
KAMIA
OUATOM
-
-
11
11
NOUVELLE-
CALEDONIE
ENERGIE
0
4
4
Total
1 792
1 943
1 383
1 897
4 992
2 285
27,5%
Source :
procès-verbaux du conseil d’administration
L’endettement consolidé demeure en deçà du ratio autorisé sur l’ensemble de la
période. Le ratio endettement net/EBITDA
58
est de 0,59 au 30 juin 2018 contre 1,3 au
30 juin 2014. Sa diminution s’explique essentiellement par la diminution de l’endettement net,
soit 5,8 Mds F CFP au 30 juin 2018 contre 11,7 Mds F CFP au 30 juin 2014.
Evolution de l’endettement consolidé de 2014 à 2018
En MF CFP
Au 30 juin
2014
2015
2016
2017
2018
Var.
2018/2014
EBITDA (1)
8 989
8 201
7 637
9 557
9 882
9,9%
Endettement net (2)
11 714
9 593
8 566
5 090
5 868
-49,9%
Ratio (2)/(1)
1,30
1,17
1,12
0,53
0,59
Ratio autorisé
59
2,50
2,50
2,50
2,50
2,50
Source :
procès-verbaux du conseil d’administration
58
Bénéfice avant intérêts, impôts, dépréciation et amortissement.
59
Documentation de financement de la centrale de Prony.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
52
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
4.6
Les engagements dans les entreprises liées
Au 30 juin 2018, ENERCAL détient des créances à l’encontre de sa filiale Prony
Energies pour un montant total de 7,4 Mds F CFP, dont un prêt subordonné remboursable à
compter de 2021 de 4 864 MF CFP, un compte courant d’associé de 1 593 MF CFP et une
créance de pénalités de 985 MF CFP. Les créances au titre du prêt subordonné et du compte
courant d’associé représentent 75% de la créance totale sur Prony Energies, soit la part du
capital de la filiale détenue par ENERCAL.
Le représentant légal indique, en réponse à la contradiction, que « les remboursements
du prêt subordonné et des comptes courants par Prony Energies à Enercal sont à ce stade
destinés à prioritairement financer le futur confortement du barrage de Yaté estimé à ce jour à
6.7 milliards de F. CFP ».
Créances et dettes dans les entreprises liées au 30 juin 2018 (en MF CFP)
Entreprises liées
Clients
Prêt
subordonné
(avance 1 à 5
ans)
Compte
courant
d’associé
Autres
créances
Fournisseurs
(dettes)
Prony Energies
93
4 864
1 593
985
1 976
Enercal Energies
Nouvelles
194
Nouvelle-Calédonie
Energie
150
1
Source :
rapport financier
Les emprunts souscrits par la société sont assortis d’un engagement de délégation de
créances que la société détient ou détiendra sur ses principaux clients au titre des contrats de
fourniture d’électricité.
Les contrats souscrits par les filiales sont assortis des mêmes garanties. Au
30 juin 2018, la garantie d’ENERCAL pour les emprunts souscrits par Prony Energies porte sur
un montant de 3,5 Mds F CFP, soit 75% d’un montant total de 4,7 Mds F CFP.
Compte tenu des engagements de garantie déjà donnés, la marge de manœuvre de la
société, pour de nouveaux emprunts, apparait limitée. Le représentant légal précise, en réponse
à la contradiction, que la garantie d’Enercal envers Prony Energies sera nulle fin décembre
2020.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
53
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Les emprunts garantis au 30 juin 2018 (en MF CFP)
Filiale
Prêteur
Montant
Wi Ache Ouatom
AFD/BNP Paribas
1 117
Hydro Paalo
AFD
841
Enercal Energies Nouvelles
AFD
167
Source :
rapport financier
Le projet de centrale pays
Le projet porté par Nouvelle-Calédonie Energie consiste à construire une centrale
électrique, fonctionnant au gaz naturel, d’une capacité de 200-220 MW sur un terrain de la SLN
et à doter la ville de Nouméa d’une infrastructure gaz, destinée à recevoir du gaz naturel liquéfié
(GNL), à le regazéifier et à le livrer à la centrale.
Il est prévu que l’électricité soit vendue par Nouvelle-Calédonie Energie à ENERCAL,
qui la livrera à la SLN (80%) et sur le réseau de distribution publique (20%).
