LES ENJEUX STRUCTURELS
POUR LA FRANCE
DÉCEMBRE 2021
ENTITÉS ET POLITIQUES PUBLIQUES
RECENTRER LES MISSIONS
DU MINISTÈRE DE
LA CULTURE
SOMMAIRE
5
SYNTHÈSE
6
CHIFFRES CLÉS
7
INTRODUCTION
9
1 - LA POLITIQUE CULTURELLE DE L’ÉTAT EN QUÊTE
D’UN NOUVEAU SOUFFLE
9
A - La structuration du paysage culturel et
la relativisation de la place du ministère
10
B -
Un ministère de plus en plus gestionnaire
11
C -
Une administration de moins en moins
bien outillée
12
D - Un pilotage problématique
14
2 -
POUR UN MINISTÈRE RETROUVANT SON ÉLAN
D’ADMINISTRATION STRATÈGE
15
A - La redéfinition des objectifs stratégiques de l’État
16
B - L’achèvement du mouvement de déconcentration
et de transferts aux collectivités territoriales
17
C - La réorganisation du ministère sur
son cœur de métier
COUR DES COMPTES
3
La présente note fait partie d’un ensemble de travaux destinés à présenter,
sur plusieurs grandes politiques publiques, les principaux défis auxquels
seront confrontés les décideurs publics au cours des prochaines années
et les leviers qui pourraient permettre de les relever. Cette série de
publications, qui s’étale d’octobre à décembre 2021, s’inscrit dans le
prolongement du rapport remis en juin 2021 au Président de la République,
Une stratégie des finances publiques pour la sortie de crise.
Ce travail de
synthèse vise à développer, sur quelques enjeux structurels essentiels,
des éléments de diagnostic issus de précédents travaux de la Cour et des
pistes d’action à même de conforter la croissance dans la durée tout en
renforçant l’équité, l’efficacité et l’efficience des politiques publiques.
La Cour, conformément à sa mission constitutionnelle d’information des
citoyens, a souhaité développer une approche nouvelle, qui se différencie
de ses travaux habituels, et ainsi apporter, par cette série de notes
volontairement très synthétiques et ciblées, sa contribution au débat
public, tout en veillant à laisser ouvertes les différentes voies de réformes
envisageables.
Cette note a été délibérée par la 3
e
chambre et approuvée par le comité du
rapport public et des programmes de la Cour des comptes.
Les publications de la Cour des comptes sont accessibles en ligne sur le site
internet de la Cour et des chambres régionales et territoriales des comptes :
www.ccomptes.fr
.
AVERTISSEMENT
4
INTRODUCTION
SYNTHÈSE
La politique menée par le ministère de la culture depuis sa création s’est traduite
par une formidable expansion de l’activité culturelle dans notre pays. Celle-ci a
en outre bénéficié de l’intervention croissante des collectivités territoriales qui
se sont appuyées sur les lois de décentralisation pour investir dans le champ
de la culture et représentent aujourd’hui une source de financement trois fois
supérieure à celle du ministère. Elle a également été marquée par la multiplication
d’opérateurs du ministère qui ont tiré profit de leur autonomie pour se développer
de façon remarquable. Conséquence de cette évolution, le rôle central d’initiateur
longtemps joué par le ministère de la culture a perdu de son importance, d’autant
que celui-ci semble s’être insuffisamment adapté, dans son organisation et ses
modes de fonctionnement, à la nouvelle donne dont il a été l’instigateur.
La situation contemporaine du paysage culturel, les mutations des pratiques
culturelles, voire du rapport à la culture plaident en faveur d’une revue globale
des missions qu’il incombe au ministère d’assumer. Le réexamen des objectifs
de la politique culturelle de l’État et le renouvellement de ses outils devrait être
le point de départ d’une réforme visant à recentrer le ministère de la culture sur
ses missions d’impulsion et de pilotage. Outre l’achèvement du mouvement de
déconcentration et de décentralisation déjà bien engagé, une réorganisation en
profondeur de son administration centrale assortie d’une politique de ressources
humaines renforcée, notamment au niveau de ses agents d’encadrement, devrait
lui permettre de concentrer son activité sur les priorités constitutives de son cœur
de métier et pouvoir tirer encore mieux parti de son potentiel d’expertise. C’est en
menant à bien une telle transformation que le ministère pourra retrouver son élan
d’administration stratège.
COUR DES COMPTES
5
SYNTHÈSE
Chiffres clés :
Budget exécuté de la mission Culture:
•
2,95Md€ en 2019
et
3,16Md€ en 2020
(incluant
des mesures exceptionnelles de soutien liées à la crise sanitaire)
•
Dépenses culturelles des collectivités locales en 2019 : environ
10Md€
•
Équipements culturels : près de
45 000
monuments classés,
près de
1 200
lieux publics d’exposition, près de
1 200
lieux
publics de diffusion du spectacle vivant,
569
établissements publics
d’enseignement de la culture
•
Effectifs du ministère de la culture en 2020 : près de
9 400
agents
•
Effectifs des opérateurs du ministère de la culture en 2019 :
près de
14 000
agents
6
INTRODUCTION
INTRODUCTION
La politique poursuivie par le ministère de la culture depuis sa création en
1961 s’est traduite par une formidable expansion de l’activité culturelle sur
l’ensemble des territoires. Avec le développement considérable de l’offre dans
tous les domaines du patrimoine et de la création, la montée en puissance des
sources de financements émanant des collectivités territoriales ou du secteur
privé, et, en retour, l’intensification de la consommation et des pratiques
culturelles, le paysage culturel français s’est profondément transformé en l’espace
de quelques décennies.
Remarque liminaire
Le ministère de la culture inclut depuis longtemps la communication
dans son champ de compétence (l’audiovisuel public, les aides à la presse,
etc.). Toutefois, pour des raisons qui tiennent à la logique spécifique dont
relève le fonctionnement de ce domaine, les problématiques développées
dans la présente note structurelle portent exclusivement, sauf mention
explicite contraire, sur le périmètre des activités du ministère relevant de
la Mission « Culture ».
