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RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT
ET DE TRAITEMENT DES
DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
(Département de la Moselle)
Exercices 2019 et suivants
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
2
TABLE DES MATIÈRES
SYNTHÈSE
......................................................................................................................
4
RAPPELS DU DROIT ET RECOMMANDATIONS
.................................................
6
PROCÉDURE
..................................................................................................................
7
INTRODUCTION
...........................................................................................................
8
1
UN SYNDICAT QUI ASSURE LE TRANSPORT ET LE TRAITEMENT
DES DÉCHETS DE PLUS DE 360 000 HABITANTS
..........................................
9
1.1
Des compétences en grande partie externalisées
..............................................
10
1.1.1
Un traitement des déchets majoritairement externalisé
...........................
10
1.1.2
Une activité de transport en partie externalisée
......................................
11
1.1.3
Une coopération avec une structure publique allemande à sécuriser
juridiquement
..........................................................................................
11
1.2
Une participation des délégués au comité syndical en diminution et une
information délivrée au comité syndical à compléter
......................................
13
2
UNE SITUATION FINANC
IÈRE EN VOIE D’AMÉLI
ORATION MAIS
QUI RESTE FRAGILE
..........................................................................................
14
2.1
Des erreurs comptables et un changement de régime fiscal
.............................
14
2.1.1
Jusqu’en 2019, un déficit dissimulé par de multiples erreurs
comptables
...............................................................................................
14
2.1.2
Un actif surestimé devant être fiabilisé pour obtenir une image
fidèle du patrimoine
................................................................................
16
2.1.3
Un nouveau régime de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) bénéficiant
à la plupart de ses membres
.....................................................................
17
2.2
Un déficit résorbé en 2023 grâce notamment à une dérogation comptable
.....
19
2.2.1
Des produits en hausse
............................................................................
20
2.2.2
Des charges dont l’augmentation est maîtrisée
.......................................
21
2.2.3
Une ca
pacité d’autofinancement (CAF) en nette augmentation
.............
22
2.3
Une structure financière qui reste fragile
.........................................................
23
2.3.1
L’atonie des dépenses d’investissement
..................................................
23
2.3.2
Le recours à l’emprunt pour financer le déficit d’exploitation
...............
23
2.3.3
Un fonds de roulement redevenant positif en 2022
.................................
25
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
3
3
UNE GESTION DES DÉCHETS ONÉREUSE EN RAISON
NOTAMMENT DE SOLUTIONS DE TRAITEMENT PEU
PERFORMANTES
................................................................................................
26
3.1
Une gestion des déchets plus onéreuse que la moyenne du Grand Est
............
26
3.1.1
Un coût moyen annuel de gestion des déchets supérieur de près de
50
€ par habitant par rapport au territoire du Grand Est
.........................
26
3.1.2
Des surcoûts liés au traitement des emballages en raison de déchets
mal triés
...................................................................................................
28
3.1.3
Une exception : un coût compétitif pour les déchets incinérés et
enfouis
.....................................................................................................
30
3.2
Le multiflux : un système de tri coûteux et inefficace
.....................................
31
3.2.1
Un système coûteux et vétuste
................................................................
31
3.2.2
Un système peu efficace
..........................................................................
33
3.3
Méthavalor : un équipement dont le fonctionnement ne permet pas
d’atteindre l’équilibre économique
..................................................................
34
3.3.1
Un site ne disposant p
as, jusqu’en mars 2024, de l’agrément
sanitaire obligatoire
.................................................................................
35
3.3.2
Un procédé industriel ne garantissant ni des biodéchets de bonne
qualité, ni un fonctionnement optimal de l’unité
....................................
36
3.3.3
Une production d’énergie ne permettant pas d’atteindre l’équilibre
économique
.............................................................................................
38
4
DES CHOIX STRATÉGIQUES CONTRAINTS PAR UN NIVEAU
D’ENDETTEMENT ÉLEVÉ
.................................................................................
41
4.1
Des options stratégiques contraintes par le niveau de la dette du Sydeme
......
41
4.2
Une connaissance des surcoûts à affiner par une revue des dépenses
..............
42
4.2.1
Un préalable : améliorer la connaissance du coût des activités
..............
43
4.2.2
Réduire les surcoûts des équipements liés aux biodéchets
.....................
44
4.2.2.1
Envisager l’aban
don du système multiflux
............................................................
44
4.2.2.2
Optimiser le fonctionnement de Méthavalor
..........................................................
44
4.2.3
Mener une revue des dépenses
................................................................
46
ANNEXES
......................................................................................................................
47
Annexe n° 1.
Liste des établissements membres du Sydeme et leur
population
.........................................................................................................
48
Annexe n° 2.
Territoire et répartition des compétences entre le Sydeme et
ses membres
.....................................................................................................
49
Annexe n° 3.
Répartition des activités entre le Sydeme et ses prestataires
..........
50
Annexe n° 4. Erreurs comptables affectant les comptes ouverts au 1
er
janvier
2019
..................................................................................................................
51
Annexe n° 5. Hypothèses retenues s’agissant du retraitement de l’actif
...............
55
Annexe n° 6. La complexité du calcul des contributions des membres
.................
56
Annexe n° 7. Un régime juridique et financier à clarifier
......................................
57
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
4
SYNTHÈSE
Le Sydeme assure le transport et le traitement des déchets ménagers d’un territoire de
plus de 360 000 habitants allant du Bouzonvillois au « Bitcherland ». Syndicat mixte « fermé »
créé en 1998, il est composé de dix établissements publics de coopération intercommunale
(EPCI) membres
1
, regroupant près de 300 communes.
Ces établissements ont décidé de transférer au syndicat le volet transport et traitement
du service public de la gestion des déchets, tout en conservant la collecte. En 2022, il a traité
près de 178 000 tonnes de déchets, toutes catégories confondues.
Une situation financière
en voie d’amélioration mais qui reste fragile
Jusqu’en
2019, le déficit du syndicat a été largement sous-estimé par divers artifices
comptables.
À la clôture de l’exercice 2018, il s’élevait
, dans les comptes,
à 3 M€ alors qu’il
était en réalité de plus de 20 M€.
Afin de rétablir l’équilibre budgétaire, le p
réfet de la Moselle a arrêté le budget du
syndicat entre 2020 et 2022 en prévoyant une hausse des contributions des membres. Cette
mesure, conjuguée à une maîtrise des charges et à une décision ministérielle récente majorant
son résultat de 9 M€ par un jeu
d’écritures comptables, lui a permis fin 2023 de résorber son
déficit d’exploitation.
Le Sydeme reste cependant très endetté : il a dû souscrire des emprunts à long terme
pour rembourser ses dettes auprès de ses fournisseurs. Cet endettement obère ses possibilités
de renouveler ses équipements.
Des surcoûts de près de 50 € par an et par habitant
Sur le territoire du Sydeme, le coût de gestion des déchets est supérieur de près de 50
par an et par habitant à la moyenne régionale (93
€). Ce surcoût s’exp
lique notamment par les
choix qu’il a effectués au début des années 2010 en s’appuyant sur deux systèmes
complémentaires
: le système multiflux et l’unité de méthanisation «
Méthavalor ».
Le système multiflux permet aux usagers de déposer dans un même bac plusieurs types
de déchets contenus dans des sacs de couleurs différentes. Les sacs sont ensuite séparés par un
procédé de reconnaissance optique.
Ce système génère un surcoût estimé par la chambre à 9 €
par an et par habitant et occasionne un tri de très mauvaise qualité.
L
’unité de méthanisation des biodéchets
,
générant un surcoût de 11 € par an et par
habitant, pourrait être mieux exploitée. Après retrait des indésirables, la valorisation de la
matière organ
ique s’élève à seulement 13
kg par an par habitant, alors que selon l’
Agence de
l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe), elle s’élève à 43 kg lorsqu’une collecte
séparée de biodéchets est mise en place.
1
Voir liste des EPCI membres à l’annexe 1.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
5
Un syndicat confronté à des choix stratégiques
sur l’avenir de ses équipements
Les équipements industriels nécessiteront dans un avenir proche des investissements
importants auxquels le syndicat ne pourra pas faire face compte tenu de son niveau
d’endettement. Dès lors, il devra opérer un c
hoix stratégique quant aux équipements à
maintenir.
Le système multiflux est coûteux et peu efficace, ce qui doit inciter le syndicat à
envisager son abandon.
L
’unité de méthanisation est sous
-utilisée, elle traite environ 35 000 tonnes de déchets
mais seulement 27 000 tonnes sont insérées dans les méthaniseurs, compte tenu de la faible
qualité des intrants, alors même
que la capacité totale de l’équipement est de 46
000 tonnes.
Pour optimiser son utilisation, il serait nécessaire de recevoir plus de biodéchets, condition qui
pourrait néanmoins se révéler incompatible avec un abandon du multiflux. Au surplus, les
perspectives d’apports en provenance de l’extérieur du territoire du Sydeme sont limitées.
Source : Ademe, Sydeme, retraitement CRC Grand Est
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
6
RAPPELS DU DROIT ET RECOMMANDATIONS
Rappel du droit n° 1 :
Procéder à l’amortissement des immobilisations conformément aux
règles définies dans le recueil des normes comptables pour les entités publiques locales.
Recommandation n° 1.
: Fiabiliser la comptabilité analytique, élaborer des outils de restitution
de l’information et les utiliser pour fonder les choix de gestion.
Recommandation n° 2.
: Se doter d’outils fiables de pilotage de l’unité de méthanisation
permettant d’identifier la quantité de gaz produite et ses débouchés.
Recommandation n° 3.
: Mener une revue des dépenses pour évaluer précisément le coût et
l’apport de chaque activité au service rendu aux membres et usagers.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
7
PROCÉDURE
Le contrôle des comptes et de la gestion du Sydeme (syndicat mixte de transport et de
traitement des déchets ménagers de Moselle-Est), inscrit au programme de la chambre régionale
des comptes Grand Est, a porté sur les exercices 2019 à nos jours.
Le 25 août 2023, des lettres
d’
ouverture de contrôle ont été adressées au président actuel
de l’établissement ainsi qu’à son prédécesseur.
Les entretiens précédant les observations provisoires, prévus par l'article L. 243-1 du
code des juridictions financières (CJF), se sont tenus le 17 janvier 2024 avec le président actuel
et son prédécesseur.
Le 26 octobre 2023, des experts en méthanisation de
l’université de Lorraine ont été
désignés par le président de la chambre pour assister cette dernière
, en application de l’article
L. 241-6 du CJF. Après avoir remis un rapport, ils ont été entendus par la chambre au cours
d’une audition, avant que celle
-
ci n’arrête ses observations provisoires le 19
février 2024. Elles
ont été communiquées
à l’ordonnateur actuel
ainsi qu’au précédent le 1
1 avril 2024. Des extraits
de ces observations ont également été transmis à des tiers mis en cause.
Après examen des réponses reçues et audition
d’un tiers mis en cause
, la chambre a
arrêté ses observations définitives lors de son délibéré du 13 juin 2024.
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
8
INTRODUCTION
Le Sydeme, syndicat mixte « fermé »
2
créé en 1998, est composé de dix établissements
publics de coopération intercommunale (EPCI) membres
3
, dont neuf situés
à l’est du
département de la Moselle et un en Alsace et regroupant plus de 360 000 habitants, répartis
dans près de 300 communes.
Ces établissements ont décidé de transférer au syndicat le volet transport et traitement
du service public de la gestion des déchets
4
, tout en conservant la collecte. En 2022, il a traité
près de 178 000 tonnes de déchets, toutes catégories confondues.
Le budget de l’établissement était chroniquement en déséquilibre au
cours de la période
sous revue. Aussi, conformément aux dispositions législatives en matière de contrôle
budgétaire, la chambre, saisie par le préfet de la Moselle, a proposé à ce dernier un plan de
redressement visant à rétablir l’équilibre du budget du
syndicat
5
basé sur une augmentation de
la contribution des membres. En maîtrisant ses dépenses et en augmentant ses recettes, le
syndicat est parvenu en 2023 à résorber son déficit d’exploitation.
La chambre s’est d’abord intéressée aux missions du syndic
at et à sa gouvernance
(partie
1). Elle a ensuite analysé l’évolution de la situation financière du syndicat entre 2019
et
2023 : malgré la résorption du déficit, la structure financière demeure très fragile et marquée
par un endettement trop important (partie 2). La gestion des déchets sur son territoire se
caractérise par un surcoût annuel estimé par la chambre à près de 50 € par habitant (partie 3).
Confronté au renouvellement de ses investissements, le syndicat est face à des choix
stratégiques : il ne
pourra pas maintenir l’intégralité de son parc d’équipements et devra
mener
une revue de ses dépenses en évaluant pour chaque activité leur coût et leur apport en matière
de service rendu aux membres et usagers (partie 4).
2
Article L. 5711-1 et suivants du code général des collectivités territoriales (CGCT). Un syndicat mixte
fermé est un « établissement public de coopération locale » soumis aux dispositions des articles L. 5211-1 à
L. 5211-63 (dispositions communes aux EPCI) et L. 5212-1 à L. 5212-34 (syndicats de communes).
3
Voir liste des EPCI membres à l’annexe 1.
4
Article L. 2224-13 du CGCT : les EPCI peuvent transférer
« à un syndicat mixte soit l'ensemble de la
compétence de collecte et de traitement […], soit la pa
rtie de cette compétence comprenant le traitement, ainsi
que les opérations de transport qui s'y rapportent. Les opérations de transport, de transit ou de regroupement qui
se situent à la jonction de la collecte et du traitement peuvent être intégrées à l'une ou l'autre de ces deux
missions »
. Un transfert partiel du traitement est en revanche prohibé (CE, 5 avril 2019,
Communauté de communes
du pays de Fayence
, n° 418906).
5
Les avis formulés par la chambre à la suite des saisines préfectorales sont consultables sur
www.ccomptes.fr/fr/crc-grand-est
.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
9
1
UN SYNDICAT QUI ASSURE LE TRANSPORT ET LE
TRAITEMENT
DES
DÉCHETS
DE
PLUS
DE
360 000 HABITANTS
Comme le précisent ses statuts, dont la dernière modification date de 2017, le Sydeme
est compétent pour le transport et le traitement des déchets ménagers et assimilés de ses
membres
6
. Il peut, en outre, traiter les déchets ménagers de collectivités non membres par
simple convention.
Le syndicat est propriétaire de différents équipements : une flotte de camions au gaz,
des centres de transfert pour assurer un regroupement des déchets collectés, des centres dits
« multiflux » séparant les déchets par catégorie, une usine de fabrication de sacs adaptés à ces
centres, ainsi que deux équipements de méthanisation : Méthavos (traitant des « déchets verts »,
c’est
-à-dire uniquement des biodéchets de jardin tels que des tontes, des feuilles mortes etc.) et
Méthavalor (traitant toutes sortes de biodéchets, c’est
-à-dire des déchets de jardin et de cuisine
tels que des restes de repas ou des épluchures). La méthanisation est un procédé biologique de
fermentation permettant de transformer de la matière organique (biodéchets) en énergie (biogaz
et électricité produite à partir de ce gaz) et en fertilisant (digestat).
Le projet d’installation d’un méthaniseur a été initié en 2005, celui d’un tri mult
iflux
l’année suivante. La collecte basée sur ce procédé a débuté en 2009 et Méthavalor a été mis en
service en 2011. Si ses installations ont permis au syndicat d’obtenir de nombreuses
distinctions
7
en 2013 et 2014 du fait de leur caractère innovant, les subventions reçues pour les
financer ont toutefois été assez faibles (environ 8
% de l’actif
8
).
Le système multiflux permet aux usagers de déposer dans un même bac de collecte
plusieurs types de déchets contenus dans des sacs de couleurs différentes (orange pour les
recyclables, vert pour les biodéchets et bleu pour les ordures ménagères résiduelles). Les sacs
sont séparés par un procédé de reconnaissance optique en vue de leur acheminement vers les
sites de traitement appropriés. Ce procédé a récemment connu des évolutions puisque les
emballages contenus dans les sacs orange ont été retirés du multiflux et font désormais l’objet
d’une collecte dissociée. Seuls les déchets résiduels (sac bleu) et les biodéchets (sac vert)
continuent à être collectés simultanément.
6
Voir le schéma de répartition des compétences entre le Sydeme et ses membres à l’annexe 2.
7
Lauréat des prix « Énergies citoyennes 2013 », « Inova 2013 », « VKU 2013 » dans la catégorie
innovation avec un partenaire allemand, « Trophées de l'économie circulaire 2014 ».
8
Les subventions d’investissement inscrites aux comptes 131 s’élèvent à 8,7 M€ pour un actif immobilisé
brut de 103,7
M€.
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
10
1.1
Des compétences en grande partie externalisées
1.1.1
Un traitement des déchets majoritairement externalisé
Le Sydeme exerce la compétence traitement soit avec ses propres moyens humains et
techniques, soit grâce à des prestataires titulaires de marchés publics (
cf
. annexe n° 3).
Le syndicat, qui possédait son propre centre de tri des recyclables à Saint-
Avold jusqu’en 2019,
a ensuite confié cette activité à un centre privé dans les Vosges. En 2022, le coût de cette
prestation s’élevait à près de 5
M€. L’externalisation résulte de la constatation d’une qualité de
tri très dégradée ainsi que de la vétusté du centre de tri nécessitant de lourds travaux
d’investissement.
Durant cette même année, le Sydeme y a acheminé 23 000 tonnes de déchets
recyclables. Les autres déchets triés dans les déchetteries (meubles, électroménager, etc.) sont
valorisés par différents prestataires.
Les déchets résiduels (c’est
-à-dire ceux qui ne sont pas des emballages ou des
biodéchets) et les déchets « tout-venant » en provenance des déchetteries sont majoritairement
incinérés en Allemagne par un partenaire public ou enfouis sur un site mosellan par un autre
prestataire. En 2022, plus de 92 000 tonnes ont ainsi été traitées (y compris les déchets
inexploitables de la méthanisation).
