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- PLENIÈRE -
Jugement n° 2021-0001
Audience publique du 20 juillet 2021
Prononcé du 23 août 2021
COMMUNAUTÉ DE COMMUNES SUD TERRITOIRE
(Territoire de Belfort)
CENTRE DES FINANCES PUBLIQUES DE DELLE
Exercices 2014 à 2017
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA CHAMBRE RÉGIONALE DES COMPTES BOURGOGNE-FRANCHE-COMTÉ,
VU
le code des juridictions financières ;
VU
le code général des collectivités territoriales ;
VU
le code de commerce ;
VU
l'article 60 modifié de la loi n° 63-156 du 23 février 1963 de finances pour 1963 ;
VU
le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;
VU
le
décret n° 2012-1386 du 10 décembre 2012 portant application du deuxième alinéa du VI de l'article 60
modifié de la loi de finances pour 1963 ;
VU
les comptes produits par Mme X... en qualité de comptable de la communauté de communes Sud Territoire
pour les exercices 2014 à 2017 ;
VU
le réquisitoire n° 2019-19 du 14 mai 2019, ensemble le réquisitoire supplétif n° 2020-10 du 18 mai 2020, par
lequel le ministère public a saisi la chambre en vue de la mise en jeu de la responsabilité personnelle et pécuniaire
de Mme X... au titre des exercices 2014 à 2017 ;
2/10
VU
les courriers en date des 14 juin 2019 et 20 mai 2020 par lesquels lesdits réquisitoires et le nom du magistrat
chargé de l’instruction ont été notifiés à Mme X..., comptable, ainsi qu’à M. Y..., président de la communauté de
communes Sud Territoire, ordonnateur, dont ils ont accusé réception les 17 juin 2019 puis, respectivement, les
25 et 22 mai 2020 ;
VU
la décision du président de la chambre du 15 septembre 2020 désignant M. Fabrice LANDAIS pour instruire
l’affaire en remplacement de Mme Valérie RHEIN-TALARD notifiée par courriers du 5 octobre 2020 à Mme X...,
comptable, ainsi qu’à M. Y..., président de la communauté de communes Sud Territoire, ordonnateur, qui en ont
accusé réception le 6 octobre 2020 ;
VU
la réponse aux réquisitoires de M. Y..., président de la communauté de communes Sud Territoire,
ordonnateur, par courrier du 12 septembre 2019 enregistré au greffe le 16 septembre 2019 ;
VU
les réponses aux réquisitoires de Mme X..., comptable, par courrier du 27 août 2019 enregistré au greffe le
5 septembre 2019, complété par courriels du 2 juin 2020 et du 19 juillet 2021 ;
VU
la demande d’information adressée à Mme Z..., comptable du service gestion comptable de Belfort 2 par
courriel du 16 mars 2021 dont elle a accusé réception le 8 avril 2021 ;
VU
les pièces adressées par Mme Z... par courriels des 9 et 16 avril 2021 ;
Vu
les pièces adressées par Mme X... le 19 juillet 2021 ;
VU
les courriers du 29 juin 2021 informant Mme X..., comptable, et M. Y..., ordonnateur, de la tenue, le 20 juillet
2021, de l’audience publique dont ils ont accusé réception le 30 juin 2021 ;
VU
le rapport n° 2021-044 du 14 juin 2021 de M. Fabrice LANDAIS, président de section assesseur ;
VU
les conclusions n° 2021-044 du 29 juin 2021 de la procureure financière près la chambre régionale des
comptes Bourgogne-Franche-Comté ;
ENSEMBLE
les pièces à l’appui ;
ENTENDU
lors de l’audience publique du 20 juillet 2021, M. Fabrice LANDAIS, président de section assesseur en
son rapport, Mme Valérie BIGOT, procureure financière, en ses conclusions, Mme X..., comptable, et M. Y...,
ordonnateur, n’étant ni présents, ni représentés ;
APRÈS AVOIR ENTENDU
en délibéré Mme Mélody DESSEIX, première conseillère, réviseure, en ses
observations et avoir délibéré hors la présence du rapporteur et de la procureure financière ;
Sur le cadre juridique
ATTENDU
qu’aux termes de l’article 60 de la loi du 23 février 1963 susvisée «
I. - Outre la responsabilité attachée
à leur qualité d'agent public, les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables du
recouvrement des recettes (…) de la conservation des pièces justificatives des opérations et documents de
comptabilité, ainsi que de la tenue de la comptabilité du poste comptable qu'ils dirigent.