Cette note a été établie sur la base des observations que la Cour a pu
dégager à l’occasion des contrôles menés dans le secteur de la culture
depuis 2015, complétées par celles qui relèvent des travaux réalisés dans
ce champ par les chambres régionales et territoriales des comptes. Les
références à ces travaux figurent en annexe.
Monuments
classés ²
Lieux
d’exposition¹
Théâtres
Lieux de
diffusion
musique et
danse
Conservatoires
musique,
danse et art
dramatique
Enseignement
supérieur
culture
44 540
1 161
953
198
449
120
L’équipement culturel de la France en 2019
¹ Musées de France, centres d’art contemporain, fonds régionaux d’art contemporain
² Au 1er janvier 2021
Source : Ministère de la culture - DEPS
COUR DES COMPTES
7
Conséquence de cette évolution, le rôle central d’initiateur joué par le ministère
de la culture a perdu de son caractère primordial, ce qui lui a valu, depuis plusieurs
années, de faire l’objet de critiques quant à sa capacité à être, encore, l’instigateur
d’une politique culturelle porteuse d’un élan. Au point que certains en sont venus
à poser la question de savoir si, au regard de l’importance prise par les grands
opérateurs et alors qu’une partie significative des politiques a été décentralisée,
il avait encore, en tant que tel, une réelle utilité. Les travaux menés par la Cour
l’amènent à constater que, pour être en quelque sorte victime de la réussite
du projet dont il a été originellement porteur, le ministère de la culture gagnerait
aujourd’hui à sérier les missions sur lesquelles il entend concentrer en priorité
ses efforts.
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LA POLITIQUE CULTURELLE DE L’ÉTAT EN QUÊTE D’UN NOUVEAU SOUFFLE
1 - LA POLITIQUE CULTURELLE DE L’ÉTAT EN QUÊTE D’UN
NOUVEAU SOUFFLE
A - La structuration du paysage
culturel et la relativisation de la place
du ministère
Depuis le franchissement du seuil qu’a
constitué le quasi-doublement de son
budget en 1982 (de 4,2 MdFF en 1981
à 7,5 MdFF en 1982), le ministère de la
culture s’est trouvé en mesure d’amplifier
considérablement dans la durée sa politique
de soutien à l’activité culturelle, l’effort
consenti ayant été graduellement accru par
tous les gouvernements qui se sont succédé
jusqu’en 2010. Si les crédits consacrés par
l’État à la culture ont ensuite connu une phase
de diminution transitoire entre 2011 et 2014,
ils sont ensuite repartis à la hausse. Avec
3 Md€ en 2019, les dépenses du ministère
représentent, compte tenu de l’évolution des
prix et des changements de périmètre de la
mission budgétaire « Culture », environ 1,3 fois
le niveau de 1982.
Grâce à ces dotations budgétaires, le ministère
a pu à la fois intensifier son action et en étendre
le domaine. Inspiré par l’idée selon laquelle
la culture recouvrait l’ensemble des traits
distinctifs, traditions, pratiques et modes
de vie d’une société ou d’un groupe social,
il a ouvert son champ d’intervention à des
activités qui ne ressortaient pas jusqu’alors
de la définition « classique » de la culture :
photographie, arts du cirque, art de la rue,
chansons, bande dessinée, design, etc. Dans
ces domaines comme dans ceux qu’il couvrait
antérieurement, il a développé une vigoureuse
politique de soutien à la création et à la
diffusion, passant pour une grande part par la
mise en place ou la consolidation d’institutions
culturelles de toutes natures (musées, salles
de spectacles, compagnies du spectacle vivant,
médiathèques, écoles, etc.), non seulement de
niveau national, mais plus largement au niveau
local où il est venu appuyer l’engagement
croissant des collectivités territoriales.
Les collectivités locales ont en effet tiré parti
des premières lois de décentralisation pour
investir dans le champ de la culture. En euros
constants, elles ont presque doublé les moyens
qu’elles y consacrent depuis quarante ans,
pour atteindre 10 Md€ en 2019, soit plus de
trois fois le budget de la mission « Culture » de
l’État. Cette évolution s’est ainsi traduite par
un considérable développement du maillage
des institutions culturelles, en particulier
dans les territoires au sein desquels la plupart
dépendent juridiquement et, pour l’essentiel,
financièrement des collectivités territoriales.
Le ministère de la culture a, en outre, cherché
à structurer le champ de ses interventions à
travers une politique d’institutionnalisation
avec la création de catégories administratives
spécifiques (établissements publics de
coopération culturelle) ou de labels
(centres dramatiques nationaux, centres
chorégraphiques nationaux, scènes nationales,
scènes de musiques actuelles, etc.) ouvrant
droit à des aides et des soutiens financiers.
En outre, il a progressivement transféré
une grande partie de ses compétences de
programmation et de gestion à des opérateurs
nationaux qu’il a érigés, lorsque ce n’était
pas déjà le cas, en établissements publics
nationaux. Ces derniers se sont multipliés et,
COUR DES COMPTES
9
pour la plupart, se sont très significativement
développés en s’appuyant sur l’autonomie de
gestion que leur conféraient leurs statuts pour
dégager à cet effet des ressources propres
venant abonder leurs moyens financiers.
Dans le courant des années 2000, l’État s’est par
ailleurs employé à construire un cadre juridique
et fiscal visant à encourager le mécénat privé
en direction de la sphère culturelle. Celui-ci
est devenu un moyen de financement à part
entière de la culture (de l’ordre de 400 M€ en
2019, auxquels il faut ajouter le coût pour l’État
des avantages fiscaux qui y sont associés).