Le projet sera réalisé dans le cadre d’un plan de financement qui s’appuierait, pour
partie, sur un dispositif de défiscalisation de type LODEOM et, d’autre part, sur des prêts
garantis par l’Etat à hauteur de 80%, avec un plafond de 38,1 Mds F CFP.
Le capital de Nouvelle-Calédonie Energie sera ouvert à d’autres investisseurs, la
participation d’ENERCAL ayant vocation à passer de 40% à 1%.
Le coût du projet est évalué à 59,6 Mds F CFP (+/- 20%, hors coût du crédit, intérêts
intercalaires et fondations profondes) et la réception de la centrale est prévue en 2022-2023
60
.
Le protocole d’accord entre Nouvelle-Calédonie Energie, l’agence calédonienne de
l’énergie, la SLN et ENERCAL
61
définit les modalités de financement du projet de centrale
pays par Nouvelle-Calédonie Energie au cours de la période pré-FID
62
.
La participation d’ENERCAL consiste en un apport en compte courant d’associé d’un
montant de 150 MF CFP, soit 8% du besoin de financement. Lors de sa réunion du
27 février 2018,
le
conseil
d’administration
d’ENERCAL
a
autorisé
le
versement
correspondant.
Plus globalement, le protocole prévoit que le projet sera réalisé dans le cadre d’un plan
de financement qui s’appuierait, de façon complémentaire, sur des apports en fonds propres des
associés de Nouvelle-Calédonie Energie. Selon le plan de financement présenté au conseil
d’administration, le financement des actionnaires autres que l’agence calédonienne de
60
Source : projet centrale pays, annexe de l’avenant n° 1 au protocole entre ENERCAL, SLN, ACE et NCE,
8 juin 2018.
61
Protocole d’accord du 5 mars 2018.
62
Final Investment Décision.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
54
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
l’énergie, soit ENERCAL et la SLN, qui détiennent respectivement 40% et 10% du capital
social, serait de 5 Mds F CFP.
Financement de la centrale pays (en MF CFP)
Emprunt (80% garanti par l’Etat)
47
Apport Nouvelle-Calédonie énergie
6
Autres actionnaires
5
Défiscalisation nationale
13
Subvention (contrat de développement)
0,65
Total
71,65
Source :
ENERCAL (conseil d’administration du 27 février 2018)
La chambre souligne, en l’état, l’incidence prévisionnelle sur les comptes
d’ENERCAL de sa participation au capital de Nouvelle-Calédonie énergie et de son
engagement dans le financement de ce projet.
4.7
La prospective
4.7.1
La programmation des investissements
Le programme d’investissements et de travaux provisionnés de l’exercice 2018-2019
a été présenté au conseil d’administration du 10 juillet 2018. Les investissements portent sur la
rénovation et la fiabilisation des moyens de production existants, dont l’aménagement
hydraulique de Yaté et la centrale de Népoui, la rénovation et la fiabilisation du réseau de
transport et des réseaux de distribution, l’amélioration des services à la clientèle, et les
structures générales (développements informatiques…).
La programmation des investissements et des travaux provisionnés pour la période
2018-2019 à 2022-2023, remise en cours d’instruction, porte sur un montant total de dépenses
de 25,7 Mds F CFP, dont 19,1 Mds F CFP d’investissements et 6,6 Mds F CFP de travaux
provisionnés.
Cette programmation prend en compte, sur l’exercice 2021-2022, un montant
budgétaire de 6,7 Mds F CFP pour l’aménagement hydraulique de Yaté et la réalisation des
travaux de confortement du barrage. Elle ne prend pas en compte, en revanche, ainsi qu’il est
mentionné au rapport financier au 30 juin 2018, les effets financiers induits liés à la
reconversion du site de Népoui.
Selon les termes du rapport financier, « en l’absence d’informations au 30 juin 2018
permettant une estimation de ces effets financiers, les amortissements et les dépréciations ont
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
55
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
été poursuivis selon les règles et principes d’origine et aucune provision pour démantèlement
ou reconversion n’a été constituée ».
La chambre relève que le montant prévisionnel des investissements à compter de
l’exercice 2019-2020 représente, en moyenne, plus du double de celui constaté sur la période
examinée.