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Les comptables publics sont personnellement et pécuniairement responsables des contrôles qu'ils sont tenus
d'assurer en matière de recettes, de dépenses et de patrimoine dans les conditions prévues par le règlement
général sur la comptabilité publique.
La responsabilité personnelle et pécuniaire prévue ci-dessus se trouve engagée dès lors (…) qu'une recette n'a
pas été recouvrée (…)
»
ATTENDU
qu’en vertu de l’article 18 du décret du 7 novembre 2012 susvisé, «
Dans le poste comptable qu'il dirige,
le comptable public est seul chargé : (…) 4° De la prise en charge des ordres de recouvrer et de payer qui lui sont
remis par les ordonnateurs ; 5° Du recouvrement des ordres de recouvrer et des créances constatées par un
contrat, un titre de propriété ou tout autre titre exécutoire ; 6° De l'encaissement des droits au comptant et des
recettes liées à l'exécution des ordres de recouvrer (…) 11° De la conservation des pièces justificatives des
opérations transmises par les ordonnateurs et des documents de comptabilité
» ;
ATTENDU
que selon l’article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, «
3° L'action des comptables
publics chargés de recouvrer les créances des régions, des départements, des communes et des établissements
publics locaux se prescrit par quatre ans à compter de la prise en charge du titre de recettes. Le délai de quatre
ans mentionné à l'alinéa précédent est interrompu par tous actes comportant reconnaissance de la part des
débiteurs et par tous actes interruptifs de la prescription
» ;
ATTENDU
que lorsqu'un comptable public n'a pas recouvré une recette qu'il a prise en charge, le juge des comptes
apprécie, d'abord, s'il y a lieu d'engager sa responsabilité ; qu'à ce titre il lui appartient de se prononcer sur le point
de savoir si le comptable s'est livré aux différents contrôles qu'il lui incombe d'assurer et s'il a exercé dans des
délais appropriés toutes les diligences requises pour le recouvrement de la créance, que lorsque le juge des
comptes estime, au terme de cette appréciation, que le comptable a manqué aux obligations qui lui incombent au
titre du recouvrement des recettes, faute d'avoir exercé les diligences et les contrôles requis, le manquement du
comptable doit en principe être regardé comme ayant causé un préjudice financier à l'organisme public concerné ;
que, toutefois, lorsqu'il résulte des pièces du dossier, et en particulier des éléments produits par le comptable, qu'à
la date du manquement, la recette était irrécouvrable en raison notamment de l'insolvabilité de la personne qui en
était redevable, le préjudice financier ne peut être regardé comme imputable audit manquement ; qu'une telle
circonstance peut être établie par tous documents, y compris postérieurs au manquement ; que dans le cas où le
juge des comptes estime qu'au vu de ces éléments, le manquement du comptable n'a pas causé de préjudice
financier à l'organisme public concerné, il peut alors décider, sur le fondement non plus du troisième mais du
deuxième alinéa du VI de l'article 60, d'obliger le comptable à s'acquitter d'une somme qu'il arrête en tenant compte
des circonstances de l'espèce ;
Sur la première présomption de charge concernant Mme X... au titre de l’exercice 2014
ATTENDU
que par les réquisitoires susvisés, le ministère public a estimé que Mme X... était susceptible de voir sa
responsabilité personnelle et pécuniaire engagée au titre de sa gestion au cours de l’exercice 2014, à concurrence
de 2 217,16
€
, pour avoir laissé se prescrire l’action en recouvrement de deux titres de recettes, n° T-17 R-5 A 65
et T-88 R-29 A 64, émis à l’encontre de M. Z..., imputés au compte 4116,« redevables - contentieux », du budget
