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Service départemental d'incendie et de secours de l'Ardèche (SDIS 07)

CRC AUVERGNE-RHÔNE-ALPES

La chambre régionale des comptes Auvergne-Rhône-Alpes a procédé au contrôle des comptes et de la gestion du service départemental d’incendie et de secours de l’Ardèche (SDIS 07) pour les exercices 2018 et suivants.

Une activité opérationnelle exceptionnellement élevée pour un SDIS de catégorie C

Le SDIS de l’Ardèche est classé dans la catégorie C (département dont la population  est inférieure à 400 000 habitants). Toutefois, la proximité avec le seuil démographique retenu par cette classification, la population de l’Ardèche atteignant 363 000 habitants en 2021, et le nombre d’interventions supérieur à la moyenne des SDIS de la même catégorie (85 interventions par jour en 2022 ) le rapprochent des SDIS de catégorie B (de 54 à 181 interventions par jour).

L’activité du SDIS de l’Ardèche a augmenté de 14,2 % entre 2018 et 2022 avec une part très majoritaire (84 % en 2022) de secours à la personne (SAP).
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Le département de l’Ardèche a pour spécificité une couverture forestière importante, les trois quarts des surfaces du territoire étant boisées. L’augmentation des feux de forêt, conséquence probable du changement climatique, conduit à une mobilisation croissante des moyens matériels (+ 29,2 % de 2018 à 2022) et humains (+ 43,3 % sur la même période).

Un recours massif à l’engagement des sapeurs-pompiers volontaires

Le SDIS de l’Ardèche recourt très majoritairement aux sapeurs-pompiers volontaires (SPV) qui assurent 88 % des interventions en 2022. Les deux tiers des sapeurs-pompiers professionnels (SPP), sont également SPV et sont encouragés à prendre un tel engagement.

Les SPV ont effectué, en moyenne en 2022, 1 040 heures de volontariat.

La jurisprudence de la Cour de justice de l’union européenne (CJUE) fait, depuis 2018, entrer une partie des activités réalisées par des sapeurs-pompiers volontaires dans le champ de la directive européenne sur le temps de travail avec un risque de requalification des temps de garde et d’astreinte sous certaines conditions, en temps de travail avec de multiples conséquences en termes juridiques et opérationnelles et financières.

Le SDIS doit en tirer les conséquences. Tout d’abord, il doit établir une cartographie identifiant les modalités d’organisation qui mettent l’établissement en défaut vis-à-vis de la réglementation européenne : activité excessive de certains SPV, SPP sous double statut et SPV saisonniers. Dans ces situations, les protections minimales applicables aux travailleurs ne sont pas toujours respectées, comme les plafonds hebdomadaires de travail et les temps de repos.

Il lui appartient ensuite d’identifier les changements à opérer et en évaluant leur coût.

Une solution consiste à augmenter le nombre de SPV pour éviter les situations de « quasi professionnalisation » de certains d’entre eux, notamment par la promotion de l’engagement différencié .

Les deux indicateurs de performance majeurs, le délai d’intervention et le potentiel opérationnel journalier (POJ) mesuré par le nombre de sapeurs-pompiers de garde ou d’astreinte, mettent en évidence une importante dégradation de la réponse opérationnelle.

D’une part, les délais d’intervention des sapeurs-pompiers se dégradent entre 2018 et 2022, particulièrement pour les communes urbaines ; dans lesquelles le délai moyen d’arrivée sur les lieux de l’intervention est passé de 10’48 à 12’36.

D’autre part, en journée (de 8H à 18H), en raison de la faible disponibilité des effectifs en semaine, en grande partie composés de volontaires, le potentiel opérationnel réel est inférieur au potentiel fixé par le règlement opérationnel . En raison de l’insuffisance du POJ réel, nombre d’interventions se font en mode dégradée (refus de départs, départ d’un autre centre de secours) même si certaines mesures semblent avoir permis de limiter les refus de départ en 2023.