La programmation des investissements et des travaux provisionnés 2018-2023
En MF CFP
2018-2019
2019-2020
2020-2021
2021-2022
2022-2023
Total
Investissements
Budget (engagements)
3 671
2 922
3 778
7 720
949
19 040
Dépenses
2 025
4 247
3 451
4 638
4 764
19 125
Travaux provisionnés
(charges)
Budget (engagements)
1 445
1 481
1 160
1 566
944
6 596
Dépenses
1 160
1 508
1 306
1 699
944
6 617
Total budget
5 117
4 403
4 937
9 286
1 893
25 636
Total dépenses
3 185
5 754
4 756
6 336
5 708
25 739
Source :
CTC - ENERCAL
A l’occasion de la présentation des investissements prévisionnels au conseil
d’administration de juin 2016, la question de l’accroissement corrélatif des recettes, d’une part,
et celle de l’incidence sur la rémunération supplémentaire à verser par le système tarifaire,
d’autre part, ont été évoquées dans les termes suivants : un administrateur « demande si cette
simulation a pris en compte d’une part, le fait que l’augmentation des dépenses
d’investissements peut produire un accroissement des recettes contrebalançant l’augmentation
des CAPEX et d’autre part, le fait que l’accroissement des investissements va provoquer une
augmentation de la rémunération des CAPEX à servir aux opérateurs par le système tarifaire ».
A la demande du président du conseil d’administration, le principe d’une réflexion concertée
entre la DIMENC et ENERCAL, sur ces questions, avait été retenu.
La chambre souligne l’intérêt d’une évaluation, lors de la programmation des
investissements, de ces éléments complémentaires d’analyse et de prospective.
4.7.2
La trajectoire financière
Un compte de résultat à 3 ans (2014-2015 à 2016-2017) a été présenté au conseil
d’administration de juillet 2014. Cette démarche de prospective, sans constituer une obligation
légale ou statutaire, répond à une préoccupation de bonne gestion.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
56
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Les changements à venir, tels que décrits précédemment, rendent l’exercice
indispensable pour la gouvernance de la société. L’estimation et la proposition au conseil
d’administration d’une nouvelle trajectoire financière s’inscrit, pour ces raisons, dans le cadre
du plan stratégique de la société
63
.
Cette trajectoire financière doit être la traduction des objectifs et des moyens définis
conjointement entre la société et l’actionnaire de référence. Son approbation et son suivi par le
conseil d’administration garantiront sa légitimité et sa portée.
Recommandation n°
4 : la chambre recommande à ENERCAL d’élaborer et de
soumettre au conseil d’administration, à l’occasion de la présentation du budget, une
prospective financière traduisant les objectifs stratégiques de la société.
Le représentant légal indique, en réponse à la contradiction, que « cela a été fait au
C.A. du 28 octobre 2019 pour les exercices 2020, 2021 et 2022 ».
63
Stratégie ENERCAL : « Estimer et proposer au CA de juillet (2018) une nouvelle trajectoire budgétaire et
financière sur les trois prochains exercices ».
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
57
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
CONCLUSION INTERMEDIAIRE
Le résultat net de la société, retraité du changement de comptabilisation des
amortissements, s’établit 1,3 Md F CFP au 30 juin 2018, soit 4,5% du chiffre d’affaires.
ENERCAL est cependant confrontée à des variations conjoncturelles de ses recettes non
récurrentes, hors distribution publique (hydraulicité de Yaté, ventes « à bien plaire » aux
métallurgistes), qui influent sur son résultat. Ce résultat doit, par ailleurs, être apprécié en
tenant compte des réserves quant à la prise en compte de la composante de stabilisation dans
le chiffre d’affaires, soit un montant de 843 MF CFP au titre de l’exercice 2017-2018. Le fonds
de roulement représente, à cette même date, moins d’un mois de charges courantes et la
trésorerie se dégrade sur la période la plus récente. L’endettement, qui augmente sur le dernier
exercice examiné, doit être mis en perspective avec les investissements à venir.
Au-delà de ces données comptables, les perspectives financières de la société doivent
être appréciées au regard des mutations structurelles à venir et de la capacité de la société et
du système tarifaire à en absorber les coûts.
Le schéma de transition énergétique (STENC) adopté par la Nouvelle-Calédonie
prévoit, à l’horizon 2030, l’alimentation à 100% de la distribution publique par des énergies
renouvelables. Le développement des énergies intermittentes et de la filière photovoltaïque
constituent un changement de paradigme pour le système électrique et un enjeu majeur pour
son gestionnaire en termes d’adaptation et de sécurisation du réseau. La commission de
régulation de l’énergie souligne le caractère capitalistique des moyens de production qui
constitueront le système électrique et qui nécessiteront des investissements importants.