annexe « eaux », pris en charge respectivement les 18 mars et 21 juillet 2010 et concernant le service de l’eau sur
la commune de Thiancourt pour des montants respectifs initiaux de 1 122,20
€
et 1 127,16
€
auxquels s’ajoutent
des frais de poursuite de 33,80
€
et 34,00
€
et dont les restes à recouvrer au 16 novembre 2018 s’élèvent à
1 056,00
€
et 1 161,16
€
;
4/10
En ce qui concerne le manquement
Sur les observations des parties
ATTENDU
que, s’agissant de l’action du comptable en matière de recette, Mme X... fait valoir que nonobstant les
diligences qu’elle a mises en
œ
uvre, le recouvrement des créances est totalement compromis étant donné la
situation d’insolvabilité du débiteur ; que les causes de l’irrécouvrabilité de la créance lui sont extérieures et ont
paralysé ses actions ;
ATTENDU
que, dans sa réponse du 16 septembre 2019, l’ordonnateur se prévaut également de l’insolvabilité du
débiteur
;
ATTENDU
que dans ses conclusions, la procureure financière considère que l’insolvabilité du débiteur ne
relève pas de circonstances constitutives de la force majeure, et que la comptable publique n’apporte pas la
preuve de diligences suffisantes menées en vue du recouvrement de la créance ;
Sur la responsabilité du comptable
ATTENDU
que les deux titres en cause ont respectivement l’objet de lettres de relance des 25 mai et
10 septembre 2010 qui ne sont pas susceptibles d’avoir interrompu le délai de prescription de l’action en
recouvrement ; que la comptable n’apporte pas, par la preuve de leur notification au débiteur, que les
commandements des 25 juin et 11 octobre 2010 auraient eu cet effet interruptif ;
ATTENDU
que dans le cadre de la mise en
œ
uvre de poursuites globales, la comptable a lancé plusieurs
oppositions à tiers détenteur (OTD), les 28 novembre 2012, 3 novembre 2016, 25 novembre 2016,
3 février 2017 et 13 mars 2018 ; que si elle justifie de leur réception par les tiers-débiteurs, elle n’établit leur
notification concomitante au débiteur, seule de nature à leur conférer un effet interruptif de la prescription de
l’action en recouvrement, notamment pour l’OTD du 28 novembre 2012 ;
ATTENDU
que dans le cadre de la mise en
œ
uvre de poursuites globales, la comptable a également adressé à
M. Z... un courrier en date du 21 octobre 2014 lui indiquant qu’il restait redevable d’une somme de 17 869,65
€
;
que par un courrier du 28 octobre 2014, reçu à la trésorerie le 30 octobre 2014, M. Z... a accusé réception de ce
courrier ; qu’en tout état de cause, à la date du 28 octobre 2014 la prescription de l’action en recouvrement des
deux titres litigieux était acquise à M. Z... depuis, respectivement, les 18 mars 2014 et 21 juillet 2014 ;
ATTENDU
toutefois que Mme X... a produit le 19 juillet 2021 un bordereau de situation au 15 juillet 2021, dont il
ressort que l’ensemble des titres en attente concernant M. Z... ont été recouvrés le 29 juin 2021 à la suite d’un
versement de l’étude notariale en charge de la succession de
M. Z... ;
ATTENDU
que la procureure financière a considéré à l’audience que la responsabilité personnelle et pécuniaire
de Mme X... au titre de la première charge ne pouvait plus être engagée au motif que les créances avaient été
recouvrées ;
ATTENDU
qu’il ressort des pièces produites que les deux titres objet de la première charge ont été recouvrés et
qu’il n’y a donc pas lieu d’engager la responsabilité de Mme X... ;
5/10
Sur la deuxième présomption de charge concernant Mme X... au titre de l’exercice 2015
ATTENDU
que par les réquisitoires susvisés, le ministère public a estimé que Mme X... était susceptible de voir sa
responsabilité personnelle et pécuniaire engagée au titre de sa gestion au cours de l’exercice 2015, à concurrence