Une situation financière satisfaisante compte tenu du mode de financement actuel des investissements immobiliers

La structure budgétaire des SDIS est rigide avec des recettes provenant essentiellement de participations des collectivités locales (97,5 % pour le SDIS de l’Ardèche) et des dépenses de gestion majoritairement constituées de dépenses de personnel peu compressibles.

La part du financement portée par le département (54,94 € par habitant) est deux fois supérieure à celle portée par le bloc communal (24,35 €), situation atypique par rapport à l’ensemble des SDIS et par rapport aux SDIS de catégorie C.

Ainsi, les finances du SDIS de l’Ardèche sont très dépendantes de la santé financière des autres collectivités et principalement du département de l’Ardèche ainsi que de l’évolution de la masse salariale.

La situation financière n’appelle pas d’alerte particulière. En effet, même si l’épargne annuelle a été en baisse constante jusqu’en 2021, elle demeure en volume, à un bon niveau, eu égard au mode de financement des investissements qui repose en grande partie sur les subventions accordées par les collectivités locales. Un retrait dans financement direct des investissements immobiliers imposerait toutefois au SDIS un renforcement de ses niveaux d’épargne propres.

L’établissement dispose de quelques possibilités non encore exploitées pour mieux encadrer l’évolution de ses charges en développant des mutualisations avec le conseil départemental et en mettant en place des outils de contrôle de gestion plus efficaces.

Une organisation interne à fiabiliser pour rendre plus efficiente la gestion

Plusieurs lacunes apparaissent dans la gestion de l’établissement :
•    un suivi insuffisant des documents structurants (indicateurs du SDACR) ;
•    l’absence de programme pluriannuel des investissements consolidé ;
•    l’absence de mises à jour régulières des autorisations de programme ;
•    l’obsolescence du règlement intérieur du personnel ;
•    l’absence de guide de la commande publique et d’orientations en matière d’achat responsable ;
•    des délais excessifs dans la réalisation de plusieurs opérations de construction.

Aucun véritable contrôle de gestion n’a jusqu’ici été mis en place au sein de l’établissement et il n’existe pas de comptabilité analytique, même embryonnaire. La taille de la structure (245 agents auxquels s’ajoutent les SPV), ses nombreux sites répartis sur l’ensemble du territoire départemental, doivent conduire la direction à mettre en place de tels dispositifs. Au-delà de la rationalisation des coûts qu’il conviendra de mener, ces outils constitueront également une aide à la décision pour le pilotage des services.

RECOMMANDATIONS

  • Recommandation n° 1. : Adopter avant le deuxième semestre 2024 un nouveau SDACR et, dans les meilleurs délais, le nouveau règlement opérationnel.
  • Recommandation n° 2. : Dès l’adoption du prochain SDACR, prévoir et ensuite assurer le suivi annuel des indicateurs prévus.
  • Recommandation n° 3. : Adopter une programmation pluri annuelle (PPI) consolidée de l’ensemble des investissements.
  • Recommandation n° 4. : Délibérer régulièrement sur l’évolution des autorisations de programme (AP) et l’échéancier des crédits de paiement (CP).
  • Recommandation n° 5. : Mesurer les coûts des différents types d’intervention par la mise en place d’une comptabilité analytique ciblée sur les principales missions.
  • Recommandation n° 6. : Adopter un plan de mise en conformité de l’organisation du temps d’activité des sapeurs-pompiers volontaires avec le droit européen.
  • Recommandation n° 7. Privilégier les recrutements de saisonniers sous forme de contrats de droit public.
  • Recommandation n° 8. : Mieux contrôler les activités et le temps de repos des sapeurs pompiers sous « double statut » (SPP/SPV).
  • Recommandation n° 9. : Respecter le régime des délégations de compétences en matière de commande publique et mettre fin aux décisions superflues.
  • Recommandation n° 10. : Approuver un guide de la commande publique et assurer sa diffusion auprès des services.

 

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