Les biodéchets sont traités dans les méthaniseurs du syndicat, qui revend
l’énergie
produite (gaz et électricité). Les 37 000 tonnes ainsi valorisées en 2022 proviennent des
membres, mais également des partenaires et clients du Sydeme. Du fait de la faible qualité des
déchets entrant sur le site, plus de 12 000
tonnes s’avèrent inexploitables
et sont donc éliminées
par incinération ou enfouissement.
Si le Sydeme a reçu, en 2022, 178 000 tonnes de déchets de ses membres, il ne traite
lui-même dans ses installations que 27 000 tonnes
9
de biodéchets considérés comme
exploitables
, c’est
-à-dire méthanisables ou compostables, environ 20 000 tonnes de déchets
verts et, enfin, 4 000 tonnes de cartons collectées dans les déchetteries.
Le Sydeme ajoute qu’il
prépare le traitement de 10 000 tonnes de bois en effectuant un broyage.
9
En pro
venance de ses membres et d’autres opérateurs (notamment son partenaire allemand).
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
11
Graphique n° 1 :
Déchets traités par le Sydeme en 2022 en provenance de ses membres (en tonnes)
Source :
rapport d’activité
2021-2022. Les emballages, papiers et cartons comprennent les 4 000 tonnes
de cartons collectées en déchetterie et traitées de façon distincte des autres déchets de cette catégorie.
1.1.2
Une activité de transport en partie externalisée
Pour le volet transport des déchets, le Sydeme exerce une partie des activités avec son
équipe de chauffeurs et sa flotte de tracteurs routiers au GNV
10
. Cette flotte a été renouvelée
avec l’achat de
douze
tracteurs pour un montant d’environ
1,6
M€ auprès de la centrale d’achat
UGAP.
Une autre partie de
l’activité de transport des déchets reste toutefois externalisée.
Au
total, pour l’année 2022, l’activité transport a coûté 4,4 M€
11
dont environ 45 % réglés à un
prestataire.
1.1.3
Une coopération avec une structure publique allemande à sécuriser
juridiquement
Le droit de l’Union européenne applicable en matière de commande publique permet
aux pouvoirs adjudicateurs tels que le Sydeme, de conclure entre eux, sans publicité ni mise en
concurrence, un marché public de coopération
« dans le but de garantir que les services publics
dont ils ont la responsabilité sont réalisés en vue d'atteindre les objectifs qu'ils ont en
10
Gaz naturel pour véhicules.
11
Charges de l’exercice 2022 affectées aux activités suivantes
: centre de réparation, coût des bennes,
centre de transfert, coût des porteurs, semi-remorque, super poids lourd, transport.
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
12
commun »
12
. D’origine jurisprudentielle et européenne
13
, cette possibilité, dénommée
« coopération public-public », a été pérennisée et précisée par une directive européenne de
2014
14
puis transposée en droit français.
Cette dérogation nécessite cependant de réunir deux conditions cumulatives :
-
la mise en œuvre de la coopération n'obéit qu'à des considérations d'intérêt général
;
-
les pouvoirs adjudicateurs concernés réalisent sur le marché concurrentiel moins de 20 %
des activités concernées par cette coopération
15
.
Le Sydeme a conclu, en 2011, une convention d’échanges de flux de déchets avec
l’Entsorgungsverband Saar (EVS), structure située en Allem
agne à quelques kilomètres
seulement du siège du syndicat. Cette convention, qualifiable de marché public
16
et prolongée
par avenants successifs modifiant certaines conditions d’exécution, s’applique actuellement
jusqu’au 31 décembre 2024. Dans ce cadre, le
Sydeme transporte des déchets résiduels en vue
de leur incinération dans une unité de valorisation énergétique de l’EVS. En échange,
l’homologue allemand s’engage à confier des biodéchets des ménages
au Sydeme.
Sur la forme, la convention, qui se fonde sur la jurisprudence européenne de 2009 en
ayant institué le principe, mérite une refonte pour faire référence au nouveau cadre juridique
applicable tant en France qu’en Allemagne (code de la commande publique pour le Sydeme).
Sur le fond, le premier critèr
e lié à l’intérêt général est satisfait (ex : rationalisation
d’équipements publics, territoires limitrophes, réduction de l’impact environnemental, tarifs
attractifs). En revanche, la lecture de la convention ne permet pas de s’assurer de la satisfaction
du second critère impliquant une limitation des activités concernées sur le marché concurrentiel
(possibilité d’aller jusqu’à un seuil de 20 %).
L’analyse de l’activité de Méthavalor sur la période 2019
-2022 démontre que ce seuil
est très légèrement dépassé (25 % en moyenne des tonnages entrants sur le site proviennent du
marché concurrentiel notamment de la restauration et des grandes surfaces. En 2022, cette part
représente 23
% tant du chiffre d’affaires que des tonnages entrants).
Par conséquent, la cha
mbre invite l’ordonnateur à mettre à jour le cadre de la convention
et à s’assurer de la satisfaction des critères réglementaires avant tout renouvellement.
L’ordonnateur précise qu’il envisage une refonte de la convention et une mise en conformité
avec le seuil de 20 %.
12
Article L. 2511-6 du code de la commande publique.
13
CJUE (Cour de justice de l'Union européenne), 9 juin 2009,
Commission c/ Allemagne
,
aff.
C-480/06.
Quatre entités allemandes avaient confié à une autre le
soin d’éliminer des déchets en utilisant une
installation de
valorisation thermique appartenant à cette dernière.
14
Point 4 de l’article 12 de la d
irective 2014/24/UE 26 février 2014 sur la passation des marchés publics.
15
L’article L.
2511-5 du code de la commande publique précise les modalités de calcul du pourcentage
d’activités. Celui
-ci
« est déterminé en prenant en compte le chiffre d'affaires total moyen ou tout autre paramètre
approprié fondé sur les activités, tel que les coûts supportés, au cours des trois exercices comptables précédant
l'attribution du marché public. Lorsque ces éléments ne sont pas disponibles ou ne sont plus pertinents, le
pourcentage d'activités est déterminé sur la base d'une estimation réaliste »
.
16
Elle répond en effet aux besoins des deux entités moyennant rémunération.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
13
1.2
Une participation des délégués au comité syndical en diminution et une
information délivrée au comité syndical à compléter
Le comité syndical, organe délibérant du Sydeme, compte 55 représentants élus dans
les dix intercommunalités membres, dont le président et un vice-président
17
. Le rôle de cet
organe est de fixer, par l’expression de la volonté collective des
membres, les modalités
d’organisation du service public des déchets incombant au syndicat.
Entre septembre 2020 et septembre 2023
, le comité s’est réuni à 17 reprises
18
. Le taux
de présence moyen des délégués est de 61 %, passant de 82 % au début de la période à 52 % à
l’occasion de la réunion de septembre 2023. Les délégués les plus assidus sont ceux de la
communauté de communes de Freyming-Merlebach (CCFM) avec 72 % de taux de présence,
suivis par ceux de la
communauté d’agglomération de Sarreguemines Confluences
(CASC)
avec 67 %. À
l’inverse, les moins présents sont ceux de la c
ommunauté de communes
Bouzonvillois-Trois frontières (CCB3F) (33 %) et de la c
ommunauté d’agglomération de
Saint-Avold Synergie (CASAS) (32 %). Les deux délégués de la CASAS
n’ont assisté à
aucune
réunion du comité durant la période sous revue.
La chambre observe que l’information délivrée à l’organe délibéra
nt présente parfois
certaines lacunes. Les documents financiers de 2018, soumis
par l’ancien ordonnateur au
comité syndical et adoptés par ce dernier en avril 2019, ne donnaient pas une image fidèle des
résultats du syndicat (
cf. infra
). Par ailleurs, les
rapports d’activité
19
des années 2020, 2021 et
2022, qui respectent les contenus réglementaires
20
, ont été présentés avec retard
21
, avant d’être
transmis aux membres par voie dématérialisée et publiés sur le site internet du syndicat.
À la suite notamment de l’externalisation du tri des emballages, les effectifs sont passés
de 203 agents en 2019 à 158 en 2022
22
. Ils se stabilisent depuis 2020, et se répartissent en six
pôles, dont 23 % pour la méthanisation, 20 % pour le pôle « filières / observatoire territorial »,
20
% pour l’administration et 1
8 % pour le transport. Ni le budget, ni le compte administratif
du syndicat ne reprennent l’effectif total dans leurs annexes
23
. Néanmoins, ces données sont
disponibles dans le rapport d’activité.
17
À la suite
d’une
démission
, il n’y a plus qu’un vice
-président depuis le 30 juin 2023, au lieu de deux
auparavant.
18
Respectant ainsi la fréquence légale fixée à l’article L.
5211-11 du CGCT :
«
l'organe délibérant […]
se réunit au moins […] pour les syndicats formés en vue d'une seule œuvre […] une fois par semestre
»
.
19
En application des articles L. 5211-39 et L. 2224-17-1 du CGCT, le Sydeme est tenu de présenter un
rapport sur ses activités et un rapport sur le prix et la qualité du service de la gestion des déchets. Néanmoins, en
vertu de l’article D.
2224-2, le contenu du second rapport est intégré dans le premier, qui doit être transmis aux
membres, avec le compte administratif, avant le 30
septembre de l’année N+1.
20
Contenu minimal figurant à l’annexe XIII précitée. Le rapport mériterait d’être complété sur les
mesures prises
en matière de santé et d’environnement.
21
Présentés le 7 mars 2022 pour celui de 2020 et le 27 novembre 2023 pour ceux de 2021 et 2022
(fusionnés en un seul document).
22
13 agents publics, 144 agents de droit privé et 1 apprenti. Comme le précise le rapport d’activité pour
2021-2022 :
« le statut de droit privé est largement prépondérant e
n raison de l’historique du Sydeme et de ses
régies [depuis lors dissoutes] »
.
23
Ces documents financiers ne recensent que les agents de droit public puisque la nomenclature
réglementaire ne permet pas de renseigner
l’effectif de droit privé
. En effet, les
parties C1.1 et C1.2 de l’instruction
budgétaire et comptable M4, appliquée par le Sydeme, permettent uniquement d’indiquer les effectifs relevant du
droit de la fonction publique et les agents d’un établissement de rattachement employés par une régie.
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
14
2
UNE SITUATION FINANCIÈ
RE EN VOIE D’AM
ÉLIORATION
MAIS QUI RESTE FRAGILE
Jusqu’en 2019, l’organisation juridique et financière du Sydeme intégrait trois régies
avec autonomie financière. Il était alors établi quatre budgets et états financiers avec de
nombreuses opérations intra-budgétaires rendant peu lisible leur interprétation. Depuis la
dissolution des régies, le syndicat établit un seul budget et un seul jeu d’états financiers suivant
l’instruction budgétaire et comptable M4.
De nombreuses erreurs comptables ont affecté les comptes du Sydeme et ont conduit la
chambre à effectuer un retraitement des données comptables avant de les analyser (2.1). Depuis
2020
, le déficit d’exploitation est en recul pour finalement se résorber à fin 2023 (2.2)
.
Toutefois, la structure financière reste fragile (2.3).
2.1
Des erreurs comptables et un changement de régime fiscal
2.1.1
Jusqu’en 2019, un déficit dissimulé par de multiples erreurs comptables
La gravité de la situation financière a été largement sous-estimée par le Sydeme
jusqu’à
l’exercice 2019. Certaines irrégularités comptables ont permis de masquer le déficit réel du
syndicat si bien que ses comptes ne donnaient pas une image fidèle de son patrimoine, de ses
résultats ainsi que de sa situation financière.
Lors du changement de gouvernance, en 2019, un audit financier réalisé par le syndicat
a évalué le montant des erreurs comptables à 19,5
M€. La chambre évalue pour sa part leur
montant à 17,3
M€
24
.
Ces erreurs comptables, qui portent sur des majorations de produits et des minorations
de charges, sont présentées de manière synthétique dans le tableau qui suit et dans le détail en
annexe 4.
24
La différence entre l’estimation du syndicat (19,5 M€) et de la chambre (17,3 M€) s’explique
notamment par une divergence d’appréciation sur le montant des charges non rattachées et des produits rattachés
à tort.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
15
Tableau n° 1 :
Erreurs comptables affectant les comptes ouverts au 1
er
janvier 2019 (en
M€)
Erreurs comptables observées
Montant
Majoration de produits
Inscription irrégulière d’un produit lié au crédit compétitivité emploi sans dépréciation de la
créance.
1
Rattachement de produits non justifiés liés à des contributions aux membres non délibérées
1,3
Minoration de charges
Absence de rattachement des charges liées à des reversements de soutiens et de ventes de
recyclage aux membres
8,7
Inscription irrégulière de charges constatées d’avance
3,3
Absence de dépréciation des actifs financiers liés à une société d'économie mixte (SEM) en
difficulté
1,4
Inscription d’engagement
s hors bilan en lieu et place de dettes
1
Absence de comptabilisation des dettes de congés payés
0,7
Total
17,3
Source : estimation CRC, détail en annexe 4. Les montants sont arrondis entraînant une légère différence entre
le total et la somme des erreurs comptables relevées.
À la clôture de l’exercice 2018, le déficit d’exploitation du Sydeme (y compris celui de
ses régies dissoutes en 2020) s’élevait à 20
M€, alors même qu’il n’était que de 3
M€ dans ses
comptes. Les erreurs comptables ont permis de dissimuler la gravité de la situation financière.
Elles ont également
nui à l’information du comité syndical et des services de l’État et ont pu
occasionner un retard dans la mise en œuvre de solutions permettant de rétablir l’équilibre.
Graphique n° 2 :
Comparaison du déficit cumulé constaté par le Sydeme et corrigé par la chambre
(en M€)
Source : états financiers du Sydeme au 31 décembre et corrections de la chambre. Pour les exercices 2018 et 2019
le déficit du syndicat a été agrégé avec ceux des trois régies.
- 3
- 19
- 16
- 12
- 12
- 20
- 22
- 19
- 18
- 13
- 25
- 20
- 15
- 10
- 5
0
2018
2019
2020
2021
2022
Déficit inscrit dans les états financiers
Déficit corrigé par la chambre
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
16
Entre 2020 et 2022, de nouvelles erreurs comptables, corrigées depuis lors, ont été
commises et relevées par la chambre dans ses avis budgétaires successifs. La plus importante
concerne l’inscription irrégulière d’un produit de 5,9
M€
25
en 2021. Au 31 décembre 2022,
seule une erreur mineure de rattachement a été relevée, réduisant à tort les charges de 523 600
€.
Le s
yndicat a néanmoins corrigé cette erreur au cours de l’exercice 2023.
La fiabilité des
comptes de l’exercice 2023 n’a pas pu être contrôlée
par la chambre compte tenu de la date de
fin d’instruction du présent contrôle.
2.1.2
Un actif surestimé devant être fiabilisé pour obtenir une image fidèle du
patrimoine
Le
Sydeme
a
investi
dans
plusieurs
équipements
industriels
(
cf.
supra
).
Au 31 décembre 2022, la valeur nette comptable des immobilisations figurant au bilan du
compte de gestion tenu par le comptable public
s’élève à 60,1
M€
26
(pour une valeur brute de
103,7 M
€),
dont 60 % liés à la méthanisation.
Suivant la norme 6 du recueil des normes comptables pour les entités publiques locales,
une immobilisation corporelle doit faire l’objet d’un amortissement traduis
ant le rythme de
consommation des avantages économiques ou du potentiel de service rendu, ce rythme
correspond à la durée d’utilisation estimée. En outre, l’amortissement commence à la date de
début de consommation des avantages économiques ou du potentiel de service qui lui sont
attachés.
La valeur
27
de cet actif présente diverses irrégularités. D'une part, certaines durées
d'amortissement sont supérieures à la durée d’utilisation des immobilisations estimée par la
chambre, comme par exemple 50 ans pour un centre de tri multiflux ou 30 ans pour Méthavalor.
D'autre part, l’amortissement a débuté plusieurs années après la mise en service des
équipements, par exemple en octobre 2017 pour Méthavalor, installation pourtant mise en
service en septembre 2011. Enfin, la valeur nette comptable de 3,3
M€ de l’unité de
méthanisation des déchets verts Méthavos doit être dépréciée dans la mesure où elle est à l’arrêt
depuis novembre 2022, sans perspective proche de remise en service (
cf. infra
). La valeur
actuelle de cette installation peut dès lors être considérée comme nulle.
En conséquence, la chambre estime que la valeur nette comptable de l'actif examiné est
survalorisée pour un montant estimé entre 21 et 27
M€
28
, selon divers scénarios impliquant
25
Le syndicat a conclu des pactes financiers avec la plupart de ses membres. Ces pactes prévoient
l’étalement
, sur quatre années,
du remboursement de dettes liées aux exercices 2016 à 2019. Jusqu’en 2021, ces
dettes figuraient au passif du bilan du syndicat. En 2021, estimant que ces passifs répond
aient à la définition d’un
engagement hors bilan, le syndicat a annulé ces dettes en constatant un produit. La chambre a considéré dans son
avis budgétaire du 22 juin 2022 qu’au regard des définitions d’un produit et d’un passif figurant dans l’instruction
budgétaire et comptable M4, le syndicat avait inscrit ces produits à tort, majorant ainsi artificiellement le résultat
de 5,9
M€.
26
L’état de l’actif du Sydeme, établi à la même date, mentionne quant à lui un montant de 62,2
M€ et de
104,4
M€ pour la val
eur brute.
27
Un examen détaillé d'une partie de ces actifs immobilisés, totalisant 80 % de la valeur nette comptable
totale, a été réalisé par la chambre.