de 6 155,74
€
, pour avoir laissé se prescrire l’action en recouvrement de deux titres de recettes, n° T-3 R3 A-66 et
T-412 R-29 A-64, imputés au compte 4116 du budget annexe « eaux », pris en charge respectivement le
14 janvier 2011 et le 11 août 2011 et émis à l’encontre de M. Z... concernant le service de l’eau sur la commune
de Thiancourt pour des montants respectifs initialement de 3 872,41
€
et 2 104,33
€
auxquels s’ajoutent des frais
de poursuite de 116,00
€
et 63,00
€
et dont les restes à recouvrer au 16 novembre 2018 s’élèvent à 3 988,41
€
et
2 167,33
€
;
En ce qui concerne le manquement
Sur les observations des parties
ATTENDU
que l’ordonnateur et la comptable font valoir les mêmes observations que sous la charge précédente ;
ATTENDU
que dans ses conclusions, la procureure financière considère la prescription de l’action en
recouvrement n’ayant pas été acquise au titre des exercices en jugement, il n’y a pas lieu d’engager la
responsabilité personnelle et pécuniaire de la comptable publique pour cette charge ;
Sur la responsabilité du comptable
ATTENDU
que, dans le cadre de poursuites globales, Mme X... a adressé à M. Z... un courrier en date du
21 octobre 2014 lui indiquant qu’il restait redevable d’une somme de 17 869,65
€
; que par un courrier du
28 octobre 2014, reçu à la trésorerie le 30 octobre 2014, M. Z... a accusé réception de ce courrier ;
ATTENDU
que le bordereau de situation de M. Z... à la date du 21 octobre 2014, édité le 8 avril 2021 totalise une
dette de 17 819,43
€
, soit un montant légèrement supérieur à celui mentionné dans le courrier du 21 octobre 2044,
mais fait apparaître les deux titres objet de la charge qui était implicitement mais nécessairement pris en compte
par le courrier du 21 octobre 2014 ; qu’un lien suffisant peut être établi entre les titres objet de la charge et le
courrier du 21 octobre 2014 valablement notifié au débiteur ; que dans ces conditions l’expiration du délai de
l’action en recouvrement a été reporté au 28 octobre 2018, soit à un exercice postérieur à ceux en jugement ;
ATTENDU
au surplus que Mme X... a produit le 19 juillet 2021 un bordereau de situation au 15 juillet 2021, dont il
ressort que l’ensemble des titres en attente concernant M. Z... ont été recouvrés le 29 juin 2021 à la suite d’un
versement de l’étude notariale en charge de la succession de M. Z... ;
ATTENDU
que la procureure financière a considéré à l’audience que la responsabilité personnelle et pécuniaire
de Mme X... au titre de la deuxième charge ne pouvait plus être engagée au motif que les créances avaient été
recouvrées ;
ATTENDU
qu’il ressort des pièces produites que les deux titres objet de la deuxième charge ont été recouvrés et
qu’il n’y a pas lieu d’engager la responsabilité de Mme X... ;
6/10
Sur la troisième présomption de charge concernant Mme X... au titre de l’exercice 2016
ATTENDU
que par les réquisitoires susvisés, le ministère public a estimé que Mme X... était susceptible de voir sa
responsabilité personnelle et pécuniaire engagée au titre de sa gestion au cours de l’exercice 2016, à concurrence
de 4 659,69
€
, pour avoir laissé se prescrire l’action en recouvrement, d’une part, de deux titres de recettes n
os
T-
2 R-992 A-74 et T-151 R-30 A-69, imputés au compte 4116 du budget annexe « eaux », pris en charge
respectivement le 1
er
février et le 13 juillet 2012, émis à l’encontre de M. Z... concernant le service de l’eau sur la
commune de Thiancourt pour des montants respectifs initialement de 941,28
€
et 1 460,24
€
et dont les restes à
recouvrer au 16 novembre 2018 s’élèvent aux mêmes montants et, d’autre part, le titre de recettes n
o
T-19 imputé
au compte 4116 du budget annexe « assainissement », pris en charge le 23 février 2012, émis à l’encontre de la