Dans de nombreux cas, il s’avère désormais
être la condition décisive pour réaliser certains
projets ou opérations. De surcroît, comme
la Cour a pu le constater à l’occasion de ses
contrôles, le secteur privé, déjà présent en
tant que gestionnaire ou dans le financement
de l’exploitation de certains monuments ou
salles de spectacles, a commencé, grâce à
des dispositifs fiscaux très favorables, à se
développer dans d’autres domaines comme
un acteur à part entière, en particulier les lieux
d’exposition d’œuvres d’art, comme pour les
fondations LVMH ou Pinault à Paris.
Enfin, résultat direct de l’action de l’État (par
exemple, avec le prix unique du livre) ou
conséquence de la dynamisation du secteur
à laquelle il a contribué, la culture compte
désormais comme une activité économique
non négligeable (36 Md€ en 2019, plus de
500 000 emplois, sans compter les retombées
indirectes, telles que le tourisme).
Menée de façon continue depuis quarante
ans, cette politique s’est traduite par
la multiplication considérable des acteurs
intervenant dans le champ de la culture
(publics et privés, étatiques et territoriaux),
un foisonnement des activités culturelles sur
tous les plans (création, diffusion, valorisation
du patrimoine, etc.), mais aussi une certaine
dilution des missions du ministère, dont le
poids financier par rapport aux collectivités
locales et au secteur privé se trouve de toute
façon fortement relativisé.
10
LA POLITIQUE CULTURELLE DE L’ÉTAT EN QUÊTE D’UN NOUVEAU SOUFFLE
Avec la multiplication des acteurs culturels
émargeant aux subventions publiques qu’il
distribue, le ministère de la culture consacre
une part de plus en plus importante de ses
activités à la distribution de fonds publics.
On constate aussi un saupoudrage des aides
selon une politique de guichet et de droits
acquis difficile à remettre en cause, ce qui rend
de moins en moins lisibles les priorités de la
politique culturelle de l’État.
L’attribution des crédits ministériels aux
institutions et acteurs culturels est, pour une
part importante (45 % en 2019), préemptée
par le financement des grandes institutions
nationales (subventions pour charges de
service public et masse salariale des personnels
encore gérés par le ministère de la culture).
Le reste est distribué à une myriade d’acteurs
et d’institutions répartis sur l’ensemble du
territoire, parfois pour de très faibles montants.
Cette part prise dans son budget global par
le financement des opérateurs nationaux
ne cessant d’augmenter (elle n’était que de
38 % au début des années 2000), les marges
financières de l’État pour soutenir d’autres
acteurs ont été réduites.
Ceci vaut en particulier pour les aides
allouées au spectacle vivant qui, en dehors du
financement des grandes structures labellisées,
conduit à une atomisation des crédits, lourde
en gestion, mais dont la Cour a pu observer
qu’il participe d’un écosystème difficile à
faire évoluer au regard de la complexité des
financements croisés dont ce secteur bénéficie.
Pour autant, aussi bien le ministère que les
professionnels eux-mêmes reconnaissent de
longue date que les financements publics
massifs (subventions budgétaires, aides
La part continûment croissante de la dépense culturelle des collectivités territoriales
Sources : Ministère de la culture/DEPS et Cour des comptes
B - Un ministère de plus en plus
gestionnaire
Au fil des années, le levier budgétaire dont
dispose le ministère a perdu de son rôle
prééminent. Compte tenu du différentiel de
croissance entre l’évolution du budget du
ministère et celle des crédits consacrés à
la culture par les collectivités territoriales,
ainsi que des financements d’origine privée
(ressources propres fortement croissantes des
établissements, développement du mécénat
et des lieux de culture privés), le pouvoir
d’orientation et d’incitation du ministère s’est
incontestablement émoussé.
(M€)
2006
2010
2014
2018
2019
Budget
ministère de
la culture
(exécuté)
2 632
2 985
2 554
2 913
2 947
Dépense
culturelle
consolidée des
collectivités
territoriales
6 816
7 472
10 160
9 244
9 830
COUR DES COMPTES
11
fiscales, sans compter les très importants effets
du régime de l’intermittence) ont conduit à
une offre surabondante, donc à un déséquilibre
entre création et diffusion. Jusqu’à ce jour, le
ministère de la culture s’est abstenu d’ouvrir
sur ce sujet, certes extrêmement sensible,
ce qui devrait sans doute être un important
chantier de réforme, que les effets de la crise
sanitaire rendent encore plus impérieux.
Cet estompement des lignes de force
de la politique ministérielle se retrouve
également dans le domaine du patrimoine,
où la dimension administrative et financière
a pris le pas sur une approche résolument
assumée en termes de choix et de priorités.
Dans ce contexte, les grands opérateurs et
leurs projets franciliens ont été favorisés,
au détriment du patrimoine communal et
rural, pourtant le plus fragile, car porté par
des propriétaires sans grands moyens. Cette
insuffisante prise en considération pour la
politique du patrimoine dans sa dimension
de proximité a rendu le ministère moins
sensible aux enjeux territoriaux de cette
politique, les directions régionales des affaires
culturelles (DRAC), services déconcentrés
de l’État, devant se « débrouiller » avec des
moyens fragilisés par le manque d’attractivité
et de reconnaissance de la filière monuments
historiques. Comme la Cour a pu l’observer, il
en résulte que les conditions de déclenchement
et les taux appliqués aux aides à l’entretien et
à la restauration du patrimoine varient selon
les DRAC, sans que se dégage une doctrine
homogène fixant, de façon nette, des critères
de choix et d’opportunité.
Enfin, l’accroissement continu du champ
d’intervention du ministère, auquel s’est ajouté
le poids financier des grands chantiers, dont
les coûts ont pour la plupart significativement
dérivés, a entraîné une certaine dispersion
des ressources, privant l’État des moyens
de sécuriser de manière satisfaisante la
conservation de son propre patrimoine, comme
l’illustre par exemple la dégradation de l’état
des cathédrales.