28
Ce montant est calculé sur la base des 50
M€ étudiés et dans l’hypothèse d’une continuité d’exploit
ation
des équipements.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
17
différentes durées d'amortissement pour les équipements de méthanisation (
cf
. annexe 5)
29
. Dès
lors, la chambre invite l’ordonnateur à rapidement fiabiliser la valeur de l’actif
, notamment en
raison de la
volonté affirmée de l’un de ses membres de quitter le syndicat (
cf. infra
).
L
’ordonnateur se dit conscient de la nécessité de fiabiliser la valeur de l’actif et indique étudier
des solutions afin d’y procéder dans les meilleurs délais.
Rappel du droit n° 1 :
Procéder à l’amortissement des immobilisations conformément aux
règles définies dans le recueil des normes comptables pour les entités publiques locales.
2.1.3
Un nouveau régime de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) bénéficiant à la
plupart de ses membres
Jusqu’en 2023, le Sydeme collectait de la TVA sur les prestations effectuées pour ses
membres et sur les contributions financières payées par ces derniers. Cette taxe ainsi collectée
était ensuite versée aux services des impôts, après déduction, par le syndicat, de la TVA payée
à ses
fournisseurs lors de l’achat de biens et services nécessaires à l’exécution de ses missions.
En 2020, un
cabinet d’avocats, conseillant régulièrement le Sydeme, a
constaté que la
pratique fiscale du syndicat en matière de TVA
«
n’était pas en phase avec les dispositions
légales »
et qu’il était possible
«
d’optimiser
le coût de cette TVA »
. Une mission d’optimisation
par l’audit des charges fiscales a alors été commandée à ce cabinet par le syndicat en juin
2020.
La chambre n’a pu obtenir les pièces attestant de
s formalités entreprises pour la passation de ce
marché de services juridiques de représentation légale qui, compte tenu de sa date de passation,
de son objet et de son montant, aurait dû faire l’objet d’une procédure adaptée
pour permettre
à tout candidat de librement soumissionner
30
.
En mai 2021, un rescrit fiscal a été déposé auprès de la direction de la législation fiscale,
laquelle a conclu à l’absence d’imposition à la TVA des contributions financières versées par
les membres. En conséquence, ces contributions auraient dû être réduites du montant de la taxe.
En revanche, le syndicat devait et doit continuer à collecter de la TVA sur les prestations
facturées aux clients externes (par exemple pour le traitement des biodéchets des
professionnels). Il n’aurait donc pas dû déduire l’intégralité de la taxe payée à
ses fournisseurs.
Dans le prolongement de ce
rescrit, l’administration fiscale a vérifié la comptabilité du
syndicat
31
et a conclu que ce dernier était fondé à récupérer le « trop versé
» à l’État. Le
Sydeme
29
La chambre relève également une différence significative (32 %) entre la valeur des dotations aux
amortissements de l’année 2022 figurant à l’état de l’actif (3 014 706 €) et celle inscrite au compte de résultat du
Sydeme (4 457 44
9 €).
30
À la date de passation de ce marché, ces services étaient en effet soumis à une procédure impliquant
des mesures de publicité et de mise en concurrence adaptées (articles R. 2131-1 et R. 2131-8 du code de la
commande publique
dans leur rédaction en vigueur). Ce n’est qu’à compter de début décembre 2020 que ces
marchés ont été soustraits à de telles obligations (loi n° 2020-1525 du 7 décembre 2020 dite « ASAP »
(d’
accélération et de simplification de l'action publique).
31
Selon
l’administration fiscale, certaines dépenses sont hors du champ d’application de la TVA et ne
donnent pas lieu à déduction (les prestations d’enfouissement et d’incinération par exemple), d’autres sont dans le
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
18
a ainsi reçu un crédit de TVA d’un montant de
6,7
M€
, mais a dû rembourser à ses membres la
TVA facturée à tort, soit 14,7
M€
.
Sur la période 2018 à 2023,
la décision de l’administration fiscale
est favorable aux
membres, à l’exception de deux d’entre eux ayant opté pour un régime fiscal différent
32
. Elle
apparaît en revanche défavorable au syndicat car le crédit de TVA reçu (6,7
M€
) est inférieur
au montant reversé aux membres (14,7 M€), augmenté des honoraires du cabinet. Pour
neutraliser cet effet défavorable, le comité syndical a décidé, le 27 novembre 2023, que le
reversement de 14,7
M€ s’accompagnerait d’une «
contribution budgétaire supplémentaire » de
9,6
M€. Le Sydeme précise que des économies supplémentaires
33
ont été réalisées dès 2021
grâce à la réduction du taux de TVA sur les contributions des membres. Aux termes de la
délibération du 27 novembre 2023, le changement de régime fiscal procure à ses membres un
gain global de 5,1
M€. Toutefois,
les deux membres au régime fiscal différent, la CCAB et la
CCB3F,
devront reverser à l’administration fiscale respectivement 924 338 € et 542 866 € de
taxe déduite à tort. En outre, ils verseront au syndicat une contribution d’un montant respectif
de 602 061 € et 353 592 €. La CCAB a demandé au syndicat des informations complémentaires
sur les conséquences de ce nouveau régime fiscal.
Pour cette prestation de services, le Sydeme a évalué à 1
M€ les honoraires du cabinet
d’avocats dans l’attente d’une facture définitive. Néanmoins, l’ordonnateur indique qu’une
«
transaction devrait permettre au Sydeme de réaliser une économie sur la rémunération du
prestataire de 10 % environ
».
Graphique n° 3 :
Gains et pertes (en €) de la régularisation du régime de TVA
suivant la
délibération du 27 novembre 2023
Source : compte rendu du comité syndical du 27 novembre 2023.
Note : les chiffres présentés à cette date ne font pas état des 5
M€ d’économie estimée par le Sydeme.
champ d’application et sont intégralement déductibles (dépenses de la méthanisation), et d’autres sont mixtes (frais
généraux, dépenses de transport) et sont déductibles suivant un coefficient de 70 %.
32
La communauté de communes de l’Alsace bossue
(CCAB) et celle du Bouzonvillois-Trois frontières
(CCB3F) ayant opté pour un régime de TVA leur permettant de déduire et collecter la taxe (assujettissement
optionnel).
33
Ces économies ne sont pas intégrées dans la délibération précitée mais sont estimées à 5
M€ par le
cabinet d’avocats.
1 156 680
900 869
665 046
545 969
477 774
335 527
333 634
309 458
0
-353 592
-602 062
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
19
2.2
Un déficit résorbé en 2023 grâce notamment à une dérogation
comptable
Retraitement des données financières du syndicat
Afin d’analyser des données financières re
mplissant les qualités requises de fiabilité et de
permanence des méthodes, et d’offrir ainsi une image fiabilisée de la situation financière du
Sydeme, la chambre a réalisé plusieurs retraitements comptables.
Jusqu’en 2019, certaines activités du syndica
t étaient portées par trois régies. Aussi, pour maintenir
un périmètre d’analyse constant, les états financiers du syndicat et de ses trois régies ont été
agrégés pour l’exercice 2019. Les
1 700 opérations réciproques identifiées pour un montant total
de 21,8
M€ ont été éliminées, elles réduisent les charges et produits pour un montant identique et
sont donc sans conséquence sur le résultat comptable.
Les conséquences sur les principaux indicateurs des retraitements opérés par la chambre sont les
suivantes :
M€
2019
2020
2021
2022
2023(P)
Impact sur la CAF (
capacité d’autofinancement)
+ 10,7
- 0,6
- 2,6
+ 5,9
+ 0,5
Impact sur le résultat
+14
- 0,6
- 2,6
+ 5,9
+ 0,5
Impact sur les ressources propres élargies
- 3,3
- 3,9
- 6,5
- 0,5
0
Pour l’exercice
2023, l
a fiabilité des comptes n’a pas pu être contrôlée par la chambre compte tenu
de la date de fin d’instruction.
Les retraitements (0,5 M€) portent uniquement sur une erreur de
rattachement commise en 2022 et corrigée en 2023.
En revanche, ces données
n’ont pas été retraitées des erreurs affectant la valeur de l’actif
immobilisé, puisque les constats de la chambre sont fondés sur un échantillon d’immobilisations
et ne sont pas exhaustifs (
cf. supra
).
La réduction du déficit ayant conduit à la mise en place d’un plan de redressement
pluriannuel a été la priorité du syndicat au cours de la période sous revue. Entre 2020 (premier
exercice au cours duquel il a réalisé un bénéfice) et 2022, le syndicat a réduit son déficit de
9,3
M€, soit près de la moitié du déficit d’exploitation constaté début 2020.
En 2023, la ministre chargée des collectivités territoriales et de la ruralité a autorisé, sur
le fondement de l’instruction
34
budgétaire et comptable M4, l’étalement d’une charge de 10
M€
sur une période de 10 années. Cette décision, sans effet sur la trésorerie du Sydeme, permet par
un jeu d’écritures comptables d’augmenter les produits de l’exercice 2023 de 10 M€ qui seront
néanmoins repris progressivement v
ia une charge annuelle de 1 M€ entre 2023 et 2032. Elle
permet d’accroître temporairement le résultat de la section d’exploitation au détriment de la
34
« Compte 4818 - Charges à étaler : le compte 4818 « Charges à étaler » ne peut être utilisé que sur
autorisation conjointe des ministres chargés du budget et des collectivités locales ».
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
20
section d’investissement
,
dérogeant de fait au principe de l’équilibre réel posé par l’article
L. 1612-4 du CGCT.
Le
résultat de l’exercice 2023 s’établit à 16,5
M€
35
, dont 9
M€
sont liés à cette opération
comptable. Ce bénéfice permet de résorber l’intégralité du déficit accumulé
et
d’afficher un
excédent cumulé d’exploitation de près de 4 M€
36
.
2.2.1
Des produits en hausse
Tableau n° 2 :
Produits d’exploitation
En M€
2019
2020
2021
2022
2023(P)
Total des produits d'exploitation (hors reprises)
42,3
39,2
47,8
49,2
56
dont versés par les membres
31,6
34,4
35,8
38,6
ND
dont ventes d'énergie
2,4
1,9
1,5
1,7
ND
dont soutiens reçus ou à recevoir
4,1
2,9
7,3
6,1
ND
dont ventes à des tiers autres que les membres
1,6
1,8
1,8
2,1
ND
Source : comptes du Sydeme retraités par la chambre.
Les
données détaillées n’ont pas pu être obtenues pour
l’exercice 2023 en raison de la date de clôture de l’instruction du contrôle.
Les produits du syndicat se sont très largement accrus entre 2019 et 2023. Les ventes
d’énergie procurées par les installation
s de méthanisation et de panneaux solaires sont
marginales (environ 5 %), elles augmentent en 2022 sous l’effet
de la hausse des prix de
l’énergie.
La hausse des cours des matériaux explique en partie l’accroissement du montant des
soutiens des éco-organismes
37
et des ventes de produits recyclés. En outre, ont été inscrits, sur
le seul exercice 2021, les soldes des reversements des années 2020 et 2021. Néanmoins, ces
produits ont vocation à être reversés aux membres.
Les prestations réalisées pour des tiers, telles que le traitement des biodéchets en
provenance d’industriels de l’agroalimentaire ou du partenaire allemand, sont stables, aux
alentours de 2
M€. Les versements des membres sont de loin la principale composante des
produits d’exploitation, ils
représentent près de 80 % du total.
Le syndicat a augmenté les contributions de ses membres en adoptant notamment des
contributions supplémentaires à l’habitant (
5,875
€ par habitant
) et des augmentations de la
35
En tenant compte d’une erreur comptable (0,5 M€) commise en 2022 et corrigée en
2023.
36
Somme du déficit cumulé à fin 2022 (-
13 M€) et de l’excédent de l’exercice 2023 (+ 16,5 M€). Par un
avis budgétaire du 13 juin 2024, postérieur à la clôture de l’instruction du contrôle des comptes et de la gestion, la
chambre a relevé une erreur comptable de 700
000 €. Elle a néanmoins constaté le rétablissement de l’équilibre
budgétaire du syndicat et a déclaré close la procédure engagée par le préfet en 2021 au titre de l’article L.
1612-14
du CGCT.
37
« Les éco-organismes récoltent les éco-contributions auprès des producteurs et les redistribuent aux
collectivités territoriales ou à d'autres opérateurs qui assurent la collecte et le tri de ces déchets, dès lors que ces
collectivités ou ces opérateurs en font la demande »
,
www.ecologie.gouv.fr
.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
21
grille tarifaire. Les contributions et participations versées par les membres ont augmenté de
22
% en quatre années. Sur cette période, l’inflation (7
%) est nettement inférieure à cette
augmentation. Cette hausse importante a conduit certains membres à accroître leur taux de taxe
d’enlèvement des ordures ménagères ou leur tarif de redevance d’enlèvement des ordures
ménagères. Elle était cependant indispensable au rétablissement de l’équilibre budgétaire du
syndicat.
La chambre a constaté que pour déterminer le montant des contributions des membres,
le syndicat utilise un modèle compliqué mêlant part forfaitaire et grille tarifaire et reposant sur
un système dont le coût est évalué à 100 000
€ par le syndicat (
cf
. annexe 6). Elle invite dès lors
l’ordonnateur à mettre en œuvre un système de facturation
moins onéreux. Le Sydeme envisage
la mise en place d’une contribution unique à compter de l’exercice 2025
, ce qui entraînerait une
modification de ses statuts. Compte tenu de la typologie des ressources du syndicat, la question
des contributions renvoie plus largement au régime juridique et financier du syndicat, lequel
aurait intérêt à être clarifié (
cf
. annexe 7).
2.2.2
Des charges dont l’augmentation est maîtrisée
Tableau n° 3 :
Charges d’exploitation
En M€
2019
2020
2021
2022
2023(P)
Total des charges d'exploitation (hors dotations)
34,6
34,2
40
37,9
36,4
dont consommations intermédiaires
21,6
22,1
22,7
23,6
ND
dont charges de personnel
9,9
9
7,3
7,2
ND
dont reversements aux membres des soutiens reçus
2,6
2,7
6,8
4,9
ND
Source : comptes du Sydeme retraités par la chambre
Entre 2019 et 2022, les charges d’exploitation sont maîtrisées. La principale variation
concerne les reversements aux membres des soutiens reçus, liée à la hausse des produits de
même nature (
cf. supra
). Les charges de personnel diminuent de près de 30 % à la suite de
l’externalisation du tri des recyclables avec une hausse des charges de sous
-traitance
(consommations intermédiaires) contenue (9 %),
proche de l’inflation (7 %). En 2023, les
charges d’exploitation poursuivent leur tendance baissière.
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
22
2.2.3
Une capacité d’autofinancement (CAF) en nette augmentation
Tableau n° 4 :
De l’excédent brut d’exploitation au résultat
En M€
2019
2020
2021
2022
2023(P)
Excédent brut d'exploitation
7,7
5
7,8
11,3
19,6
+/- Résultat financier
- 2,7
- 2,3
- 2
- 2
- 2,2
+/- Résultat exceptionnel (réel, hors cessions)
- 2,3
2,9
- 0,6
- 0,7
- 6,3
= CAF brute
2,8
5,6
5,2
8,6
11,1
Transfert de charges (décision ministérielle)
10
+/- Autres produits et charges (notamment les
dotations aux amortissements)
- 4,9
- 2,9
- 3,8
- 3,4
- 4,5
= Résultat section d'exploitation
- 2,1
2,8
1,4
5,1
16,5
Source : comptes du Sydeme retraités par la chambre.
La hausse
importante des produits d’exploitation
, conjuguée à une augmentation
modérée des charges d’exploitation
,
accroît l’excédent brut d’exploitation
38
. Les charges
financières se stabilisent autour de 2 M€. La capacité d’autofinancement a été multipliée par
trois. Après imputation des dotations aux amortissements
39
et prise en compte de l’étalement
de charges inscrit en 2023, le syndicat est excédentaire sur les quatre derniers exercices, ce qui
lui permet de résorber son déficit.
38
L’excédent brut d’exploitation représente le flux de trésorerie généré par l’exploitation. À ce titre, il ne
comprend pas, entre autres, les dotations aux amortissements, les charges financières et les produits et charges
exceptionnels.
39
Charges permettant de constater l’usure des investissements.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
23
2.3
Une structure financière qui reste fragile
2.3.1
L’atonie des dépenses d’investissement
Tableau n° 5 :
La capacité de financement
En M€
2019
2020
2021
2022
2023(P)
CAF brute
2,8
5,6
5,2
8,6
11,1
- Annuité en capital de la dette (retraitée des renégociations)
4,2
2
4,1
4,4
4,2
= CAF nette ou disponible (A)
- 1,4
3,6
1,1
4,2
6,9
Recettes d'inv. hors emprunt (B)
0,6
0,1
0,3
0,2
0,3
= Financement propre disponible (A+B)
- 0,8
3,7
1,4
4,4
7,2
- Dépenses d'équipement (y compris travaux en régie)
1,7
0,9
0,8
0,9
2,4
- Autres dépenses
0
1,8
- 0,1
- 0,9
- 0,1
= Capacité de financement
- 2,5
1
0,6
4,5
4,8
Source : comptes du Sydeme retraités par la chambre.
La capacité de financement du syndicat s’améliore et est supérieure à 4
M€ en 2022 et
en 2023 et ce grâce, d’une part, à l’amélioration du résultat créant de nouvelles capacités
d’épargne et, d’autre part, à l’atonie des investissements réduisant les besoi
ns de financement.