SARL MAGIC TOUCH concernant le raccordement au réseau d’eaux usées pour un montant initialement de
2 258,17
€
et dont le reste à recouvrer au 16 novembre 2018 s’élève au même montant ;
En ce qui concerne le manquement
Sur les observations des parties
ATTENDU
que s’agissant des titres émis à l’encontre de M. Z... la comptable et l’ordonnateur font valoir les mêmes
observations que sous la première charge ;
ATTENDU
que, s’agissant de la SARL MAGIC TOUCH, la comptable fait valoir, dans le dernier état de ses écritures
en date du 19 juillet 2021, que la société ayant été dissoute par jugement du 30 janvier 2013, aucun acte de
poursuite ne pouvait plus être effectué après cette date, et que la créance devait être admise en non-valeur ; qu’au
surplus dans la mesure où une SCI ALTAN 66 appartenant au gérant de la SARL MAGIC TOUCH et domiciliée à
la même adresse, elle a sollicité auprès de la CCST l’annulation du titre initial et son éventuelle réémission au nom
de la SCI au motif que la SARL MAGIC TOUCH n’aurait pas été le véritable débiteur ; que, pour sa part,
l’ordonnateur fait valoir que la SARL MAGIC TOUCH a fait l’objet d’une procédure collective, ce qui a rendu toute
poursuite impossible ;
ATTENDU
qu’en ce qui concerne les titres émis à l’encontre de M. Z... dans ses conclusions, la procureure
financière considère que la prescription de l’action en recouvrement n’ayant pas été acquise au titre des
exercices en jugement, il n’y a pas lieu d’engager la responsabilité personnelle et pécuniaire de la comptable
publique pour cette charge ;
ATTENDU
qu’en ce qui concerne le titre émis à l’encontre de la SARL MAGIC TOUCH dans ses conclusions,
la procureure financière considère qu’en l’absence d’acte suspensif ou interruptif de la prescription, celle-ci
est acquise depuis le 24 février 2016, et que la comptable publique n’a pas réalisé les diligences suffisantes
pour procéder au recouvrement de la créance ;
Sur la responsabilité du comptable
S’agissant des deux titres émis à l’encontre de M. Z
....
ATTENDU
que, dans le cadre de poursuites globales, Mme X... a adressé à M. Z... un courrier en date du
21 octobre 2014 lui indiquant qu’il restait redevable d’une somme de 17 869,65
€
; que par un courrier du
28 octobre 2014, reçu à la trésorerie le 30 octobre 2014, M. Z... a accusé réception de ce courrier ;
7/10
ATTENDU
que le bordereau de situation de M. Z... à la date du 21 octobre 2014, édité le 8 avril 2021 totalise une
dette de 17 819,43
€
, soit un montant légèrement supérieur à celui mentionné dans le courrier du 21 octobre 2044,
mais fait apparaître les deux titres objet de la charge qui était implicitement mais nécessairement pris en compte
par le courrier du 21 octobre 2014 ; qu’un lien suffisant peut être établi entre les titres objet de la charge et le
courrier du 21 octobre 2014 valablement notifié au débiteur ; que dans ces conditions l’expiration du délai de
l’action en recouvrement a été reporté au 28 octobre 2018, soit à un exercice postérieur à ceux en jugement ;
ATTENDU
au surplus que Mme X... a produit le 19 juillet 2021 un bordereau de situation au 15 juillet 2021, dont il
ressort que l’ensemble des titres en attente concernant M. Z... ont été recouvrés le 29 juin 2021 à la suite d’un
versement de l’étude notariale en charge de la succession de M. Z... ;
ATTENDU
que la procureure financière a considéré à l’audience que la responsabilité personnelle et pécuniaire
de Mme X... au titre de la troisième charge ne pouvait plus être engagée au motif que les créances avaient été
recouvrées ;
ATTENDU
qu’il ressort des pièces produites que les deux titres émis à l’encontre de M. Z... objet de la troisième
