Situé dans un département en fort déficit de médecine de ville (dernier au classement régional), le centre hospitalier de Bourg-en-Bresse (CHBB) est l’établissement de santé de référence du département de l’Ain. Support du Groupement hospitalier de territoire (GHT) Bresse-Haut-Bugey, il présente une offre de soins de recours et de proximité répartie en sept pôles d’activités cliniques, médico-techniques et de support : médecine, chirurgie, soins critiques et non programmés, mère-enfant, gériatrie, cancérologie, transversal et support.
L’analyse des comptes rendus du comité stratégique du GHT, ainsi que la production d’éléments de réalisation par celui-ci, permettent de constater la réelle activité du GHT en tant qu’animateur de bassin de santé avec les établissements de santé le composant.
Gouvernance et stratégie d’établissement
Le CHBB ne disposait plus de projet d’établissement complet depuis 2011. Le projet médical 2020-2024 a été validé par le conseil de surveillance le 20 février 2020 comme le projet qualité ; il n’en demeure pas moins que certains éléments sont incomplets ou absents. Par ailleurs, la chambre invite le CHBB à procéder au renouvellement de son contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (CPOM) pour la période 2024-2029 ainsi qu’à rédiger de nouveaux contrats de pôle pour la période 2024-2028 et en assurer un suivi régulier.
Une activité prépondérante sur son bassin de santé
Le centre hospitalier capte 40 % de l’activité en médecine et un tiers en chirurgie et demeure largement majoritaire en obstétrique sur sa zone d’attractivité. La valeur totale produite des séjours en MCO connait globalement une hausse sur toute la période. Afin d’augmenter la qualité du codage, source de recettes supplémentaires, l’établissement a mis en place un système de centralisation et de professionnalisation du codage.
Dans le cadre de l’enquête régionale sur l’hospitalisation à domicile (HAD), la chambre a analysé le dispositif alternatif à l’hospitalisation traditionnelle qui répond au souhait croissant des patients d’être soignés chez eux. Le CHBB est autorisé à exercer l’activité de médecine sous la modalité d’HAD depuis le 20 juillet 2007, en fixant les zones d’interventions autour de la zone de soins de Bourg-en-Bresse. L’HAD du CHBB présente une activité de plus de 12 000 journées, soit environ près de 35 patients pris en charge en moyenne par jour (pour une durée moyenne de séjour de 15 à 24 jours). L’activité de l’HAD a évolué depuis la crise sanitaire, traduisant un poids croissant de l’activité d’oncologie dans les prises en charge HAD, en lien avec le développement de la file active prise en charge en cancérologie.
Un établissement attractif pour les professionnels
Concernant les personnels non médicaux (PNM), les effectifs du budget principal s’élèvent à 1 706 emplois temps plein moyens rémunérés (ETPMR) - en 2023 - et sont stables sur la période sous revue. La masse salariale (budget principal hors intérim) a progressé de l’ordre de 18 %, (passant de 79 M€ en 2019 à 94 M€ en 2022 pour le budget principal et devrait être de l’ordre de 99 M€ en 2023). La gestion de la masse salariale est conduite en fonction d’objectifs cibles actualisés puis validés par le service RH et suivie au moyen d’outils précis et complets. Par ailleurs, l’établissement développe une politique de recrutement et d’attractivité dynamique. Le turn-over des PNM est en augmentation sur la période sous-revue mais demeure parmi les établissements les plus performants de la région Auvergne-Rhône-Alpes.
Concernant les personnels médicaux (PM), la masse salariale a progressé de 23,5 % (passant de 24,7 M€ en 2019 à 30,6 M€ en 2022 pour le budget principal) ; en 2023, elle devrait être de l’ordre de 31,5 M€ (soit une hausse de près de 3 %). Cette évolution est liée à la croissance des effectifs (globalement de + 17,29 ETPMR sans les internes, passant de 160,16 en 2019 à 177,45 en 2023). La chambre relève qu’il n’existe pas de guide du temps de travail médical formalisé au sein du centre hospitalier de Bourg-en-Bresse, permettant d’afficher plus clairement le cadre de travail et les conditions de comptabilisation des différents temps (activité libérale, temps de travail additionnel, activités d’intérêt général, valences). Enfin, l’établissement a développé une politique d’attractivité à l’attention des personnels médicaux. Le CHBB a passé des conventions de coopération avec les HCL, propose des activités de recherche clinique, accueille des internes et enfin implique les praticiens dans les opérations de recherche de candidats et des procédures de recrutement.