Le montant des investissements (6,6
M€) réalisés au cours des
cinq dernières années
représente à peine l’équivalent financier de l’usure
de 18 mois
de l’outil de production
, qui est
par ailleurs sous-estimée (
cf. supra
). À ce rythme, le
parc d’immobilisations d’une valeur brute
de 104
M€ sera renouvelé dans plus de
75 ans, un horizon nettement supérieur à sa durée
d’utilisation. Le syndicat
, confronté à des difficultés financières et un manque de trésorerie, a
été contraint de restreindre ses dépenses aux seuls investissements absolument nécessaires à la
poursuite de l’exploitation industrielle.
2.3.2
Le recours à l’emprunt pour financer le déficit d’exploitation
Tableau n° 6 :
L’encours de dettes
En M€
2019
2020
2021
2022
2023(P)
Encours de dettes au 1
er
janvier
70,7
66,6
64,5
73,9
69,6
- Annuité en capital de la dette
4,2
12,9
4,1
4,4
4,2
+ Nouveaux emprunts
10,8
13,5
1
= Encours de dettes au 31 décembre
66,6
64,5
73,9
69,6
66,3
- Trésorerie nette
- 2,3
- 0,4
7
7,3
15,3
= Encours de dette net de la trésorerie
68,8
64,9
66,9
62,3
51
Capacité de désendettement, en années (dette / CAF
brute)
23,8
11,4
14,2
8,1
6
Source : comptes du Sydeme retraités par la chambre
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
24
Entre 2019 et 2022, le Sydeme
a souscrit des emprunts d’un montant important à deux
reprises : une première fois en 2020, dans le cadre d’une renégociation de sa dette
(10,8
M€),
une seconde fois en 2021 (13,5 M€), pour régler des dettes d’exploitation.
Les emprunts de 2021 ont permis de rembourser des dettes
d’exploitation des années
antérieures et non de financer des investissements. De telles dépenses auraient dû être réglées
grâce à des recettes
d’exploitation
à savoir, comme le prévoient les statuts, les contributions des
membres. Mais le syndicat a estimé que cette solution induirait une augmentation difficilement
soutenable pour ces derniers. Aussi, face au coût élevé des intérêts moratoires dus pour retard
de paiement (il a réglé en 2021 des intérêts de près de 1,3
M€ à l’
un de ses fournisseurs) et au
risque du défaut de paiement (il devait, en 2021, à ce fournisseur plus de 5,4
M€ pour des
prestations réalisées entre 2019 et 2020), il a opté pour une solution permettant le financement
sur le long terme de dépenses de court terme.
Graphique n° 4 :
Estimation de la trésorerie nette de janvier 2020 à janvier 2022 en M€
Source : trésorerie nette : disponibilités diminuées des lignes de trésorerie, données Sydeme retraitées par la CRC.
Avec les emprunts ainsi souscrits au dernier trimestre 2021, le syndicat a remboursé ses
dettes à ses fournisseurs, a soldé ses lignes de trésorerie et a retrouvé un niveau de disponibilités
représentant deux mois de charges d’exploitation.
En outre, sa capacité de désendettement s’est améliorée grâce à l’augme
ntation de sa
CAF. Son encours de dettes (69,6
M€ fin 2022) demeure, toutefois, à un niveau extrêmement
élevé : il est le deuxième syndicat le plus endetté du Grand Est, toutes compétences confondues,
et figure parmi les dix syndicats de gestion des déchets les plus endettés de France
40
.
40
Source : observatoire des finances et de gestion publique locales et Banatic, 2022. Comparaison du
montant de l’encours de dette total (budget principal et budge
ts annexes).
- 6
- 4
- 2
-
2
4
6
8
janv.-20
févr.-20
mars-20
avr.-20
mai-20
juin-20
juil.-20
août-20
sept.-20
oct.-20
nov.-20
déc.-20
janv.-21
févr.-21
mars-21
avr.-21
mai-21
juin-21
juil.-21
août-21
sept.-21
oct.-21
nov.-21
déc.-21
janv.-22
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
25
2.3.3
Un fonds de roulement redevenant positif en 2022
Tableau n° 7 :
Le fonds de roulement net global
E
n M€
2019
2020
2021
2022
2023(P)
Dotations et réserves
- 16,1
- 18,2
- 15,5
- 14,1
- 8,9
+ Résultat
- 2,1
2,8
1,4
5,1
16,5
+ Subventions d'investissement
5,4
5,1
4,7
4,4
4
+ Provisions pour risques et charges
3,7
2,1
1,5
0,7
0,6
= Ressources propres élargies
-
9,1
-
8,2
-
7,9
-
3,9
12,1
+ Dettes financières
66,6
64,5
73,9
69,6
66,3
= Ressources stables (A)
57,5
56,3
66
65,7
78,4
Immobilisations nettes
73,4
69,5
65,3
60,7
58,2
+ Autres actifs
0,3
1,9
1,8
1,5
10,4
= Emplois immobilisés (B)
73,7
71,5
67,1
62,3
68,6
= Fonds de roulement net global (A-B)
-
16,2
-
15,2
-
1
3,4
9,8
Source : comptes du Sydeme retraités par la chambre
Le fonds de roulement
41
s’est nettement amélioré en 2021 et est redevenu positif en
2022. Cette amélioration résulte à la fois de la réduction du déficit et de la souscription
d’emprunts. De même, grâce à l’excédent généré en 2023, les ressources propres so
nt
redevenues positives (à hauteur de 12,1 M€ fin 2023). Toutefois, la valeur de l’actif immobilisé
au bilan (58,2
M€) est inférieure au montant de ses dettes (66,3
M€). De surcroît, comme l’a
précédemment relevé la chambre, la valeur de l’actif est surestimée d’un montant minimum de
20
M€.
La situation financière du Sydeme reste donc fragile, car sa structure financière est
déséquilibrée : le syndicat est très endetté et contraint de sous-investir dans son outil de
production.
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ______________________
J
usqu’en 2019, l’ampleur du déficit du Sydeme a été masquée
par des erreurs
comptables. La fiabilité de ses comptes s’est
depuis très largement améliorée. Il reste
néanmoins un travail conséquent à mener pour fiabiliser la valeur de son actif immobilisé qui
est surestimé d’au moins 20 M€ selon l’estimation de la chambre.
Inscrit dans une trajectoire de redressement mise en place par les services de l’État, le
syndicat a augmenté les contributions de ses membres et parallèlement maîtrisé ses dépenses
dans un contexte inflationniste. Ces efforts, conjugués à une dérogation ministérielle obtenue
en 2023 autorisant l’étalement d’une charge de 10 M€ sur dix ans, lui ont permis de résorber
son déficit d’exploitation en 2023.
41
Le fonds de roulement mesure la couverture des emplois stables (immobilisations) par des ressources
stables (réserves, subventions, emprunts).
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
26
Le Sydeme reste cependant très endetté : il a dû souscrire des emprunts à long terme
pour rembourser ses dettes auprès de ses fournisseurs. Cet endettement obère ses possibilités
de renouveler ses équipements alors même que ceux-ci nécessiteront dans un avenir proche des
investissements importants.
3
UNE GESTION DES DÉCHETS ONÉREUSE EN RAISON
NOTAMMENT DE SOLUTIONS DE TRAITEMENT PEU
PERFORMANTES
La chambre estime que le coût de gestion des déchets sur le territoire du Sydeme est
supérieur de près de 50 € par an et par habitant à la moyenne du Grand Est (3.1.). Ce surcoût
s’explique notamment par le manque d’efficacité économique de deux de ces équipements
: le
système multiflux (3.2) et l’unité de méthanisation, Méthavalor (3
.3).
3.1
Une gestion des déchets plus onéreuse que la moyenne du Grand Est
La chambre a estimé le surcoût moyen annuel de la gestion des déchets sur le territoire
du Sydeme (3.1.1) puis a analysé les coûts de traitement des deux principaux flux de déchets
collectés : les emballages (3.1.2) et les déchets résiduels (3.1.3).
3.1.1
Un coût moyen annuel de gestion des déchets supérieur de près de 50
€ par
habitant par rapport au territoire du Grand Est
Afin d’analyser le coût du service public de la gestion des déchet
s rendu par le Sydeme,
la chambre a recouru aux matrices des coûts conçues par l’Ademe. Ces dernières ont pour but
de quantifier et
d’
analyser l'ensemble des coûts associés à la gestion des déchets
et d’effectuer
des comparaisons. Les matrices des dix memb
res du syndicat ont fait l’objet d’une
consolidation, laquelle a notamment permis une comparaison avec le territoire régional du
Grand Est.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
27
Graphique n° 5 :
Comparaison du coût aidé et de la quantité de déchets collectée entre le territoire
du Sydeme et le Grand Est (2019-2022)
Source : m
atrices Ademe retraitées par la CRC. Le coût aidé est exprimé en € HT/hab. ;
la quantité de déchets
collectée en kg/hab. Note : les données 2022 ne comprennent pas, pour le Sydeme, la communauté de communes
du Pays de
Bitche, ni la communauté d’agglomération de Saint
-Avold Synergie (données non disponibles). Pour
le Grand Est, les données de 78 % des collectivités représentant 84 % de la population sont compilées pour 2022.
Sur la période 2019 à 2022, le coût moyen aidé
42
de gestion des déchets des membres
du Sydeme est supérieur de près de 50
€ par habitant à celui
constaté dans la région Grand Est
(138
€/an par habitant pour le
territoire du Sydeme contre 93
pour le Grand Est, soit 50 % de
plus). De surcroît, aucun membre
n’a un coût aidé inférieur à celui constaté dans le Grand Est.
Ce coût aidé augmente de près de 20 % au cours de la période (contre 8 % pour la
région). Par ailleurs, les habitants du territoire du Sydeme produisent plus de déchets que les
autres habitants du Grand Est (+ 25 kg/hab. en moyenne sur 2019-2022)
43
.
En 2019, le coût de gestion des déchets supporté par les membres était déjà largement
supérieur à la moyenne régionale alors même que le montant des contributions versées ne
permettait pas d’atteindre son point d’équilibre financier. Depuis 2020, le surcoût du Sydeme
pour ses membre
s s’explique essentiellement par le niveau nécessaire des contributions pour
faire face aux dépenses élevées du syndicat. Dans une moindre mesure, il s’explique égalem
ent
par la nécessité de réaliser des excédents pour réduire son déficit cumulé, cet effort financier
étant, selon les estimations de la chambre, de l’ordre de 8 € par
an et par habitant
44
.
Ce coût de gestion intègre la collecte des déchets
qui n’est pas de
la compétence du
Sydeme mais de celles de ses membres. Néanmoins, la chambre constate que cette composante
n’est pas responsable du surcoût
, puisque le coût de collecte sur le territoire du Sydeme est
42
Le coût aidé tel que défini par
l’annexe XIII du CGCT
correspond à
« l’ensemble des charges,
notamment de structure, de collecte et de transport, moins les produits industriels (ventes de matériaux et
d’énergie, prestations à des tiers), les soutiens des organismes agréés pour la gestion des déchets et les aides
publiques ».
43
Les territoires des membres du Sydeme présentent une diversité de typologies, notamment rurales,
mixtes rurales, urbaines et mixtes urbaines. Lorsque l'analyse est segmentée par catégorie de territoire, elle conduit
dans l'ensemble aux mêmes conclusions que celles obtenues à l'échelle de l'ensemble des membres.
44
Au cours des exercices 2020 à 2022, la chambre estime après retraitement des erreurs comptables que
le syndicat a réduit son déficit de 9,3 M€
518
557
528
527
503
483
524
486
499
2019
2020
2021
2022
Moyenne
2019-2022
Quantité collectée
en kg par habitant
128
131
142
153
138
95
86
89
103
93
2019
2020
2021
2022
Moyenne
2019-2022
Coût aidé
par habitant
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
28
inférieur d’environ 10 € par an et par
habitant à la moyenne régionale (40
€)
.
L’ordonnateur
indique par ailleurs que sur le territoire du Sydeme, les biodéchets sont collectés puis traités par
un procédé
ad hoc
,
ce qui n’est généralement pas le cas en Grand Est. Consciente de cette
spécificité, la chambre a analysé plus loin dans le rapport le surcoût imputable au multiflux et
à
l’unité de méthanisation.
3.1.2
Des surcoûts liés au traitement des emballages en raison de déchets mal triés
En 2019, les emballages recyclables collectés dans les sacs orange étaient acheminés
vers les centres de transfert ou directement vers les centres multiflux. À compter de juillet 2020,
les sacs orange ont été progressivement sortis du dispositif multiflux (en juin 2023, seul un
EPCI utilisait encore cette modalité de collecte).
Face à une qualité de tri très dégradée ainsi qu’à la vétusté du centre de Saint
-Avold, le
comité syndical a donc délibéré
, en juin 2020, en faveur de l’externalisation de cette prestation,
attribuant le marché à une société privée
45
dont le centre de tri est situé dans les Vosges. En
décembre 2020, le comité syndical a ensuite validé
le passage à l’extension des consignes de
tri
46
et s’est mis en conformité avec le code couleur national des déchet
s (jaune pour les
emballages). Cette décision s’est accompagnée d'
une augmentation du tarif de traitement de la
part du prestataire de 19
€/tonne
.
En moyenne, sur la période 2019-2022, le Sydeme a convoyé un peu plus de
23 000
tonnes d’emballages à destination d’un centre de tri (à Saint
-
Avold jusqu’en 2019 puis
dans les Vosges depuis mi-2020) pour un coût annuel moyen de 4,5
M€. Avec des coûts de
186
€/tonne traitée pour 2021 et 195
€ pour 2022,
le coût lié au traitement des emballages pour
le Sydeme est
légèrement moins élevé que le coût de la gestion du tri lorsqu’elle était effectuée
par ses services (195
€ en 2019 et 213
€ au titre du premier semestre 2020).
Par ailleurs, la qualité de ces dé
chets s’avère très mauvaise. En 2021, pour l’ensemble
de la région Grand Est, la quantité de refus de tri
47
était estimée à 61 000 tonnes
48
, soit environ
11 kg/hab. et par an. Au Sydeme, cette quantité est de 29 kg/hab. et par an. Son territoire,
représentant 6 % de la population régionale, est responsable de plus de 17 % des refus de tri du
Grand Est.
45
Seul opérateur économique à avoir répondu à l’appel d’offres.
46
L’extension des consignes de tri consiste à trier dorénavant tous les emballages afin de développer le
recyclage des emballages en plastique qui n'étaient pas recyclés jusqu'alors tels que les films, pots et barquettes.
47
Le refus de tri désigne la fraction de déchets qui est soustraite au flux avant traitement ou qui est
récupérée après un traitement inapproprié à leur nature. Les refus de tri sont ensuite sujets à une valorisation
thermique (combustible solide de récupération ou incinération) ou conduits dans un centre d'enfouissement.
48
Les données 2021 sont les dernières disponibles. Région Grand Est (2023),
Observatoire régional de
la prévention et de la gestion des déchets et de l’économie circulaire en Région Grand Est,
page 94.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
29
Graphique n° 6 :
Comparaison des quantités valorisées après retrait des refus de tri entre le Sydeme
et la région Grand Est (en kg/hab.)
2021
Source : retraitement CRC à
partir de données du Sydeme et du rapport de l’o
bservatoire régional
de la prévention et de la gestion des déchets et de l’économie circulaire en
région Grand Est.
Sur la période 2019-2022, le pourcentage de refus de tri sur le territoire du Sydeme est
proche de 50 % (8 700 tonnes refusées sur un tonnage collecté de 19 300 tonnes). Les refus de
tri génèrent un surcoût important en partie refacturé
49
à ses membres pour un montant annuel
total compris entre 0,6 et 0,9
M€
50
, soit 2
€/an et par habitant.
Tableau n° 8 :
Coût et
quantité d’emballages traités
En tonnes et millions d’euros
2019
2020
2021
2022
Tonnage emballages traités
26 822
20 154
22 416
23 176
Tonnage refus de tri
8 043
6 790
10 599
9 528
Pourcentage de refus de tri
35 %
40 %
57 %
51 %
Coût du tri des emballages
5,2
4,2
4,2
4,5
Coût des refus de tri
0,6
0,9
0,9
0,8
Source : données Sydeme, retraitement CRC.
Enfin, l’externalisation de la prestation de tri vers le centre vosgien a considérablement
augmenté la distance parcourue par les déchets recyclables (plus de cinq fois plus de kilomètres
en moyenne)
51
. Aussi, le coût relatif au transport a quasiment doublé entre 2019 et 2022, passant
49
Le coût du tri des recyclables comprend une part de traitement des refus de tri à hauteur de 20 %.
Le prestataire facture au Sydeme les tonnages de refus supérieurs à 20 %.
50
Le Sydeme prend à sa charge une partie des coûts de refus de tri. Il estime que 15 % des refus tri sont
liés au dispositif multiflux.
51
Calcul effectué sur l’année 2020 (année de transition) à partir des données du Sydeme, comparaison
entre le 1
er
et 2
ème
semestre [144 099 kms effectués pour aller dans les Vosges au 2
e
semestre pour 912 rotations
contre 26 166 kms pour 932 rotations effectués sur le territoire du Sydeme].
-
10
20
30
40
50
60
Quantité collectée
Quantité de refus tri
Quantité valorisée
56
11
45
50
29
21
Grand Est
Sydeme
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
30
de 0,8
M€ à 1,4
M€. À tonnage inférieur de
14 % en 2022 par rapport à 2019, le prix de
transport de la tonne est passé à 60
€ en 2022 contre 29
€ en début de période.