La délibération du 5 mars 2012 relative au système électrique de la Nouvelle-
Calédonie pose le principe que les tarifs de vente d’électricité applicables à la sortie des
réseaux de transport et de distribution, qui reflètent les coûts réels de l’électricité, doivent
permettre aux opérateurs d’assurer leurs missions. Elle prévoit cependant que pour éviter ou
atténuer une augmentation des tarifs publics de l’électricité, le gouvernement peut recourir au
versement d’une compensation financière au gestionnaire du réseau public de transport. Alors
que les tarifs de l’électricité n’ont pas été révisés depuis 2008, aucune compensation financière
n’a été accordée à ENERCAL depuis 2014. Cette dernière estime à 843 MF CFP le défaut de
rémunération attendue au titre de l’exercice clos le 30 juin 2018.
Cette situation constitue un facteur de fragilité pour la société qui affecte la lisibilité
de ses perspectives financières.
La chambre souligne, par ailleurs, l’incidence prévisionnelle sur les comptes
d’ENERCAL de sa participation au capital de Nouvelle-Calédonie énergie et de son
engagement dans le financement du projet de centrale pays.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
58
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
5
LES RESSOURCES HUMAINES
5.1
L’évolution des effectifs
L’effectif total de la société, qui a augmenté de 10% de 2012 à 2016, soit 46 agents
64
,
est stable depuis ce dernier exercice. La société emploie 435 salariés au 30 juin 2018, dont
394 salariés à temps plein.
Au 30 juin 2018, les agents d’exécution représentent 56,7% des effectifs et les agents
de maîtrise et les cadres, 43,1% des effectifs. Au 30 juin 2014, ces proportions s’établissaient
respectivement à 58,1% et à 41,7%. A moyen terme, les besoins de compétences et de
qualification du personnel liées aux mutations du marché de l’électricité devraient se traduire
par une évolution sensible de ces équilibres.
Evolution des effectifs de 2014 à 2018
Au 30 juin
2014
2015
2016
2017
2018
Var.
2018/2014
Exécution
242
253
258
249
247
5
En % du total
58,1%
59,2%
59,3%
57,6%
56,7%
Maîtrise
137
137
137
143
142
5
En % du total
32,9%
32%
31,4%
33,1%
32,6%
Cadres
37
37
40
40
46
9
En % du total
8,8%
8,6%
9,1%
9,2%
10,5%
Total
416
427
435
432
435
19 (4,5%)
Dont agents
permanents
65
402
412
420
416
419
17 (4,2%)
Effectif
stable
66
369
387
400
396
394
25 (6,7%)
Source : rapports d’activité
Au 30 juin 2018, 140 agents, soit le tiers des effectifs, sont affectés à la gestion
déléguée des centrales de Doniambo et de Prony. Les effectifs régulés, pris en charge par le
système tarifaire, représentent 293 agents, soit 67% des effectifs totaux. Les personnels affectés
au transport et à la distribution sont pris en charge par le système tarifaire à hauteur,
respectivement, de 100% et de 91%.
64
Dont 8 pour la centrale de Prony et 2 pour Enercal Energies Nouvelles.
65
Agents dont l’emploi correspond au cœur de métier d’ENERCAL, à l’exclusion des agents chargés d’une
mission limitée dans le temps ou en renfort et du personnel de service.
66
Salariés à temps plein, inscrits à l’effectif pendant tout l’exercice considéré, et liés par un contrat de travail à
durée indéterminée.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
59
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Affectation des effectifs par unités (au 30 juin 2018)
Unités
Direction
générale/direction
générale déléguée
Doniambo
Népoui
Prony
Energies
Hydraulique
Distribution
Transport
Services
supports
Total
Effectifs totaux
13
85
41
55
24
151
20
46
435
Dont effectifs
régulés
9,6
0
41
27,5
23
137,8
20
34
293
Effectifs
régulés/effectifs
totaux
(arrondi)
74%
0%
100%
50%
96%
91%
100%
74%
67%
Source : CTC - ENERCAL
Les charges de personnel représentent un montant de 3 683 MF CFP au 30 juin 2018
contre 3 368 MF CFP au 30 juin 2014, soit une augmentation de 9,3%, à rapprocher d’une
évolution des effectifs de 6,7%. Ces dépenses n’incluent pas la rémunération des deux cadres
d’EDF mis à disposition, dont le directeur général.
