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Le modèle économique d’Électricité de France (EDF)

Issue d’un Épic (Établissement public à caractère commercial) en situation de monopole sur le territoire français, de la production à la fourniture d’électricité, en passant par le transport et la distribution, EDF et ses filiales, exercent aujourd’hui leur activité de façon diversifiée dans le domaine de l’énergie et dans de nombreux pays. La Cour, sollicitée par la commission des finances de l’Assemblée nationale, publie un rapport sur son modèle économique et analyse la nature et le champ de ses activités, les modalités de formation du chiffre d’affaires et des résultats. Ainsi, l’enquête revient sur les moyens mis en œuvre par le groupe pour remplir ses missions tout en assurant une trajectoire financière soutenable. Après une analyse des principales caractéristiques de ce modèle économique, le rapport examine les principaux déterminants des résultats du groupe sur la période 2012-2024 avant d’évaluer les leviers mobilisables pour que le groupe puisse réaliser son ambitieux programme d’investissement.

Les caractéristiques du modèle économique d’EDF

La production et commercialisation d’électricité en France représentent la principale source de revenus du groupe. EDF bénéficie pour ces activités d’une position encore nettement dominante, d’un parc de production au pilotage unifié et aux coûts compétitifs et d’une intégration verticale allant jusqu’à la commercialisation. Ce modèle intégré permet une meilleure gestion des risques et s’insère dans un cadre de régulation qui vise notamment  à préserver des prix de ventes compétitifs. Les activités régulées de gestion des réseaux électriques représentent le deuxième secteur d’activité le plus important du groupe. Elles lui assurent des résultats stables et prévisibles, indépendants des variations des prix de l’énergie. Les principales implantations d’EDF dans trois pays européens (Royaume-Uni, Italie et Belgique), répliquent le modèle français d’un pilotage intégré de la production à la vente. Ces implantations concourent à la politique de diversification des risques grâce à des mix de production différents. La diversification dans les renouvelables s’effectue pour l’essentiel à l’international à l’appui de contrats de long terme.

Des investissements réalisés entre 2012 et 2024 au prix d’un fort accroissement de l'endettement financier

La rentabilité des capitaux engagés par EDF a diminué depuis 2012 , pour atteindre à l’aube de la crise des prix de l’énergie, des niveaux ne permettant plus au groupe de créer de la valeur. Cette évolution traduit essentiellement la diminution de la rentabilité du parc de production nucléaire français, sous l’effet d’une baisse tendancielle de sa disponibilité, aggravée par la corrosion sous contrainte à partir de 2022. Si la rentabilité s’est bien redressée en 2023 et 2024, c’est à la faveur de prix de l’électricité très élevés. L’endettement financier net a progressé de 23 Md€ entre 2012 et 2024, alors même que plusieurs augmentations de capital et différents plans de cessions d’actifs sont intervenus sur la période. Cette évolution résulte d’une génération insuffisante de cashflows positifs sur la période , compte tenu des investissements engagés.

Un modèle confronté à un programme d’investissement massif

Affichant une dette financière nette de plus de 53 Md€ fin 2024, EDF fait face à un programme d’investissement dont le montant cumulé pourrait atteindre jusqu’à 460 Md€ de 2025 à 2040. La majorité de ces investissements concerne la prolongation et le renouvellement de son parc de production nucléaire en France (plus de 200 Md€ hors aval du cycle et pour un programme de 14 EPR2) et le réseau de distribution d’électricité ( 100 Md€). Or, le dispositif de régulation prenant la suite de l’Arenh (Accès régulé à l’électricité nucléaire historique) au 1er janvier prochain augmente l’exposition du groupe aux fluctuations des prix de marché. Cette situation aura un impact sur la prévisibilité des niveaux de revenus du parc nucléaire existant, et de la capacité future d’autofinancement du groupe. 
Dans ce contexte, le partage des coûts de financement du programme d’investissements entre EDF, l’État et les clients du groupe gagnerait à être clarifié. L’octroi d’un prêt bonifié par l’État permet de limiter le besoin pour EDF de s’adresser au marché pour financer le programme nouveau nucléaire, mais ne résout pas à lui seul la question de la trajectoire d’endettement et du risque de dégradation des ratios financiers du groupe. La politique de dividende que l’État entend mener mériterait ainsi d’être précisée.
De son côté, EDF doit mettre en œuvre tous les leviers à sa main pour financer ses investissements prioritaires. Dans ce cadre, la Cour invite EDF à procéder à une revue stratégique de ses actifs et filiales et à un meilleur suivi de la rentabilité de ses investissements dans les projets d’énergies renouvelables.
Enfin, les pouvoirs publics ont jusqu’à présent cherché à faire en sorte que les prix payés par les clients reflètent les coûts de production. Il conviendra à cet égard de veiller à ce que les modalités du futur contrat pour différence (CfD) applicable au financement du nouveau parc nucléaire tienne compte de la bonne répercussion des coûts de production dans les prix qui auront été fixés.

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