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Port autonome de Papeete (Polynésie française)

CTC POLYNÉSIE FRANÇAISE

La chambre territoriale des comptes (CTC) a examiné les comptes et la gestion de l’établissement public industriel et commercial du Port autonome de Papeete (PAP) au cours des exercices 2018 et suivants. Le contrôle a porté sur la fiabilité des comptes, la situation financière, la gouvernance, les projets d’investissements pluriannuels, les ressources humaines et la gestion du domaine.

L’année 2020, marquée par la crise sanitaire liée à la pandémie de la COVID 19, a vu l’activité du trafic portuaire fortement impactée par une décroissance enregistrée dans tous les types d’activités (de l’ordre -7,2% par rapport à 2019) avec 1,3 million de tonnes de marchandises traitées. En 2021, les différents trafics maritimes ont stagné en raison d’une forte demande sur le transport maritime dont l’inflation des coûts d’acheminement vers la Polynésie française est une des conséquences (en 2021, en moyenne le coût du fret représente 17% de la valeur des biens importés). Selon la direction générale du Port, la situation se redresse en 2022.

La Chambre regrette vivement l’absence de formalisation du schéma directeur de développement du Port alors même qu’une recommandation dans ce sens a déjà été faite dans son précédent rapport d’observations définitives. Ce défaut de vision stratégique validée et globale handicape à plus d’un titre l’établissement. Ainsi, le plan pluriannuel des investissements arrêté à 38 MdF CFP par le conseil d’administration (CA) fin 2021 ne tient pas compte des stratégies de développement validées. Il est pris note de la réponse la direction générale de l’établissement qui souligne que le Port est sur le point d’aboutir fin 2022, date postérieure à l’instruction, à la validation de ce schéma directeur par les instances dirigeantes.

Le PAP qui doit s’inscrire dans des démarches de protection du cadre de vie et de l’environnement, en amorçant en tant qu’opérateur de premier plan, une transition écologique et énergétique opérationnelle n’a par ailleurs pas voté sa politique dans le domaine environnemental.

La faible association du conseil portuaire à la gouvernance de l’établissement observée est ancienne et a également déjà fait l’objet d’observations de la part de la Chambre dans son précédent rapport en date du 19 février 2018.

Le Port aurait à gagner à dialoguer et à associer les professionnels du secteur aux échéances importantes qui se présentent. Ceci apparaît d’autant plus essentiel qu’il n’existe aucune autre instance de concertation mise en place dans les statuts de l’établissement alors même que par leur contribution les socioprofessionnels participent au développement et à la pérennité de l’outil portuaire.

En matière de ressources humaines, sur la période 2018-2021, la direction du Port n’est pas parvenue à contenir l’évolution de la masse salariale. Celle-ci est en progression à la faveur du renforcement des effectifs consécutifs aux deux réorganisations internes des services (+16, soit 154 postes budgétaires ouverts).

Par ailleurs, la charge relative au versement de l’indemnité de capital retraite a également progressé sous l’effet de l’augmentation de la durée de carrières des personnels quittant l’établissement et représente aujourd’hui un montant moyen par agent de l’ordre de 10 MF CFP en valeur nette.

Enfin, les formations dispensées connaissent en fin de période une chute brutale (111 heures dispensées pour 11 agents en 2021) qui appelle la mise en place d’un plan pluriannuel de formation afin d’accompagner notamment les personnels nouvellement recrutés à la maîtrise de leur emploi.

En ce qui concerne, la gestion du domaine portuaire, la Chambre observe que le Port doit s’attacher à la fois à sécuriser, simplifier, fluidifier et rentabiliser sa gestion. C’est la poursuite et le renforcement de l’ensemble des actions combinées entre elles qui pourra permettre d’obtenir un meilleur niveau de service.