Evolution des charges de personnel de 2014 à 2018
Au 30 juin
2014
2015
2016
2017
2018
Var.
2018/2014
Salaires et
traitements
2 432
2 516
2 497
2 575
2 655
9,1%
Charges
sociales
936
961
968
985
1 028
9,8%
Total
3 368
3 477
3 465
3 560
3 683
9,3%
Evolution n/n-1
3,8%
3,2%
-0,3%
2,7%
3,4%
Source : rapports financiers
Le ratio des frais de personnel rapportés au chiffre d’affaires est relativement stable
sur la période 2014-2018 (12% en 2018 contre 11,4% en 2014).
Ratio frais de personnel / chiffre d’affaires de 2014 à 2018
2014
2015
2016
2017
2018
11,4%
11,5%
12,1%
12,4%
12%
Source : bilans sociaux
Selon la convention générale d’appui et d’assistance conclue entre ENERCAL et EDF,
cette dernière s’engage à répondre aux demandes de la société dans les domaines de la gestion
et de la planification du système électrique, de la production, du transport et de la distribution
d’électricité, de la commercialisation d’électricité et de l’efficacité énergétique, de la formation
et du détachement de personnel et en matière juridique. Les prestations d’EDF font l’objet d’une
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
60
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
rémunération forfaitaire annuelle de 23 866 340 F CFP (valeur 2013). Des missions d’expertise
ou de conseil en stratégie particulières peuvent faire l’objet d’une rémunération forfaitaire
complémentaire.
5.2
Le pilotage de la masse salariale
Le pilotage de la masse salariale fait l’objet du processus « développer les
compétences et mobiliser les ressources humaines », dont l’une des finalités, au titre de la
performance financière, est de « piloter la masse salariale au regard des budgets et des
trajectoires d’effectif ». Cette démarche s’inscrit dans le cadre général du système de
management intégré de la société.
Le service des ressources humaines est doté d’un contrôle de gestion sociale, chargé
du reporting et de l’analyse des données, et de l’élaboration d’un bilan annuel de performance.
Le bilan prévisionnel du plan de performance 2017-2018 fait état d’un gain de
36 MF CFP sur les heures supplémentaires (-21%), à pondérer par l’effet du cyclone Cook, et
de 13 MF CFP (-16%) sur les frais de déplacement, par rapport à l’exercice précédent.
La reconversion du site de Népoui, à l’horizon 2024, et l’évolution du contrat de
gestion de la centrale de Doniambo avec la SLN comportent des enjeux forts en termes de
gestion des ressources humaines.
Lors de sa réunion du 27 février 2018, le conseil d’administration d’ENERCAL a
décidé l’arrêt des quatre moteurs de la centrale de Népoui lors de la mise en service de la future
centrale pays au gaz et le lancement d’études pour la reconversion du site. Cette reconversion
concerne 37 agents en contrat à durée indéterminée à reconvertir à l’horizon 2024.
L’évolution du contrat de gestion de la centrale de Doniambo, à l’initiative de la SLN,
acte une nouvelle organisation, avec un effectif cible au 1
er
janvier 2020 de 73 personnes, soit
une réduction de 13 agents
67
.
Ces mesures sont annonciatrices de mutations structurelles liées à la transition
énergétique, en matière de mobilité et de reconversion des agents, de besoins de qualification,
et de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.
ENERCAL a remis à la chambre, à sa demande, en cours d’instruction, une trajectoire
prévisionnelle de la masse salariale et des effectifs à l’échéance de juin 2020, soit à n+1. La
masse salariale évoluerait de 2,9% en 2019 et en 2020, et les effectifs (équivalents temps plein)
de -2,1% et de 0,4% sur chacun des exercices considérés.
Lors du conseil d’administration de juin 2016, le président du conseil d’administration
avait demandé « qu’un plan pluriannuel de besoins et de trajectoire d’effectifs soit présenté au
67
A ce jour, trois agents restent à reclasser.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
61
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Conseil, démarche qui aurait dû être faite il y a 3 ans quand [les] besoins de recrutement ont été
identifiés ».
La société a indiqué qu’elle disposait des éléments de prévisions nécessaires dans le
cadre du système tarifaire et du revenu au titre de l’exploitation (ROpex).
Au regard de ce qui précède, la chambre invite la société à traduire ces éléments dans
une perspective de moyen terme et à soumettre celle-ci au conseil d’administration.
