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Communauté d’agglomération Var Estérel Méditerranée (Cavem), devenue Estérel Côte d’Azur Agglomération, à Saint-Raphaël (Var) - La prévention et la gestion des déchets ménagers et assimilés

CRC PROVENCE-ALPES-CÔTE D'AZUR

La chambre régionale des comptes Provence-Alpes-Côte d’Azur a contrôlé, sur la période 2015-2021, la communauté d’agglomération Var Estérel Méditerranée (Cavem), devenue Estérel Côte d’Azur Agglomération en 2021, établissement de 115 000 habitants situé dans l’Est-Var. Ce contrôle s’inscrivait notamment dans le cadre d’une enquête nationale menée par la Cour des comptes portant sur la prévention et la gestion des déchets ménagers et assimilés (DMA).

La chambre appelle en particulier à une homogénéisation de l’organisation intercommunale et des procédures relatives à la collecte, qui restent perfectibles, à une rationalisation du système existant en matière de traitement des déchets du territoire ainsi qu’à la mise en place d’un programme local de prévention des DMA pour améliorer la performance de ce service public et atteindre les objectifs nationaux en matière de déchets.

SYNTHÈSE
La chambre a contrôlé les comptes et la gestion de la communauté d’agglomération Var Estérel Méditerranée (Cavem), devenue Estérel Côte d’Azur Agglomération par délibération du conseil communautaire prise le 25 mars 2021, à compter de l’exercice 2015, dans le cadre d’une enquête nationale des juridictions financières portant sur la prévention et la gestion des déchets ménagers et assimilés (DMA).
La Cavem est compétente en matière de prévention et de gestion des DMA sur le territoire de ses cinq communes membres, qui compte près de 115 000 habitants. Une direction dédiée comprenant près de 80 agents assure le bon fonctionnement du service public de gestion des déchets, auquel est consacré un quart du budget de fonctionnement de cet établissement public de coopération intercommunale (EPCI), soit 28,5 M€ en 2019.
La Cavem assure les opérations de collecte et de transport des déchets et a confié l’exercice de sa compétence en matière de traitement au Syndicat mixte du développement durable de l’Est-Var pour le traitement et la valorisation des déchets ménagers (Smiddev) dont elle est membre. Il ressort que 98 % des tonnages de déchets pris en charge par le Smiddev pour ses membres proviennent de la Cavem. La communauté de communes du Pays de Fayence (CCPF), qui est le seul autre membre du Smiddev , n’adhère en effet à ce syndicat que pour une seule de ses neuf communes, Bagnols en-Forêt, sur laquelle se situe l’installation de stockage des déchets non dangereux (ISDND) des Lauriers.
La chambre relève que le Smiddev est également chargé de prestations liées au tri (fourniture des bacs de collecte, actions de communication) et ponctuellement au transport des déchets, missions qui devraient être exercées directement par la Cavem, en charge de la prévention, de la collecte et du transport. Cette organisation alternative pose un problème de régularité puisque les textes n’autorisent pas de tels transferts à la carte et est source de complexité et de dilution de l’action publique.
Le Smiddev confie la plupart des missions dont il a la charge à des sociétés privées dans le cadre de marchés publics, prestations qu’il refacture à ses membres.
Dans ce contexte, la question de l’utilité propre et de l’existence même du Smiddev , du fait notamment de son intervention actuelle quasi exclusive au profit de la Cavem, des stratégies différentes arrêtées par la CCPF et Estérel Côte d’Azur Agglomération en matière de réduction des déchets à la source mais aussi des orientations de la CCPF et de la commune de Bagnols-en-Forêt, continue de se poser. À tout le moins, il serait nécessaire de procéder à une clarification des rôles et du système existant, afin de supprimer les exercices de compétence irréguliers ainsi que les doublons que l’organisation actuelle génère.
La collecte des DMA est organisée de manière très hétérogène sur le territoire de la Cavem, avec des modalités de gestion disparates (régie, recours à des prestataires, gestion mixte) qui n’ont pas évolué par rapport à la situation qui préexistait dans chaque commune à la création de l’EPCI en 2013. Ce statu quo témoigne d’un défaut de vision intercommunale dans la conduite de cette politique publique.