Corroborant le constat d’une dilution
croissante des lignes de force de l’action
du ministère, les travaux récents de la Cour
sur les établissements d’enseignement
supérieur artistique ont mis en lumière
l’absence de stratégie intégrée dans ce
domaine, où le pilotage du ministère se réduit
à l’exercice « au fil de l’eau » d’une tutelle
administrative et budgétaire de chacun des
établissements concernés.
C - Une administration de moins en
moins bien outillée
Le ministère de la culture a pâti dans la période
récente d’une forte instabilité ministérielle
et d’un affaiblissement de ses ressources
d’encadrement et d’expertise. Depuis 2007,
huit ministres en moins de quatorze ans se
sont succédé rue de Valois et autant, sinon
plus, de directeurs de cabinet et de secrétaires
généraux, ce qui a affecté la continuité de
la direction et le pilotage stratégique de la
politique culturelle de l’État. Si la rotation
rapide des équipes ministérielles a été en
partie compensée par la relative stabilité
dans leur poste des directeurs généraux,
ceux-ci, responsables de secteur d’activités
très étendus, se sont de plus en plus laissés
absorber par leurs fonctions administratives
au détriment de la mise en œuvre de projets
politiques structurants, perçus comme
aléatoires car pouvant être abandonnés à
chaque changement de ministre.
12
LA POLITIQUE CULTURELLE DE L’ÉTAT EN QUÊTE D’UN NOUVEAU SOUFFLE
La Cour a constaté que l’administration
centrale, se trouve, de surcroît, confrontée
à l’attrition continue de son vivier de cadres
et d’experts techniques pour des raisons
cumulatives. Le niveau des rémunérations
offertes en administration centrale est de
moins en moins attractif, non seulement au
regard d’autres ministères, mais surtout du
traitement que les mêmes agents peuvent
obtenir sur des postes de détachement
chez les opérateurs, sans parler du secteur
privé. En outre, l’intérêt des postes chez les
opérateurs exerce un fort pouvoir d’attraction
pour les agents de haut niveau : la possibilité
qu’ils offrent d’exercer des responsabilités
managériales effectives et de participer à des
projets concrets amènent nombre d’entre eux
à délaisser l’administration centrale.
Le récent changement d’échelle des régions
avec la loi du 7 août 2015 portant nouvelle
organisation territoriale de la République
(NOTRe) n’a pas été accompagné au sein des
DRAC, ne serait-ce que pour compenser le
temps des déplacements. Cette inadaptation
des moyens aux missions a pu notamment
être constatée par la Cour dans les travaux
qu’elle a conduit sur les mesures de relance
prises pour tempérer les effets de la crise
sanitaire : alors que de très importants crédits
ont été débloqués en soutien des travaux
d’entretien et de restauration du patrimoine
dans les territoires (certaines DRAC ont reçu
jusqu’à 60 % de crédits supplémentaires à cet
effet), le nombre insuffisant d’agents relevant
de la chaîne de traitement administratif des
autorisations de travaux a créé des goulets
d’étranglement qui freinent la capacité à
engager les chantiers, donc l’effet recherché
pour relancer l’économie.
La problématique des ressources humaines du
ministère de la culture ne peut être détachée
de l’évolution de l’environnement dans lequel il
intervient. Alors qu’il était jadis un protagoniste
sans rival, il doit désormais compter avec
la stature et les capacités d’initiative des
dirigeants des grands opérateurs qu’il a lui-
même créés, mais aussi avec la montée en
puissance, comme acteurs de la politique
culturelle, des grands élus locaux qu’a encore
amplifiée l’agrandissement des régions. De ce
fait, face à ces acteurs désormais puissants
(dont les premiers relèvent en principe
de sa tutelle), le ministère ne semble plus
suffisamment armé pour que les conditions du
dialogue politique et de gestion avec les autres
acteurs de la culture demeurent équilibrées.
Combiné à l’élargissement continu de son
périmètre d’intervention et l’atomisation
croissante de son action, l’affaiblissement des
services centraux du ministère de la culture
et l’inadaptation des moyens de ses services
déconcentrés contrarient l’exercice de sa
fonction stratégique d’inspiration et de pilotage
des politiques culturelles nationales.
D - Un pilotage problématique
Du fait de la réussite du projet sur lequel
s’est principalement articulée l’action du
ministère de la culture depuis sa création,
son administration centrale se retrouve
à devoir gérer un champ de plus en plus
divers et disparate : pilotage réglementaire
et administratif des différents secteurs qui
relèvent de son domaine de compétences,
pilotage des opérateurs vis-à-vis desquels il
joue surtout un rôle d’allocataire de ressources,
pilotage des activités déconcentrées ou encore
du dispositif d’attribution de subventions de
COUR DES COMPTES
13
montants très variables à un vaste éventail
d’acteurs, dans des conditions qui tendent
de plus en plus à participer d’une logique
d’abonnement, dépourvue de critères
de qualité ou de dispositifs institutionnels
permettant d’évaluer la pertinence des aides
ou même de contrôler la régularité de leur
attribution. Les récents audits flash conduits
par la Cour sur les soutiens spécifiques du
ministère dans le domaine du patrimoine et du
spectacle vivant confirment cette observation.
Par ailleurs, les multiples contrôles de la Cour, y
compris les plus récents, sur les établissements
publics relevant du ministère conduisent à
s’interroger sur les conditions dans lesquelles
celui-ci exerce sa tutelle. Lettres de missions
inexistantes ou signées très en aval de la
nomination des dirigeants, contrats d’objectifs
et de performance couvrant des périodes
largement entamées lors de leur signature
ou chevauchant les mandats de dirigeants,
objectifs stratégiques flous, indicateurs trop
nombreux et souvent peu pertinents pour
assurer un suivi approprié de l’activité et des
performances des établissements, dialogue de
gestion peu structuré où, lorsqu’il existe, les
considérations d’ordre technique l’emportent
souvent sur la co-construction d’une réflexion
stratégique : ces constats quasi systématiques
témoignent d’un exercice des fonctions de
tutelle globalement insatisfaisant.
