Une vulnérabilité à la mono-saison et à la mono-activité
La commune des Gets accueille sur son territoire une station de sports d’hiver de moyenne montagne qui culmine à 1 850 mètres d’altitude. Son domaine skiable, composé d’une cinquantaine de pistes, est relié à ceux de Morzine et des Portes du soleil qui s’étend jusqu’en Suisse, sur 12 stations et 600 km de pistes.
Elle a conservé la maîtrise de sa stratégie touristique et de la majeure partie de son domaine skiable dont elle a affermé l’exploitation à la SAGETS, société d’économie mixte dont elle détient 78 % des parts et dont le maire est à la fois le président et le directeur général.
Le modèle économique de la station, pour les acteurs publics comme pour les acteurs économiques, est largement dépendant du ski, même si la fréquentation estivale, en hausse, représente environ 35 % des nuitées.
Les retombées économiques sur le territoire sont également concentrées sur la saison hivernale. Elles sont de l’ordre de 89 M€ pour l’hiver 2021/2022, dont près de 25 % au titre des remontées mécaniques, et elles peuvent être estimées à 25 M€ pendant la saison d’été 2022.
La commune est toutefois fortement exposée au changement climatique. Les perspectives d’enneigement à l’horizon 2035-2050 puis 2100 reposent en grande partie sur la production de neige.
La collectivité, qui se projette difficilement au-delà de 2050, entend maintenir le ski alpin le plus longtemps possible afin de financer la mutation de son modèle économique. Elle a développé sa capacité de production de neige pour garantir l’ouverture et la continuité de la saison, en réalisant plusieurs retenues collinaires. La chambre observe que cette stratégie ne s’appuie sur aucune étude relative à la viabilité économique de la station.
Une stratégie de diversification et de dessaisonalisation bien engagée qui n’a toutefois pas trouvé sa rentabilité économique
Confrontée dès la fin des années 80 à des hivers peu enneigés, la commune s’est engagée depuis plus de 30 ans dans une stratégie volontariste de diversification et de dessaisonalisation, portée par le développement de nouvelles activités, la réalisation d’équipements et l’accueil de manifestations sportives de portée nationale ou internationale. Son objectif à moyen terme est de proposer un bouquet d’activités touristiques neuf mois par an, susceptibles d’entrainer à l’année la même fréquentation et de procurer des revenus comparables à ceux générés par le ski.
Toutefois, à ce jour, malgré des efforts de diversification anciens, importants et coûteux, force est de constater que c’est le ski qui finance les investissements et les déficits d’exploitation de la nouvelle offre touristique.
La commune ne s’appuie en outre sur aucune analyse économique et financière prospective pour piloter sa stratégie de diversification et investit dans de nouveaux projets au coup par coup. Ces activités offrent néanmoins des retombées économiques complémentaires aux professionnels de la station qui sont ouverts plus longtemps sur une année.
Des conséquences financières liées au changement climatique encore limitées pour la commune
Le budget principal, comme le budget annexe remontées mécaniques et activités touristiques, présentent une situation financière saine et des capacités d’investissement et d’emprunt préservées. Les recettes générées par le tourisme représentent une importante ressource financière et ont enregistré une progression de 36 % entre 2017 et 2022, portée par la dynamique des taxes foncières et d’habitation, de la redevance remontées mécaniques et par l’amélioration du rendement de la taxe de séjour.
Ces recettes ne présentent pas toutes la même vulnérabilité au changement climatique. Ainsi, les taxes foncière et d’habitation ne disparaitront pas si l’activité touristique diminue, alors que le montant de la redevance remontées mécaniques et activités touristiques est sensible aux fluctuations de l’enneigement et aux stratégies de diversification.
Si les recettes ont été jusqu’ici peu affectées, la nature, sinon le montant des dépenses d’investissement, a quant à elle évolué. La commune a concentré ses investissements sur la production de neige (réalisation de retenues collinaires et d’un réseau d’eau souterrain). Elle a par ailleurs investi dans des projets de diversification et de dessaisonalisation de son offre touristique. Ces deux axes devraient se maintenir dans les années à venir par la création d’une nouvelle retenue collinaire et la poursuite de la réalisation de nouveaux équipements touristiques (luge quatre saisons et parc accrobranches).
En outre, ces investissements ont été réalisés au détriment de ceux nécessités par l’exploitation habituelle du domaine skiable. Depuis le changement du télésiège du Ranfoilly en 2017, la commune n’a plus investi dans les remontées mécaniques et ne dispose pas d’une programmation de renouvellement ou de rationalisation des remontées mécaniques, alors que leur moyenne d’âge, de l’ordre de 36 années, est élevée.
La chambre observe que la commune ne dispose pas de prospective financière à moyen voire long terme lui permettant d’évaluer l’impact d’une baisse d’activité touristique sur ses équilibres budgétaires. Cela lui serait d’autant plus utile que les investissements qu’elle porte s’amortissent sur des durées de l’ordre d’une trentaine d’années.
RECOMMANDATIONS
- Recommandation n° 1. : transférer les opérations relatives à la retenue collinaire de la Mouille au Blé dans le budget annexe Eau-Assainissement, à hauteur de son utilisation pour l’eau potable.
- Recommandation n° 2. : élaborer les programmations pluriannuelles d’investissement du budget principal comme du budget annexe en s’appuyant sur des prospectives financières dont la durée permettrait d’intégrer les conséquences du changement climatique, afin de s’assurer de leur soutenabilité.
- Recommandation n° 3. : réexaminer le projet de téléporté entre les secteurs des Chavannes et du Mont-Chéry, à l’aune des prévisions d’enneigement dont dispose désormais la commune et de données financières actualisées.
- Recommandation n° 4. : évaluer la disponibilité réelle de la ressource en eau à la bonne échelle géographique et en tenant compte des pics de saisonnalité (à la semaine, voire au jour le jour), dans la perspective du changement climatique (répartition de la pluviométrie annuelle, diminution des débits de fonte).
- Recommandation n° 5. : formaliser la stratégie d’adaptation de la station au changement climatique à l’horizon 2050, adossée à des études économiques de rentabilité.