charge ont été recouvrés et qu’il n’y a pas lieu d’engager la responsabilité de Mme X... ;
S’agissant du titre émis à l’encontre de la SARL MAGIC TOUCH
ATTENDU
que la prise en charge, le 23 février 2012, de ce titre d’un montant de 2 258,17
€
ayant pour objet
« raccordement au réseau d’eaux usées » a été suivie de l’envoi d’une simple lettre de rappel non susceptible
d’interrompre la prescription de recouvrement, elle-même suivie d’une mise en demeure de payer du 10 mai 2012
dont le caractère interruptif n’est pas établi en l’absence de preuve de sa notification à la société débitrice ;
ATTENDU
que les annonces publiées dans les bulletins officiels sont réputées connues des comptables publics
qui doivent s’organiser pour avoir connaissance des informations juridiques nécessaires à l’exercice de leurs
missions ; que l’annonce publiée au BODACC du 30 janvier 2013 mentionne la dissolution anticipée de la SARL
MAGIC TOUCH et la nomination d’un liquidateur amiable ; que le liquidateur amiable en application des
dispositions de l’article L. 237-24 du code de commerce est habilité à payer les créanciers et répartir le solde
disponible ; qu’en conséquence la dissolution anticipée de la société n’empêchait pas la comptable publique de
poursuivre le recouvrement du titre pris en charge, qu’enfin l’état de poursuites extérieures par voie de saisie produit
par la comptable a été signé le 11 mars 2016, soit postérieurement à la date à laquelle la prescription de l’action
en recouvrement doit être regardée comme acquise à la société débitrice, soit le 23 février 2016 ; que cette
diligence tardive n’a en outre pas été productive ; qu’aucune diligence n’a été mise en
œ
uvre par la comptable
entre le 10 mai 2012 et le 11 mars 2016 ;
ATTENDU
que l’importante charge de travail et les difficultés rencontrées par Mme X... tenant à la restructuration
du poste comptable, aux transferts de compétence en lien avec l’évolution de la carte des EPCI dans un contexte
de changements récurrents de personnels ne sont pas de nature à l’exonérer de sa responsabilité au titre de la
force majeure ; que la liquidation de la SARL MAGIC TOUCH, ne l’empêchait nullement d’agir et ne peut pas
davantage constituer une circonstance de force majeure ; que, par ailleurs, si la comptable publique a formulé les
27 et 31 août 2012 des réserves sur les exercices 2003 à 2011, au demeurant insuffisamment précises et
détaillées, l’action en recouvrement contre le titre litigieux n’était pas en tout état de cause prescrite au moment où
ces réserves ont été formulées ;
8/10
ATTENDU
enfin que Mme X... a produit le 19 juillet 2021, un bordereau de situation au 15 juillet 2021 concernant
la SARL MAGIC TOUCH dont il ressort que l’ensemble des titres pris en charge à compter de la gestion 2016 ont
été recouvrés, la copie d’un courriel que Mme X... a adressé le 1
er
juillet 2019 aux services de la communauté de
communes en indiquant que le titre émis en 2012 à l’encontre de la SARL MAGIC TOUCH l’avait peut-être été par
erreur, deux factures respectivement de 3 472,40
€
et 1 020,47
€
concernant une autre entreprise domiciliée à la
même adresse que la SARL MAGIC TOUCH, qu’ensuite par ce même courriel Mme X... souhaitait également être
informée rapidement de la suite donnée à sa demande, et qu’enfin était mentionné de façon manuscrite sur ledit
courriel « tout est annulé et tout est refacturé », sans que l’auteur de cette mention ne soit identifié ;
ATTENDU
, qu’en l’état les pièces produites par la comptable publique à l’appui de son courriel du 19 juillet 2021
ne permettent pas d’établir une éventuelle erreur quant à l’identité du débiteur ; qu’en effet, les factures produites
ne portent pas ni sur le même montant et ni sur des prestations identiques et concernent une autre entreprise; que