Trajectoire prévisionnelle de la masse salariale et des effectifs
Au 30 juin
2017
2018
2019
2020
Var. 2020/2017
Objectif masse salariale (en MF CFP)
3 590
3 684
3 793
3 903
8,7%
Evolution n/n-1
2,6%
2,9%
2,9%
Réalisé masse salariale (en MF CFP)
3 562
3 683
Evolution n/n-1
3,3%
Objectif équivalents temps plein
432
441,2
431,9
433,9
0,4%
Evolution n/n-1
2,1%
-2,1%
0,4%
Réalisé équivalents temps plein
427,2
428,9
Evolution n/n-1
0,3%
Source : CRC - ENERCAL
Recommandation n°
5 : la chambre recommande à ENERCAL de définir une trajectoire
d’effectifs à moyen terme, tenant compte des mutations structurelles en termes d’emplois
et de compétences liées au développement des énergies renouvelables.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
62
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
6
LES CONCESSIONS DE DISTRIBUTION
6.1
Un cadre réglementé
Selon l’article 51 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999, les communes ou
leurs groupements autorisent les concessions de distribution électrique. Ils peuvent, avec
l'accord de l'assemblée de province, déléguer cette compétence à la province.
ENERCAL assure la distribution de l’électricité dans 27 communes sur les 33 que
compte la Nouvelle-Calédonie. Les concessions renouvelées sur la période contrôlée
comportent une durée de vingt années. Les autres concessions, hors celles de DUMBEA et de
la zone aéroportuaire de TONTOUTA, ont une durée de quarante ans.
La concession de Canala est sortie du portefeuille d’ENERCAL au 1
er
octobre 2018.
Plusieurs concessions arriveront à leur terme dans les prochaines années, dont l’Ile des pins en
2020, Ouégoa, Poum et Thio en 2021.
Etat des concessions de distribution ENERCAL
Communes
Durée
(en années)
Échéance
Date d’effet des nouvelles
concessions (20 ans)
BELEP
40
02/04/2026
CANALA
40
01/10/2018
EEC concessionnaire
DUMBEA
20
30/11/2025
ILE DES PINS
40
09/06/2020
KONE
40
29/09/2015
01/10/2015
KOUAOUA
40
31/07/2037
MARE
40
17/03/2023
OUEGOA
40
10/05/2021
OUVEA
40
03/05/2022
POUEMBOUT
40
29/09/2015
29/08/2015
POUM
40
28/09/2021
POYA
40
23/05/2016
24/05/2016
SIVM Est
40
29/08/2016
31/08/2016
SIVM Sud
40
31/12/2014
01/01/2015
THIO
40
26/01/2021
TONTOUTA (zone aéroportuaire)
30
14/05/2033
VOH
40
21/03/2016
22/03/2016
YATE
40
26/06/2017
28/12/2017
Source : CTC - ENERCAL
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
63
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Le juge administratif considère
que la remise en concurrence périodique des contrats
de délégation de service public constitue une garantie de la liberté d’accès, d’égalité de
traitement des candidats, de transparence des procédures, d’efficacité de la commande publique
et de bon emploi des deniers publics
68
.
Les concessions de distribution d’énergie électrique sont régies par un cahier des
charges type fixé par arrêté du président du gouvernement
69
. L’article 3 de ce cahier des charges
fixe une durée de la concession comprise entre 15 et 25 ans
70
.
La chambre souligne qu’en application des principes ci-dessus, la durée des
concessions de distribution ne saurait excéder la durée normale d’amortissement des
installations
71
.
Les concessions de distribution entre les communes et les concessionnaires présentent
la singularité de s’inscrire dans un cadre réglementé. Comme indiqué ci-dessus, les tarifs
publics de l’énergie électrique applicables à la distribution sont fixés par la Nouvelle-Calédonie.
Ils tiennent compte des coûts d’investissement et des coûts d’exploitation supportés par les
gestionnaires de réseaux publics de distribution
72
.
Ce contexte doit être pris en compte pour apprécier l’équilibre financier desdites
concessions et le risque assumé par le concessionnaire. Comme indiqué ci-dessus, la
68
Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie, 15 septembre 2016, n° 1600064 : « (…) Aux termes de l’article
22 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie : «
La Nouvelle-Calédonie est compétente
dans les matières suivantes : (…) 17° Règles relatives à la commande publique dans le respect des principes de
liberté d’accès, d’égalité de traitement des candidats, de transparence des procédures, d’efficacité de la
commande publique et de bon emploi des deniers publics (…)
». Aux termes de l’article 51 de la même loi
organique : «
Les communes ou leurs groupements autorisent les concessions de distribution électrique. Ils
peuvent, avec l’accord de l’assemblée de province, déléguer cette compétence à la province
». La remise en
concurrence périodique des contrats de délégation de service public constitue une garantie de la liberté d’accès des
opérateurs économiques à ces contrats et de la transparence des procédures de passation (…) ».