3.1.3
Une exception : un coût compétitif pour les déchets incinérés et enfouis
À l’instar des emballages, les déchets résiduels transitent par les centres de transfert du
Sydeme ou sont acheminés directement vers les centres multiflux. Le traitement de ces déchets
est entièrement externalisé. Le Sydeme coopère avec ses voisins allemands dans le but
d'optimiser les infrastructures de traitement (
cf. supra
)
. En conséquence, pour l’année 2022, les
deux tiers des déchets résiduels (OMR et tout venant) du territoire sont dirigés vers les centres
de valorisation thermique en Allemagne (à Velsen ou Neunkirchen) et 6 % vers un site
mosellan. Un quart est enfoui sur le site de Téting-sur-Nied (Moselle)
52
. La France
s’est fixée
pour objectif d’assurer d’ici 2025
la valorisation énergétique d’au moins 70
% des déchets ne
pouvant faire l’objet d’une valorisation matière des déchets
53
. À son échelle, le Sydeme a atteint
cet objectif dès 2022 (73 %) et, en 2023, a valorisé sous forme énergétique 83 % de ses déchets
résiduels.
Entre 2019 et 2022, le coût total de traitement des ordures ménagères a connu une baisse
sensible s’expliquant essentiellement par une baisse des quantités traitées. Dans le détail, la
quantité traitée a baissé de 30 % durant la période contrôlée tandis que le coût à la tonne a
augmenté de plus de 25 %
sous l’effet
notamment de la hausse de la taxe générale sur les
activités polluantes (TGAP).
Tableau n° 9 :
Coût et quantité des déchets incinérés et enfouis
2019
2020
2021
2022
Coût du traitement
9
,2 M€
9
,2 M€
8,8
M€
8,2
M€
Tonnage traité
115 837
111 173
102 935
92 278
Coût par tonne
79
82
86
89
Montant facturé aux membres
74
91
115
117
Déchets incinérés et enfouis par habitant
309 kg
299 kg
278 kg
250 kg
Source : Sydeme. L
es données comprennent l’ensemble des déchets incinérés et enfouis
, y compris les résidus de
la méthanisation. Les refus de tri traités par le prestataire dans les Vosges ne sont toutefois pas compris.
Avec une moyenne de 81 € par tonne d’OMR traitée, le coût de traitement est inférieur
à celui du Grand Est (112 €
54
). Le Sydeme facture ce traitement à ses membres en moyenne à
100 € à la tonne (117
€ en 2022), cette activité est donc bénéficiaire. Cette politique tarifaire
est cohérente avec l’objectif du syndicat de détourner du flux résiduel les déchets valorisables
et notamment les biodéchets.
52
Le reste (6
%) fait l’objet d’une valorisation thermique en Moselle.
53
9° de l’article L. 541
-
1 du code de l’environnement.
54
Matrice Ademe, région Grand Est coût de traitement par tonne des OMR, 2021.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
31
La quantité de déchets incinérés et enfouis (278 kg par habitant en 2021, y compris le
tout-venant) est légèrement supérieure à la moyenne du Grand Est (263 kg par habitant en
2021
55
). Environ 15
% des déchets incinérés et enfouis proviennent de l’unité de méthanisation
Méthavalor, en raison de la mauvaise qualité des déchets entrant sur le site (
cf. infra
).
En mettant en œuvre une valorisation des biodéchets, le Sydeme devrait enfou
ir et
incinérer moins de déchets que la moyenne régionale. La chambre constate que cet objectif
n’est pas atteint et que le flux de biodéchets ne permet pas de réduire de manière significative
les quantités de déchets résiduels traités.
3.2
Le multiflux : un système de tri coûteux et inefficace
En 2005, lorsque le Sydeme s’est engagé dans la valorisation par méthanisation des
biodéchets, il a opté pour une solution de collecte simultanée de tous les flux, évitant ainsi une
tournée spécifiquement dédiée aux biodéchets. Le système multiflux permet aux usagers, lors
de la phase de collecte, de déposer dans un même bac plusieurs types de déchets contenus dans
des sacs de couleurs différentes. Les sacs sont ensuite séparés, lors de la phase de tri, par un
procédé de vis sans fin et de reconnaissance optique.
Ce système singulier a été mis en service entre 2009 et 2011. Son caractère novateur
était alors souligné et a permis au syndicat d’obtenir de nombreuses distinctions.
La chambre a d’abord estimé le coût de ce système (3.2.1) avant d’en évaluer l’efficacité
(3.2.2).
3.2.1
Un système coûteux et vétuste
Les coûts directs (notamment matières et charges de personnel) inhérents au système
multiflux peuvent être isolés à partir de la comptabilité analytique du syndicat. Ils correspondent
au fonctionnement des trois centres multiflux (Faulquemont, Sarreguemines et Morsbach), des
centres de transfert, de l’usine de confection de sacs ainsi qu’aux opérations de distribution de
sacs aux habitants. Au 31 décembre 2022, 39 agents (27 % des effectifs) sont rattachés à ces
activités (hors centres de transfert).
55
Les données 2021 sont les dernières disponibles. Région Grand Est (2023),
Observatoire régional de
la prévention et de la gestion des déchets et de l’économie circulaire en Région Grand Est,
p. 94. Valorisation
énergétique (981 999 t. y compris tout-venant) et stockage (573 302 t. y compris tout-venant) hors déchets inertes
(86
754 t.) / nombre d’habitants (5
562 700 h.)
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
32
Tableau n° 10 :
Estimation du coût direct du multiflux (en M€)
En M€
2020
2021
2022
Moyenne
2020-2022
Coût global multiflux
7,4
7,2
6,3
7
dont confection de sacs multiflux
4,1
3,5
3,2
3,6
dont distribution de sacs multiflux
0,5
0,5
0,5
0,5
Coût/hab du Multiflux
(en €/hab)
20
19
17
19
Source : traitement CRC à partir de la comptabilité analytique corrigée
des charges constatées d’avance.
Note :
les amortissements des immobilisations relevant du multiflux ont été intégrés au coût de l’équipement sans
être retraités des erreurs relevées par la chambre. L’année 2019 n’a pas été retenue en raison du caractère non
exhaustif du classement analytique sur cet exercice comptable.
Les dépenses du système multiflux
s’élèvent en moyenne à 7
M€ par an. Elles
représentent 12
% du total des dépenses d’exploitation du Sydeme et sont comparativement
quasi aussi élevées que celles dédiées à la méthanisation. La fabrication des sacs multiflux ainsi
que leur distribution représentent plus de 60 % des dépenses.
Le dispositif multiflux constitue une étape additionnelle dans le processus global de
gestion des déchets, générant un surcoût pour les habitants du territoire du Sydeme (19
€ par an
et par habitant, ce chiffrage ne tenant toutefois pas compte de l’économie réalisée par les
ménages liée au fait qu’ils n’aient pas à acheter de sacs).
Si celui-
ci était, jusqu’en 2022
, partiellement compensé par des économies
56
réalisées
par les EPCI membres sur la collecte simultanée des déchets,
ce n’est plus le cas depuis la mise
en place d’une nouvelle collecte
dissociée rendue obligatoire pour les emballages, dont le coût
moyen s’élève également à environ 10 € par an et par
habitant,
d’après les
membres consultés
57
.
En effet, la modification de prise en charge du flux de déchets recyclables a généré une
rupture dans le fonctionnement des opérations de collecte. Les EPCI ont dû s'adapter et mettre
en place
de nouvelles modalités, en favorisant principalement l’instauration
de points d'apport
volontaire
58
.
Désormais, le système multiflux n’est plus utilisé que pour
séparer les biodéchets des
déchets résiduels. Il a perdu 20 % des tonnages collectés mais, du fait de la rigidité des charges
du système, la baisse des coûts sera inférieure à celle des volumes traités.
En outre, le Sydeme est confronté à l’obsolescence avérée de ses installations.
En août
2023, les besoins en investissements essentiels au maintien du bon fonctionnement ont été
évalués à 2,7
M€ pour les trois centres. Des démarches
prospectives ont également été
56
La chambre constate
d’ailleurs
que les opérations de collecte, relevant de la compétence des membres,
présentent un coût inférieur de 10
€ à la moyenne régionale sur la période 2019
-2021. Cf. matrices Ademe
consolidées.
57
Le coût s’échelonne de 0
€ à 23
€ pour les EPCI en fonction de la solution choisie. Les EPCI dont le
coût est nul ont procédé à une réorganisation interne des équipes ou espacé les collectes. Le coût le plus élevé
correspond à l’équipement sac jaune déposé dans un bac dédié collecté en porte
-à-porte. Il comprend, le cas
échéant, l’amortissement des bacs acqu
is.
58
Fin août 2023, cinq EPCI avaient fait le choix du point d’apport volontaire (soit 46
% de la population
du Sydeme), trois celui du sac jaune collecté en porte-à-porte (23 % de la population), et un celui du bac jaune
collecté en porte-à-porte (9 % de la population).
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
33
entreprises en vue du remplacement de ces derniers pour un coût évalué entre 10 et
12 M€ selon
le syndicat.
3.2.2
Un système peu efficace
La technologie du multiflux, reposant sur un procédé de reconnaissance optique,
requiert des sacs aux propriétés spécifiques (couleur et résistance notamment).
Le Sydeme dispose de sa propre usine de confection de sacs depuis avril 2014, implantée
à Behren-lès-Forbach. Les sacs précédemment fabriqués en Asie ne permettant pas, selon le
syndicat, d’assurer la pérennité de l’approvisionnement et de modifier
aisément les
caractéristiques techniques des sacs, celui-
ci a pris la décision d’en internaliser la production
.
Celle-ci est assurée par 11 personnes en 2022. Les sacs sont ensuite distribués par 12 autres
agents du Sydeme, les « ambassadeurs du tri », dans des locaux mis à disposition par les
communes (70 % des sacs) ou lors d'une tournée effectuée avec un camion spécialement
aménagé (30 % des sacs).
Les trois centres multiflux, qui ont pour vocation de diriger les sacs vers les lieux de
traitement
propre à chaque flux de déchets, ne s’avèrent pas aussi efficaces qu’espéré. En effet,
dès l’arrivée en quai de décha
rgement, des sacs sont déjà éventrés laissant échapper leur
contenu et amenuisant ainsi la qualité de la reconnaissance du tri optique. Les causes de cette
détérioration des sacs sont diverses
: il peut s’agir de sacs mal fermés par les ménages, de sacs
ay
ant fait l’objet d’une compaction
59
trop importante lors de la collecte ou du déchargement en
centre de transfert. Certains sacs sont aussi déchirés par des vis sans fin au fil du parcours dans
les lignes de tri. En outre, les installations sont vétustes :
à titre d’illustration, des trous de
corrosion dans les lignes laissent passer des déchets impropres au circuit emprunté à destination
du lieu de traitement final. Les fosses dans lesquelles sont déchargés les sacs contiennent aussi
parfois des déchets inappropriés (matelas, cadre de vélo
60
…).
L’ensemble de ces incidents génère des erreurs de tri
conséquentes, attribuées tant au
Sydeme (dispositif multiflux), qu’aux
membres lors de la collecte et aux ménages (geste de tri
inapproprié). Les refus de tri consignés par le syndicat, concernant les emballages, indiquent
des taux dépassant les 55 %. En 2021 et 2022, le syndicat estimait que la part des refus lui étant
attribuable
61
était respectivement de 16 % et 14 %. Ces refus représentent un coût global de
près d’1
M€
.
S’agissant des biodéchets, sur les 13
000 tonnes en provenance en 2022 des
ménages du Sydeme, 8 000 tonnes
ont été écartées de manière mécanique en raison d’une
qualité insatisfaisante. Ces refus de tri représentent plus de 60 % des sacs verts.
59
Le Sydeme indique pourtant avoir imposé un taux de compaction de la collecte multiflux afin de
restreindre la compaction. Selon lui, 98 % des tonnages livrés en 2022 étaient conformes à ce taux de compaction.
60
La présence de ce type de déchets entraîne la facturation de pénalités aux membres : 110
€ TTC par
élément indésirable de niveau 1 ou 330
€ TTC pour un niveau 2.
61
Erreurs imputables au tri optique.
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
34
Tableau n° 11 :
Quantité de refus de tri (en tonnes)
2019
2020
2021
2022
Emballages réceptionnés
23 164
16 836
18 584
18 850
Refus de tri
8 043
6 790
10 599
9 528
Taux de refus de tri
35 %
40 %
57 %
51 %
Biodéchets en provenance du territoire du Sydeme
16 234
14 507
16 475
13 211
Refus primaire
10 414
9 541
9 640
8 057
Taux de refus primaire
64 %
66 %
59 %
61 %
Source : traitement CRC à partir des données Sydeme. Les refus primaires concernent principalement les
biodéchets en provenance du territoire du Sydeme. Les autres biodéchets reçus, notamment ceux en provenance
du partenaire allemand,
n’imposent pas le criblage mis en place pour les biodéchets du territoir
e du Sydeme.
La sortie des emballages du multiflux s’effectue progressivement depuis le début de
l’année 2022 et se poursuit encore en 2023. Fin juin 2023, seule la c
ommunauté
d
’agglomération Forbach Portes de France
(21 % de la population du Sydeme) utilisait encore
ce système pour la collecte des emballages. Ce changement de méthode de collecte a d’ores et
déjà permis d’observer une diminution des refus, le
taux passant de 56 % en janvier 2022 à
39 % en août
2023. À titre d’illustration, la communauté de
communes Bouzonvillois-Trois
Frontières affiche un taux de refus de tri de 37 % en 2022
via
une collecte séparée contre 49 %
l’année précédente
via
une collecte multiflux.
3.3
Méthavalor : un équipement dont le fonctionnement ne permet pas
d’atteindre l’équi
libre économique
Le Sydeme possède deux unités de méthanisation.
La première unité, Méthavos, est située à Sarreguemines et dédiée au traitement des
déchets verts. Mise en service à la fin de l’année 2015, elle est à l’arrêt depuis le mois de
novembre 2022 à la suite de nombreuses défaillances techniques. Depuis cette date, le site de
Sarreguemines reçoit des déchets verts qu’il traite par compostage, sans méthanisation. Entre
2020 et 2022, les charges directes de ce site s’élevaient à
1,2
M€
et les produits, essentiellement
tirés de la valorisation énergétique, à 0,4
M€.
Depuis l’arrêt de la méthanisation, le Sydeme ne
bénéficie plus des recettes tirées de la vente d’énergie
62
mais a pu réduire ses charges à due
concurrence
63
.
L
es coûts éventuels d’une remise en fonction de l’installation
ne sont pas connus. La
valeur nette comptable en 2022 de cet équipement est de 3,3 M€ dans les comptes du Sydeme
alors que la chambre considère qu’elle devrait être
nulle (
cf. supra
).
62
Les ventes d’énergie de 2022 se sont élevées à un peu plus de 250
000
€.
63
Le seul transport et traitement des digestats liquides a coûté en 2022 plus de 200 000
€.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
35
La seconde unité de méthanisation, Méthavalor, mise en service en 2011, est toujours
active. Située à Morsbach, elle est dédiée au traitement des biodéchets des ménages collectés
dans les sacs verts sur le territoire du Sydeme (restes de repas), mais également chez des clients
professionnels (grandes surfaces, industrie agroalimentaire et restauration collective). Le
syndicat accueille également des biodéchets et des déchets verts des ménages en provenance de
son homologue allemand.
L’objectif initial du Sydeme était de créer, via le procé
dé de méthanisation, un cercle
vertueux en détournant des déchets de la filière consacrée aux ordures ménagères et en
produisant, à cette occasion, de l’énergie et des fertilisants pour permettre un retour au sol de
la matière organique.
L’analyse qui suit porte sur l’unité Méthavalor. Pour contrôler cet équipement, la
chambre a fait appel à l
’assistance d’experts en méthanisation
de l’université de Lorraine.
3.3.1
Un site ne disposant pas
, jusqu’
en mars 2024,
de l’agrément sanitaire
obligatoire
Après plusieurs crises sanitaires survenues dans les années 1990, la réglementation
européenne
64
, précisée par des dispositions nationales
65
, a fixé un cadre strict pour l’utilisation
des sous-produits animaux
66
dans les usines de méthanisation traitant des biodéchets.
Selon cette réglementation, les exploitants doivent veiller à ce que leurs usines soient
agréées
67
dès lors que des sous-produits animaux y sont introduits. Seuls les sites agréés et
figurant sur une liste peuvent exercer une activité et prétendre à mettre sur le marché les produits
dérivés de la méthanisation, tels que du compost et du digestat
68
. Les usines doivent, sauf
dérogation
69
, être équipées
d’une unité de pasteurisation/hygiénisation
permettant d’éliminer
les risques sanitaires en s’assurant qu’une
température de 70 °C est atteinte durant une heure
70
.
À défaut d’agrément, provisoire ou définitif, ou en cas de retrait de celui
-
ci, l’exploitant doit
cesser son activité
71
.
Durant la majeure partie de la période sous revue, malgré des demandes formulées
auprès de la direction départementale de la protection des populations de la Moselle (DDPP -
64
Règlement n° 1069/2009 et règlement n° 142/2011.
65
Notamment l’a
rrêté du 9 avril 2018 fixant les dispositions techniques nationales relatives à l'utilisation
de sous-produits animaux et de produits qui en sont dérivés, dans une usine de production de biogaz, une usine de
compostage ou en « compostage de proximité », et à l'utilisation du lisier.
66
Article 3 du règlement n° 1069/2009, les sous-produits animaux sont
« les cadavres entiers ou parties
d’animaux, les produits d’origine animale ou d’autres produits obtenus à partir d’animaux, qui ne sont pas
destinés à la consommation humaine »
, classés en trois catégories (1 à fort risque ; 2 à risque modéré ; 3 à risque
faible, dont les déchets de cuisine et table).
67
Article 24 du règlement n° 1069/2009.
68
Article 3 du règlement n° 1069/2009, les produits dérivés sont
« les produits obtenus moyennant un ou
plusieurs traitements, ou une ou plusieurs transformations ou étapes de transformation de sous-produits
animaux »
.
69
Les cas de dérogation accordée par les autorités compétentes figurent à l’article 8 de l’arrêté du
9 avril 2018.
70
Annexe V du règlement n° 142/2011.
