Largement progressif, l’impôt sur le revenu est également le vecteur principal de la prise en compte de la structure familiale dans l’impôt, mais cette dernière pourrait être consolidée.
L’impôt sur le revenu (IR) repose sur un barème constitué de sept tranches (0% à 49%) : il a été acquitté par 18 millions de foyers fiscaux sur 40 en 2023. En revanche, les prélèvements sociaux, au premier rang desquels la contribution sociale généralisée (CSG), sont acquittés par l’ensemble des personnes percevant des revenus d’activité ou des revenus du capital. Le CPO présente une évaluation de la progressivité conjointe de ces impositions : inférieur à 5% pour le premier dixième de la population, le taux d’imposition moyen auxquels sont soumis les 1% des plus aisés atteint 30%.
À ce principe d’égalité « verticale » se rajoute, pour l’IR, une prise en compte des différences de situation des foyers fiscaux au travers des quotient conjugal et familial. Le CPO constate que les couples aux revenus élevés mais hétérogènes bénéficient du plein effet du quotient conjugal alors que les couples des classes moyennes sont désavantagés par rapport aux célibataires par l’application de la décote, et propose un rééquilibrage en leur faveur. Le CPO appelle également à une meilleure prise en compte des charges familiales dans le calcul de l’impôt par un relèvement du plafond du quotient familial et à un recentrage du quotient familial sur la prise en compte des charges effectivement supportées.
Élément essentiel dans l’appréciation de l’égalité devant les charges publiques, la cohérence du traitement fiscal des différentes catégories de revenus peut être renforcée.
Les différentes catégories de revenus font l’objet de traitement fiscaux différenciés, dans l’objectif de prendre en compte les différences de situation de leurs bénéficiaires. Pour autant, certains traitements fiscaux préférentiels n’apparaissent pas pleinement justifiés. En particulier, si les salaires sont fortement taxés, on assiste au développement des compléments de salaire exonérés, qui fragilise l’égalité devant l’impôt. Les avantages fiscaux dont bénéficient les pensions et retraites ne devraient pas bénéficier aux retraités les plus aisés. Les revenus du patrimoine immobilier continuent d’être marqués par des distorsions entre location meublée et location nue qui sont analysés plus en détail dans une note du CPO publiée conjointement avec ce rapport. La fiscalité des revenus du patrimoine mobilier a été allégée par la création du prélèvement forfaitaire unique (PFU) dont le CPO recommande de poursuivre l’évaluation. Indépendamment de ce dispositif, elle permet cependant plusieurs schémas d’optimisation fiscale, que le CPO recommande de mieux encadrer.
Ces différents types de revenus ne sont pas intégralement pris en compte dans le revenu fiscal de référence (RFR), utilisé comme référence pour le bénéfice de certaines prestations sociales. Le CPO estime que sa définition doit être ajustée pour qu’il reflète mieux les capacités contributives des contribuables.
Les crédits et réductions d’impôt, concentrés sur les plus aisés, pourraient être rationalisés.
Après avoir examiné l’ensemble des crédits et réductions d’impôt d’un montant supérieur à 100 M€, le CPO recommande l’ajustement, voire la suppression, de certains d’entre eux. Le taux du crédit d’impôt pour l’emploi d’un salarié à domicile pourrait être réduit pour les services ne relevant pas de la garde d’enfants ou de la dépendance. La réduction d’impôt à raison des investissements réalisés en Outre-mer et la réduction d’impôt pour frais de scolarité s’ajoutent à d’autres instruments de politiques publiques poursuivant les mêmes objectifs avec une efficacité supérieure : le CPO en recommande la suppression.
Enfin, le CPO constate que le plafonnement global des réductions et crédits d’impôts dont peut bénéficier un foyer fiscal manque aujourd’hui de cohérence et propose d’inclure l’ensemble de ces avantages, à l’exception de la réduction d‘impôts sur les dons, sous un plafond unique modulé en fonction de la composition du foyer fiscal et de l’existence de personnes dépendantes ou à charge.
Enfin, alors que le « pacte fiscal » incarné par l’impôt sur le revenu demeure remis en cause par la fraude et l’évasion fiscale, de nouveaux outils peuvent être développés pour capitaliser sur les avancées obtenues en matière de lutte contre la fraude durant ces dernières années.
Le CPO relève que malgré des progrès, il est nécessaire d’aller plus loin pour lutter contre l’évitement fiscal international en matière d’imposition des revenus des personnes physiques. Le développement des échanges d’information entre Etats sur les bénéficiaires effectifs de sociétés est nécessaire pour faire échec aux stratégies d’évitement internationales de l’imposition sur le revenu des personnes physiques. La concurrence entre Etats pour attirer la résidence fiscale des contribuables aisés nécessite le lancement de nouveaux travaux au niveau de l’OCDE pour lutter contre les pratiques fiscales dommageables.
Sur le plan interne, le CPO constate que la France ne produit pas encore d’évaluation de la fraude ou de l’écart fiscal concernant l’impôt sur le revenu. Il décrit en revanche un paysage des contrôles en pleine évolution rendant nécessaire une meilleure coordination entre les administrations fiscales et sociales. d’une part, entre le juge de l’impôt et le juge pénal d’autre part.
Les mesures proposées par le CPO visent à conforter l’égalité des citoyens devant l’imposition des revenus. En termes budgétaires, elles ont un impact qui peut varier entre une stabilisation des recettes et une augmentation de 1,7 Md€, en fonction des paramètres retenus pour certaines mesures. Le « pacte fiscal » qui constitue une condition de notre contrat social et de notre « vivre ensemble » s’en trouverait renforcé, sans porter atteinte aux finances publiques.