69
Arrêté n° 2019-355/GNC du 19 février 2019 relatif au cahier des charges type de concession de distribution
publique de l’énergie électrique.
70
L’autorité de la concurrence de la Nouvelle-Calédonie, dans son avis précité du 18 juillet 2019 relatif au
renouvellement du contrat de concession de la distribution d’énergie électrique de la commune de Nouméa, « ne
peut qu’approuver le choix opéré par la commune de Nouméa de s’en tenir à la durée de concession la plus courte
prévue par le cahier des charges type du 19 février 2019 mais s’interroge néanmoins sur l’opportunité et la légalité
d’une concession d’une durée encore plus courte, qui pourrait être de dix ans, pour renforcer la concurrence « pour
le marché ».
71
Le conseil d’Etat distingue la notion d’amortissement économique, de celle d’amortissement comptable. Par
une décision du 11 août 2009 (Société Maison Comba), ce dernier a posé le principe selon lequel « la durée normale
d’amortissement des installations susceptible d’être retenue par une collectivité délégante peut être la durée
normalement attendue pour que le délégataire puisse couvrir ses charges d’exploitation et d’investissement,
compte tenu des contraintes d’exploitation liées à la nature du service et des exigences du délégant, ainsi que de
la prévision des tarifs payés par les usagers, que cette durée coïncide ou non avec la durée de l’amortissement
comptable des investissements ; qu’en jugeant que la durée normale des investissements ne saurait se réduire par
principe à la durée comptable mais résultait d’un équilibre global entre les différents éléments précités, la cour
administrative d’appel (...) n’a donc pas commis d’erreur de droit ».
72
L’arrêté n° 2019-747/GNC du 26 mars 2019 plafonne les redevances communales prises en compte dans le
calcul de l’indice d’actualisation des tarifs de vente de la distribution d’énergie électrique à 8,6% de la marge
commerciale du concessionnaire.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
64
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
comptabilité analytique fait ressortir un résultat excédentaire de la fonction distribution, qui
absorbe certaines concessions déficitaires.
En application de l’arrêté n° 86 du 12 janvier 1989
73
« le contrôle économique de la
production, du transport et de la distribution d’énergie électrique relève du service des mines et
de l’énergie au sein duquel il est organisé un service du contrôle économique de l’énergie.
Le directeur des mines et de l’énergie en assure les fonctions d’ingénieur chef de contrôle.
Le service du contrôle économique de l’énergie électrique est notamment chargé d’assurer le
contrôle économique des concessions et régies, dans les conditions prévues dans les
conventions et les cahiers des charges des concessionnaires d’énergie électrique ».
La direction de l’industrie, des mines et de l’énergie (DIMENC) agrée les contrats de
vente d’électricité dans le cadre des concessions de production hydroélectrique. Elle régule les
concessions de transport et de distribution, via la rémunération fixée par le modèle tarifaire. Le
contrôle économique des concessions, au sens des dispositions précitées, n’est cependant pas
mis en œuvre, privant la Nouvelle-Calédonie, dans sa fonction de régulateur, d’éléments
d’appréciation sur le fonctionnement du système électrique.
Selon l’article 23 de la délibération n° 195 du 5 mars 2012, « le schéma directeur,
prévu dans le cadre du contrat de concession de distribution électrique, est élaboré par le
gestionnaire du réseau public de distribution et présenté au concédant. Tout schéma directeur
établi après l’adoption de la présente délibération est élaboré en tenant compte de la
programmation pluriannuelle des investissements de production électrique. Le schéma
directeur comprend notamment :
-
les objectifs généraux en matière de développement du réseau par commune, dans les
domaines de la qualité, de la sécurité et de la préservation de l’environnement ;
-
une présentation du système électrique existant comprenant le recensement des
contraintes existantes ou susceptibles d’apparaître à un horizon de 10 à 15 ans (évolution
de la puissance, contraintes de transit, qualité de tension, de vétusté, de sécurisation…)
par commune ;
-
l’identification des zones de fragilité électrique par commune, pour la bonne desserte
électrique desquelles le développement ou le renforcement du réseau public de
distribution d’énergie électrique sera nécessaire, en vue de satisfaire les besoins en
puissance et en énergie des consommateurs ou des producteurs ;
-
la liste des projets de développement du réseau en cours de concertation ou d’instruction
réglementaire.