71
Article 44 du règlement n° 1069/2009.
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
36
services vétérinaires), autorité compétente
72
, le Sydeme, bien que traitant des sous-produits
animaux (déchets de cuisine et de table contenant notamment
de la viande), n’a
vait pas obtenu
d’agrément sanitaire pour Méthavalor.
En 2018, une première demande déposée
par le syndicat n’a
pas reçu de suite favorable.
Une deuxième demande formulée en 2021
aurait fait l’objet, selon le Sydeme, d’un refus oral.
Cette situation est la conséquence du caractère incomplet des dossiers présentés et plus
particulièrement du
fait que l’usine ne possède pas d’unité
de pasteurisation/hygiénisation pour
ses digestats
73
ou ne remplit pas les conditions pour déroger à cette obligation. Des échanges
informels et réguliers avec ce service
de l’État ont eu lieu en 2021 et 2022 au sujet d’un projet
d’acquisition d’une telle unité et du dépôt
d’
une
nouvelle demande d’agrément. Par un courrier
de janvier 2023, la DDPP a rappelé au syndicat le caractère incomplet du dossier concernant
les digestats liquides mais a entrouvert la possibilité
de la délivrance d’un agrément provisoire,
dès lors que les
travaux d’installation de l’unité
auraient débuté.
Par une délibération du 11 avril 2023, reconnaissant en préambule la nécessité de se
mettre en conformité avec la réglementation sanitaire, le comité syndical s’est prononcé en
faveur de l’installation d’un procédé d’ultrafiltration
, dont le coût est estimé à 3
M€.
Toutefois,
après le contrô
le de la chambre, la DDPP a décidé d’accorder, le 19 mars 2024, un agrément
provisoire sur le fondement des dérogations prévues par la réglementation, dans la mesure où
les digestats sont traités par une filière spécialisée et qu’aucun épandage n’
a été réalisé depuis
2023. Par une délibération du 3 avril
2024, le comité syndical a décidé d’abandonner le projet
d’ultrafiltration.
La chambre constate que le syndicat a
procédé à l’épandage
74
, sur des terres agricoles
environnantes, de près de 14 000 tonnes de digestats liquides non hygiénisés entre 2019 et 2022
(plus de 3 300 tonnes pour 39 000
€ en 2022, soit 12 € la tonne).
Depuis lors, le Sydeme a cessé
les épandages.
3.3.2
Un procédé industriel ne garantissant ni des biodéchets de bonne qualité, ni
un
fonctionnement optimal de l’unité
L’unité de méthanisation Méthavalor est alimentée par la collecte multiflux et par des
apports extérieurs. En raison des défaillances du tri (
cf
.
supra
), de nombreux éléments non
organiques (plastique, sacs, aluminium, verre,
etc
) peuvent être observés dans les containers
(trémies) réunissant les biodéchets collectés sur le territoire du syndicat et destinés à être
introduits dans le méthaniseur.
72
Arrêté du 8 décembre 2011 établissant des règles sanitaires applicables aux sous-produits animaux et
produits dérivés.
73
Le syndicat dispose en revanche d’une unité d’hygiénisation pour son compost.
74
Le Sydeme a été autorisé à épandre ses digestats par un arrêté préfectoral du 18 octobre 2017.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
37
Photo n° 1 :
Trémies réunissant les déchets des ménages collectés sur le territoire du Sydeme et
entrant à Méthavalor
Source :
photos des trémies n° 1 et 2, rapport d’expertise
Ces déchets, d’apparence très éloignée de ce qui est traditionnellement observable dans
des processus de méthanisation, sont convoyés vers une machine de criblage pour que les plus
gros indésirables soient retirés. Ces « refus primaires » sont ensuite incinérés ou enfouis. De
nombreux éléments non organiques de taille plus petite sont tout de même introduits dans
l’installation après cette opération de tri.
En 2022, sur les 37 000 tonnes de biodéchets accueillies sur le site, 13 000 tonnes
proviennent des déchets des ménages du territoire, soit 27 kg/hab. Les refus primaires, qui
représentent au total 8 000 tonnes, sont pour leur quasi-intégralité imputables à ce flux de
déchets. L’Ademe estime que lorsqu’une collecte séparée de biodéchets est mise en place, elle
permet de détourner des déchets résiduels 43 kg/hab. de biodéchets
75
. Avec seulement
27 kg/hab. collectés et 13 kg/hab. méthanisés, la quantité de biodéchets effectivement détournée
des déchets résiduels apparaît dérisoire.
À
l’inverse, le flux en provenance du partenaire allemand, faisant l’objet d’une collecte
séparée, est de bien meilleure qualité (12 000 tonnes de biodéchets et déchets verts des
ménages). Le reste des tonnages provient de clients professionnels (grandes et moyennes
surfaces, industrie agroalimentaire) et génère peu de refus primaires
76
.
Alors que l’unité possède
une capacité de 46 000 tonnes, 26 952 tonnes seulement ont
été réellement introduites dans les digesteurs, dont 18 % environ proviennent des sacs verts.
Avant
cette étape d’introduction
, les « intrants » sont stockés dans deux trémies
« tampon »
d’une capacité de stockage de 120
tonnes chacune, dimensionnées pour permettre
un approvisionnement et un fonctionnement optimal des digesteurs.
Selon le rapport d’expertise
fourni à la chambre, la régularité de l’introduction des tonnages dans l’unité est une condition
sine qua non
pour un fonctionnement optimal. Or, l’analyse de plusi
eurs périodes démontre une
75
Source : Ademe (2022),
Évaluation de la généralisation du tri à la source des biodéchets
(valeur
médiane, p. 135).
76
Le système de déconditionnement « Orgasep », spécifique à ce flux de biodéchets, étant en panne
depuis plusieurs mois, ils sont redirigés vers les lignes destinées aux biodéchets des ménages du territoire.
L’ordonnateur précise que ce système a été remis en fonction le 23
avril 2024.
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
38
irrégularité forte et fait apparaître que les quantités les plus faibles sont introduites les samedis
et dimanches.
Une meilleure régularité d’introduction de la matière
permettrait une optimisation du
fonctionnement des digesteurs, engendrant ainsi une production de biogaz plus constante et plus
facilement valorisable.
Pour le Sydeme, l’unité de méthanisation est néanmoins dépendante de
la quantité des sacs verts collectés et fait face à de lourdes problématiques de maintenance.
Enfin, les digestats solides ou compost
77
, obtenus après le processus, sont à leur tour
raffinés par criblage pour respecter la norme en vigueur
78
. La part de compost considérée
comme de mauvaise qualité (en 2022, 4
300 tonnes de refus d’affinage) est élim
inée par
incinération ou enfouissement. Celui considéré comme conforme comporte, parmi ses
composants inertes, 16,5 % de particules fines inférieures à 2 mm
79
d’origine non déterminée.
La méthode communément utilisée pour mesurer ces matières inertes permet
d’écarter des
analyses
l’essentiel
de la matière organique. Ne restent donc dans ces « fines » que des
particules comme
de très petits cailloux, du plastique, du verre, du métal ou d’autres inertes
indéterminés. Le compost « normé
» n’est toutefois pas
valorisé comme fertilisant sur des terres
agricoles mais est utilisé
à d’autres fins
, notamment pour du remblayage.
L’Ademe
80
considère que la production d’engrais organique (le compost et le digestat
liquide), en lieu et place d’engrais synthétique, est l’u
n des principaux avantages
environnementaux des unités de méthanisation. En l’occurrence, étant donné que le compost et
la quasi-
intégralité du digestat liquide ne sont pas valorisés en agriculture, l’unité de
méthanisation perd de son intérêt environnemental.
Afin
d’informer
les utilisateurs potentiels, ainsi que pour permettre un retour vers
davantage de terres agricoles,
le syndicat doit identifier les freins à l’utilisation de ses produits
par les agriculteurs, mais aussi en connaître la qualité, par exemple grâce à l’analyse de
la
composition exacte des particules fines inférieures à 2 mm.
3.3.3
Une production d’énergie ne permettant pas d’atteindre l’équilibre
économique
Selon les experts, même si la qualité des intrants est inadéquate et l’introduction de
matière trop irrégulière, la réactivité de la biologie dans les digesteurs est bonne et permet
d’affirmer que l’unité de
méthanisation est fonctionnelle. En effet, le biogaz produit possède
77
Pour le devenir des digestats liquides,
cf.
sous-partie précédente.
78
Référentiel NF U44-051. Pour être considéré comme aux normes, le compost ne doit notamment pas
contenir des taux trop élevés de plastiques supérieurs à 5 mm.
79
Norme NF U 44-164 pour les inertes.
80
« Pour la filière méthanisation à la ferme en cogénération, les principaux contributeurs aux impacts
évités sont :
-
la valorisation du contenu azote des digestats, principalement sur les indicateurs changement climatique
(CC), oxydation photochimique (Ox. Ph.), acidification (AC) et eutrophisation marine (EUT. Mar.) ;
-
la valorisation du contenu phosphore des digestats, principalement sur l’indicateur eutrophisation eau
douce (EUT. ED) ».
Ademe, EVEA Évaluation et Accompagnement, S3D Ingénierie, Cornelus M., Rousseau EL Habti A. (2019),
Impacts environnementaux de filières de traitement biologique des déchets alimentaires : compostages et
méthanisations
.p. 67.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
39
une composition, sauf exception, présentant un taux de méthane supérieur à 50
%, signe d’un
bon déroulement de la « digestion anaérobie ».
La production de biogaz, bien qu’inférieure aux
objectifs, reste tout de même conséquente compte tenu de la quantité de déchets introduits. Elle
mériterait cependant d’être mieux valorisée.
Méthavalor possède, en effet, deux voies de valorisation de ce biogaz :
d’une part,
la
« cogénération », qui perm
et de générer de l’électricité et de la chaleur grâce à l’énergie
primaire du biogaz passant dans deux moteurs, et, d’autre part, l’injection du biométhane
dans
le réseau gazier après purification, plus rémunératrice que la cogénération (
cf. infra
).
L’objectif de production de biogaz fixé par le syndicat correspond à 75
% de la capacité
maximale de production de l’unité. Cette valeur apparaît pertinente car elle
offre une souplesse
d’opération des digesteurs, mais
permet aussi de gérer des surplus de production liés soit à
davantage de volumes à traiter, soit à un meilleur pouvoir méthanogène de la matière introduite.
L
es objectifs de production de l’installation ne sont
toutefois pas atteints
81
. Le Sydeme rappelle
que la capacité maximale du hall de réception et de préparation des déchets est de 46 000 tonnes,
identique à celle des méthaniseurs. Il précise qu’il traite 35
000 tonnes de déchets mais que
seulement 27 000 tonnes sont insérées dans les méthaniseurs, compte tenu de la faible qualité
des intrants.
L’ordonnateur en fonctions estime que les objectifs,
déterminés sous l'ancienne
gouvernance, sont structurellement inatteignables dans les conditions actuelles du Multiflux et
sont non pertinents pour le pilotage de l'installation.
Les experts diligentés par la chambre constatent que Méthavalor ne possède pas de
véritable stockage de biogaz, si bien que le syndicat brûle à la torchère
82
une partie de la
production, sans toutefois être en capacité de mesurer
, faute d’outils appropriés,
le volume ainsi
perdu. Ils estiment également probable, eu égard aux variations de production, qu’une partie du
biogaz est évacuée directement
dans l’atmosphère par les soupapes de sécurité (sans torchage)
et qu’une autre
est perdue en raison de potentiels
problèmes d’étanchéité.
Ils estiment que 20 à
30 % du gaz produit n’est pas valorisé.
La chambre invite par conséquent le syndicat à procéder
aux vérifications techniques nécessaires
, notamment en raison de l’impact environn
emental du
rejet de méthane dans l’atmosphère
83
.
Selon les experts, le moteur de cogénération le plus puissant serait suffisant pour
valoriser en électricité et en chaleur l’énergie primaire du biogaz,
compte tenu des volumes
produits. Ils constatent également que la chaleur est trop peu valorisée, même si elle permet de
chauffer les locaux du syndicat.
L’injection de biogaz dans le réseau
apparaît plus rémunératrice que la revente
d’électricité (22
% de plus sur la période novembre 2022 à octobre 2023).
81
À titre d’illustration, sur la période de janvier 2022 à août 2023, l’objectif de production de biogaz
n’a
jamais été atteint.
Le taux moyen d’accomplissement de l’objectif est de 73 % ± 7 % des 500 000 Nm3 de biogaz
mensuel à produire, soit en moyenne sur la période 55 % du Cmax (capacité maximale de production)
de l’unité
.
82
Le « torchage » du gaz est l'action de brûler intentionnellement dans des « torchères » le gaz sans
valorisation de son énergie.
83
L’Ademe considère qu’un taux de fuite supérieur à 5 % au niveau des soupapes de sécurité pourrait
obérer le bilan carbone des filières de méthanisation par rapport aux scénarios de compostage. Ademe, EVEA
Évaluation et Accompagnement, S3D Ingénierie, Cornelus M., Rousseau EL Habti A. (2019),
Impacts
environnementaux
de
filières
de
traitement
biologique
des
déchets
alimentaires : compostages
et
méthanisations
, p. 73.
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
40
La production énergétique ne permet pas d’atteindre l’équilibre. Le syndicat ne dispose
pas d’outil de gestion lui permettant de connaître les produits et les charges associés à son
équipement et n’est pas davantage en mesure d’en déterminer le résultat co
mptable. La chambre
a néanmoins procédé à l’évaluation de ces éléments pour l’exercice 2022, sans toutefois intégrer
les charges indirectes telles qu’une quote
-part des frais généraux et des charges financières.
Tableau n° 12 :
Estimation du déficit de l’unité de méthanisation (en M€)
Source : estimation CRC sur la base des données fournies par le syndicat. Le montant des produits et des charges
directes correspond à ceux inscrits dans l’activité «
méthanisation » et « biodéchets » de la comptabilité
analytique. Les dotations
aux amortissements sont extraites de l’état de l’actif. Le coût de traitement des refus
correspond aux quantités de déchets non compostables multipliées par le coût moyen de traitement d’une tonne
de déchets enfouie ou incinérée (89 €), le coût du transport de ces refus n’a pas pu être intégré faute d’estimation
fiable.
Les produits générés par l’équipement (2,5 M€) comprennent à parts égales les ventes
d’énergie issues du processus de méthanisation et la facturation des prestations de traitement à
des tie
rs (le partenaire allemand en premier lieu mais également les grandes surfaces, l’industrie
agroalimentaire et la restauration collective). Ces produits sont nettement inférieurs aux charges
qui s’élèvent à 7,7 M€. Outre les dotations aux amortissements et
le coût de traitement des
déchets non compostables, ces dépenses comprennent des charges de personnel (1,3
M€) et les
coûts de traitement et de transport des digestats (1,1
M€).
En 2022, l’équipement a été déficitaire de 5,2 M€. Il a permis de traiter le
s 13 211 tonnes
de biodéchets collectées auprès des ménages du territoire du syndicat à un coût prohibitif de
près de 400 € la tonne
84
. Rapporté au nombre d’habitants, le surcoût de cette unité de
méthanisation s’élève, pour l’année 2022, à 11 €
85
.
84
Déficit de l’équipement de 5,2 M€ pour un tonnage traité de 13
211 tonnes.
85
Si les 13 211 tonnes étaient incinérées ou enfouies, le coût serait de 13
211 x 89 € soit 1,2 M€.
Le
surcoût de l’unité de méthanisation est de 4 M€ (5,2
1,2), soit 11 € par habitant.
M€
2022
Ventes d'énergie
1,3
Autres produits
1,2
Total des produits (A)
2,5
Coût direct
4,9
Dotations aux amortissements
1,7
Coût de traitement des refus
1,1
Total des charges (B)
7,7
Déficit de l'équipement (A - B)
- 5,2
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
41
______________________ CONCLUSION INTERMÉDIAIRE ______________________
Le coût de la gestion des déchets sur le territoire du Sydeme est bien plus élevé que la
moyenne régionale. La chambre estime ce surcoût à près de 50 € par an et par habitant. Il
s’explique par l’effort financier nécessaire à la résorption du déficit (8 € par an et par habitant)
et par un mauvais tri des déchets recyclés (2 € par habitant).
Afin de valoriser les biodéchets, le Sydeme a mis en service au début des années 2010
deux systèmes complémentaires : un système de tri multiflux et une unité de méthanisation.
D‘un point de vue économique, le système multiflux représente 9 € du surcoût constaté sur le
territoire du Sydeme. D’un point de vue technique, il occasionne un tri des déchets de mauvaise
qualité. Quant à l’unité de méthanisat
ion, elle
n’a obtenu que très récemment un agrément
sanitaire provisoire, document préalable pourtant obligatoire à l’exercice de toute activité.
En
2022, elle a contribué au surcoût global pour 11 € par an et par habitant.
4
DES CHOIX STRATÉGIQUES CONTRAINTS PAR UN
NIVEAU D’ENDETTEMENT
ÉLEVÉ
Le coût moyen de la gestion des déchets des membres du Sydeme est supérieur de près
de 50 € par habitant et par an à la moyenne régionale sans pour autant qu’une meilleure qualité
de service rendue à l’usager soit observée. D’une part
, le multiflux occasionne des refus de tri
importants dégradant le gisement des emballages
. D’autre part,
la quantité de biodéchets en
provenance des membres, après avoir retiré les déchets non méthanisables ou non
compostables, est dérisoire (13 kg/hab.), ce qui représente environ trois fois moins que la
moyenne nationale.
Le syndicat doit parvenir à réduire ses dépenses pour abaisser le coût moyen de gestion
des déchets sur son territoire. Il fera face dans les prochaines années au renouvellement de ses
installations dont la plupart ont été mises en service il y a plus de 10 ans.