Ce constat est accentué, tout d’abord, par le fait que, jusqu’à la fin de l’année 2021, deux agents municipaux de Fréjus et Saint-Raphaël étaient chargés du suivi des prestataires de collecte pour le compte de la Cavem sur leur territoire communal et dans le cadre d’activités accessoires. Les ordonnateurs ont mis fin à cette pratique irrégulière. Ensuite, le financement de la gestion des déchets repose sur une taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) qui n’a aucun caractère incitatif et qui, surtout, présente des taux non harmonisés qui sont toujours définis par rapport aux territoires communaux. La majorité élue en 2020 s’est engagée à mettre en œuvre un taux harmonisé.
Sur la période examinée, le produit de la TEOM, globalement en suréquilibre, a ainsi permis à l’établissement de dégager près de 7 M€ d’excédent de fonctionnement entre 2015 et 2019 qui ne saurait perdurer.
L’organisation et le suivi du fonctionnement de la collecte en déchèteries apparaît perfectible. La Cavem doit notamment se doter d’un système d’information pour s’assurer du respect des seuils à partir desquels les dépôts de déchets deviennent payants et disposer de données fiables pour optimiser ce service.
Pour le traitement actuel des déchets de la Cavem, le Smiddev possède deux équipements importants, l’un destiné à l’enfouissement des déchets ultimes, l’ISDND des Lauriers à Bagnols-en-Forêt, l’autre au traitement et à la valorisation des déchets verts, la plateforme de compostage de La Poudrière située à Puget-sur-Argens, dont l’exploitation est confiée à des sociétés privées dans le cadre de marchés publics de prestations de services. Les déchets issus de la collecte sélective sont, pour leur part, acheminés vers un centre de tri et de valorisation matière situé sur la commune du Muy et vers d’autres centres de traitement, implantés notamment à Fréjus, tous exploités par des prestataires privés.
Même si elles sont affectées par sa forte attractivité touristique, les performances du territoire en matière de gestion des déchets n’apparaissent pas assez satisfaisantes. En effet, malgré les actions engagées en vue de diminuer le tonnage de DMA collectés par habitant (935 kg/hab. en 2019) et celui des OMR enfouies, tout comme les coûts de gestion, les chiffres affichés par la Cavem restent élevés comparativement aux moyennes nationales et locales. Si des progrès sont notés sur la période, notamment en termes de réduction de l’enfouissement, d’accroissement du tri (mise en place de l’extension des consignes de tri en 2016, de la collecte des bio-déchets en 2018) et de valorisation des déchets, l’EPCI doit poursuivre et amplifier ses efforts pour se rapprocher des performances locales et nationales et atteindre les objectifs fixés à horizons 2025 et 2030.
Dans cette optique, la Cavem doit définir sa stratégie en adoptant enfin son programme local de prévention des DMA, démarche engagée à partir de 2019 seulement alors qu’elle devrait l’avoir menée à terme depuis 2012. L’EPCI gagnerait également à réfléchir à la mobilisation d’outils de financement plus équitables et incitatifs, notamment en matière de gestion des déchets assimilés issus des activités économiques, pour lesquels aucune redevance n’est mise en place, ce qui revient à faire supporter le coût de ce service par la fiscalité des ménages.
Du côté des dépenses, la chambre constate que les contrats et prestations de service représentent plus de la moitié des charges de fonctionnement de la Cavem en matière de déchets. Un petit nombre d’entreprises concentrent une part importante des marchés publics passés par la Cavem.
Les coûts de gestion des déchets par la Cavem, quels que soient les flux considérés et les ratios utilisés, apparaissent largement supérieurs aux coûts moyens nationaux et locaux en zones touristiques et urbaines, dans un contexte où, par ailleurs, les besoins de financement à venir apparaissent particulièrement conséquents dans le cadre des projets ambitieux de nouvelle ISDND du Vallon-des-Pins et d’unité de valorisation multi-filières (UVM).
Le premier projet, lié à la fermeture programmée de la décharge des Lauriers en juin 2023, est porté par une société publique locale (SPL) dont le Smiddev est actionnaire. Cette installation est supposée répondre aux besoins de stockage de la Cavem et d’autres apporteurs de déchets sur 25 ans. Son ouverture était prévue en avril 2022.
Sans remettre en cause la nécessité de créer une nouvelle décharge sur ce territoire, la chambre estime qu’il n’est pas logique et rationnel que ce soit le Smiddev et non la Cavem qui soit actionnaire de cette SPL. Elle constate qu’à aucun moment la Cavem n’a débattu de cette question en bureau ou en conseil communautaire alors que les décisions prises par le Smiddev pour participer à ce projet l’engagent, en particulier en termes financiers, comme l’illustre notamment le fait que c’est la Cavem et non le Smiddev qui garantit les emprunts souscrits par la SPL (15 M€ au total) à hauteur de sa part dans l’utilisation de l’ISDND. En outre, le choix de créer une nouvelle structure juridique qui s’ajoute à des structures existantes qui se superposent induit nécessairement des coûts de fonctionnement supplémentaires et ajoute une couche de complexité dans un système qui l’est déjà suffisamment.
Le projet d’UVM a pour objet de permettre l’extraction de la fraction encore valorisable des OMR et donc de diminuer sensiblement la part des déchets qui seront finalement enfouis. Ce projet structurant, qui semble sur le principe intéressant et novateur, paraît cependant engager le Smiddev , et indirectement la Cavem, dans une démarche techniquement et financièrement risquée, d’autant plus que la CCPF n’est pas impliquée dans le montage et n’envisage pas d’utiliser cet équipement. De fait, le Smiddev porte seul ce projet qui nécessite en l’état 29 M€ d’emprunts, sans qu’à nouveau la Cavem, concernée par cette dette, n’ait décidé de s’y engager.

RECOMMANDATIONS

  • Recommandation n° 1 : Revoir l’organisation de la collecte des déchets afin de rationaliser, d’optimiser et d’homogénéiser les modes de gestion (gestion en régie versus recours à des marchés publics) et le niveau de service offert, tout en prenant en compte le besoin de proximité.
  • Recommandation n° 2 : Mettre en place un système d’information fiable recueillant, par type d’usager et flux de déchet, les données sur la fréquentation et les tonnages entrants en déchèterie ainsi que les coûts induits par ce service, afin de pouvoir en apprécier la performance.
  • Recommandation n° 3 : Finaliser et mettre en œuvre le programme local de prévention des déchets ménagers et assimilés (article L. 541-15-1 du code de l’environnement) dans les meilleurs délais.
  • Recommandation n° 4 : Réaliser une étude de gisement et de caractérisation des déchets assimilés du territoire afin d’étudier les opportunités que pourrait présenter la mise en place d’une redevance spéciale.
  • Recommandation n° 5 : Parallèlement à l’homogénéisation des modes de gestion, procéder à l’harmonisation des taux de la TEOM sur l’ensemble du territoire d’Estérel Côte d’Azur Agglomération.