Avec la mise en œuvre, à la fin des années 2010,
de procédures plus ouver tes et plus
transparentes, et l’instauration de règles plus
strictes sur la durée des mandats, le ministère
a cherché à rationnaliser sa politique de
nomination dans les établissements relevant
de sa tutelle. Cependant, les conditions de
nomination des dirigeants des grands
établissements nationaux, qui restent toujours
assez discrétionnaires, la position de ces
dirigeants face aux directions sectorielles
du ministère reléguées, lors de la réforme
de 2010, au rang de services, compliquent
l’exercice d’une tutelle par ailleurs trop faible
pour conduire un dialogue stratégique équilibré
avec les opérateurs.
Compte tenu de ces différentes contraintes,
les marges de manœuvre du ministère se
réduisent de plus en plus à l’engagement
de projets ponctuels d’importance variable,
tels que le lancement d’un grand chantier
conduisant à l’érection d’un nouveau bâtiment
(par exemple, le Mucem ou la Philharmonie
de Paris) ou à la restauration d’un ancien,
assortie d’un projet d’utilisation renouvelé
(par exemple, le Grand Palais ou le château
de Villers-Cotterêts), la création d’un nouvel
opérateur (par exemple, le Centre national
de la musique) et, de façon moins visible,
le soutien, certes souvent décisif, en matière de
légitimation ou de bouclage financier, apporté
à une multitude de projets dans les territoires.
En définitive, hormis quelques initiatives de
portée générale, comme la gratuité dans les
musées pour les jeunes ou, dernièrement,
le « Pass Culture », la politique du ministère
consiste principalement dans la poursuite
d’une politique de subventions et de guichet,
avec pour conséquence, dans nombre de cas,
l’accroissement des charges financières pesant
durablement sur son budget. L’élaboration
d’une politique culturelle nationale répondant
aux enjeux de l’époque, ou en phase avec elle,
n’est plus perçue comme la mission prioritaire
du ministère, d’où découleraient toutes
les autres.
14
POUR UN MINISTÈRE RETROUVANT SON ÉLAN D’ADMINISTRATION STRATÈGE
2 - POUR UN MINISTÈRE RETROUVANT SON ÉLAN
D’ADMINISTRATION STRATÈGE
Le fait que la loi portant nouvelle organisation
territoriale de la République ait institué la
politique culturelle en politique partagée
entre l’État et les régions, départements et
communes ne décharge pas l’État de ses
responsabilités spécifiques en la matière.
D’autant que l’affirmation de ce principe n’a
pas emporté de définition des rôles ou des
périmètres respectifs de compétence revenant
à chacun de ces acteurs. Si l’État ne peut plus
prétendre agir systématiquement en chef
de file des projets culturels cofinancés par
d’autres, il n’en conserve pas moins, outre
des compétences de son ressort exclusif,
la légitimité de porter un projet politique et
sociétal en matière culturelle. Et il s’avère que,
dans notre pays, la culture est, de longue date,
considérée comme l’une des composantes
essentielles de ce projet de société, ainsi que
l’a encore attesté, ces dernières décennies,
le combat pour « l’exception culturelle » dont
la France a été le fer de lance, et comme en
témoignent, de façon générale, la singularité
du profil et du rôle caractérisant le ministère
de la rue de Valois au regard de ses équivalents
étrangers, mais aussi des attentes qu’il suscite.
La nouvelle donne résultant de l’essaimage
et de la décentralisation des acteurs culturels
conduit à s’interroger sur la nécessité, ou même
l’opportunité, de conserver ce positionnement
singulier. L’on pourrait effectivement considérer
qu’en ayant puissamment concouru au
développement, à la structuration et à la
dynamisation d’un secteur de la culture qui
a acquis à bien des égard une capacité de
fonctionnement autonome, le ministère a,
sommes toutes, accompli l’essentiel de sa
mission originelle et que sa vocation
pionnière doit céder le pas à une conception
plus modeste, voire banalisée, de son action.
Mais l’on peut aussi concevoir que les enjeux
culturels n’ont en rien perdu de leur dimension
d’exception au regard des évolutions du
monde contemporain.
L’extension continue de la sphère marchande,
les transformations induites par la révolution
numérique et les offensives conquérantes
des entreprises du GAFAM (Google, Apple,
Facebook, Amazon et Microsoft), la rivalité
des puissances dont le «
soft power
» est
devenu une arme à part entière, ou encore les
interrogations sur les ressorts dont procèdent
les perspectives du « vivre ensemble »
soulèvent maintes questions d’importance, qui
sollicitent des réponses dont la culture paraît
être une composante incontournable, et le
ministère qui en a la charge un protagoniste
nécessaire. Ce sont là les nouveaux défis
qui semblent appelés à prendre le relais de
la politique de développement du paysage
culturel menée avec succès lors des décennies
passées. Pour être à même de les relever
de façon adéquate, il apparaît souhaitable
que le ministère de la culture engage les
transformations qui lui permettront de se
concentrer sur les missions auxquelles ceux-ci
renvoient désormais.
COUR DES COMPTES
15
A - La redéfinition des objectifs
stratégiques de l’État
Les évolutions du paysage culturel dont le
ministère a été l’acteur, les mutations des
pratiques culturelles, voire du rapport à la
culture, et les grands enjeux qui relèvent de
la mondialisation sont autant de facteurs
qui plaident en faveur d’une revue globale
des missions qu’il va incomber à l’État de
devoir assumer dans les décennies à venir.