Les options stratégiques du syndicat sont contraintes par ses dettes (4.1). Le niveau de
ses contributions l’oblige à améliorer la connaissance de ses coûts et à mener une revue des
dépenses (4.2.).
4.1
Des options stratégiques contraintes par le niveau de la dette du
Sydeme
La dette du Sydeme s’élevait en 2022 à près de 70 M€ alors même que la chambre
estime que, compte tenu des erreurs en matière d’amortissement, la valeur de ses actifs de long
terme (actifs immobilisés) était au plus de 39
M€. Le syndicat a fina
ncé son déficit
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
42
d’exploitation par de la dette avec un horizon de remboursement lointain (2055 pour la dette la
plus longue).
Graphique n° 7 :
Poids de la dette et valeur des actifs immobilisés (en M€)
Jusqu’en 2033, la dette du
Sydeme se réduira rapidement, au
rythme de 4
M€ par an. Sur la même
période, la chambre estime que la
réduction de la valeur de ses actifs
immobilisés, du fait de leur usure,
pourrait être de 3
M€ par an. Le
rythme de remboursement de la dette
étant plus élevé que la perte de valeur
d
es investissements, l’écart entre
l’actif et le passif deviendra positif à
l’horizon 2040.
Source : données Sydeme retraitées par la
CRC. La valeur de l’actif a été retraitée en
retenant
des
durées
d’amortissement
conformes à leur durée d’utilisation et e
n
intégrant les dates de mises en service réelles
(cf. infra).
Cependant, le syndicat fera face dans les cinq années à venir à la nécessité de renouveler
une partie de son outil industriel. Son encours de dettes devrait néanmoins réduire sa capacité
à mobiliser de nouveaux financements bancaires. Au surplus, compte tenu du coût élevé de la
gestion des déchets sur son territoire, le Sydeme pourra difficilement compter sur une
augmentation des contributions de ses membres.
Dès lors
, le niveau d’investisseme
nt soutenable par le syndicat ne lui permettra pas de
renouveler le parc d’immobilisations existant. Il devra faire des choix stratégiques afin de
conserver et renforcer les actifs présentant la valeur ajoutée la plus importante pour ses
membres et abandonner ceux dont les performances environnementale, économique et en
matière de service rendu aux citoyens sont les plus faibles.
4.2
Une connaissance des surcoûts à affiner par une revue des dépenses
La chambre estime les surcoûts liés à la gestion des déchets sur le territoire du Sydeme
à près de 50 € par an et par habitant. Ils sont liés au système Multiflux (9 € auxquels s’ajoutent
2 € liés au refus tri dont est responsable en partie ce système) et à la méthanisation (11 €).
D’autres surcoûts (environ 20 €) n
e sont pas identifiés. Aussi, le Sydeme doit, en premier lieu,
se doter d’outils de connaissance de ses coûts (4.2.1.) puis réduire les surcoûts des équipements
liés aux biodéchets (4.2.2.) et mener une revue de ses dépenses (4.2.3.).
0
10
20
30
40
50
60
2024
2029
2034
2039
2044
2049
2054
Dettes
Actifs
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
43
Graphique n° 8 :
Décomposition des 50
€ de surcoût par an et par habitant
Source : estimation de la chambre sur la base des matrices Ademe, de la comptabilité analytique du Sydeme et
des informations fournies par le syndicat.
4.2.1
Un préalable : améliorer la connaissance du coût des activités
Facultative et à usage interne, la comptabilité analytique produit des informations
nécessaires à la gestion d’une organisation telles que le coût des activités. Elle complète la
comptabilité générale, obligatoire et normalisée, dont la vocation est d’infor
mer les parties
prenantes.
Afin d’envisager la réduction de ses coûts
,
le syndicat devrait se doter d’outils de gestion
fiables, notamment en matière de comptabilité analytique. Une comptabilité analytique a été
mise en place par le syndicat et enrichie progressivement. La répartition par activité est
stabilisée depuis 2020. Toutefois, elle ne concerne que certaines charges directes, si bien que
20 % des charges de 2022 telles que les charges financières, les frais généraux ou même les
dotations aux amortissements ne sont pas réparties par activité.
Cette absence d’affectation
analytique empêche d’évaluer de façon exhaustive les charges des activités et des équipements
du syndicat.
L’ordonnateur indique que le travail de généralisation de la comptabilité an
alytique
à l’ensemble des dépenses est en cours et qu’
«
il est prévu de le mener à son terme, si possible
avant fin 2025
».
Par ailleurs
, cette comptabilité ne fait l’objet d’aucune restitution
, que ce soit au comité
syndical, à la commission des finances, à la direction générale ou à la direction des finances, si
bien que le syndicat n’a qu’une connaissance très limitée de ses coûts. Alors même qu’il connaît
des difficultés financières, ses décisions ne sont pas suffisamment fondées sur des données
économiques et il ne dispose pas d’outils de pilotage.
L’ordonnateur prévoit
néanmoins de
présenter les données issues de la comptabilité analytique à l’ensemble des instances de
décision du syndicat l
orsqu’elles auront été fiabilisées.
La chambre recommande au Sydeme
d’
accroître la complétude de la comptabilité
analytique en procédant à une affectation de l’ensemble des charges aux activités
et
d’élaborer
des outils de restitution de cette information. Ces nouveaux outils de pilotage seront à utiliser
pour fonder ses choix de gestion.
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
44
Recommandation n° 1.
:
Fiabiliser la comptabilité analytique, élaborer des outils de
restitution de l’information et les utiliser pour fonder les choix de gestion.
4.2.2
Réduire les surcoûts des équipements liés aux biodéchets
4.2.2.1
Envisager l’abandon du système multiflux
Comme démontré précédemment, le multiflux explique à lui seul 9 € par an et par
habitant des surcoûts identifiés. Ce système coûteux est, en outre, inefficace pour trier les
déchets. En effet, les déchets recyclables comme les biodéchets sont mal triés, provoquant des
coûts additionnels (refus de tri) pour les emballages d’environ 2 € par an et par habitant, coût
supplémentaire également inhérent à ce système multiflux. Par ailleurs, la mauvaise qualité des
déchets entrant en méthanisation génère un compost qui, bien que conforme à la réglementation,
n’est pas valorisé en agriculture en raison d’une forte présence de particules fines.
Mis en service il y a près de 15 années, les centres multiflux sont vétustes et
nécessiteraient de nouveaux investissements évalués entre 10 et 12 M€.
La chambre invite le syndicat à envisager l’abandon du multiflux, ce qui nécessite au
préalable d’identifier et d’évaluer les coûts liés aux solutions alternatives de collecte séparée de
biodéchets soit en porte-à-
porte, soit en points d’apport volontaire.
Certains membres pourraient opter pour le compostage des biodéchets, dont le coût est
plus faible que
la collecte. Cette solution serait de nature à réduire la production d’énergie de
l’unité de méthanisation puisque les tonnages entrants seraient réduits de ce fait. Il conviendra
dès lors de mettre en œuvre un système incitatif afin de limiter la baisse d
es biodéchets
méthanisés, par exemple grâce à un tarif différencié incitant au traitement des biodéchets.
4.2.2.2
Optimiser le fonctionnement de Méthavalor
La chambre estime que l’unité de méthanisation génère des surcoûts de 11 € par
habitant. Outre la réduction
des dépenses, l’augmentation des recettes de cette unité est l’autre
solution pour réduire les surcoûts. De ce point de vue, le seul levier réside dans une amélioration
des conditions d’exploitation. Une telle optimisation nécessite des outils fiabilisés
de pilotage
de l’installation dont ne dispose pas le syndicat. La chambre lui recommande de s’en doter.
Recommandation n° 2.
:
Se doter d’outils
fiables de pilotage
de l’unité de
méthanisation permettant d’identifier la quantité de gaz produite et ses débouchés.
La chambre c
onstate que le mix de production énergétique n’est pas optimisé puisque
le gaz produit par l’unité est transformé pour une grande partie en électricité
,
alors qu’il
conviendrait de privilégier l’injection de biogaz dans le réseau
qui procure des revenus plus
importants. Au surcroît, le contrat de rachat du biogaz, signé en 2013 pour une durée de 15 ans,
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
45
arrive prochainement à échéance. À cette occasion, des tarifs de vente plus avantageux
pourraient être envisagés et amélioreraient ainsi le rendement économ
ique de l’unité.
Par ailleurs, les digesteurs ne sont utilisés qu’à un peu plus de la moitié de leur capacité
,
notamment en raison de la taille du hall de stockage
. Les coûts de l’unité de méthanisation étant
principalement fixes et chaque biodéchet méthanisé générant une recette par la vente d’énergie
produite, chaque tonne supplémentaire introduite de biodéchets permettrait de réduire le déficit
de l’installation.
En augmentant la quantité de biodéchets reçus, en améliorant la qualité des déchets en
provenance de ses membres (passant nécessairement par un changement de mode de collecte)
et en privilégiant l’injection de gaz à la production d’électricité, le syndic
at pourrait accroître
ses recettes annuelles
et ainsi réduire le déficit de l’équipement
.
Pour y parvenir, le syndicat doit augmenter le volume de biodéchets traités.
Le démarchage de gros producteurs (restaurants, grandes et moyennes surfaces) a atteint
ses limites puisque pour maintenir la coopération public-public avec son partenaire allemand,
le syndicat doit réaliser sur le marché concurrentiel moins de 20 % des activités concernées par
cette coopération, seuil déjà atteint (
cf. supra
).
Il reste do
nc à rechercher des biodéchets auprès d’autres EPCI. Le Sydeme pourrait être
aidé en cela par l’évolution de la réglementation. En effet, depuis le 1
er
janvier 2024,
conformément à l’article L.
541-21-
1 du code de l’environnement, les collectivités territo
riales
ont l’obligation de mettre en place un tri à la source des biodéchets et de proposer, de manière
complémentaire :
-
soit une valorisation sur place (via des composteurs individuels ou collectifs) ;
-
soit une collecte séparée des biodéchets (via des ba
cs dédiés ou des points d’apport
volontaire).
Ces nouvelles dispositions pourraient offrir l’opportunité au syndicat de recevoir les
déchets des EPCI voisins,
d’autant
plus
qu’il est le seul pour l’instant à disposer d’un
méthaniseur public dans le département de la Moselle et que sa capacité de traitement pourrait
lui permettre de recevoir les biodéchets de tous les mosellans.
Des échanges ont eu lieu entre le Sydeme et les groupements chargés du traitement des
déchets de Moselle Nord (Sydelon) et de la métropole de Metz, assistée
d’
Haganis, sa régie
chargée du traitement des déchets, mais sans aboutir à un accord. Le Sydelon prévoit la
construction de son propre méthaniseur, mutualisé avec la métropole de Metz
, d’une capacité
de 36 000 tonnes.
Sans coopération avec ces groupements, il reste au Sydeme à offrir ses services de
traitement des biodéchets à des collectivités du Bas-Rhin ou de Meurthe-et-Moselle. Cette
solution d’optimisation permettrait en outre de disposer de recettes supplémentaires
pour la
prise en charge du traitement des biodéchets. Des demandes ont été formulées aux services
préfectoraux afin d’autoriser l’élargissement de l’origine géographique des déchets mais, selon
le Sydeme, les derniers compléments qu’il a apportés en 2021 n’ont pas
reçu de réponse.
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
46
Certaines menaces pèsent toutefois sur les approvisionnements du site de méthanisation
puisque deux membres, représentant un quart de la population, évoquent une sortie du syndicat.
L’un, la CCPB, a d’ores et déjà délibéré
en ce sens
86
.
De surcroît, sortir les biodéchets du multiflux pourrait réduire les quantités apportées
par certains membres, tentés de privilégier le compostage individuel ou collectif par les
ménages à la collecte séparée, plus onéreuse.
4.2.3
Mener une revue des dépenses
Les surcoûts identifiables de gestion des déchets sur le territoire du syndicat
s’expliquent par
:
-
la résorption du déficit (8 €)
;
-
le multiflux (11 €
, y compris les refus de tri en grande partie liée au système) ;
-
et l’unité de méthanisation (11 €).
Cepen
dant, l’origine d’une partie des surcoûts (20 € par habitant) n’a pu être identifiée
par la chambre en raison, d’une part, d’une information trop partielle sur les charges du Sydeme
et, d’autre part, de l’absence d’indicateurs comparatifs précis au niveau
régional ou national.
Certaines causes ont été identifiées par la chambre sans pouvoir être précisément
estimées ou comparées. Tout d’abord, les activités liées au transport des déchets se sont accrues
avec le traitement des emballages dans les Vosges.
Ensuite, les coûts liés à l’administration du
syndicat sont à étudier, ils étaient en moyenne de 1,6 M€
87
en 2021 et en 2022. Enfin, 20 % des
charges ne sont ni affectés à une activité,
ni répartis. Même si leur montant diminue, il s’élevait
encore à 8,1 M€
en 2022.
Dès lors, la chambre invite le Sydeme à mener une revue de ses dépenses pour estimer
le coût et l’apport de chaque activité au service rendu à ses membres et aux usagers.
Il pourra
ensuite sur cette base identifier l
es mesures à mettre en œuvre
permettant de réduire le surcoût
de la gestion des déchets constaté sur son territoire.
Recommandation n° 3.
: Mener une revue des dépenses pour évaluer précisément le
coût et l’apport de chaque activité au service rendu aux membres et usagers.
86
Délibération du 22 décembre 2023 portant sur la
«
mise en œuvre de la procédure de retrait du
SYDEME par la CCBP »
.
87
Charges directes inscrites dans les activités administration générale, communication, qualité, hygiène
et frais généraux.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
47
ANNEXES
Annexe n° 1. Liste des établissements membres du Sydeme et leur population
............
48
Annexe n° 2. Territoire et répartition des compétences entre le Sydeme et ses
membres
.....................................................................................................
49
Annexe n° 3. Répartition des activités entre le Sydeme et ses prestataires
....................
50
Annexe n° 4. Erreurs comptables affectant les comptes ouverts au 1
er
janvier 2019
.....
51
Annexe n° 5. Hypothèses retenues s’agissant du retraitement de l’actif
........................
55
Annexe n° 6. La complexité du calcul des contributions des membres
..........................
56
Annexe n° 7. Un régime juridique et financier à clarifier
...............................................
57
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
48
Annexe n° 1.
Liste des établissements membres du Sydeme et leur population
Communauté
d’agglomération de Forbach Porte de France (CAFPF)
Communauté d’agglomération de Saint
-Avold Synergie (CASAS)
Communauté d’agglomération de Sarreguemines Confluences (CASC)
Communauté de communes Bouzonvillois-Trois frontières (CCB3F)
88
Communauté de communes de Freyming-Merlebach (CCFM)
Communauté de communes de l’Alsace Bossue (CCAB)
Communauté de communes du district urbain de Faulquemont (CCDUF)
Communauté de communes du Pays de Bitche (CCPB)
Communauté de communes du Warndt (CCW)
Communauté de communes de la Houve et du Pays boulageois (CCHPB)
Intercommunalité
2019
2020
2021
2022
2023
CAFPF
79 237
78 570
78 293
77 910
77 491
CASAS
54 561
54 293
53 998
53 813
53 429
CASC
66 726
66 357
66 121
65 634
65 267
CCB3F
13 732
13 644
13 582
13 555
13 530
CCFM
32 757
32 352
32 109
31 932
31 905
CCAB
25 254
25 087
24 991
24 880
24 766
CCDUF
25 122
24 902
24 780
24 695
24 640
CCPB
35 428
35 169
34 921
34 681
34 343
CCW
18 385
18 296
18 268
18 261
18 002
CCHPB
23 588
23 555
23 476
23 377
23 290
Total
374 790
372 225
370 539
368 738
366 663
Source : CRC à partir de données Sydeme.
88
P
our une partie de son territoire, l’autre partie relevant de la compétence du syndicat mixte de transport
et de traitement des déchets ménagers de Lorraine Nord (SYDELON).
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
49
Annexe n° 2.
Territoire et répartition des compétences entre le Sydeme et ses membres
Source
:
CRC d’après site internet du Sydeme
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE MOSELLE EST (SYDEME)
50
Annexe n° 3.
Répartition des activités entre le Sydeme et ses prestataires
Source
:
CRC d’après rapport d’activité du Sydeme 2021
-2022
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
51
Annexe n° 4.Erreurs comptables affectant les comptes ouverts au 1
er
janvier 2019
Des produits majorés
L’inscription d’un produit lié au crédit d’impôt compétitivité emploi
L’instruction budgétaire et comptable M4 (IBC M4) appliquée par le Sydeme prévoit
que les produits comprennent
« les sommes ou valeurs reçues ou à recevoir : en contrepartie
de la fourniture par le service de biens, travaux, services ainsi que des avantages qu'elle a
consentis ; en vertu d'une obligation légale existant à la charge d'un tiers ; exceptionnellement,
sans contrepartie »
(IBC M4 applicable en 2018, tome 2, p. 4). La procédure de rattachement
des charges et de produits à l’exercice vise à assurer la correcte application du principe
d’indépendance des exercices. Pour les produits, elle consiste à intégrer tous les droits acquis
au cours de l
’exercice considéré qui n’ont pu être comptabilisés (
IBC M4, tome 3, p. 42).
Au cours des exercices 2013 à 2018, des produits ont été comptabilisés dans les comptes
de la régie Ecotri pour un total de 980
000 € au titre du crédit d’impôt pour la compétiti
vité et
l’emploi (CICE). L’administration fiscale
,
considérant que la régie n’était pas éligible à ce
crédit d’impôt a, dès 2016, rejeté le remboursement de ce crédit (confirmé le 15
octobre 2019
par le tribunal administratif de Strasbourg et la cour admin
istrative d’appel de Nancy en 2021).
Dès lors, sans obligation légale existant à la charge de l’administration fiscale de rembourser
ce crédit d’impôt, la régie n’aurait pas dû comptabiliser ce produit.