La ressource susceptible d’être perçue au titre de la gestion domaniale doit être potentialisée au maximum (en 2022, cette ressource potentielle estimée à 1 069 MF CFP est en très légère augmentation (2%) par rapport à 2021) par une refonte de la politique tarifaire de l’établissement, un suivi rigoureux de la facturation et de l’ensemble des modalités d’occupation pour éviter toute occupation irrégulière.

Sur un plan financier, les principaux ratios comme l’excédent brut d’exploitation (EBE) (réduit de 52% en 4 ans) et la capacité d’autofinancement (CAF) sont orientés défavorablement en fin de période (2021) en raison de la contraction des recettes lors des deux années de crise sanitaire (+9,6%) alors même que les charges, notamment celles de personnel, ont augmenté (+15,5%). Les comptes de l’année 2021, arrêtés en 2022, enregistrent de meilleurs résultats qui restent à confirmer sur la durée.

Le Port a soutenu les entreprises de la zone portuaire en accordant des exonérations sur ses prestations ou tarifs d’occupation de son domaine. Ce manque à gagner s’est chiffré sur les deux années 2020 et 2021 à 560 MF CFP.

Par ailleurs, les ressources d’exploitation du Port sont fortement dépendantes de la taxe de péage en progression constante sur la période (puisque assisse sur le coût des marchandises importées lequel est orienté à la hausse) pour s’établir en 2021 à 1,9 MdF CFP, soit en moyenne 46% des recettes courantes d’exploitation. Or, la pérennité de ce mode de financement n’est actuellement garantie que par le maintien à l’identique du dispositif d’affectation de cette taxe au Port tel que voté par l’assemblée de la Polynésie française. Pour le Port la question de la sécurisation de ce mode de financement est ainsi cruciale. Elle pourrait s’effectuer par la signature d’un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (CPOM) entre le Port et le Pays afin de d’établir les conditions stables d’un financement pluriannuel de ses investissements.

Ensuite, la vision consolidée de l’ensemble des charges de personnel (rémunérations, primes et cotisations sociales) et des prestations extérieures liées à l’externalisation notamment du gardiennage, nettoyage et entretien des sites portuaires, dont notamment ceux affectés récemment au Port, montre la progression significative de l’ordre de 17% l’ensemble de ces charges fixes passant de 1,32 MdF CFP en 2018 à près de 1,54 MdF CFP en 2021.

Face à ce constat, la Chambre appelle à la mise en place rapide d’une politique globale de maîtrise des charges fixes de l’établissement qui pourrait comporter plusieurs volets (baisse des effectifs permanents de l’établissement, revue générale des primes versées, évaluation annuelle des contrats de prestations de services en cours).

En ce qui concerne les investissements, sur la période 2018/2022, le Port a consacré 4,6 MdF CFP aux dépenses d’équipements soit une moyenne annuelle 1,1 MdF CFP.

Après une année 2020 en net retrait, l’année 2021 semble marquer l’amorce d’une nouvelle période caractérisée par la progression du volume des crédits inscrits en investissement. Ainsi, la forte progression des investissements arbitrée pour l’année 2022 (5,3 MdF CFP) et reconduite selon un plan pluriannuel d’investissement arrêté à
38 MdF CFP va modifier durablement les équilibres financiers de l’établissement. Selon le budget prévisionnel 2022 voté, le Port devrait mobiliser une grande partie de ses réserves disponibles (à la hauteur de 80% soit de l’ordre de 3,6 MdF CFP) et recourir à l’emprunt, ce qui constitue un changement fondamental.

Le Port vient ainsi courant 2022 de procéder à la signature de trois contrats d’emprunts très significatifs pour un montant global de 8,3 MdF CFP pour financer notamment trois opérations majeures d’investissement (terminal de croisière international, quai au long cours, quai de cabotage n°6°).

La trajectoire financière de l’établissement à moyen terme (jusqu’en 2026) votée par le CA à la fin de l’année 2021 s’appuie ainsi sur des hypothèses d’évolution favorables pour lesquelles la Chambre émet un avis réservé quant à leur réalisation effective.

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