En cohérence avec le schéma directeur, le gestionnaire du réseau public de distribution
élabore périodiquement un programme d’investissement. Le schéma directeur et le programme
d’investissement sont transmis au service de la Nouvelle-Calédonie compétent en matière
d’énergie ».
Selon les éléments apportés par la société en cours d’instruction, le schéma directeur
prévu par les dispositions précitées serait en cours d’expérimentation dans certaines
73
Arrêté relatif à l’organisation du contrôle des concessions de production, de transport et de distribution d’énergie
électrique en Nouvelle-Calédonie.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
65
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
concessions. La chambre invite ENERCAL, en relation avec la Nouvelle-Calédonie et les
concédants, à poursuivre et à généraliser cette démarche prospective.
Le représentant légal indique, en réponse à la contradiction, que les schémas directeurs
de la commune de Dumbéa et du SIVM Sud sont disponibles, que ceux des communes de la
zone VKP sont en cours et que les autres suivront en 2020.
6.2
Poursuivre la mise en place des indicateurs de performance
Le cahier des charges type de concession de distribution publique de l’énergie
électrique prévoit la fourniture par le concessionnaire, dans le cadre du rapport annuel
d’activité,
a minima
, d’indicateurs relatifs à la continuité d’alimentation (temps de coupure
moyen…), à la qualité de service à l’usager (délai moyen de transmission d’un devis pour un
branchement…), à l’efficacité du recouvrement (taux de recouvrement des factures après deux
ans…) et à la performance réseaux (taux de perte réseaux sur douze mois glissants). Il en définit
les modalités de calcul
74
.
La société a précisé, en cours d’instruction, qu’une partie des indicateurs du cahier des
charges type était en cours de construction et de test (délai pour rendez-vous et transmission de
devis, pour travaux de branchement, taux de factures réglées de manière dématérialisée…).
La qualité de service, d’une part, la contestation de la facture et une demande de
contrôle de la facturation, d’autre part, constituent les deux premiers motifs des réclamations
(en 2018, 116 et 108 réclamations sur un total de 354). Le taux de paiement par prélèvement est
de 55% à fin 2019 contre 39,09% en 2016.
74
Article 38.2 Indicateurs de performance.
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
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Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie - BP 2392 - 98846 Nouméa
Indicateurs du cahier des charges type suivis par ENERCAL
2015
2016
2017
2018
Critère B sur coupures
(durée moyenne en minutes de la totalité des coupures par client sur une année)
637
460
534
430
Critère B sur incidents
172
111
38
65
Critère B sur coupures et incidents
75
809
571
571
495
Critère C sur incidents
(nombre moyen de coupures par client sur une année)
2,7
0,9
1,3
0,6
Réclamations
Nombre de réclamations
336
350
354
Durée moyenne des réclamations (en jours)
1,09
2,8
2,08
Taux de traitement sous 30 jours
99%
99%
99%
Taux de règlement à échéance
66,9%
69,5%
73,5%
Source CTC - réponse ENERCAL
La chambre invite la société à poursuivre la mise en place des indicateurs du cahier
des charges type et à rapprocher ces derniers de références ultramarines, permettant de situer
les performances de la société.
Le représentant légal indique, en réponse à la contradiction, que les indicateurs de
qualité de fourniture et de service existent pour toutes les communes.
75
A titre indicatif, en métropole, la durée moyenne annuelle de coupure non planifiée par client basse tension est
de 50,78 minutes et la durée moyenne annuelle de coupure planifiée de 13,9 minutes (source : Open Data ENEDIS,
données 2018).
RAPPORT D’OBSERVATIONS DEFINITIVES ENERCAL
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REPONSE
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publications de la chambre territoriale des comptes e Nouvelle-Calédonie
Chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie
13, boulevard Vauban
BP 2392
98846 Nouméa CEDEX
www.ccomptes.fr/fr/ctc-nouvelle-caledonie
Les publications de la chambre territoriale des comptes
de la Nouvelle-Calédonie
sont disponibles sur le site :
www.ccomptes.fr/fr/ctc-nouvelle-caledonie