par ailleurs, le bordereau de situation actualisé au 15 juillet 2021 ne concerne que les titres pris en charge à compter
de la gestion 2016 et ne permet pas d’établir que le titre litigieux pris en charge au cours de la gestion 2012 aurait
fait l’objet d’un recouvrement ou d’une annulation, faute de mention précise en ce sens, à une date qui ne peut être
déterminée ; que dans ces conditions Mme X... n’a pas apporté la démonstration qu’elle avait effectué des
diligences, complètes, adéquates et rapides en en vue du recouvrement du titre T19 d’un montant de 2 258,17
€
,
lequel a été atteint par le jeu de la prescription de recouvrement le 23 février 2016, qu’en conséquence la
responsabilité personnelle et pécuniaire de Mme X... doit être mise en jeu ;
En ce qui concerne le préjudice financier
Sur les observations des parties
ATTENDU
que l’ordonnateur estime que les faits mentionnés au réquisitoire n’ont causé aucun préjudice à la
collectivité et que Mme X... fait valoir qu’elle a été empêchée d’agir du fait de la liquidation judiciaire de la SARL
MAGIC TOUCH ;
ATTENDU
que dans ses conclusions, la procureure financière considère que la créance n’était pas
irrécouvrable à la date du manquement, et que la collectivité a de ce fait subi un préjudice financier ;
Sur l’existence d’un préjudice financier
ATTENDU
que le non recouvrement d’une recette qui lui est due constitue un préjudice financier pour la collectivité
publique créancière ; que Mme X... ne produit aucun document de nature à établir l’irrécouvrabilité de la créance,
notamment du fait de l’insolvabilité de la société débitrice, à la date du manquement ; que l’ouverture d’une
procédure de dissolution anticipée avec nomination d’un liquidateur amiable ne préjuge pas de l’impossibilité de
désintéresser l’ensemble des créanciers de la SARL MAGIC TOUCH, qu’il y a lieu de regarder le préjudice financier
comme établi ;
Sur le lien de causalité entre le manquement du comptable et le préjudice financier
ATTENDU
que l’absence de justification par Mme X... de diligences adéquates, complètes et rapides n’a pas
permis de recouvrer la créance de la communauté de communes Sud Territoire à l’égard de la SARL
MAGIC TOUCH, ni de préserver ses droits ; que le lien de causalité entre le manquement de la comptable et
le préjudice financier subi par la collectivité est ainsi établi ;
9/10
Sur le débet à prononcer
ATTENDU
qu’en application des dispositions du 3
ème
alinéa du VI de l’article 60 modifié de la loi du 23 février 1963
précité, il y a donc lieu de constituer Mme X... débitrice de la communauté de communes Sud Territoire du montant
du préjudice subi par la collectivité, à concurrence de
2 258,17
€
; que conformément au VIII de l’article 60 modifié
de la loi du 23 février 1963, ce débet portera intérêt au taux légal à compter
du 17 juin 2019, date à laquelle le
réquisitoire lui a été notifié ;
Sur la quatrième présomption de charge concernant Mme X... au titre de l’exercice 2017
ATTENDU
que par les réquisitoires susvisés, le ministère public a estimé que Mme X... était susceptible de voir sa
responsabilité personnelle et pécuniaire engagée au titre de sa gestion au cours de l’exercice 2017, à concurrence
de 11 560,77
€
, pour avoir laissé se prescrire l’action en recouvrement du titre de recettes no T-1528041633 imputé
au compte 46721,« débiteurs divers - amiable » du budget principal, pris en charge le 15 juillet 2013 et émis à
l’encontre de SMACL SOC concernant un ordre de reversement pour un montant de 11 560,77
€
et dont le reste
à recouvrer au 1
er
avril 2019 s’élevait au même montant ;
En ce qui concerne le manquement
Sur les observations des parties
ATTENDU