Dans son rapport
Une stratégie des finances
publiques pour la sortie de crise
de juin dernier,
la Cour a appelé, en particulier pour le secteur
de la culture, à une revue des missions de
l’ensemble des acteurs publics, en vue de
renoncer à certaines des missions que la
sphère publique n’aurait pas nécessairement
vocation à assumer, de rationaliser davantage
les compétences exercées par plusieurs
catégories d’administrations publiques en
charge du domaine culturel, de décentraliser
des activités qui pourraient être assurées
plus efficacement par une autre collectivité
publique ou à un autre échelon, et de réorienter
l’action publique vers les territoires fragilisés.
Exercice indispensable devant le conduire
à recentrer son action sur ses objectifs
stratégiques, une telle revue des missions
semble être le préalable qui permettra au
ministère de la culture de renouer avec sa
fonction « pionnière ».
La définition des objectifs et le renouvellement
des outils de la politique culturelle nationale
devrait procéder d’une vision de la culture
participant de la mission générale d’éducation
poursuivie par l’État et considérée comme
un vecteur privilégié du lien collectif – ce qui
implique en particulier un renforcement de
l’action en direction de la jeunesse. Cette
vision semble inséparable de l’objectif visant
à permettre l’accès du plus grand nombre à
la culture à travers la poursuite des efforts
de démocratisation culturelle, l’invention de
formes nouvelles pour développer l’éducation
artistique et culturelle, ainsi que la promotion
d’initiatives inclusives, ce qui passe par une
stratégie de ciblage des actions et des aides en
direction des territoires et publics défavorisés.
Une revue des missions culturelles de l’État
suppose un réexamen méthodique des enjeux
attachés à chaque domaine d’intervention : à la
conservation et à la transmission du patrimoine
collectif aux générations futures ; au soutien
de la liberté de créer et à l’encouragement
susceptible d’être apporté aux formes
nouvelles de création, en privilégiant la prise
en charge des risques que seul l’État est en
mesure de porter ; et à la conservation, au
développement et à la promotion des savoir-
faire, en confortant les filières des métiers d’art
et en développant l’enseignement supérieur
artistique dans la visée de l’excellence et de sa
reconnaissance au niveau mondial.
Conformément à la fonction d’initiative et
au rôle de coordinateur qu’il lui revient de
jouer au niveau national, le ministère pourra
se pencher sur les conditions lui permettant
d’assumer pleinement son rôle de « tête
de réseau » s’agissant des domaines de la
culture qui impliquent d’autres ministères.
La Cour a pu constater récemment pour
l’ensemble des monuments, bâtiments et
œuvres patrimoniales appartenant à l’État ou
encore les formations artistiques supérieures
que les relations avec les ministères
chargés de l’enseignement supérieur et de
l’éducation nationale sont quasi inexistantes.
La fédération d’initiatives pour promouvoir la
culture française et européenne sur la scène
internationale, en intégrant l’importance du
«
soft power
», pourrait utilement participer de
cette réflexion.
16
POUR UN MINISTÈRE RETROUVANT SON ÉLAN D’ADMINISTRATION STRATÈGE
Il apparaît également souhaitable d’intégrer
parmi les axes prioritaires de son action le
renforcement de la prise en charge de la
question du numérique, afin d’en faire un levier
majeur de son action, notamment en matière
de conservation, de valorisation et de diffusion
de la culture, mais aussi comme vecteur de
densification des contenus. Et sur un plan plus
général, la poursuite de l’effort engagé pour
renforcer la fonction prospective semble devoir
figurer parmi les préoccupations majeures
de cette revue, afin que le ministère puisse
être, dans son domaine, constamment à la
pointe de la prise en compte des mutations
technologiques, économiques et sociétales.
B - L’achèvement du mouvement de
déconcentration et de transferts aux
collectivités territoriales
Pour que le ministère puisse effectivement
se recentrer sur ses missions d’impulsion
et de pilotage de la politique culturelle, il
apparaît nécessaire de pousser jusqu’à son
terme le mouvement consistant à transférer
à des opérateurs relevant de sa tutelle ou
aux collectivités territoriales les activités
opérationnelles qu’il exerçait directement et
que soit ainsi fixé sans ambiguïté le périmètre
restant de son ressort.
Cette perspective vaut particulièrement
pour la sphère des musées nationaux, qui,
antérieurement aux années 1990, était dans sa
quasi-intégralité gérée en régie par le ministère.
Certes, si les plus grands musées nationaux
ont été, l’un après l’autre, transformés en
établissements publics et ont, de ce fait, acquis
leur autonomie de fonctionnement et, pour
les plus importants, de gestion, il en reste
cependant encore une quinzaine qui relèvent
du ministère. Bien que placés sous le statut
de service à compétence nationale (SCN), ils
ne disposent en réalité d’aucune marge de
manœuvre leur permettant de se développer.
Un constat similaire a pu être fait par la Cour
lors de son contrôle du Mobilier national,
dont la très grande difficulté à se réformer est
essentiellement imputable à son statut de SCN,
qui le prive de marges d’action.
Par ailleurs, la création d’opérateurs culturels
à partir des services du ministère ne s’est pas
systématiquement traduite par le transfert à
tous ces établissements des personnels qui y
exercent leur activité professionnelle. Malgré
les mouvements récemment opérés en ce
sens (Musée d’Orsay, établissement public du
château de Versailles et Centre des monuments
nationaux), et dont la Cour avait souligné la
nécessité, il demeure encore, principalement
dans la sphère muséale – et ceci sans
compter les musées ressortissant au statut
de SCN – des établissements publics (musée
Picasso, musée Guimet, Mucem, établissement
public du château de Fontainebleau) dont une
partie des agents continuent en effet d’être
rémunérés et administrés par le ministère
(agents dits « du titre II »). L’achèvement du
transfert de ces personnels devrait permettre
aux établissements concernés de conduire une
véritable politique de ressources humaines,
donc de disposer de l’ensemble des leviers pour
optimiser leur gestion globale.
