Dans quelle mesure la loi « climat et résilience » et le Plan national pour des achats durables ont-ils abouti à l’insertion de clauses et de critères sociaux et environnementaux dans les marchés de l’État ?
Une très forte augmentation de la proportion des marchés qui intègrent des considérations sociales ou environnementales a été constatée en 2023 : désormais 55 % des marchés attribués par l’État contiendraient une considération environnementale et 25 % une considération sociale. L’obligation fixée par la loi « Climat et résilience » d’un cumul dès août 2026, pour l’intégralité des marchés publics, d’un critère de sélection et d’une clause à caractère environnemental, reste néanmoins un objectif très ambitieux. La Cour met en exergue plusieurs limites quant à la fiabilité de ces chiffres et souligne le risque que certaines considérations n’aient pas de réelle portée opérationnelle. En outre, si la passation des marchés est bien suivie, leur exécution l’est beaucoup moins, rendant très difficile l’appréciation des impacts concrets des considérations sociales et environnementales insérées. Elle recommande donc de mettre en place des indicateurs opérationnels permettant de suivre la mise en œuvre des dispositions de la loi « Climat et résilience », de renforcer la formation et l’information des acheteurs de l’État sur l’achat durable et de contrôler plus spécifiquement l’exécution d’un échantillon de prestations, de services ou de travaux à fort impact en termes de développement durable.
Les considérations sociales des marchés de l’État ont-elles eu un impact sur l’insertion dans l’emploi et ont-elles permis de prendre en compte d’autres objectifs sociaux ?
L’État n’est pas en mesure d’être, par ses achats, un acteur important de l’insertion par l’activité économique. En effet, ses achats ne portent pas sur les secteurs où la présence des structures d’insertion est forte (entretien des espaces verts, certains corps de métier du bâtiment, etc.). En outre, le suivi actuel des heures d’insertion dans les marchés ne permet pas d’évaluer la pérennité de l’intégration professionnelle. La Cour recommande de réaliser des enquêtes nationales pour suivre l’évolution professionnelle des bénéficiaires. Elle préconise également que l’État mobilise plus largement le réseau des facilitateurs de la clause sociale afin d’aider les acheteurs à insérer dans les marchés des clauses relatives à d’autres enjeux sociaux (handicap, secteur protégé).
L’inclusion de considérations relatives à l’environnement a-t-elle eu un impact sur les émissions de gaz à effet de serre ?
La France s’est engagée à réduire ses émissions de gaz à effet de serre à travers des accords internationaux et des dispositions législatives nationales. Pour autant, l’État n’a pas pleinement respecté l’obligation légale de publier un bilan de ses émissions de gaz à effet de serre dès le 31 décembre 2012. Des travaux non publiés, menés par le Commissariat général au développement durable, estiment néanmoins que les achats liés aux biens et services représentent environ 27 % des émissions annuelles de l’État, ce qui fait des achats un outil important de réduction des gaz à effet de serre. L’intégration de critères spécifiques à la réduction des émissions de CO2 dans l’évaluation des offres est encore balbutiante. La Cour relève des initiatives dans les achats immobiliers. La démarche a gagné en maturité mais ne concerne que des enjeux financiers encore modestes. La Cour recommande la publication de guides méthodologiques pour prendre en compte les émissions de CO2 dans le choix des candidats afin d’aider les acheteurs dans cette démarche, en commençant par les secteurs qui présentent les plus forts enjeux.