En contrepartie de ce produit, une créance était alo
rs inscrite à l’actif de la régie. Compte
tenu du risque de non recouvrement, une dépréciation de cette créance aurait dû être constatée
ou une provision aurait dû être inscrite
89
. À la clôture de l’exercice 2018, aucune provision ou
dépréciation n’avait ét
é comptabilisée.
L
e syndicat n’aurait donc pas dû inscrire les produits liés au CICE. Une fois cette
première erreur commise, il aurait dû déprécier la créance inscrite au bilan de sa régie.
Ces manquements comptables ont eu pour conséquence de majorer le résultat de la régie
Ecotri de 980
000 €.
Le rattachement injustifié de produits
L’instruction M4 précitée limite le rattachement des produits aux
droits acquis au cours
de l’exercice considéré qui n’ont pu être comptabi
lisés.
Au 31 décembre 2018, le Sydeme a rattaché des produits (compte 706) sous la
dénomination « traitement des jus non immobilisés » pour un montant de 906 415
et
« TGAP
90
2018 - rattrapage 2014-15-16 » pour un montant de 392 303
€. Ces produits devaie
nt
faire l’objet de «
factures à émettre » aux membre
s. Or, ces produits ne s’appuyaient pas sur
89
Sont inscrites [au compte 151
Provisions pour risques] toutes les provisions destinées à couvrir les
risques identifiés inhérents à l’activité du service (I
BC M4 tome 2, p. 24).
90
Taxe générale sur les activités polluantes (TGAP).
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
52
une décision du comité syndical prévoyant le versement de telles contributions. Aucune
convention ou délibération ne permettait au syndicat d’en espérer la fac
turation. Ces montants
n’ont d’ailleurs jamais été appelés
, ni
a fortiori
versés.
L’inscription de ces produits non justifiés a eu pour effet de majorer le résultat de
1 298 718
.
Des charges minorées
L’absence d’inscription de certaines charges liées à
des reversements aux membres
À l’instar des produits, le rattachement des charges consiste à intégrer dans le résultat
d’exploitation d’un exercice les charges qui le concernent (IBC M4, tome 3, p. 142).
Au cours des exercices 2018 et antérieurs, le syndicat a inscrit en produits des soutiens
reçus ou à recevoir des exercices 2016 à 2018. Il a fait de même avec les ventes des produits de
recyclage. De manière constante, ces soutiens sont reversés aux membres du syndicat. Ainsi,
en conséquence de l’inscript
ion des produits précités, le Sydeme aurait dû inscrire sous la forme
d’un rattachement des charges les droits acquis par ses membres ou, si des incertitudes pesaient
sur le montant à reverser, sous la forme d’une provision pour charges. Or, seuls les reve
rsements
liés aux acomptes pour l’exercice 2016 avaient été rattachés au 31
décembre 2018 et ce, pour
un montant de 1 881
880 €. Les reversements aux membres liés au solde de l’exercice 2016 et
aux soutiens des exercices 2017 et 2018, pourtant inscrits en produits,
n’avaient pas été inscrits
en charges.
La chambre estime que le montant non rattaché des charges
en 2018 s’élèv
e à
8 662
355 €
et a eu pour effet de majorer le résultat du même montant. Cette somme a été
rattachée à la clôture de l’exercice 2019
.
L’inscription irrégulière de charges constatées d’avance
Aux termes de l’instruction M4, les charges constatées d’avance
« sont des actifs
correspondant à des achats de biens ou de services dont la fourniture ou la prestation
interviendra ultérieurement »
. Plus précisément, le compte 486 « Charges constatées
d’avance
» est
« débité en fin d’exercice, du montant des charges enregistrées en section
d’exploitation alors qu’elles ne se rapportent pas ou qu’elle ne se rapportent qu’en partie à la
gestion en cours, par le crédit des comptes de la classe 6 qui ont supporté la dépense »
.
Depuis 2014, le Sydeme a irrégulièrement considéré que les coûts des sacs supportés
durant l’exercice N devaient être rattachés à l’exercice N+1 en raison des durées de stockage
de ces sacs par les ménages, qui,
d’après ses données, étaient de l’ordre de dix mois
.
Cependant, ce stockage des sacs par le consommateur final ne saurait correspondre à la
définition d’une charge constatée d’avance inscrite à l’actif. Seul le coût de production ou
d’acquisition des sacs non distribués et donc stockés par le Sydeme peut être inscrit à l’actif.
Cette erreur comptable a été corrigée au cours des exercices 2020 et 2021.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
53
À la clôture des comptes
de l’exercice
2018, le syndicat a ainsi réduit de manière
irrégulière ses charges de 3 300 050
€ et donc majoré son résultat du même montant.
L’a
bsence de dépréciation des actifs financiers liés à une SEM en difficulté dont le
Sydeme était actionnaire.
Le syndicat était actionnaire principal d’une société d’économie mixte (SEM) dont il
avait souscrit des parts sociales pour un montant de 31
265 €.
Il avait également accordé à cette
société une avance de trésorerie de 800 000
€ et une garantie d’emprunt de 575
000 €. Le
commissaire aux comptes de la société avait, dès l’exercice 2017, refusé de certifier les comptes
au motif notamment que «
l’applic
ation des règles et principes comptables français dans un
contexte normal de poursuite des activités concernant notamment l’évaluation des actifs et des
passifs, pourrait s’avérer inappropriée
». Il avait confirmé cette opinion d’audit sur les comptes
2018 en indiquant que «
les comptes annuels ne sont pas […] réguliers et sincères et ne donnent
pas une image fid
èle du résultat des opérations de l’exercice écoulé ainsi que de la situation
financière et du patrimoine de la société
». L’annexe des comptes ind
iquait quant à elle que
«
la continuité d’exploitation de la société est compromise
».
Lorsque la valeur actuelle d’un actif immobilisé, c’est
-à-dire la valeur la plus élevée de
la vénale ou de la valeur d’usage, devient inférieure à la valeur nette compt
able, cette dernière
est ramenée à la valeur actuelle par le biais d’une dépréciation (IBC M4, tome 2, p.
38). Par
ailleurs, une
provision destinée à couvrir les risques identifiés inhérents à l’activité du service
est à constituer (IBC M4 tome 2, p. 24).
Malgré les incertitudes avérées pesant sur la poursuite des activités de la SEM, qui
mèneront d’ailleurs à sa liquidation, le Sydeme n’a pas procédé à la dépréciation des actifs
financiers liés à la SEM, ni au provisionnement du montant de la garantie d’em
prunt.
L’absence de comptabilisation des dépréciations
liées à la SEM et de la provision
pour garantie d’emprunt a eu pour effet de majorer le résultat de 1
406 265
€.
L’inscription en engagement hors bilan de passif remplissant la définition d’une
dette certaine
Au compte
administratif de l’exercice 2018 du syndicat, figuraient dans les
engagements hors bilan les intérêts moratoires dus à l’un de ses fournisseurs (480
000 €) et des
reliquats de la TGAP non encore réglés (479 254
€).
L’IBC M4 (tome 2, p. 7) définit une dette comme un passif certain dont l’échéance et le
montant sont fixés de façon certaine. Seuls les passifs éventuels
91
peuvent être inscrits en
engagement hors bilan.
91
Un passif éventuel est :
-
soit une obligation potentielle de l’entité à l’égard d’un tiers résultant d’événements dont l’existence ne
sera confirmée que par la survenance, ou non, d’un ou plusieurs événements futurs incertains qui ne sont pas
totalement sous le contrôle de l’entité ;
-
soit une obligation de l’entité à l’égard d’un tiers dont il n’est pas probable ou certain qu’elle provoquera
une sortie de ressources sans contrepartie au moins équivalente attendue de celui-ci.
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
54
Ici, la définition d’une dette était bien remplie pour, d’une part, les in
térêts moratoires
payés dont l’échéance était prévue au 31 janvier 2019 (et ayant été réglés effectivement le
21 février 2019 pour 482
000 € suivant le protocole d’accord transactionnel) et, d’autre part, la
TGAP liée aux exercices 2014 à 2016 réglée entre le 4 mars 2019 et le 5 février 2020 par
trois versements de 154
751 € et une amende de 15
000
€. À la clôture de l’exercice
2019, la
part encore due à cette date a été inscrite en provisions.
Ces montants auraient dû être inscrits en dette via une charge
dès l’exercice 2018
.
En les portant dans les engagements hors bilan, le Sydeme a majoré son résultat de
961
254 €.
L’absence de comptabilisation des dettes de congés payés
L’instruct
ion comptable (IBC M4, tome 2, p. 47) prévoit que « les indemnités de congés
à payer acquises à la clôture de l’exercice sont portées au crédit du compte 4282 « Dettes
provisionnées pour congés à payer » par le débit du compte 6412 « Congés payés ».
Le syndicat n’a pas procédé à cette inscription comptable.
Sur la base du montant
porté en provisions dans les régies
à la clôture de l’exercice
2019, la chambre estime que
cette dette s’élevait à 688
912
€ majorant le résultat de l’exercice 2018 du même montant.
_______________________________ CONCLUSION ______________________________
La chambre estime que les erreurs comptables sur les comptes 2018 du Sydeme et de
ses régies ont eu pour effet de majorer le résultat de 17 297
504 €.
Ces erreurs comptables (en
dehors de celle liée aux charges constatées d’avance) ont été corrigées au cours de l’exercice
2019.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
55
Annexe n° 5.
Hypothèses retenues s’agissant
du retraitement de l’actif
L'analyse de la chambre s'est concentrée sur une partie de l'état de l'actif établi à la date
du 31 décembre 2022 représentant 80 % de la valeur nette comptable.
La révision a été réalisée en se fondant sur des hypothèses de durées d'amortissement
spécifiques et en concertation avec les services techniques et financiers du Sydeme, comme
suit :
-
pour les bâtiments, une durée d'amortissement de 25 ans a été appliquée ;
-
les aménagements ont été amortis sur une période de 20 ans ;
-
en ce qui concerne le centre de tri de Saint-Avold (recyclables), une durée
d'amortissement de 17 ans a été retenue ;
-
les centres de tri multiflux ont été soumis à des durées d'amortissement de 25 ans
pour les bâtiments et de 15 ans pour les « process » ;
-
l’usine Méthavalor
a fait l'objet de plusieurs évaluations en fonction des scénarii
détaillés ci-après ;
-
enfin,
l’ensemble des immobilisations relatives à
Méthavos ont vu leur valeur
nette comptable réduite à néant en raison
de l’inactivité de l’équipemen
t depuis
fin 2022.
Tableau n° 1 :
Surestimation de l’actif en fonction de différents scénarii de durée d’amortissement
concernant Méthavalor (en M€)
En M€
Valeur nette
étudiée
Valeur nette
retraitée (scénario
20 ans)
Valeur nette
retraitée (scénario
17 ans)
Valeur nette
retraitée (scénario
15 ans)
Méthavalor
29
16
13
10
Méthavos
3
-
-
-
Multiflux
12
7
7
7
Autres
(locaux
Sydeme…)
5
5
5
5
Total général
50
29
25
22
Surestimation
de l'actif
21
25
27
Source
: chiffrage CRC d’après l'état de
l'actif établi à la date du 31 décembre 2022.
SYNDICAT MIXTE DE TRANSPORT ET DE TRAITEMENT DES DÉCHETS MÉNAGERS DE
MOSELLE EST (SYDEME)
56
Annexe n° 6.La complexité du calcul des contributions des membres
Les statuts du Sydeme prévoient une contribution fondée sur deux composantes.
La première pour les
«
frais d’administration générale, financiers et d
e gestion »
est
fonction du nombre d’habitants.
Elle s’élève
depuis 2021
à 8 €
92
par habitant. Or, pour
l’exercice 2022, le montant des frais généraux (1,9
M€) et des charges financières (2 M€) était
a minima
93
de 3,9 M€
,
soit 10,7 € par habitant. La chambre
constate que le niveau de la
contribution par habitant ne permet pas de faire face aux frais d’administration, comme le
prévoient pourtant les statuts.
La seconde composante pour les
« frais de transport et de traitement des déchets »
devrait être fonction des quantités de déchets.
Cette composante fait l’objet d’une grille tarifaire
dont la dernière version
recense près d’une trentaine de prestations
différentes, associant des
quantités par type de déchets, des forfaits et des distances. Pour obtenir les informations
nécessaires à la facturation de ses membres, le syndicat doit notamment procéder, par sondage,
à
un tri manuel assorti d’une pesée
des déchets déposés par les habitants. Les coûts associés à
cette activité sont estimés par le syndicat à 100 0
00 € par an
.
En utilisant le montant facturé au titre des prestations obligatoires, la chambre a
déterminé, par une méthode d’analyse basée sur des itérations
successives, une solution de
facturation simplifiée aboutissant à des montants proches de ceux facturés et permettant de
respecter les dispositions statutaires du syndicat. Ainsi, en calculant le montant de la
contribution sur la base de la population de chaque membre à hauteur de 36 % et des tonnages
globaux de déchets traités à hauteur de 64 %, la différence entre cette contribution théorique et
celle facturée avec le système complexe du syndicat est en moyenne de seulement 3 %
94
.
La chambre constate donc que le syndicat utilise une méthode de calcul des
contributions non conforme à ses statuts et qu
i s’avère inutilement complexe. Elle l’invite à
simplifier cette méthode.
92
S’ajoute une contribution supplémentaire de
5,875
€ par habitant
devant permettre de résorber le déficit.
93
La classification analytique du Sydeme n’est pas exhaustive, ainsi, à titre d’exemple, les dotations aux
amortissements ne sont pas affectées par activité.
94
Avec un écart extrême maximum de 5,5 % et minimum de - 4 %.
RAPPORT D’OBSERVATIO
NS DÉFINITIVES
57
Annexe n° 7.Un régime juridique et financier à clarifier
La problématique des contributions rejoint directement celle de la qualification
juridique des activités du Sydeme soit en service public administratif (SPA), soit en service
public à caractère industriel et commercial (SPIC). En l’absence de qualification législative, la
nature administrative est présumée, sauf si trois critères cumulatifs sont réunis et tendent à
qualifier le service en SPIC
95
:
l’objet du service est comparable à celui d’une entreprise privée,
le financement est assuré par des redevances facturées aux usagers et les modalités de
fonctionnement s’assimilent à celles d’une entreprise privée
96
. Néanmoins, il ressort de la
jurisprudence dans le domaine des déchets que le critère du mode de financement est
prépondérant. Ainsi, si le financement est assuré par le budget général ou la taxe d’enlèvement
des ordures ménagères, le service est administratif
97
. À l
’inverse, il est industriel et commercial
lorsqu’une redevance est facturée à un usager (redevance d’enlèvement pour les ménages ou
redevance spéciale pour les professionnels)
98
.
Pour l’exercice 2022, il ressort des comptes du syndicat que près de 80
% de ses recettes
d’exploitation proviennent
des contributions des membres et que moins de 10 % sont liés à des
prestations facturées à des clients ou à la
revente d’énergie produite par les installations
. Selon
l’avis de l’administration fiscale
(
cf. supra
),
puisqu’il agit dans le cadre d’un transfert de
compétences, le Sydeme ne peut pas être regardé comme délivrant des prestations de services
à ses membres moyennant le paiement d’une redevance
99
. Par conséquent, les contributions que
ces derniers versent ne doivent pas être assujetties à la TVA.
Il s’ensuit qu’une part essentielle
de l’activité du syndicat
apparaît
s’assimiler à celle d’un SPA au regard du critère prédominant
du mode de financement.
L
a chambre invite l’ordonnateur à mener une étude approfondi
e sur la qualification des
différentes activités du Sydeme
, afin d’en tirer les conséquences sur les plans juridique et
financier.
95
CE, 16 novembre 1956,
Union syndicale des industries aéronautiques
.
96
Le fait d’appliquer la nomenclature budgétaire et comptable M4 normalement applicable aux SPIC
n’est pas un indice suffisant pour
établir que le fonctionnement de cet établissement serait comparable à celui d'une
entreprise privée et que le service serait qualifiable de SPIC (CAA de Paris, 23 avril 2019,
Communauté de
communes du Pays de Fontainebleau
, n° 17PA00362).
97
CE, 8 janvier 1997,
Société Verrerie-
Cristallerie d’Arques
, n° 151795.
98
CE, 10 avril 1992,
SARL Hofmiller
, n° 132539 ; T. Confl., 12 octobre 2015,
Communauté de communes
de la vallée du Lot et du vignoble
, n° C4024.
99
CAA de Nancy, 7 février 2013, Syndicat d'études et de réalisations pour le traitement intercommunal
des déchets (Sertrid), n° 12NC00063.
De plus, lorsqu’un syndicat est exclusivement chargé d’un SPIC, il ne peut
recevoir en principe
aucune participation de ses membres au titre du 1° de l’article L. 5212
-19 du CGCT. Ces
derniers ne peuvent prendre en charge des dépenses de ce service, couvertes en principe par le produit des seules
redevances perçues auprès des usagers, que pour l’une des raisons limitativement énoncées à l’article L. 2224
-2
du même code (CE, 29 octobre 1997,
Sucrerie agricole de Colleville
, n° 144007 ; CE, 6 avril 2007,
Syndicat
intercommunal d’adduction d’eau et d’assainissement d’eau de la vallée de la Béthune
, n° 284544).
Chambre régionale des comptes Grand Est
3-5, rue de la Citadelle
57000 METZ
Tél. : 03 54 22 30 49
grandest@crtc.ccomptes.fr
« La société a le droit de demander compte
à tout agent public de son administration »
Article 15 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen
L’intégralité de ce rapport d’observations définitives
est disponible sur le site internet
de la chambre régionale des comptes Grand Est :
www.ccomptes.fr/fr/crc-grand-est