Dans le même ordre d’idées, la tentative de
l’État, sous l’égide de la commission présidée
par René Rémond en 2003, de transférer aux
collectivités territoriales des monuments
nationaux paraissant ressortir davantage
d’une gestion de proximité a rencontré, auprès
de ces dernières, un très faible écho positif,
obligeant à leur maintien dans le giron du
Centre des monuments nationaux. Une telle
entreprise devrait pourtant être relancée.
COUR DES COMPTES
17
Elle vaudrait également pour certains
musées encore classés dans la catégorie des
musées nationaux, mais qui, au regard des
collections dont ils ont la charge, pourraient
être décentralisés et bénéficier ainsi d’une
gestion plus dynamique grâce aux soutien de
proximité des collectivités locales. Renouer
avec la politique de transfert aux collectivités
territoriales des monuments « nationaux »
ou des musées dont celles-ci seraient mieux
à même de dynamiser le développement
serait de nature à rendre plus nette la ligne de
partage des rôles entre l’échelon national et
l’échelon territorial.
Il paraît ainsi essentiel d’aller au bout de la
logique de déconcentration et de transferts
aux collectivités territoriales des activités de
gestion opérationnelle dont on ne voit guère
l’utilité qu’elles demeurent assurées par l’État
au niveau central.
C - La réorganisation du ministère sur
son cœur de métier
Au-delà du transfert souhaitable de certaines
activités opérationnelles toujours gérées
au niveau de son administration centrale,
il apparaît que les défaillances de son
organisation, la mobilisation excessive de ses
agents sur des travaux quotidiens de gestion
et de
reporting
empêchent le ministère de
la culture de se concentrer sur les priorités
politiques de son activité et de tirer pleinement
profit du potentiel d’expertise technique
de très haut niveau dont il dispose. Cette
situation plaide en faveur d’une réforme de son
organisation et de son fonctionnement, sur la
base de la redéfinition préalable de son cœur
de métier résultant de la revue de ses missions.
À cet effet, un réagencement global des
processus qui structurent les activités du
ministère semble inévitable. Sur la base des
constats que la Cour a établi à l’occasion de
ses contrôles, il apparaît que ce chantier de
transformation publique devrait conduire,
s’agissant des missions continuant de relever
de l’intervention de l’État, à un réexamen
des processus d’instruction, de décision et
de gestion aux fins d’en accroître l’efficacité
et la fluidité, et ceci dans la perspective de
déboucher sur la mise en œuvre d’un mode
global de gestion pluriannuelle par les objectifs
et les résultats.
L’objectif visant à concentrer l’activité de
l’administration centrale sur des tâches de
niveau strictement national pourra impliquer
de pousser au maximum la déconcentration
des processus de décision et de gestion au
niveau des DRAC et de tirer les conséquences,
au plan des moyens humains qui leur sont
alloués, de l’évolution subséquente de leurs
missions. Par contrecoup, l’ajustement
du champ des ac tivités incombant à
l’administration centrale incitera à procéder
à une meilleure articulation de la dualité du
pilotage métier (directions générales) et de
celui des ressources (secrétariat général),
passant par la redéfinition du périmètre
des directions.
En outre, dans la mesure où les opérateurs
relevant de sa tutelle participent de l’action
du ministère, une révision de leur modèle
économique gagnerait à être intégrée dans
ce processus de réforme. Ces opérateurs ont
en effet été mis à mal par la crise sanitaire, les
récents audits flash faisant apparaître que les
musées et les opérateurs du spectacle vivant
ont vu leurs ressources propres s’effondrer
sans que les prévisions de fréquentation
future permettent d’escompter un retour au
niveau précédent. Ils tireraient donc avantage
à bénéficier d’une mutualisation des fonctions
18
POUR UN MINISTÈRE RETROUVANT SON ÉLAN D’ADMINISTRATION STRATÈGE
qui leur sont communes pour en réduire les
coûts globaux (notamment dans la sphère
muséale) ou pour en faciliter l’exercice grâce à
des prestations de service collectif (notamment
chez les petits opérateurs). Par ailleurs, la
définition d’un cadre général de contrôle de
gestion pourrait leur permettre de disposer
d’un référentiel partagé.
Enfin, la perspective, pour l’État, d’assumer
de façon ambitieuse ses missions recentrées
paraît devoir passer par l’élaboration d’une
politique de ressources humaines spécifique
à la catégorie des cadres supérieurs, fondée
sur l’enrichissement des tâches managériales,
le développement d’une véritable gestion
prévisionnelle des emplois et compétences et
une politique de rémunération incitative dans
le but d’accroître la fluidité des parcours entre
le ministère et ses opérateurs.
La nécessaire transformation du ministère de
la culture pour adapter son fonctionnement
et son organisation aux évolutions de son
nouveau système et mieux remplir certaines
missions qui relèvent de sa seule impulsion n’a
pas échappé à ses responsables. Le « plan de
transformation du ministère » lancé en juillet
2019, avec le triple objectif de renforcer les
politiques transverses, faire de la culture une
priorité pour les jeunes et repositionner l’action
de l’État semblait d’ailleurs vouloir apporter
des réponses à ce diagnostic. Si quelques-unes
des pistes alors ouvertes ont débouché sur des
réformes ponctuelles, la crise sanitaire et le
changement des équipes en charge de piloter
le processus global semblent avoir entraîné
le gel de ce plan. Or, la possibilité pour l’État
de retrouver un nouvel élan en matière de
politique culturelle n’est pas envisageable
sans une réforme préalable du ministère qui
le conduise à se recentrer sur un nombre
limité de missions et à les exercer de façon
plus stratégique.