Un partenariat dans la construction d’un nouveau bâtiment de soins de suite et de réadaptation
Dans le cadre de la construction et de l’exploitation du nouveau bâtiment de soins de suite et de réadaptation (SSR), l’association ORSAC et le CHBB ont conclu un accord cadre le 11 octobre 2016, actant un montage financier. Cependant, ce dernier n’apporte aucune garantie au CHBB en cas de défaillance de paiement de l’ORSAC que ce soit pour sa contribution aux investissements initiaux ou pour sa participation aux charges de fonctionnement. Il faut attendre la convention d’autorisation d’occupation temporaire du domaine public (AOT) signée le 10 janvier 2019 pour relever l’existence de garanties (encore trop faibles) en cas de non paiement de l’ORSAC ce qui, au regard de l’acte d’engagement signé avec la société en charge de la construction pour un montant de 24,8 M€ l’année précédente, constitue une prise de risque importante pour un établissement hospitalier fortement endetté. La chambre souligne que le CHBB pourrait demander à l’ORSAC, une garantie bancaire couvrant tout ou partie du risque financier.
Un établissement dont le fort endettement doit être contenu
La progression des charges de gestion, est marquée essentiellement par celle des dépenses de personnel, qui augmentent globalement de l’ordre de 20 % entre 2019 et 2022 en raison principalement des mesures salariales gouvernementales. La progression des produits de gestion trouve principalement son origine dans l’augmentation des dotations versées par l’ARS. Au final, le taux de marge brute du CHBB représente 3 % de l’ensemble de produits de gestion en 2022.
Plus spécifiquement, les produits issus de la tarification à l’activité, composés des séjours d’une part et des actes et consultations d’autre part, ont progressé de 5,25 % en moyenne annuelle sur la période, évoluant de 106 M€ en 2019 à 124 M€ en 2022. Alors que l’activité hospitalière a diminué du fait de la crise sanitaire (de 2020 à 2022), le niveau de ces produits n’a pas régressé, grâce au dispositif de la garantie de financement. Les produits forfaitaires ont connu globalement une progression de 91 % entre 2019 et 2022. Cette forte progression résulte notamment d’aides reçues afin de compenser les surcoûts liés à la crise sanitaire.
Le CHBB présente un taux de renouvellement des immobilisations bien au-dessus des 20 % des établissements de même catégorie les plus performants, au cours de la période de 2019 à 2022. Cette situation favorable relève d’une stratégie de réhabilitation globale des bâtiments entre 2009 et 2024. Conséquence directe de ces investissements de rénovation immobilière, l’endettement de l’établissement progresse rapidement sur la période sous revue passant d’un encours de 62 M€ en 2019 à 123 M€ en 2022 soit une progression de 98 %. Dès lors, la chambre recommande au CHBB de réduire le niveau des investissements futurs pour contenir le niveau d’endettement.
RECOMMANDATIONS
- Recommandation n° 1. : Assurer la cohérence du futur projet d’établissement en produisant tous les documents stratégiques au sens de l’article L. 6143-2 du code de la santé publique.
- Recommandation n° 2. : En lien avec l’ARS, mettre en œuvre les procédures de suivi et de renouvellement du CPOM.
- Recommandation n° 3. : Procéder à la rédaction des nouveaux contrats de pôle pour la période 2024-2028 et en assurer un suivi régulier.
- Recommandation n° 4. : Mettre en place un guide du temps de travail pour le personnel médical.
- Recommandation n° 5. : Encadrer le recours au temps de travail additionnel, en lien avec la COPS, et établir les contrats en conséquence.
- Recommandation n° 6. : Mettre en place un schéma de promotion des achats socialement et écologiquement responsables (SPASER).
- Recommandation n° 7. : Compte tenu des rénovations récentes de l’établissement, réduire le niveau des investissements pour contenir le niveau d’endettement.