que Mme X... fait valoir que cette somme correspond à un avoir sur les cotisations d’assurance en
faveur de la communauté de communes Sud Territoire, qui a été compensé par imputation sur des appels de
cotisations successifs, et que la communauté de communes a émis un mandat le 12 juillet 2019 (n°779/2019) pour
régulariser cet ordre de versement ;
ATTENDU
que l’ordonnateur ne s’est pas exprimé spécifiquement sur cette charge ;
ATTENDU
que dans ses conclusions, la procureure financière estime que la caisse de la comptable a été
rétablie à la date du 12 juillet 2019 à la suite de la prise en charge d’un mandat de régularisation et qu’il n’y
a, par suite, plus lieu à charge ;
Sur la responsabilité du comptable
ATTENDU
que le titre de recettes
pris en charge le 15 juillet 2013 d’un montant de 11 560,77
€
a pour objet le
recouvrement d’un avoir
de la communauté de communes Sud Territoire à l’égard de son assureur, la SMACL
;
qu’il n’a donné lieu de la part de la comptable qu’à deux diligences, une lettre de relance du 10 mai 2017 non
susceptible d’effet interruptif de la prescription de l’action en recouvrement, elle-même suivie d’une mise en
demeure de payer du 19 juillet 2017 dont la notification à la société débitrice n’est pas établie et qui était en tout
état de cause tardive, dans la mesure où la prescription doit être regardée comme acquise à la société débitrice
au 15 juillet 2017 ;
ATTENDU,
qu’un tel manquement serait de nature à engager la responsabilité personnelle et pécuniaire du
comptable public dans les conditions prévues par l’article 60 susvisé de la loi de finances du 23 février 1963, que
toutefois il résulte de l’instruction que la caisse de la comptable a été rétablie à la date du 12 juillet 2019 par
l’émission d’un mandat de régularisation pour un montant identique à celui du titre de recettes initial ; que dans ces
conditions, il n’y a pas lieu d’engager la responsabilité de Mme X... au titre de cette charge ;
PAR CES MOTIFS,
10/10
DECIDE :
Article 1 :
Mme X... est déchargée de sa gestion au titre des exercices 2014, 2015 et 2017.
Article 2 :
Au titre l’exercice 2016, Mme X... est constituée débitrice de la communauté de communes
Sud Territoire de la somme de 2 258,17
€
, augmentée des intérêts de droit à compter du 17 juin 2019.
Article 3
: Mme X... ne pourra être déchargé de sa gestion au titre de l’exercice 2016 qu’après apurement du débet
prononcé à l’article 2 ci-dessus.
Fait et jugé à la chambre régionale des comptes Bourgogne-Franche-Comté, réunie en formation plénière.
M. Thierry FARENC, président de section, président de séance,
M. Vladimir DOLIQUE, premier conseiller,
Mme Mélody DESSEIX, première conseillère, réviseure,
M. Yannick KLEIN, premier conseiller,
Mme Léa LHIOUI-PERRIN, conseillère.
En conséquence, la République française mande et ordonne à tous huissiers de justice, sur ce requis, de mettre
ledit jugement à exécution, aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux
judiciaires d’y tenir la main, à tous commandants et officiers de la force publique de prêter main-forte lorsqu’ils en
seront légalement requis.
En foi de quoi, le présent jugement a été signé par :
Mireille GREGOIRE, greffière et Thierry FARENC, président de section de la chambre régionale des comptes Bourgogne-
Franche-Comté, président de séance.
Collationné, certifié conforme à la minute déposée au greffe de la chambre régionale des comptes Bourgogne-Franche-Comté.
Le secrétaire général,
Stéphane PELTIER
Voies et délais de recours
La présente décision juridictionnelle peut être déférée en appel devant la Cour des comptes dans un délai de deux mois à compter de la
date de sa notification (articles L. 242-6 et R. 242-19 à 28 du code des juridictions financières).