COUR DES COMPTES
RÉFÉRENCES AUX TRAVAUX
DE LA COUR DES COMPTES ET
DES CHAMBRES REGIONALES ET
TERRITORIALES DES COMPTES
La Cour des comptes et les chambres régionales et territoriales des comptes ont
mené de nombreux travaux ces dernières années sur lesquels s’est appuyée la
rédaction de la présente note, en particulier :
S’agissant de la Cour des comptes :
•
Le soutien de l’État au patrimoine pendant la crise sanitaire
, audit flash,
novembre 2021 ;
•
Le soutien du ministère de la culture au spectacle vivant pendant la crise de la
covid 19
, audit flash, novembre 2021 ;
•
Le budget de l’État en 2020 (résultats et gestion) – Mission culture
, avril 2021 ;
•
La Bibliothèque publique d’information
, référé, février 2021 ;
•
L’enseignement supérieur en arts plastiques
, communication à la commission
des finances du Sénat, janvier 2021 ;
•
L’École nationale supérieure de création industrielle
, observations définitives,
juillet 2020 ;
•
Le budget de l’État en 2019 (résultats et gestion) – Mission culture
, avril 2020 ;
•
Le service à compétences nationales Mobilier national et les Manufactures
nationales des Gobelins, de Beauvais et de la Savonnerie
, rapport public annuel,
février 2020 ;
•
La valorisation internationale de l'ingénierie et des marques culturelles. Le cas
des musées nationaux
, communication à la commission des finances du Sénat,
juin 2019 ;
•
L’enjeu immobilier au sein de l’établissement du palais de la Porte Dorée
, référé,
mai 2019 ;
•
Le budget de l’État en 2018 (résultats et gestion) – Mission culture
, mai 2019 ;
RECENTRER LES MISSIONS DU MINISTERE DE LA CULTURE
•
Les Archives nationales. Les voies et le moyens d’une nouvelle ambition
,
communication à la commission des finances du Sénat, novembre 2017 ;
•
Les théâtres nationaux
, rapport public annuel, février 2016 ;
•
L’Opéra national de Paris
, rapport particulier, septembre 2016.
La note s’appuie également sur les résultats de nombreux contrôles par la Cour
d’organismes qui n’ont pas donné lieu à publication.
S’agissant des chambres régionales et territoriales des comptes :
•
Région Île-de-France - La politique culturelle –
Chambre régionale des comptes
(CRC) Île-de-France, novembre 2021 ;
•
Association Opéra national de Lyon (métropole de Lyon) –
CRC Auvergne-Rhône-
Alpes, novembre 2021 ;
•
Opéra de Limoges (Haute-Vienne) –
CRC Nouvelle Aquitaine, octobre 2021 ;
•
Établissement public de coopération culturelle (EPCC) «Musée du Louvre-Lens»
(Pas-de-Calais) –
CRC Hauts-de-France, septembre 2021 ;
•
Association « Centre chorégraphique national Roubaix Hauts-de-France » (Nord)
-
CRC Hauts-de-France, juillet 2021 ;
•
Régie des musiques actuelles de Grand Angoulême «La Nef» - Angoulême
(Charente) –
CRC Nouvelle Aquitaine, juin 2021 ;
•
Établissement public de coopération culturelle «La condition publique» (Nord) –
CRC Hauts-de-France, mai 2021 ;
•
Établissement public de coopération culturelle (EPCC) Le Quai -
Centre
dramatique national (CDN) - Angers (Maine-et-Loire
) – CRC Pays de la Loire,
mai 2020 ;
•
Association «Comité de gestion du théâtre du Beauvaisis» (Oise)
– CRC Hauts-
de-France, novembre 2020 ;
•
Association Centre culturel transfrontalier «Le Manège» à Maubeuge (Nord)
–
CRC Hauts-de-France, mai 2020 ;
COUR DES COMPTES
•
É
tablissement public de coopération culturelle (EPCC) « Chemins du patrimoine
en Finistère » - Daoulas (Finistère)
- CRC Bretagne, décembre 2019 ;
•
Fonds régional d’art contemporain Bretagne (FRAC) à Rennes (Ille-et-Vilaine)
-
CRC Bretagne, octobre 2019 ;
•
Association pour le développement des activités musicales dans l’Aisne (Adama)
-
CRC Hauts-de-France, octobre 2019 ;
•
Syndicat mixte du conservatoire «Ardèche musique et danse» à Privas (Ardèche)
-
CRC Auvergne-Rhône-Alpes, mai 2019 ;
•
Conservatoire de musique et de danse de la Nouvelle-Calédonie
– Chambre
territoriale des comptes (CTC) Nouvelle-Calédonie, mai 2019 ;
•
Association «Arts, Loisirs et culture» de Méru-les-Sablons (Oise)
- CRC Hauts-de-
France, avril 2019 ;
•
Société publique locale Réunion des musées régionaux (SPL RMR) (La Réunion)
-
CRC La Réunion, février 2019 ;
•
Association « Lille 3000 » (Nord)
- CRC Hauts-de-France, février 2019 ;
•
Association «La Renaissance» de Mondeville (Calvados)
– CRC Normandie,
octobre 2018 ;
•
Association du festival du film de Cabourg (Calvados)
– CRC Normandie,
octobre 2018 ;
•
Te Fare Tauhiti Nui (TFTN) - Maison de la culture (Polynésie française)
–
CTC Polynésie française, juillet 2018 ;
•
Association Fontevraud-Centre culturel de l’Ouest (Maine-et-Loire)
– CRC Pays de
la Loire, juin 2018 ;
•
Association «Orchestre de Picardie» (Somme)
– CRC Hauts-de-France, juin 2018 ;
•
La Rose des vents - Villeneuve d’Ascq (Nord)
– CRC Hauts-de-France, mai 2018 ;
•
Association «Le Channel, scène nationale» (Pas-de-Calais)
–
CRC Hauts-de-France, mai 2018 ;
•
Maison de la culture d’Amiens (Somme)
– CRC Hauts-de-France, mai 2018.
Les publications de la Cour des comptes sont consultables sur le site Internet :
www. ccomptes.fr
Le présent rapport
est disponible sur le site internet
de la Cour des comptes :
www.ccomptes.fr
LES ENJEUX STRUCTURELS
POUR LA FRANCE
DÉCEMBRE 2021